Le ministre de l'agriculture et de l'alimentation,
Vu le code rural et de la pêche maritime, notamment son article L. 814-2 ;
Vu l'arrêté du 25 novembre 2016 modifié portant approbation du projet stratégique national pour l'enseignement agricole et du schéma prévisionnel national des formations de l'enseignement agricole applicables pour les années 2016 à 2020 ;
Vu l'avis du conseil national de l'enseignement agricole en date du 3 juin 2020,
Arrête :
Il est inséré un addendum, figurant en annexe du présent arrêté, au schéma prévisionnel national des formations de l'enseignement agricole applicable pour les années 2016 à 2020 approuvé par l'arrêté du 25 novembre 2016 susvisé.Versions
La directrice générale de l'enseignement et de la recherche est chargée de l'exécution du présent arrêté, qui sera publié au Journal officiel de la République française.Versions
ANNEXE
ADDENDUM AU 6E SCHÉMA PRÉVISIONNEL NATIONAL DES FORMATIONS
Le 6e schéma prévisionnel national des formations (SPNF) de l'enseignement agricole (2016-2020) s'inscrit dans le cadre des priorités fixées par le projet stratégique national pour l'enseignement agricole. Il en définit les priorités et les orientations opérationnelles, ce qui en fait un document de travail et de référence dans les échanges avec les partenaires institutionnels. C'est pourquoi, il doit être régulièrement révisé en fonction de l'actualité et de nouvelles priorités.
L'addendum du 6e SPNF a pour objet de fixer trois nouvelles priorités que sont :
1. Conduire le plan « Enseigner à produire autrement pour les transitions et l'agro-écologie » pour amplifier la contribution de l'enseignement agricole à la transformation nécessaire des systèmes agricoles et alimentaires.
2. Conduire la rénovation des diplômes pour préparer aux nouvelles compétences et aux métiers en évolution.
3. Développer le lien entre enseignement technique et enseignement supérieur long pour favoriser la promotion scolaire et sociale des élèves de l'enseignement agricole.
1. Conduire le plan « Enseigner à produire autrement pour les transitions et l'agro-écologie » pour amplifier la contribution de l'enseignement agricole à la transformation nécessaire des systèmes agricoles et alimentaires
Le plan « Enseigner à produire autrement » a été lancé sur 2014-2018 afin de promouvoir l'agro-écologie dans l'enseignement agricole. En effet l'agro-écologie repose sur une modification majeure des cadres de pensée, des modes d'acquisition des savoirs et des pratiques, dans laquelle l'enseignement agricole doit jouer un rôle central, au titre de ses missions de formation, expérimentation, innovation et animation des territoires. L'agriculture de demain doit être socialement et écologiquement soutenable. Il convient alors de former à une certaine éthique du métier pour développer des modes de consommation, de production et de transformation plus vertueux.
Ce plan « Enseigner à produire autrement » a été relayé par des plans régionaux pilotés par les DRAAF et accompagné par une centaine de référents répartis dans différents établissements et par le dispositif national d'appui. Il a suscité une mobilisation forte et volontariste de nombreux établissements d'enseignement agricole, qui y ont trouvé une opportunité de remettre leur exploitation agricole ou atelier technologique au centre de leur projet.
Après une phase de bilan et partage d'expériences conduite en 2018, un nouveau plan est lancé en 2019 pour amplifier la dynamique et l'élargir à toutes formes de production, transformation et services associés à l'agriculture, l'alimentation et la bioéconomie : « Enseigner à produire autrement, pour les transitions et l'agro-écologie ».
Plusieurs axes de mobilisation sont définis pour guider l'action :
AXE I. - Encourager la parole et l'initiative des apprenants sur les questions des transitions et de l'agro-écologie
Repositionner les apprenants et les apprentissages au cœur du système est la clé de voûte de la démarche « d'enseigner à produire autrement » n° 2 (EPA 2). Les apprenants sont incités à devenir acteurs, voire auteurs de leur apprentissage. Ils sont ainsi en mesure de devenir des ambassadeurs de la démarche agro-écologique. Ils peuvent contribuer à faire connaître largement les dynamiques lancées dans les établissements et les partager, en s'appuyant notamment sur les nouveaux usages du numérique.
Cet axe se décline en 4 actions :
- préparer les jeunes à débattre, à appréhender la complexité du dialogue entre le monde agricole et le reste de la société ;
- soutenir la dynamique du réseau des éco-responsables ;
- développer la participation active des apprenants dans la construction et la conduite de projets ;
- reconnaître et valoriser toutes les compétences des apprenants liées aux transitions.
AXE II. - Mobiliser la communauté éducative pour enseigner l'agro-écologie et poursuivre les transitions
« Enseigner à Produire Autrement » n° 1 a montré que l'agro-écologie nécessite de revoir et parfois déconstruire les pratiques et les postures des équipes éducatives et pédagogiques. Complexe par nature, l'agro-écologie nécessite encore un travail d'appropriation par les équipes. L'accompagnement et la formation doivent se poursuivre.
Il s'agit aussi de poursuivre la rénovation des référentiels pour y intégrer l'agro-écologie et le bien-être animal, et plus largement de prendre en compte, dans les projets et pratiques de l'enseignement agricole, les grands défis du 21e siècle qui nécessitent une transition majeure des systèmes de production, de transformation, de commercialisation et de consommation : un véritable changement de paradigme est à l'œuvre.
Cet axe se décline en 4 actions :
- intégrer les enjeux des transitions et de l'agro-écologie dans les projets d'établissements ;
- poursuivre la rénovation des référentiels ;
- accompagner et former les équipes éducatives et pédagogiques aux référentiels rénovés ;
- mettre en place une plate-forme de ressources pédagogiques accessible à tous les acteurs de l'enseignement agricole.
AXE III. - Amplifier la mobilisation des exploitations agricoles et ateliers technologiques comme supports d'apprentissage, de démonstration et d'expérimentation
Les apprenants et équipes éducatives ont besoin d'un terrain pour leurs démarches d'apprentissage tournées vers les transitions et l'agro écologie. Une part substantielle des temps d'enseignement et de formation est de fait dédiée à des travaux pluridisciplinaires qui prennent tout leur sens lorsqu'ils peuvent être mis en œuvre sur des situations concrètes.
Les exploitations agricoles et les ateliers technologiques des établissements constituent le cœur de ces terrains d'apprentissage, en même temps qu'ils doivent refléter les politiques publiques portées par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation (MAA), voire être pionniers dans la re-conception nécessaire des systèmes agro-alimentaires dont l'urgence s'intensifie face au changement climatique. Dans le cadre EPA2, la réduction significative du recours aux intrants de synthèse et aux énergies fossiles constitue un objectif prioritaire. Les politiques publiques considérées seront tout particulièrement mises en oeuvre : Ecophyto 2+ (réduction de l'utilisation des produits phytosanitaires (- 50 % d'ici 2025) et arrêt du glyphosate d'ici fin 2020 (sauf impasse avérée), Ambition Bio 2022, 4/1000, Stratégie nationale bien-être animal, Plan Ecoantibio, Stratégie nationale sur les protéines végétales. Les EA/AT contribueront également aux objectifs de la loi EGALIM concernant la restauration collective.
Les exploitations agricoles et ateliers technologiques veilleront à assurer une implication active des apprenants, qui fonde la pédagogie de leur établissement.
Les exploitations agricoles et installations professionnelles hors établissements d'enseignement sont aussi les lieux d'un apprentissage qui doit bénéficier de l'accompagnement pédagogique des équipes et impliquer les professionnels innovants du territoire.
Cet axe se décline en 4 actions :
- élaborer et déployer une approche diagnostique harmonisée des exploitations agricoles et ateliers technologiques de l'enseignement agricole ;
- mobiliser les exploitations et ateliers de l'enseignement agricole autour d'objectifs collectifs et suivre leurs progrès ;
- participer à des projets d'expérimentation et de démonstration multi-sites ;
- repérer et impliquer des exploitations innovantes sur le territoire.
AXE IV. - Développer l'animation dans les territoires et l'essaimage des pratiques innovantes
Au contact du monde professionnel et au sein des territoires, les établissements de l'enseignement agricole sont à l'écoute des besoins, participent activement au repérage et à l'essaimage de pratiques innovantes et s'impliquent dans des dynamiques collectives et multi-acteurs. Les territoires, au-delà de leur rôle support, sont au cœur du système en tant qu'espace de production, d'alimentation et espace de vie et impliquent l'ensemble des filières (agricole, services, aménagement…). Il s'agit d'imaginer collectivement de nouvelles modalités de travail et de vie avec les territoires pour nourrir une dynamique d'échanges réciproques. Les projets alimentaires territoriaux constituent une politique publique particulièrement intéressante.
Les actions doivent renforcer et consolider les partenariats et la recherche de nouvelles synergies territoriales entre établissements et acteurs locaux, ainsi que la capitalisation, valorisation et mutualisation des ressources.
Cet axe se décline en 4 actions :
- renforcer et développer les partenariats territoriaux ;
- rendre visible et accessible la transition agro-écologique mise en œuvre dans les établissements ;
- incarner les objectifs de la Loi Egalim en matière de restauration collective ;
- structurer des partenariats thématiques.
Les principes d'une gouvernance aux niveaux national, régional et local ont été définis, notamment au travers d'un comité de pilotage national, composé du comité de direction DGER, de représentants des DRAAF, du dispositif national d'appui (DNA) et de l'enseignement privé. La DGER présentera les avancées du plan au CNEA et ces avancées seront suivies grâce à un panel d'indicateurs de résultats, assorties de valeurs cibles pour certains d'entre eux.
Indicateurs de succès de la priorité 1. - Conduire le plan « Enseigner à produire autrement pour les transitions et l'agro-écologie » pour amplifier la contribution de l'enseignement agricole à la transformation nécessaire des systèmes agricoles et alimentaires
- nombre d'établissements, d'exploitations agricoles et d'ateliers technologiques engagés dans une démarche éco-responsable ;
- taux de participation des équipes éducatives aux formations en lien avec ces questions ;
- nombre de partenariats engagés dans cette démarche.
2. Conduire la rénovation des diplômes pour préparer aux nouvelles compétences et aux métiers en évolution
Pertinence et qualité des diplômes professionnels
Disposer d'une offre de diplômes professionnels en phase avec la réalité des métiers, des secteurs professionnels et de leurs évolutions est une nécessité et une préoccupation permanente pour le ministère de l'agriculture et de l'alimentation.
Un diplôme professionnel vise l'acquisition de compétences professionnelles et l'acquisition d'une culture générale permettant à la personne formée de s'insérer dans la vie professionnelle et d'évoluer dans la société, de poursuivre des études ou d'être en mesure de se former tout au long de sa vie.
Un diplôme professionnel s'appuie sur un référentiel professionnel qui décrit les emplois visés, leur environnement économique, les activités précises qu'ils sous-tendent, les situations significatives qui révèlent les compétences clés, construit sur la base de l'analyse du travail. A échéance régulière, les diplômes du CAP agricole au BTSA en passant par les baccalauréats professionnels, les BP, les BPA et les certificats de spécialisation, font l'objet de travaux de rénovation dans le cadre de la commission professionnelle consultative (CPC) afin de prendre en compte les évolutions qui traversent les secteurs professionnels. Les grands chantiers de rénovation récents ont notamment porté sur la prise en compte de la triple performance, économique, sociale et environnementale inscrite dans le projet agroécologique du ministère de l'agriculture et de l'alimentation.
Des diplômes en adéquation avec l'évolution des métiers
Les diplômes du ministère de l'agriculture et de l'alimentation disposent par ailleurs d'une marge d'autonomie permettant une adaptation aux réalités professionnelles des territoires : les établissements d'enseignement agricole qui sont proches et à l'écoute des besoins des professionnels s'en saisissent pour, à leur niveau, mieux répondre aux compétences recherchées.
Cependant, différents acteurs (directeurs d'établissements, fédérations du privé, organisations professionnelles, organisations syndicales) signalent le besoin d'adaptation de l'offre de formation face aux évolutions très rapides que connaissent les activités professionnelles et questionnent fortement l'enseignement agricole. Ainsi, nous devons penser les métiers de demain.
Loi du 5 septembre 2018 : une révolution dans le monde de la formation
Par ailleurs, la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel vise à mieux répondre aux besoins en compétences des entreprises et participer ainsi à les rendre plus attractives. Elle invite les ministères certificateurs des diplômes professionnels à réfléchir conjointement avec les branches professionnelles aux compétences nécessaires à l'exercice des métiers de demain et que les secteurs professionnels rechercheront. Ainsi, elles donnent aux branches une place et un rôle prépondérants au sein de la nouvelle CPC « agriculture, agroalimentaire, aménagement ». Elle impose un rythme plus soutenu de rénovation des diplômes professionnels avec un cycle de 5 ans durant lequel tous les diplômes professionnels doivent avoir été reconsidérés et modifiés - si nécessaire - au regard des éventuelles évolutions du secteur professionnel visé.
Dans ce contexte, la DGER lance une consultation très large auprès de l'ensemble des établissements et des partenaires professionnels afin de mener un travail prospectif permettant de repérer les nouvelles compétences et les évolutions des métiers.
Trois objectifs sont visés :
- accentuer la lisibilité et l'attractivité des intitulés des diplômes ;
- simplifier l'offre en veillant à ne pas maintenir une offre qui ne correspondrait plus à un besoin ;
- diversifier l'offre en rénovant les diplômes ou en développant de nouveaux diplômes qui répondent aux évolutions des métiers du secteur professionnel visé.
Indicateurs de succès de la priorité 2. - Conduire la rénovation des diplômes pour préparer aux nouvelles compétences et aux métiers en évolution
- respect des objectifs fixés par le programme biennal des travaux de la CPC « agriculture, agroalimentaire, aménagement » ;
- nombre de diplômes créés afin de répondre aux besoins en compétences des secteurs professionnels concernés.
3. Développer le lien entre enseignement technique et enseignement supérieur long pour favoriser la promotion scolaire et sociale des élèves de l'enseignement agricole
Favoriser l'ancrochage pour faire fonctionner l'ascenseur social
L'une des missions des établissements d'enseignement agricole est de participer pleinement à l'insertion scolaire, sociale et professionnelle des élèves.
Ce faisant, l'enseignement secondaire qui est dispensé dans les établissements, associé aux orientations éducatives spécifiques (promotion de la santé, lutte contre toutes formes de discrimination, développement durable, promotion de l'éducation culturelle et sportive, engagement citoyen, actions pour le bien vivre ensemble) permet aux publics accueillis parfois en situation scolaire et personnelle précaire, de s'engager dans un processus de réussite scolaire et donc de promotion sociale. C'est un système de formation globalement inclusif et émancipateur. Dans ce contexte, les actions menées pour prévenir le décrochage scolaire et favoriser l'ancrochage jouent un rôle majeur. En particulier, il convient de prendre en compte le rôle joué dans le décrochage par la difficulté de déplacement de certains jeunes dans les territoires ruraux.
Mieux préparer les élèves et les étudiants des établissements de l'enseignement technique à l'enseignement supérieur
L'enseignement technique est un enseignement à vocation professionnel permettant aux élèves d'accéder à un emploi et une insertion sociale. Néanmoins, accéder à l'enseignement supérieur, court ou long, notamment celui relevant du ministère chargé de l'agriculture est un facteur important de promotion sociale, auquel les élèves doivent être préparés.
Dans ce cadre, le lien entre enseignement technique et enseignement supérieur agricoles doit être renforcé afin de favoriser l'accès des élèves à ce dernier. Il s'agit de susciter des vocations, faire naître des ambitions, préparer les élèves à la poursuite des études et aux exigences des concours d'accès dans les écoles et fournir une meilleure information des élèves et de leur famille sur les voies d'accès innovantes qui se sont développées vers l'enseignement supérieur.
Les deux semaines de l'orientation organisées dans les classes terminales en novembre et février dans les lycées ont vocation à permettre aux lycéens de s'informer et d'échanger avec des étudiants ou autres représentants professionnels, du domaine agricole, mais aussi d'études universitaires, dans les domaines de la biologie, de la médecine, du sport, de classes préparatoires dans le but d'affiner leur projet d'orientation, au-delà de l'offre d'enseignement supérieur
Les classes préparatoires dans les lycées ont un rôle éminent à jouer en veillant à la diversité des talents, des projets, des cursus d'origine dans les futurs étudiants qui vont préparer les concours des écoles d'agronomie et vétérinaire.
L'appel à projet « devenir ingénieur, vétérinaire ou enseignant avec un BTSA » a précisément pour objectif de renforcer les coopérations entre les établissements d'enseignement supérieur agricole et les lycées agricoles ayant des classes de BTSA. Il offre des moyens pour encourager la concrétisation du lien enseignement supérieur court - enseignement supérieur long et favoriser la réussite vers des poursuites d'études longues pour des étudiants en BTSA.
Le regroupement des écoles agronomiques et vétérinaires doit permettre non seulement d'accueillir plus d'étudiants pour répondre aux besoins en cadres en assurant aux étudiants une bonne insertion professionnelle mais aussi de resserrer les liens avec l'enseignement technique agricole de façon innovante pour donner leurs chances à tous les talents.
Enfin une politique de développement des recrutements directs au niveau baccalauréat initiera une meilleure connexion entre les écoles du ministère de l'agriculture et de l'alimentation et tous les lycées, permettant la mise en place d'un réel continuum technique-supérieur.
Indicateurs de succès de la priorité 3. - Développer le lien entre enseignement technique et enseignement supérieur long pour favoriser la promotion scolaire et sociale des élèves de l'enseignement agricole
- taux de candidats titulaires BTSA retenus dans les classes ATS-bio relevant du ministère chargé de l'agriculture ;
- taux de candidats issus de l'enseignement agricole retenus dans les classes préparatoires biologie, chimie, physique et sciences de la terre du ministère chargé de l'agriculture.
Fait le 6 août 2020.
Pour le ministre et par délégation :
L'adjoint à la directrice générale de l'enseignement et de la recherche, chef du service de l'enseignement technique,
J.-L. Tronco