(DÉCLARATION DU 13 AVRIL 2022 RELATIVE AUX RÉSULTATS DU PREMIER TOUR DE SCRUTIN DE L'ÉLECTION DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE)
Le Conseil constitutionnel,
Au vu des textes suivants :
- la Constitution, notamment ses articles 6, 7 et 58 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
- la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel ;
- la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 relative aux listes électorales consulaires et au vote des Français établis hors de France pour l'élection du Président de la République ;
- le décret n° 2001-213 du 8 mars 2001 portant application de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel ;
- le décret n° 2005-1613 du 22 décembre 2005 portant application de la loi organique n° 76-97 du 31 janvier 1976 relative aux listes électorales consulaires et au vote des Français établis hors de France pour l'élection du Président de la République ;
- le décret n° 2022-66 du 26 janvier 2022 portant convocation des électeurs pour l'élection du Président de la République ;
- le code électoral en ses dispositions rendues applicables par les textes mentionnés ci-dessus ;
Au vu des pièces suivantes :
- les procès-verbaux établis par les commissions de recensement ainsi que les procès-verbaux des opérations de vote portant mention des réclamations présentées par des électeurs et les pièces jointes, pour l'ensemble des départements, la Polynésie française, les îles Wallis et Futuna, la Nouvelle-Calédonie, Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon ;
- les résultats consignés dans les procès-verbaux des commissions électorales instituées respectivement par l'article 14 de la loi organique du 31 janvier 1976 mentionnée ci-dessus et le paragraphe VI de l'article 3 de la loi du 6 novembre 1962 mentionnée ci-dessus ainsi que les réclamations présentées par des électeurs et mentionnées dans les procès-verbaux des opérations de vote ;
- les réclamations qui ont été adressées au Conseil constitutionnel ;
- les rapports des délégués du Conseil constitutionnel ;
Après avoir entendu les rapporteurs ;
Après avoir rejeté comme irrecevables les réclamations parvenues directement au Conseil constitutionnel en méconnaissance du premier alinéa de l'article 30 du décret du 8 mars 2001 mentionné ci-dessus ;
Après avoir statué sur les réclamations mentionnées dans les procès-verbaux des opérations de vote, opéré diverses rectifications d'erreurs matérielles, procédé aux redressements qu'il a jugé nécessaires et aux annulations énoncées ci-après ;
S'est fondé sur ce qui suit :
- Sur les opérations électorales :
1. Dans la commune de Fakarava (Polynésie française), dans laquelle 635 suffrages ont été exprimés, le tract d'un candidat a été agrafé à certaines enveloppes adressées à chaque électeur contenant les déclarations des candidats ainsi que les bulletins de vote à leur nom. Ces faits étant de nature à altérer la sincérité du scrutin, il y a lieu d'annuler l'ensemble des suffrages exprimés dans cette commune.
2. Dans la commune de Léchelle (Pas-de-Calais), dans laquelle ont été exprimés 30 suffrages, le magistrat délégué du Conseil constitutionnel a constaté que, en méconnaissance de l'article R. 40 du code électoral, le maire avait pris l'initiative d'organiser les opérations de vote à son domicile. En outre, les lieux ne faisaient l'objet d'aucune signalisation et étaient dépourvus d'isoloir. Cette situation a perduré en dépit des observations du magistrat délégué. Dans ces conditions, il y a lieu d'annuler l'ensemble des suffrages exprimés dans cette commune.
3. Dans la commune de Chenevelles (Vienne), alors que l'arrêté du 25 mars 2022 du préfet de la Vienne n'avait institué qu'un seul bureau de vote, la commune a créé, en méconnaissance de l'article R. 40 du code électoral, un second bureau sur la liste duquel deux électeurs étaient inscrits. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'annuler les suffrages exprimés dans ce bureau.
4. Dans le bureau de vote n° 15 du douzième arrondissement de Paris, dans lequel 1 252 suffrages ont été exprimés, le magistrat délégué du Conseil constitutionnel a constaté, lors de son passage, qu'aucun membre du bureau de vote n'était présent. Une telle irrégularité étant de nature à entraîner des erreurs et à favoriser la fraude, il y a lieu d'annuler l'ensemble des suffrages exprimés dans ce bureau.
5. Dans le bureau de vote n° 2 de la commune de Roisel (Somme), dans lequel 422 suffrages ont été exprimés, le magistrat délégué du Conseil constitutionnel a constaté, lors de son passage, qu'aucun membre du bureau n'était présent à son arrivée. Une telle irrégularité étant de nature à entraîner des erreurs et à favoriser la fraude, il y a lieu d'annuler l'ensemble des suffrages exprimés dans ce bureau.
6. Dans le bureau de vote n° 1 de la commune de Beautheil-Saints (Seine-et-Marne), dans lequel 627 suffrages ont été exprimés, le magistrat délégué du Conseil constitutionnel a constaté, lors de son passage, que tant le président du bureau de vote que les assesseurs étaient absents. Une telle irrégularité est de nature à entraîner des erreurs et à favoriser la fraude. Par suite, il y a lieu d'annuler l'ensemble des suffrages exprimés dans ce bureau.
7. Dans la commune de Cargèse (Corse-du-Sud), dans laquelle 570 suffrages ont été exprimés, le magistrat délégué du Conseil constitutionnel a constaté que les électeurs étaient invités à signer la liste d'émargement avant d'introduire leur bulletin dans l'urne, en méconnaissance des dispositions du dernier alinéa de l'article L. 62-1 du code électoral. Le président du bureau de vote, à qui le magistrat délégué a signalé cette irrégularité, a refusé d'y mettre fin. Il y a donc lieu d'annuler l'ensemble des suffrages exprimés dans cette commune.
8. Dans la commune de Condat-sur-Vézère (Dordogne), dans laquelle 534 suffrages ont été exprimés, les électeurs étaient invités à signer la liste d'émargement avant d'introduire leur bulletin dans l'urne, en méconnaissance des dispositions du dernier alinéa de l'article L. 62-1 du code électoral. Cette irrégularité s'est poursuivie en dépit des observations du magistrat délégué du Conseil constitutionnel, auxquelles le président du bureau de vote a refusé de donner suite. Dès lors, il y a lieu d'annuler l'ensemble des suffrages exprimés dans cette commune.
9. Dans la commune de Wail (Pas-de-Calais), dans laquelle 170 suffrages ont été exprimés, le maire a refusé de communiquer au magistrat délégué du Conseil constitutionnel le procès-verbal sur lequel ce dernier souhaitait porter une mention. Dans ces conditions, il y a lieu d'annuler l'ensemble des suffrages exprimés dans cette commune.
10. Dans la commune de Dénipaire (Vosges), dans laquelle 162 suffrages ont été exprimés, le magistrat délégué du Conseil constitutionnel a été, de manière agressive, empêché d'exercer sa mission de contrôle par le président du bureau de vote. Il y a donc lieu d'annuler l'ensemble des suffrages exprimés dans cette commune.
11. Dans la commune de Secondigné-sur-Belle (Deux-Sèvres), dans laquelle 311 suffrages ont été exprimés, le magistrat délégué du Conseil constitutionnel a constaté, lors de son passage en fin de journée, que l'urne n'était pas verrouillée. Une telle irrégularité étant de nature à favoriser la fraude, il y a lieu d'annuler l'ensemble des suffrages exprimés dans cette commune.
12. Dans la commune de Lieudieu (Isère), dans laquelle 192 suffrages ont été exprimés, le bureau de vote a fermé prématurément à 18 heures en méconnaissance des dispositions du paragraphe II bis de l'article 3 de la loi du 6 novembre 1962 en vertu desquelles le scrutin ne peut être clos avant 19 heures. Cette irrégularité étant de nature à empêcher des électeurs d'exercer leur droit de suffrage, il y a lieu d'annuler l'ensemble des suffrages exprimés dans la commune.
13. Dans la commune de Nandax (Loire), dans laquelle 325 suffrages ont été exprimés, le magistrat délégué du Conseil constitutionnel a constaté que, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 52 du code électoral, le procès-verbal des opérations de vote n'était pas mis à disposition des électeurs et que la représentante d'un candidat n'avait pu, malgré sa demande, y avoir accès. Dans ces conditions, il y a lieu d'annuler l'ensemble des suffrages exprimés dans cette commune.
14. Dans le bureau de vote n° 27 de Grasse (Alpes-Maritimes), dans lequel 843 suffrages ont été exprimés, le magistrat délégué du Conseil constitutionnel a constaté, lors de son passage, que l'urne était ouverte, de sorte qu'il était possible d'y introduire des bulletins de vote par une autre ouverture que celle prévue à cette fin. Une telle irrégularité étant de nature à favoriser la fraude, il y a lieu d'annuler l'ensemble des suffrages exprimés dans ce bureau.
15. Dans le bureau de vote n° 308 de Nice (Alpes-Maritimes), dans lequel 475 suffrages ont été exprimés, la commission départementale de recensement a relevé des discordances importantes et inexpliquées entre le nombre de suffrages exprimés, le nombre de bulletins blancs ou nuls et le nombre des émargements. Une telle discordance mettant le Conseil constitutionnel dans l'impossibilité d'exercer son contrôle sur la régularité des votes, il y a lieu d'annuler l'ensemble des suffrages exprimés dans ce bureau.
16. Dans le bureau de vote n° 130 de la commune de Toulouse (Haute-Garonne), dans lequel 1 479 suffrages ont été exprimés, la commission départementale de recensement a relevé des discordances importantes et inexpliquées entre les chiffres inscrits dans le procès-verbal retraçant les résultats et ceux figurant dans les feuilles de dépouillement. Le Conseil constitutionnel n'étant pas en mesure d'exercer son contrôle sur la régularité des votes, il y a lieu d'annuler l'ensemble des suffrages exprimés dans ce bureau.
17. Dans les communes de Blérancourt et de Besmé (Aisne), dans lesquelles ont été respectivement exprimés 627 et 93 suffrages, la commission départementale de recensement a constaté que la liste d'émargement était manquante. Cette circonstance rend impossible un contrôle de la régularité et de la sincérité des suffrages émis dans ces bureaux. Par suite, il y a lieu d'annuler l'ensemble des suffrages exprimés dans ces communes.
18. Dans le bureau de vote n° 1 de la commune de Plessis-Belleville (Oise), dans lequel 562 suffrages ont été exprimés, le procès-verbal des opérations de vote n'a pas été transmis immédiatement à la préfecture à l'issue du dépouillement, en méconnaissance de l'article L. 68 du code électoral. Ce manquement rend impossible le contrôle de la régularité et de la sincérité du scrutin. Il y a donc lieu d'annuler l'ensemble des suffrages exprimés dans ce bureau de vote.
19. Dans les communes d'Hodenc-l'Évêque, de Maysel et de Ponchon (Oise), dans lesquelles ont été respectivement exprimés 163, 153 et 589 suffrages, les listes d'émargement n'ont pas été transmises à la préfecture après le dépouillement du scrutin, en méconnaissance de l'article L. 68 du code électoral. Ce manquement rend impossible le contrôle de la régularité et de la sincérité du scrutin. Il y a donc lieu d'annuler l'ensemble des suffrages exprimés dans ces communes.
- Sur l'ensemble des résultats du scrutin :
20. Aucun candidat n'a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés au premier tour de scrutin.
Le Conseil constitutionnel déclare :Liens relatifs
Les résultats du scrutin pour l'élection du Président de la République, auquel il a été procédé les 9 et 10 avril 2022, sont les suivants :
Électeurs inscrits : 48 747 876
Votants : 35 923 707
Bulletins blancs : 543 609
Bulletins nuls : 247 151
Suffrages exprimés : 35 132 947
Majorité absolue : 17 961 805
Ont obtenu :
Mme Nathalie ARTHAUD : 197 094
M. Fabien ROUSSEL : 802 422
M. Emmanuel MACRON : 9 783 058
M. Jean LASSALLE : 1 101 387
Mme Marine LE PEN : 8 133 828
M. Éric ZEMMOUR : 2 485 226
M. Jean-Luc MÉLENCHON : 7 712 520
Mme Anne HIDALGO : 616 478
M. Yannick JADOT : 1 627 853
Mme Valérie PÉCRESSE : 1 679 001
M. Philippe POUTOU : 268 904
M. Nicolas DUPONT-AIGNAN : 725 176
La proclamation des résultats de l'ensemble de l'élection interviendra dans les conditions prévues par le décret du 8 mars 2001.
La présente déclaration sera publiée sans délai au Journal officiel de la République française.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans ses séances des 11, 12 et 13 avril 2022, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mmes Corinne LUQUIENS, Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET, Michel PINAULT et François SÉNERS.
Rendu public le 13 avril 2022.
Vous pouvez consulter l'intégralité du texte avec ses images à partir de l'extrait du Journal officiel électronique authentifié accessible en bas de page
Décision n° 2022-195 PDR du 13 avril 2022