Décret n° 2019-360 du 24 avril 2019 relatif à l'expérimentation des entreprises adaptées de travail temporaire portant modalités de mise en œuvre, de financement et d'évaluation

NOR : MTRD1834452D
ELI : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2019/4/24/MTRD1834452D/jo/texte
Alias : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2019/4/24/2019-360/jo/texte
JORF n°0097 du 25 avril 2019
Texte n° 23

ChronoLégi

Version initiale


Publics concernés : personnes titulaires de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé, entreprises adaptées, employeurs, organismes du service public de l'emploi.
Objet : expérimentation d'entreprises adaptées de travail temporaire en vue de favoriser l'accompagnement des transitions professionnelles de travailleurs handicapés vers des employeurs (publics ou privés).
Entrée en vigueur : le texte entre en vigueur le lendemain de sa publication.
Notice : le décret prévoit la constitution, à titre expérimental et jusqu'au 31 décembre 2022, d'entreprises adaptées de travail temporaire qui ont pour activité exclusive de faciliter l'accès à l'emploi durable des travailleurs handicapés sans emploi ou qui courent le risque de perdre leur emploi en raison de leur handicap en mettant en œuvre un accompagnement professionnel renforcé durant le contrat de mission et en intermission. Les contrats de missions de travail temporaire qu'elles concluent avec les travailleurs reconnus handicapés doivent proposer l'acquisition d'une expérience professionnelle, un accompagnement individuel et l'accès à des formations notamment pré-qualifiantes et qualifiantes favorisant la réalisation des projets professionnels et de les promouvoir en situation de travail.
Références : le décret est consultable sur le site Légifrance (https://www.legifrance.gouv.fr).


Le Premier ministre,
Sur le rapport de la ministre du travail,
Vu le régime cadre exempté de notification n° SA.40208 relatif aux aides en faveur de l'emploi des travailleurs défavorisés et des travailleurs handicapés ;
Vu le code de l'action sociale et des familles, notamment son article L. 241-5 ;
Vu le code rural et de la pêche maritime, notamment ses articles L. 313-1 et D. 313-15 ;
Vu le code du travail, notamment ses articles L. 1251-45 et L. 5213-13 ;
Vu la loi n° 2018-771 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, en particulier son article 79 ;
Vu l'avis du Conseil national d'évaluation de la formation et de l'orientation professionnelles du 11 décembre 2018 ;
Vu la saisine du conseil départemental de Mayotte du 12 décembre 2018,
Décrète :


    • L'expérimentation mentionnée à l'article 79 de la loi n° 2018-771 susvisée est ouverte à l'ensemble du territoire national jusqu'au 31 décembre 2022.
      Seule une entreprise agréée en qualité d'entreprise adaptée peut être candidate à l'expérimentation. Pour mener cette expérimentation, l'entreprise adaptée constitue une personne morale distincte, quel que soit son statut juridique, dans laquelle elle détient le pouvoir de décision.
      Les candidatures sont instruites par le préfet de région selon les critères et les modalités prévus par le cahier des charges national de l'expérimentation approuvé par arrêté du ministre chargé de l'emploi. Sur chaque candidature, le préfet de région rend un avis qu'il transmet à la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle et au comité de suivi de l'expérimentation. Ce dernier procède à l'examen des dossiers de candidature et des avis formulés par le préfet de région et adresse au ministre chargé de l'emploi des propositions en vue de l'établissement de la liste des entreprises adaptées autorisées à mettre en œuvre l'expérimentation.
      Cette liste est arrêtée par le ministre chargé de l'emploi au titre de chaque période couverte par l'appel à candidature.


    • I. - Lorsque le projet économique et social de l'entreprise adaptée candidate est retenu au titre de l'expérimentation, le contrat mentionné à l'article L. 5213-13 du code du travail est conclu avec la personne morale constituée pour porter l'activité exclusive de travail temporaire au plus tard un mois à compter de l'inscription de l'entreprise sur la liste des entreprises retenues pour mettre en œuvre l'expérimentation et de la notification par le préfet de région à chaque entreprise de la décision d'inscription rendue par le ministre chargé de l'emploi. Le contrat reconnaît à cette structure la qualité d'entreprise adaptée de travail temporaire pour une durée qui ne peut excéder le terme de l'expérimentation. Les stipulations financières de ce contrat sont annuelles et révisées chaque année par voie d'avenant dans la limite des crédits inscrits en loi de finances.
      II. - Par dérogation au I de l'article D. 5213-63 du code du travail, la proportion de travailleurs reconnus handicapés dans l'effectif de salariés intérimaires dans l'entreprise adaptée de travail temporaire ne peut être inférieure à 100 %.
      Les dispositions de l'article D. 5213-63-1 du même code ne s'appliquent pas aux entreprises adaptées de travail temporaire.
      III. - Le contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens est établi au plus tard un mois à compter de l'inscription de l'entreprise sur la liste des entreprises retenues pour mettre en œuvre l'expérimentation. Il est composé de :
      1° L'autorisation de l'autorité administrative visée à l'article L. 1251-45 du code du travail et l'attestation de garantie financière mentionnée à l'article L. 1251-49 du même code ;
      2° Une présentation du projet économique et social de la structure visant à favoriser l'accès à l'emploi des travailleurs reconnus handicapés précisant :
      a) Les données relatives à l'identification de l'entreprise et un descriptif de ses activités ;
      b) Les modalités d'accompagnement, d'encadrement et de formation professionnelle des travailleurs handicapés destinées à favoriser la réalisation de leur projet professionnel et leur mobilité vers d'autres employeurs publics ou privés dans des conditions adaptées ;
      3° La présentation des moyens mobilisés pour mettre en œuvre l'accompagnement, l'encadrement et la formation professionnelle des travailleurs handicapés ;
      4° L'enveloppe financière susceptible d'être accordée par l'Etat, qui correspond au produit entre le nombre d'équivalent temps plein accompagné et le montant de l'aide financière mentionnée à l'article 5 ;
      5° Les engagements en termes d'accès et de retour à l'emploi pris par l'entreprise et les indicateurs destinés à rendre compte des actions et des résultats ;
      6° Les documents administratifs, comptables et financiers à transmettre au préfet de région ;
      7° Les modalités de suivi, d'évaluation et de résiliation du contrat.
      IV. - Les entreprises adaptées autorisées à mettre en œuvre l'expérimentation peuvent recruter et déployer leurs moyens d'accompagnement à compter de la conclusion du contrat mentionné au I.


    • I. - Le préfet de région contrôle l'exécution du contrat conclu pour la mise en œuvre de l'expérimentation. L'entreprise adaptée de travail temporaire autorisée à mettre en œuvre l'expérimentation lui fournit, à sa demande, tout élément permettant de vérifier la bonne exécution contrat et la réalité des actions d'accompagnement et de formation mises en œuvre, ainsi que leurs résultats.
      En cas de non-respect des stipulations du contrat en matière d'accompagnement, de formation des personnes, le préfet de région informe l'entreprise par tout moyen conférant date certaine de son intention de résilier le contrat. L'entreprise adaptée de travail temporaire dispose pour faire connaître ses observations d'un délai d'un mois à l'issue duquel le préfet de région peut demander le reversement des sommes indûment perçues au titre de l'aide mentionnée à l'article 5.
      Lorsque l'aide financière est obtenue à la suite de fausses déclarations, le préfet de région résilie l'avenant après avoir observé la procédure prévue au présent article. Les sommes indûment perçues au titre de l'aide mentionnée à l'article 5, donnent alors lieu à reversement.
      II. - En cas de résiliation du contrat dans les conditions prévues au I, et en l'absence de conclusion d'un nouveau contrat mentionné au III de l'article 2, les contrats de travail temporaire en cours se poursuivent jusqu'à leur terme sans le bénéfice de l'aide mentionnée à l'article 5.


    • L'entreprise adaptée de travail temporaire transmet au préfet de région un bilan annuel d'activité précisant pour les salariés qu'elle emploie, les actions mises en œuvre et leurs résultats à l'issue du parcours dans la structure.
      Ce document précise les réalisations en termes de suivi, d'accompagnement et d'encadrement professionnel des personnes et comporte les mentions suivantes :
      1° Les moyens affectés à la réalisation de ces actions ;
      2° Les caractéristiques des personnes embauchées et de leur contrat de travail ;
      3° La nature et l'objet des actions de suivi individualisé et d'accompagnement professionnel des personnes ;
      4° Le cas échéant, les propositions d'action sociale faites à la personne pendant la durée du contrat et avant la sortie de la structure ;
      5° Les propositions faites, selon les besoins de la personne concernée, d'orientation professionnelle, de formations notamment pré-qualifiante ou qualifiante et d'emploi, ainsi que les suites qui leur auront été données ;
      6° Les résultats en termes d'accès et de retour à l'emploi des personnes sorties de la structure.


    • I. - L'embauche, par l'entreprise adaptée autorisée à mettre en œuvre une activité exclusive de travail temporaire, de personnes sans emploi bénéficiaires de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, mentionnée à l'article L. 241-5 du code de l'action sociale et des familles, ou de personnes de cette reconnaissance et qui courent le risque de perdre leur emploi en raison de leur handicap, ouvre droit à une aide financière de l'Etat.
      L'aide contribue à compenser les surcoûts liés à l'emploi de travailleurs handicapés. Elle vise notamment les coûts liés à l'emploi des personnes chargées de la fonction d'accompagnement et uniquement pour le temps passé à assister les travailleurs handicapés et les coûts liés à la formation de ces personnes à cette tâche. L'aide est attribuée dans la limite des crédits inscrits en loi de finances. L'aide est versée mensuellement.
      II. - Le montant annuel de l'aide est fixé à 4 472 euros par équivalent temps plein accompagné. Ce montant est réduit à due proportion du temps de travail effectif ou assimilé.
      III. - Le montant annuel de l'aide à Mayotte est fixé à 3 375 euros par équivalent temps plein accompagné. Ce montant est réduit au prorata du temps de travail effectif ou assimilé.
      IV. - L'aide est versée, pour le compte de l'Etat, par l'Agence de services et de paiement.
      Le montant de l'aide est revalorisé annuellement à compter du 1er janvier 2020, en fonction de l'évolution du salaire minimum de croissance, par arrêté conjoint du ministre chargé de l'emploi et du ministre chargé du budget. Cet arrêté peut fixer à Mayotte un montant spécifique de l'aide financière en fonction de l'évolution du salaire minimum interprofessionnel de croissance en vigueur à Mayotte.
      Cette aide financière ne peut se cumuler pour un même poste avec une autre aide de même nature et ayant le même objet, versée par l'Etat.


    • L'évaluation de l'expérimentation est réalisée en deux étapes :


      - Au plus tard douze mois avant le terme de l'expérimentation, un rapport intermédiaire d'évaluation est remis au ministre chargé de l'emploi ;
      - Au terme de l'expérimentation, un rapport final d'évaluation est présenté au ministre chargé de l'emploi en vue de sa transmission au Parlement.


      Un comité scientifique est chargé de l'évaluation indépendante de l'expérimentation à laquelle collabore le comité de suivi de l'expérimentation. La composition du comité scientifique est fixée par arrêté du ministre chargé de l'emploi, il comprend des personnalités reconnues pour leurs compétences académiques et des représentants des services des études et des statistiques des personnes publiques intéressées.
      L'évaluation mesure l'impact de l'expérimentation sur l'accès à l'emploi des travailleurs reconnus handicapés, sur les formations suivies, ainsi que les conséquences sur les finances publiques soit :


      - par une évaluation contrefactuelle comparant les résultats obtenus au regard de la situation des travailleurs reconnus handicapés non bénéficiaires de l'expérimentation ;
      - par une analyse du changement, comprenant une évaluation de mise en œuvre, mesurant la contribution de chaque action aux résultats. Cette évaluation mobilise les instruments adaptés de nature quantitative ou qualitative et en particulier une analyse de la performance s'appuyant sur les données de suivi mises en œuvre. Elle porte également une attention particulière à la soutenabilité de la généralisation éventuelle de l'expérimentation.


      Les rapports d'évaluation comportent notamment les indications suivantes :
      1° Les caractéristiques des travailleurs reconnus handicapés embauchés et de leur contrat de travail ;
      2° La nature, l'objet et la durée des actions de suivi individualisé et d'accompagnement professionnel de ces bénéficiaires ;
      3° Les résultats en termes d'accès et de retour à l'emploi des travailleurs reconnus handicapés qui ne sont plus employés ou mis à disposition par les entreprises adaptées autorisées à mettre en œuvre l'expérimentation.


    • La ministre du travail, le ministre de l'action et des comptes publics, la ministre des outre-mer et la secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.


Fait le 24 avril 2019.


Edouard Philippe
Par le Premier ministre :


La ministre du travail,
Muriel Pénicaud


Le ministre de l'action et des comptes publics,
Gérald Darmanin


La ministre des outre-mer,
Annick Girardin


La secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées,
Sophie Cluzel

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