(PROPOSITION DE LOI VISANT À AFFIRMER LE CARACTÈRE DE SERVICE PUBLIC NATIONAL DE L'EXPLOITATION DES AÉRODROMES DE PARIS)
Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 10 avril 2019, par le président de l'Assemblée nationale, sous le n° 2019-1 RIP, conformément au quatrième alinéa de l'article 11 et au premier alinéa de l'article 61 de la Constitution, de la proposition de loi visant à affirmer le caractère de service public national de l'exploitation des aérodromes de Paris.
Au vu des textes suivants :
- la Constitution, notamment ses articles 11 et 40 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment son article 45-2 ;
- la loi organique n° 2013-1114 du 6 décembre 2013 portant application de l'article 11 de la Constitution, ensemble la décision du Conseil constitutionnel n° 2013-681 DC du 5 décembre 2013 ;
Au vu des pièces suivantes :
- les observations du Gouvernement, enregistrées les 23 avril 2019 ;
- les observations de M. Sébastien Nadot, député, enregistrées le même jour ;
- les observations en réponse de Mme Valérie Rabault et plusieurs autres députés, enregistrées le 29 avril 2019 ;
- les observations en réponse de M. Gilles Carrez, député, enregistrées le même jour ;
- les observations en réponse de M. Patrick Kanner, sénateur, enregistrées le même jour ;
Et après avoir entendu le rapporteur ;
Le Conseil constitutionnel s'est fondé sur ce qui suit :
1. La proposition de loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel a été déposée sur le bureau de l'Assemblée nationale, en application du troisième alinéa de l'article 11 de la Constitution.
2. Aux termes des premier, troisième, quatrième et sixième alinéas de l'article 11 de la Constitution : « Le Président de la République, sur proposition du Gouvernement pendant la durée des sessions ou sur proposition conjointe des deux assemblées, publiées au Journal officiel, peut soumettre au référendum tout projet de loi portant sur l'organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation et aux services publics qui y concourent, ou tendant à autoriser la ratification d'un traité qui, sans être contraire à la Constitution, aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions. »
« Un référendum portant sur un objet mentionné au premier alinéa peut être organisé à l'initiative d'un cinquième des membres du Parlement, soutenue par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales. Cette initiative prend la forme d'une proposition de loi et ne peut avoir pour objet l'abrogation d'une disposition législative promulguée depuis moins d'un an ».
« Les conditions de sa présentation et celles dans lesquelles le Conseil constitutionnel contrôle le respect des dispositions de l'alinéa précédent sont déterminées par une loi organique. »
« Lorsque la proposition de loi n'est pas adoptée par le peuple français, aucune nouvelle proposition de référendum portant sur le même sujet ne peut être présentée avant l'expiration d'un délai de deux ans suivant la date du scrutin ».
3. Aux termes de l'article 45-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 mentionnée ci-dessus : « Le Conseil constitutionnel vérifie, dans le délai d'un mois à compter de la transmission de la proposition de loi :
« 1° Que la proposition de loi est présentée par au moins un cinquième des membres du Parlement, ce cinquième étant calculé sur le nombre des sièges effectivement pourvus à la date d'enregistrement de la saisine par le Conseil constitutionnel, arrondi au chiffre immédiatement supérieur en cas de fraction ;
« 2° Que son objet respecte les conditions posées aux troisième et sixième alinéas de l'article 11 de la Constitution, les délais qui y sont mentionnés étant calculés à la date d'enregistrement de la saisine par le Conseil constitutionnel ;
« 3° Et qu'aucune disposition de la proposition de loi n'est contraire à la Constitution ».
4. En premier lieu, la proposition de loi a été présentée par au moins un cinquième des membres du Parlement à la date d'enregistrement de la saisine du Conseil constitutionnel.
5. En deuxième lieu, elle a pour objet de prévoir que « l'aménagement, l'exploitation et le développement des aérodromes de Paris - Charles-de-Gaulle, Paris-Orly et de Paris-Le Bourget revêtent le caractère d'un service public national au sens du neuvième alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ».
6. Il en résulte que cette proposition de loi porte sur la politique économique de la nation et les services publics qui y concourent. Elle relève donc bien d'un des objets mentionnés au premier alinéa de l'article 11 de la Constitution.
7. Par ailleurs, à la date d'enregistrement de la saisine, elle n'avait pas pour objet l'abrogation d'une disposition législative promulguée depuis moins d'un an. Et aucune proposition de loi portant sur le même sujet n'avait été soumise au référendum depuis deux ans.
8. En dernier lieu, aux termes du neuvième alinéa du Préambule de 1946 : « Tout bien, toute entreprise, dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public national ou d'un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité ». Si la nécessité de certains services publics nationaux découle de principes ou de règles de valeur constitutionnelle, la détermination des autres activités qui doivent être érigées en service public national est laissée à l'appréciation du législateur ou de l'autorité réglementaire selon les cas.
9. L'aménagement, l'exploitation et le développement des aérodromes de Paris - Charles-de-Gaulle, Paris-Orly et Paris-Le Bourget ne constituent pas un service public national dont la nécessité découlerait de principes ou de règles de valeur constitutionnelle. La proposition de loi, qui a pour objet d'ériger ces activités en service public national, ne comporte pas par elle-même d'erreur manifeste d'appréciation au regard du neuvième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946.
10. Il résulte de tout ce qui précède que la proposition de loi est conforme aux conditions fixées par l'article 11 de la Constitution et par l'article 45-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 tels qu'ils sont rédigés.
11. Dès lors, l'ouverture de la période de recueil des soutiens des électeurs à la proposition de loi doit intervenir dans le mois suivant la publication au Journal officiel de la République française de la présente décision. Le nombre de soutiens d'électeurs inscrits sur les listes électorales à recueillir est de 4 717 396.
Le Conseil constitutionnel décide :Liens relatifs
La proposition de loi visant à affirmer le caractère de service public national de l'exploitation des aérodromes de Paris est conforme aux conditions fixées par l'article 11 de la Constitution et par l'article 45-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel.Liens relatifs
L'ouverture de la période de recueil des soutiens des électeurs à la proposition de loi visant à affirmer le caractère de service public national de l'exploitation des aérodromes de Paris doit intervenir dans le mois suivant la publication au Journal officiel de la présente décision.
Jusqu'à l'intervention de la décision par laquelle le Conseil constitutionnel constatera si la proposition de loi a recueilli le soutien d'au moins 4 717 396 électeurs inscrits sur les listes électorales, l'examen de la proposition de loi par le Parlement est suspendu.
Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française.
Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 9 mai 2019, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT.
Rendu public le 9 mai 2019.
Décision n° 2019-1 RIP du 9 mai 2019