ELI : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2016/7/27/ETSD1615479D/jo/texte Alias : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2016/7/27/2016-1027/jo/texte JORF n°0174 du 28 juillet 2016 Texte n° 25
Publics concernés : chômeurs de longue durée ; entreprises de l'économie sociale et solidaire ; collectivités territoriales, établissements publics de coopération intercommunale ou groupes de collectivités territoriales et tous autres organismes publics et privés volontaires participant à l'expérimentation territoriale.
Objet : mise en œuvre de l'expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée.
Entrée en vigueur : le texte entre en vigueur le lendemain de sa publication.
Notice : le présent décret a pour objet de définir les modalités de mise en œuvre de l'expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée. Cette expérimentation, réalisée pour une durée de cinq ans sur dix territoires, a pour objet de favoriser la création d'emplois sous forme de contrats à durée indéterminée, en faveur des chômeurs de longue durée, dans les entreprises de l'économie sociale et solidaire. En redéployant les dépenses sociales existantes (« activation » des dépenses « passives »), elle vise à ne pas générer de dépenses supplémentaires pour les collectivités.
Le décret détermine notamment les règles d'organisation et de fonctionnement de l'association gestionnaire du fonds national d'expérimentation ainsi que les modalités de versement des aides aux entreprises participant à l'expérimentation.
Il prévoit les modalités d'évaluation de l'expérimentation. Seront notamment mesurés les effets du dispositif sur la situation des territoires en matière d'emploi, de qualité de vie, d'inégalités et de développement durable, ainsi que son impact global sur les finances publiques.
Références : le présent décret est pris pour l'application de la loi n° 2016-231 du 29 février 2016 d'expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée. Il peut être consulté sur le site Légifrance (http://www.legifrance.gouv.fr).
Le Premier ministre, Sur le rapport de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, Vu le code du travail ; Vu la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire ; Vu la loi n° 2016-231 du 29 février 2016 d'expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée ; Vu le décret n° 2006-781 du 3 juillet 2006 fixant les conditions et les modalités de règlement des frais occasionnés par les déplacements temporaires des personnels civils de l'Etat ; Vu l'avis du Conseil national de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelles en date du 14 juin 2016 ; Vu l'avis du Conseil supérieur de l'économie sociale et solidaire en date du 17 juin 2016 ; Vu l'avis du Conseil national d'évaluation des normes en date du 7 juillet 2016 ; Le Conseil d'Etat (section sociale) entendu, Décrète :
Le fonctionnement de l'association gestionnaire du fonds national d'expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée mentionné au I de l'article 3 de la loi du 29 février 2016 susvisée est financé par l'Etat et par les collectivités territoriales, les établissements publics de coopération intercommunale ou groupes de collectivités territoriales participant à l'expérimentation ainsi que par tous autres organismes publics et privés volontaires. Ces contributions financières font l'objet de conventions d'objectifs et de moyens conclues avec l'association.
La convention d'objectifs et de moyens signée entre l'Etat et l'association gestionnaire du fonds pour la durée de l'expérimentation précise notamment : 1° Le montant prévisionnel de la contribution de l'Etat, d'une part, au fonctionnement de l'association et, d'autre part, au financement du fonds et les modalités de versement de cette contribution ; 2° Les modalités de contrôle de l'utilisation des crédits versés à l'association pour son fonctionnement et le financement du fonds ; 3° Le dispositif de contrôle interne destiné à sécuriser les versements effectués par le fonds aux entreprises ; 4° Le système de collecte des données de suivi mises à la disposition de l'Etat et du comité scientifique.
L'association gestionnaire du fonds présente un budget distinct et tient une comptabilité distincte, d'une part, pour son fonctionnement et, d'autre part, pour les interventions du fonds.
Les conventions d'objectifs et de moyens conclues entre l'association et les autres contributeurs précisent les montants financiers mobilisés et leur affectation ainsi que les modalités de versement des crédits et de contrôle de leur utilisation.
Les attributions du conseil d'administration de l'association gestionnaire du fonds d'expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée sont notamment les suivantes : 1° Adopter et modifier les statuts ; 2° Désigner le président et, le cas échéant, un vice-président ; 3° Désigner les membres du bureau ; 4° Adopter le budget annuel et approuver les comptes financiers en vue de leur présentation à l'assemblée générale ; 5° Adopter le rapport annuel d'activité du fonds ; 6° Adopter le cahier des charges mentionné à l'article 3 de la loi du 29 février 2016 susvisée ; 7° Proposer la liste des territoires retenus pour mener l'expérimentation et des collectivités territoriales, établissements de coopération intercommunales et groupes de collectivités territoriales, prévue à l'article 3 de la loi du 29 février 2016 susvisée ; 8° Approuver les programmes d'action et les modalités de fonctionnement des comités locaux chargés du suivi de l'expérimentation sur chaque territoire ; 9° Approuver les conventions d'objectifs et de moyens avec l'Etat, les collectivités territoriales, leurs groupements et les autres contributeurs ; 10° Approuver chaque année la programmation budgétaire des subventions à verser aux entreprises conventionnées ; 11° Approuver les conventions à conclure par le fonds avec les entreprises mentionnées à l'article 4 de la loi du 29 février 2016 susvisée ; 12° Approuver le rapport de bilan de l'expérimentation avant sa transmission au Parlement et au ministre chargé de l'emploi. Le conseil d'administration peut déléguer au bureau les compétences mentionnées aux 8°, 10° et 11° dans les conditions définies par les statuts. Le conseil d'administration est régulièrement informé des conditions de déroulement de l'expérimentation.
Le bureau est composé de huit membres parmi lesquels figurent le président, le vice-président si les statuts de l'association le prévoient, un représentant de l'Etat, un représentant des collectivités territoriales, le représentant de Pôle emploi, le représentant du Conseil national de l'insertion par l'activité économique, le représentant du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Le commissaire du Gouvernement assiste de droit aux séances du bureau.
Les membres du conseil d'administration, les personnes invitées à ses réunions et les membres du comité scientifique qui n'ont pas la qualité de fonctionnaire ou d'agent de l'Etat bénéficient du remboursement de leurs frais de déplacement dans les conditions prévues par le décret du 3 juillet 2006 susvisé.
Les délibérations et décisions sont transmises au commissaire du Gouvernement, par tout moyen conférant date certaine à cette transmission. Celui-ci dispose, pour s'y opposer, d'un délai de quinze jours ou, lorsque l'urgence lui est signalée, de cinq jours ouvrés, à compter de sa réception. L'exécution de la délibération ou de la décision concernée est suspendue jusqu'à l'expiration du délai fixé à l'alinéa précédent, ou jusqu'à la date, si elle est antérieure, à laquelle le commissaire du Gouvernement fait connaître par tout moyen lui conférant date certaine qu'il n'entend pas exercer son droit d'opposition. L'exercice par le commissaire du Gouvernement de son droit d'opposition dans le délai mentionné au premier alinéa fait obstacle à la mise en œuvre de la délibération ou de la décision qui en fait l'objet.
L'embauche, par l'entreprise conventionnée, de personnes dans le cadre de l'expérimentation ouvre droit à une contribution au développement de l'emploi attribuée par l'association gestionnaire du fonds d'expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée, dans le cadre d'une convention qui fixe le nombre maximal de salariés exprimé en équivalents temps plein couverts par la contribution. Cette contribution ne peut pas être cumulée pour une même embauche avec une autre aide à l'insertion ou à l'emploi financée par l'Etat au titre d'un même salarié. Cette contribution ne peut pas être attribuée lorsque l'employeur n'est pas à jour du versement des cotisations et contributions sociales dues pour ses salariés.
Le montant de la contribution au développement de l'emploi est fixé en proportion du salaire minimum de croissance. Il ne peut excéder 113 % de son montant brut par heure travaillée, dans la limite de la durée légale hebdomadaire du travail. Ce montant peut être modulé dans la convention prévue à l'article 17 par décision de l'association gestionnaire du fonds d'expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée en fonction : 1° Des caractéristiques socio-économiques du territoire ; 2° Du type d'activités exercées par les personnes embauchées dans le cadre de l'expérimentation ; 3° De la part que prennent les recettes de l'entreprise résultant de la vente de biens et services dans la couverture des charges liées à ces activités.
Les conventions entre l'association gestionnaire du fonds d'expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée et les entreprises ou leurs avenants financiers annuels peuvent prévoir une dégressivité du montant annuel de la contribution au développement de l'emploi pour tenir compte de l'évolution de la situation économique de l'entreprise, appréciée notamment au regard de l'évolution de son chiffre d'affaires, de sa marge brute et de sa masse salariale.
Le versement par l'association gestionnaire du fonds d'expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée à l'entreprise de la contribution au développement de l'emploi intervient sur production d'une attestation de l'employeur justifiant le nombre d'heures de travail effectuées par les salariés participant à l'expérimentation.
Le remboursement à l'employeur d'une fraction des indemnités de licenciement, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 6 de la loi du 29 février 2016 susvisée, intervient sur décision de l'association gestionnaire du fonds d'expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée et après réception d'un justificatif du montant versé par l'employeur aux salariés licenciés.
Pour financer la contribution au développement de l'emploi, le fonds d'expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée reçoit des dotations financières de l'Etat et des collectivités territoriales, des établissements publics de coopération intercommunale ou groupes de collectivités territoriales participant à l'expérimentation ainsi que de tous autres organismes publics et privés volontaires.
L'Etat contribue au financement de la contribution au développement de l'emploi versée aux entreprises conventionnées à hauteur d'un montant égal au minimum à 53 % et au maximum à 101 % du montant brut horaire du salaire minimum de croissance, appliqué au nombre prévisionnel d'équivalents temps plein correspondant aux personnes mentionnées à l'article 2 de la loi du 29 février 2016 susvisée embauchées par ces entreprises, dans la limite des crédits disponibles. Ce taux est fixé annuellement par arrêté des ministres en charge de l'emploi et du budget. Les autres personnes morales mentionnées à l'article 5 de la loi du 29 février 2016 susvisée peuvent compléter ce montant selon des modalités précisées dans les conventions mentionnées à cet article.
La convention conclue par l'association gestionnaire du fonds d'expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée avec une entreprise participant à l'expérimentation comporte notamment : 1° L'identification de l'entreprise ; 2° Ses caractéristiques générales ; 3° Les éléments attestant de son appartenance au champ de l'économie sociale et solidaire mentionnée aux articles 1er et 2 de la loi du 31 juillet 2014 susvisée ; 4° Le nombre et le contenu des emplois proposés ; 5° Le calendrier prévisionnel annuel des embauches ; 6° L'organisation du travail au sein de l'entreprise ; 7° Les taux de la contribution au développement de l'emploi appliqués aux embauches effectuées ; 8° Les modalités de régularisation sur l'année des montants versés par rapport aux montants effectivement dus, calculés sur la base des justificatifs produits par l'employeur ; 9° Le cas échéant, les conditions et les modalités de la dégressivité de la subvention annuelle ; 10° Les modalités de prise en charge de la fraction de l'indemnité de licenciement prévue au I de l'article 4 de la loi du 29 février 2016 susvisée ; 11° Le cas échéant, les actions de formation professionnelle ou de validation des acquis de l'expérience nécessaires à la réalisation du projet professionnel des personnes embauchées ; 12° Les modalités d'accompagnement, en lien avec Pôle emploi, des personnes embauchées ; 13° Les informations à communiquer au fonds, pour réaliser le suivi et le bilan de l'expérimentation, et au comité scientifique chargé de son évaluation ; 14° Les modalités de suivi, de contrôle et d'évaluation de la convention.
La convention mentionnée à l'article 17 est conclue pour la durée de l'expérimentation. Un avenant assorti d'une annexe financière fixe, pour chaque année civile ou si nécessaire pour chaque semestre, les engagements de l'employeur et le montant de la subvention à verser par le fonds pour l'année considérée, compte tenu du bilan établi par l'employeur pour l'année précédente.
L'association gestionnaire du fonds d'expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée contrôle l'exécution de la convention. L'employeur lui fournit, à sa demande, tout élément permettant de vérifier la bonne exécution de la convention, la réalité des embauches en contrat à durée indéterminée et, le cas échéant, des actions d'accompagnement et de formation mises en œuvre ainsi que leurs résultats. L'association gestionnaire du fonds se voit communiquer à sa demande toute information financière ou commerciale concernant l'entreprise conventionnée dans la limite des informations strictement nécessaires à son contrôle. En cas de non-respect des dispositions de la convention par l'employeur, l'association gestionnaire du fonds informe l'employeur par lettre recommandée de son intention de résilier la convention. Celui-ci dispose d'un délai, qui ne peut être inférieur à un mois, pour faire connaître ses observations. Le fonds peut alors demander le reversement des sommes indûment perçues. Lorsque l'aide financière est obtenue à la suite de fausses déclarations ou lorsque la convention est détournée de son objet, le fonds résilie la convention et demande le remboursement de la totalité des aides perçues.
Le comité local de pilotage et d'appui à l'expérimentation mentionné au II de l'article 3 de la loi du 29 février 2016 susvisée est au minimum composé des représentants pour le territoire de l'expérimentation : 1° Des collectivités territoriales ou leurs groupements parties prenantes à l'expérimentation désignés par leurs assemblées respectives ; 2° Du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi ; 3° De Pôle emploi ; 4° Des entreprises conventionnées par le fonds. Sont également membres du comité local des demandeurs d'emploi de longue durée embauchés par des entreprises du territoire conventionnées par le fonds.
Le comité local est chargé de piloter l'expérimentation dans le territoire habilité, d'en suivre le déploiement et de collecter toutes les données nécessaires au fonds pour assurer le suivi et établir le bilan de l'expérimentation. A ce titre, il est chargé de : 1° Coordonner l'action des acteurs locaux participant à l'expérimentation ; 2° Etablir un état de la situation socio-économique du territoire en termes de chômage de longue durée et d'activités économiques existantes ; 3° Informer et accueillir l'ensemble des demandeurs d'emploi de longue durée volontaires ; 4° Déterminer, en lien avec Pôle emploi, la liste des demandeurs d'emploi mentionnés à l'article 2 de la loi du 29 février 2016 susvisée volontaires pour participer à l'expérimentation, et identifier leurs compétences ainsi que leurs projets professionnels ; 5° Organiser, avec Pôle emploi, les modalités d'accompagnement des demandeurs d'emploi participant à l'expérimentation et identifier leurs besoins de formation ; 6° Recenser les activités répondant à des besoins non satisfaits, adaptées aux compétences des demandeurs d'emploi participant à l'expérimentation, non concurrentes des activités économiques existantes et ne se substituant pas aux emplois privés ou publics déjà présents sur le territoire ; 7° Elaborer le programme d'actions mentionné au II de l'article 3 de la loi du 29 février 2016 susvisée ; 8° Assurer le suivi de la mise en œuvre de l'expérimentation et de ses résultats. Il communique au comité scientifique mentionné à l'article 23 toutes les informations nécessaires à l'évaluation et à l'association gestionnaire du fonds les informations nécessaires à la réalisation du bilan de l'expérimentation.
Lorsque la candidature d'un territoire émane d'un groupe de collectivités territoriales dépourvu de la personnalité morale, celle-ci est portée par la collectivité ou l'établissement public désigné comme chef de file par convention entre toutes les collectivités participantes.
Le comité scientifique mentionné à l'article 1er de la loi du 29 février 2016 susvisée est chargé de l'évaluation de l'expérimentation. Il est composé de personnalités reconnues pour leurs compétences académiques et de représentants des services des études et des statistiques des personnes publiques intéressées.
L'évaluation mesure les effets de l'expérimentation sur la situation globale des territoires en matière d'emploi, de qualité de vie, d'inégalités et de développement durable. En particulier, elle s'attache à déterminer l'impact de l'expérimentation sur ces différents aspects, en comparant l'évolution constatée sur ces dimensions par rapport à une situation où l'expérimentation n'aurait pas été mise en place. Elle utilise à cette fin tous les instruments d'observation adaptés de nature quantitative ou qualitative. Le comité scientifique procède à une analyse coût-bénéfice de l'expérimentation. Il évalue notamment l'impact, global et territoire par territoire, de l'expérimentation sur les finances publiques. Il porte également une attention particulière à la soutenabilité du financement de l'expérimentation. Il a accès à tous les documents comptables et financiers de gestion du fonds. Il analyse les conditions d'une éventuelle généralisation.
Au terme de l'expérimentation ou si elle est interrompue avant ce terme, l'association gestionnaire du fonds national d'expérimentation territoriale contre le chômage de longue durée est dissoute. Toutefois, elle conserve la personnalité morale pour les besoins de sa liquidation et jusqu'à l'apurement de ses comptes. L'actif restant après ces opérations est reversé, dans le délai de six mois, à l'Etat et aux autres financeurs à proportion de leurs contributions effectives au financement de l'association et du fonds durant l'expérimentation. La clôture de la liquidation est prononcée par le conseil d'administration.
Le ministre des finances et des comptes publics, la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et le secrétaire d'Etat chargé du budget sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.
Versions
Fait le 27 juillet 2016.
Manuel Valls Par le Premier ministre :
La ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, Myriam El Khomri
Le ministre des finances et des comptes publics, Michel Sapin
Le secrétaire d'Etat chargé du budget, Christian Eckert