Décret n° 2021-568 du 10 mai 2021 relatif à la procédure d'exonération totale ou partielle des sanctions pécuniaires prévue au IV de l'article L. 464-2 du code de commerce

NOR : ECOC2105008D
ELI : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2021/5/10/ECOC2105008D/jo/texte
Alias : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2021/5/10/2021-568/jo/texte
JORF n°0110 du 12 mai 2021
Texte n° 7

Version initiale


Publics concernés : entreprises et organismes ayant mis en œuvre une pratique prohibée par le droit de la concurrence, services de l'Autorité de la concurrence, services de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.
Objet : modalités d'organisation et d'application de la procédure de clémence en droit de la concurrence.
Entrée en vigueur : le décret entre en vigueur trente jours après sa publication .
Notice : le décret procède à la transposition des articles 17 à 22 de la directive (UE) 2019/1 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 dite « ECN + » portant sur la procédure de « clémence » en droit de la concurrence, qui ont par ailleurs donné lieu à un communiqué de procédure de l'Autorité de la concurrence du 3 avril 2015. Ces dispositions précisent notamment les conditions formelles de la démarche que le demandeur d'une mesure de clémence doit effectuer, les renseignements qu'il doit communiquer afin de bénéficier de cette procédure, les modalités de la procédure qui s'ensuit, l'information du demandeur au sujet de son éligibilité à l'exonération totale ou partielle de sanctions pécuniaires ainsi que les conditions de fond de l'exonération totale ou partielle.
Références : le décret est pris pour l'application du IV de l'article L. 464-2 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi n° 2020-1508 du 3 décembre 2020. Il transpose les articles 17 à 22 de la directive (UE) 2019/1 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018. Le code de commerce, modifié par le décret, peut être consulté sur le site Légifrance (https://www.legifrance.gouv.fr).


Le Premier ministre,
Sur le rapport du ministre de l'économie, des finances et de la relance,
Vu la directive (UE) 2019/1 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 visant à doter les autorités de concurrence des Etats membres des moyens de mettre en œuvre plus efficacement les règles de concurrence et à garantir le bon fonctionnement du marché intérieur ;
Vu le code de commerce, notamment son article L. 464-2, dans sa rédaction résultant de l'article 37 de la loi n° 2020-1508 du 3 décembre 2020 ;
Le Conseil d'Etat (section des finances) entendu,
Décrète :


  • La section 1 du chapitre IV du titre VI du livre IV de la partie règlementaire du code de commerce est ainsi modifiée :
    I.-L'article R. 464-5 est ainsi modifié :
    1° Le premier alinéa est remplacé par les trois alinéas suivants :
    « La démarche mentionnée au IV de l'article L. 464-2 est effectuée par le biais d'une demande adressée soit au directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, soit au rapporteur général de l'Autorité de la concurrence. La demande est adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, par l'intermédiaire d'une plateforme d'échanges sécurisés de documents électroniques, oralement ou par tout autre moyen approprié prévu par l'administration ou par l'Autorité de la concurrence.
    « Le directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, le rapporteur général de l'Autorité de la concurrence ou un rapporteur désigné par lui à cet effet accuse, par écrit, réception de cette demande. Par dérogation à l'article R. 112-5 du code des relations entre le public et l'administration, cet accusé de réception ne mentionne que la date et l'heure de réception.
    « La déclaration du demandeur est recueillie par un enquêteur de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ou un rapporteur de l'Autorité de la concurrence et fait l'objet d'un procès-verbal de déclaration. » ;
    2° Le troisième alinéa est supprimé ;
    3° Au quatrième alinéa, les mots : « sur le respect par l'entreprise ou l'organisme bénéficiaire de l'avis de clémence des conditions prévues par celui-ci » sont remplacés par les mots : « du respect par le demandeur des conditions qui s'imposent à lui ».
    II.-Après l'article R. 464-5, sont insérés les articles R. 464-5-1 à R. 464-5-5 ainsi rédigés :


    « Art. R. 464-5-1.-I.-L'exonération totale des sanctions pécuniaires prévue au IV de l'article L. 464-2 est accordée lorsque les conditions suivantes sont remplies :
    « 1° Le demandeur satisfait aux conditions fixées à l'article R. 464-5-4 ;
    « 2° Il révèle sa participation à une pratique prohibée par l'article L. 420-1 ;
    « 3° Il est le premier à fournir des éléments d'information qui :
    « a) Soit permettent, au moment où la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ou l'Autorité de la concurrence reçoivent la demande, de procéder à des opérations de visite et de saisie ou à des perquisitions dans le cadre d'une procédure pénale en rapport avec la pratique en cause, à condition qu'elles n'aient pas déjà en leur possession des éléments d'information qu'elles estiment suffisants pour permettre de procéder à de telles opérations de visite et de saisie ou qu'il n'ait pas déjà été procédé à de telles opérations ou perquisitions ;
    « b) Soit sont suffisants pour permettre à l'Autorité de la concurrence d'établir l'existence de la pratique en cause, à condition que la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ou l'Autorité de la concurrence n'aient pas déjà en leur possession des éléments d'information que cette dernière estime suffisants pour lui permettre d'établir l'existence de cette pratique et qu'aucun autre demandeur n'ait déjà rempli les conditions pour bénéficier de l'exonération totale de sanctions pécuniaires en application du a du présent 3°.
    « II.-Un demandeur ayant pris des mesures pour contraindre d'autres entreprises ou associations d'entreprises à participer à la pratique en cause ou à continuer à y participer est exclu du bénéfice de l'exonération totale de sanctions pécuniaires.


    « Art. R. 464-5-2.-I.-L'exonération partielle de sanctions pécuniaires prévue au IV de l'article L. 464-2 est accordée lorsque les conditions suivantes sont remplies :
    « 1° Le demandeur satisfait aux conditions fixées à l'article R. 464-5-4 ;
    « 2° Il révèle sa participation à une pratique prohibée par l'article L. 420-1 ;
    « 3° Il fournit des éléments d'information qui comportent une valeur ajoutée significative afin d'établir l'existence de la pratique en cause, par rapport à ceux qui se trouvent déjà en la possession de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ou de l'Autorité de la concurrence au moment de la demande.
    « II.-Lorsqu'un demandeur est le premier à fournir des éléments d'information décisifs permettant à l'Autorité d'établir des éléments de fait supplémentaires conduisant à une augmentation des sanctions pécuniaires infligées aux participants à la pratique en cause par rapport à celles qui auraient été infligées en l'absence de ces éléments, l'Autorité de la concurrence ne le prend pas en compte pour déterminer le montant de la sanction infligée au demandeur ayant fourni ces éléments d'information. »


    « Art. R. 464-5-3.-I.-Le demandeur peut solliciter du directeur général de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ou du rapporteur général de l'Autorité de la concurrence l'attribution d'une place dans l'ordre d'arrivée en vue de bénéficier de l'exonération totale ou partielle de sanctions pécuniaires mentionnée au IV de l'article L. 464-2. Les autorités saisies fixent un délai afin de permettre au demandeur de rassembler les éléments d'information requis.
    « II.-Les éléments d'information fournis par le demandeur durant le délai mentionné au I sont réputés avoir été communiqués à la date de réception de la demande, telle que constatée dans le courrier ou le procès-verbal marquant sa place dans l'ordre d'arrivée.
    « III.-Le demandeur fournit les éléments d'information dont il dispose en lien avec la pratique en cause, notamment :
    « 1° Son nom et son adresse ;
    « 2° Les circonstances ayant conduit à l'introduction de la demande ;
    « 3° Les noms de toutes les autres entreprises ou associations d'entreprises qui participent ou ont participé à la pratique en cause ;
    « 4° Les produits et les territoires concernés ;
    « 5° La durée et la nature de la pratique en cause ;
    « 6° Des renseignements sur toute autre demande d'exonération totale ou partielle de sanctions pécuniaires présentée par le passé ou susceptible d'être présentée à l'avenir à toute autre autorité de concurrence concernant la pratique en cause.


    « Art. R. 464-5-4.-Afin de se voir accorder une exonération totale ou partielle de sanctions pécuniaires, le demandeur est tenu de remplir l'ensemble des conditions suivantes :
    « 1° Il doit mettre fin à sa participation à la pratique prohibée sans délai et au plus tard immédiatement après avoir déposé sa demande, sauf pour ce qui serait, de l'avis du rapporteur général de l'Autorité de la concurrence, raisonnablement nécessaire à la préservation de l'intégrité de l'enquête ;
    « 2° Il doit apporter à l'Autorité de la concurrence une coopération véritable, totale, permanente et rapide dès le dépôt de sa demande et tout au long de la procédure d'enquête et d'instruction, ce qui implique en particulier de :
    « a) Lui fournir sans délai tous les éléments d'information de la nature de ceux mentionnés au III de l'article R. 464-5-3 supplémentaires concernant la pratique en cause, qui viendraient en sa possession ou auxquels il pourrait avoir accès, comprenant notamment une description détaillée de cette pratique et de sa nature, de la nature et de l'usage des produits en cause, des territoires sur lesquels cette pratique est susceptible de produire des effets, ainsi qu'une estimation de sa durée de mise en œuvre ;
    « b) Se tenir à la disposition de l'Autorité de la concurrence pour répondre rapidement à toute demande de sa part visant à contribuer à l'établissement des faits constitutifs de la pratique en cause ;
    « c) Mettre ses représentants légaux et salariés actuels à la disposition de l'Autorité de la concurrence, et fournir des efforts raisonnables pour en faire de même avec ses anciens représentants légaux et salariés ;
    « d) S'abstenir de détruire, de falsifier ou de dissimuler des informations ou des éléments de preuves pertinents se rapportant à la pratique en cause ;
    « e) S'abstenir de divulguer l'existence ou la teneur de sa demande avant que l'Autorité de la concurrence n'ait communiqué ses griefs aux parties, sauf si elle y donne préalablement son accord ;
    « f) Ne remettre en cause à aucun moment devant l'Autorité de la concurrence, et ce jusqu'au terme de la procédure, les éléments d'information qu'il lui a révélés dans le cadre de la procédure, notamment en ce qui concerne la matérialité des faits qu'il a dénoncés ou l'existence même de la pratique ;
    « 3° Lorsqu'il envisage d'adresser une demande à l'Autorité de la concurrence, le demandeur ne doit pas avoir détruit ou falsifié de preuves de la pratique en cause, ni avoir divulgué son intention de présenter une demande ou la teneur de celle-ci, sauf à d'autres autorités de concurrence.


    « Art. R. 464-5-5.-I.-Un demandeur ayant sollicité une exonération totale ou partielle de sanctions pécuniaires auprès de la Commission européenne, soit pour l'attribution d'une place dans l'ordre d'arrivée en vue de bénéficier d'une telle exonération, soit par le dépôt d'une demande complète, peut, si cette demande se réfère à une pratique prohibée couvrant les territoires de plus de trois Etats membres, soumettre à l'Autorité de la concurrence une demande sommaire concernant la même pratique.
    « II.-La demande sommaire mentionnée au I, qui est soumise aux conditions prévues aux trois premiers alinéas de l'article R. 464-5, comporte les éléments mentionnés aux 1° et 3° à 6° du III de l'article R. 464-5-3, ainsi que la mention des Etat membres où les preuves de la pratique en cause sont susceptibles de se trouver.
    « Les clarifications que l'Autorité de la concurrence peut demander lorsqu'elle est saisie d'une demande sommaire ne peuvent concerner que les éléments mentionnés à l'alinéa précédent.
    « III.-Lorsqu'elle est saisie d'une demande sommaire, l'Autorité de la concurrence vérifie si elle a déjà reçu une autre demande, sommaire ou complète, de la part d'un autre demandeur, concernant la même pratique. En l'absence d'une telle autre demande, et si elle estime que la demande sommaire dont elle est saisie comporte les éléments mentionnés au premier alinéa du II du présent article, le rapporteur général ou un rapporteur désigné par lui informe le demandeur de l'acceptation de sa demande.
    « IV.-Lorsque la Commission européenne a informé l'Autorité de la concurrence de ce qu'elle n'a pas l'intention d'instruire l'affaire en tout ou en partie, le demandeur a la possibilité de soumettre au rapporteur général de l'Autorité de la concurrence une demande complète. A titre exceptionnel, lorsque cela s'avère strictement nécessaire pour la délimitation d'une affaire ou pour son attribution, le rapporteur général ou un rapporteur désigné par lui peut inviter le demandeur à soumettre une demande complète avant que la Commission européenne n'ait informé l'Autorité de la concurrence de ce qu'elle n'a pas l'intention d'instruire l'affaire en tout ou en partie.
    « V.-Le rapporteur général de l'Autorité de la concurrence peut fixer au demandeur un délai maximal pour le dépôt de sa demande complète ainsi que des éléments d'information correspondants.
    « Lorsque le demandeur dépose sa demande complète dans le délai imparti, celle-ci est réputée avoir été déposée au moment du dépôt de la demande sommaire, pour autant que cette dernière porte sur les mêmes produits et les mêmes territoires et sur la même durée de la pratique en cause que la demande introduite auprès de la Commission européenne, qui peut avoir été mise à jour. »


  • Le présent décret entre en vigueur trente jours après sa publication.


  • Le ministre de l'économie, des finances et de la relance est chargé de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.


Fait le 10 mai 2021.


Jean Castex
Par le Premier ministre :


Le ministre de l'économie, des finances et de la relance,
Bruno Le Maire

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