Observations du Gouvernement sur la loi relative au droit des étrangers en France

Version initiale


  • Le Conseil constitutionnel a été saisi par plus de soixante sénateurs d'un recours dirigé contre la loi relative au droit des étrangers en France.
    Ce recours appelle, de la part du Gouvernement, les observations suivantes.


    Les sénateurs soutiennent que les dispositions du VII de l'article 20 et du II de l'article 40 ont été adoptées selon une procédure contraire à la Constitution.
    Le Gouvernement estime que ce grief n'est pas fondé.
    Ces dispositions, introduites en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale, étaient, en effet, en relation directe avec les dispositions restant en discussion.
    1. Les dispositions du paragraphe VII de l'article 20, issu de l'article 13 du projet de loi, modifient l'article L. 120-4 du code du service national, qui permet à certaines catégories d'étrangers de souscrire un contrat de service civique ou de volontariat associatif.
    En première lecture, l'article 13 du projet de loi a été modifié pour indiquer que les personnes titulaires de la carte de séjour pluriannuelle générale et de la carte de séjour pluriannuelle « passeport talent », créées par la loi déférée, pouvaient souscrire un contrat de service civique ou de volontariat associatif.
    Cet amendement n'avait pas modifié les dispositions de l'article L. 120-4 du code du service national qui prévoient que les personnes volontaires devaient justifier être en séjour régulier en France depuis plus d'un an sous couvert de l'un des titres de séjour mentionnés. Cette rédaction impliquait que, pour être éligible au service civique, un étranger titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle devait justifier d'une présence régulière de deux années en France, cette carte de séjour étant délivrée au terme d'une année de séjour régulier, alors qu'un étranger titulaire d'une carte de séjour temporaire de séjour ne devait justifier que de la présence régulière d'une année.
    L'amendement adopté en nouvelle lecture a également eu pour objet d'insérer, dans l'article L. 120-4 du code du service national, la référence au titre de séjour « passeport talent » ainsi qu'au titre de membre de famille du titulaire d'un tel passeport, créés par les dispositions de la loi restant en discussion, et qui se substituent pour partie à des titres que la loi abroge (cartes « salariés en mission », « scientifiques chercheurs », « compétences et talents ») et qui ouvraient droit au contrat de service civique ou de volontariat associatif.
    Le législateur a donc entendu, en deuxième lecture, clarifier les dispositions de l'article L. 120-4 pour assurer la coordination nécessaire avec les nouvelles catégories de titre de séjour créées par la loi. Les adjonctions contestées sont donc en relation directe avec l'article 13 du projet de loi, qui restait en discussion à l'issue de la première lecture.
    2. Les dispositions du II de l'article 40, issu de l'article 22 du projet de loi, abrogent les dispositions de l'article L. 552-4-1 et du chapitre II du titre VI du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permettent, à titre exceptionnel, au juge d'ordonner l'assignation à résidence avec surveillance électronique mobile lorsque l'étranger est père ou mère d'un enfant mineur.
    La complexité technique des mesures de surveillance électronique mobile n'a pas permis leur mise en œuvre effective. Mais, s'appuyant sur les objectifs de la directive retour, certaines juridictions ont estimé que ces dispositions faisaient obstacle à des mesures de rétention administrative (cour administrative d'appel de Lyon, 8 janvier 2015, n° 14LY01506).
    L'article 22 du projet de loi modifiait en profondeur le cadre juridique de l'assignation à résidence lorsque cette mesure est prononcée à l'égard d'un étranger obligé de quitter le territoire français. Cette modification s'inscrivait dans la logique de la directive retour, qui impose la priorité de l'assignation à résidence sur le placement en rétention.
    Dans le cadre de l'examen du projet de loi en première lecture, l'Assemblée nationale a fait évoluer l'ensemble de ce dispositif en modifiant à la fois l'article 22 et l'article 19 du projet de loi. Elle a aménagé le cadre juridique de l'assignation à résidence et a prévu des dispositions particulières pour le placement en rétention des étrangers lorsqu'ils sont accompagnés d'enfants mineurs.
    L'abrogation de l'assignation à résidence avec surveillance mobile est la conséquence logique de la réforme ainsi engagée qui affirme la priorité donnée à l'assignation à résidence et accroît les garanties pour les cas où, par exception à cette priorité, il est nécessaire de placer en rétention des étrangers accompagnés d'enfants mineurs. Le nouveau régime, qui répond aux exigences du droit européen, a vocation à se substituer aux règles préexistantes, y compris le dispositif de l'assignation à résidence avec surveillance électronique, qui s'est révélé inopérant.
    Les dispositions litigieuses sont donc en relation directe avec ces dispositions qui restaient en discussion à l'issue de la première lecture.


    Pour l'ensemble de ces raisons, le Gouvernement est d'avis que les griefs articulés dans les saisines ne sont pas de nature à conduire à la censure de la loi déférée.
    Aussi estime-t-il que le Conseil constitutionnel devra rejeter les recours dont il est saisi.

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