Le Président de la République,
Sur le rapport du Premier ministre et du ministre des affaires étrangères,
Vu la Constitution, notamment ses articles 52 à 55 ;
Vu le décret n° 53-192 du 14 mars 1953 modifié relatif à la ratification et à la publication des engagements internationaux souscrits par la France ;
Vu le décret n° 65-259 du 31 mars 1965 portant publication de l'échange de lettres entre la France et le Canada du 27 février 1965 relatif à une entente entre la France et le Québec sur un programme d'échanges et de coopération dans le domaine de l'éducation ;
Vu le décret n° 2007-215 du 19 février 2007 portant publication de l'entente en matière de sécurité sociale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Québec, signée à Paris le 17 décembre 2003,
Décrète :
L'entente entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Québec relative à la mobilité professionnelle et à l'intégration des migrants, signée à Paris le 26 novembre 2010, sera publiée au Journal officiel de la République française.
Le Premier ministre et le ministre des affaires étrangères sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.
E N T E N T E
ENTRE LE GOUVERNEMENT DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE ET LE GOUVERNEMENT DU QUÉBEC RELATIVE À LA MOBILITÉ PROFESSIONNELLE ET À L'INTÉGRATION DES MIGRANTS
Le Gouvernement de la République française
et
Le Gouvernement du Québec
Considérant les liens historiques d'amitié et de coopération qui unissent la France et le Québec ;
Se fondant sur l'Entente entre la France et le Québec sur un programme d'échanges et de coopération dans le domaine de l'éducation, conclue le 27 février 1965, laquelle entente a créé la Commission permanente de coopération franco-québécoise et établit le cadre général de la coopération entre la France et le Québec ;
Se référant à l'Entente en matière de sécurité sociale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Québec, conclue le 17 décembre 2003, laquelle remplace l'entente du 12 février 1979 ;
Se référant à l'Entente entre la France et le Québec en matière de reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles, conclue le 17 octobre 2008 ;
Se référant à la Déclaration conjointe portant sur la coopération en matière de flux migratoires et d'intégration des migrants entre la France et le Québec, signée le 14 septembre 2009 ;
Se référant à l'Entente entre la ministre de l'immigration et des Communautés culturelles du Québec et Pôle emploi concernant le recrutement de candidats à l'emploi de nationalité française, de ressortissants de l'Espace économique européen ou d'étrangers en situation régulière en France par des employeurs du Québec, conclue le 29 janvier 2010 ;
Désireux de mettre en œuvre des politiques et des mesures en vue de promouvoir et de faciliter la mobilité professionnelle et l'intégration des migrants entre la France et le Québec ainsi que l'intégration des migrants sur leurs territoires respectifs, et de contribuer à accroître l'excellence et la compétitivité des entreprises de part et d'autre ;
Animés d'un égal désir d'accroître la coopération à cet égard, initiée dans le cadre de l'Entente en vue de favoriser l'établissement à titre permanent ou temporaire aux fins d'emploi au Québec de ressortissants français ou étrangers résidant régulièrement en France, conclue le 9 juin 2010 ;
Désireux également de renforcer la coopération et le partenariat entre les ministères chargés de l'immigration, conformément aux décisions prises par les gouvernements de la République française et du Québec, lors de la 15e Rencontre alternée des Premiers ministres de la République française et du Québec, les 3 et 4 juillet 2008,
Conviennent de ce qui suit :
Article 1er
Objet
La présente Entente vise, dans le respect de leurs législations et réglementations respectives en vigueur, à créer un espace de mobilité professionnelle entre la France et le Québec et à favoriser l'intégration des bénéficiaires de cette mobilité et leur insertion dans l'emploi au sein de cet espace.
Pour atteindre leur objectif, les deux parties conviennent de coopérer en matière :
― d'information sur les mesures et dispositifs favorisant la mobilité professionnelle, sur les modalités de recherche d'emplois et de stages ainsi que sur les services et les acteurs agissant à cet égard ;
― de facilitation des formalités nécessaires à l'entrée, au séjour et à l'autorisation de travail sur le territoire de l'une ou l'autre des Parties ;
― d'admission sur le marché de l'emploi ;
― d'accès aux dispositifs d'accueil et d'intégration, y compris ceux favorisant l'accès à l'emploi et ceux favorisant l'apprentissage du français dans le contexte de l'insertion professionnelle ;
― d'emploi des travailleurs expérimentés sur leur territoire dans le cadre des dispositifs existants ;
― d'évaluation, d'étude, de recherche et de référence des opportunités d'emplois ou de stages sur le territoire de l'une ou l'autre Partie ;
― de suivi des flux migratoires entre les territoires des deux Parties ;
― d'amélioration des dispositifs existants ou la mise en place de nouveaux dispositifs facilitant la mobilité et l'intégration professionnelle.
Article 2
Bénéficiaires
Sous réserve de l'application des accords, ententes ou échanges de lettres bilatéraux, qui ne prévoient le bénéfice de leurs dispositions qu'en faveur des ressortissants français ou canadiens, les bénéficiaires de l'Entente sont :
― sur le territoire de la Partie québécoise : des ressortissants français ou des personnes qui n'ont pas la nationalité française et sont autorisées à résider sur le territoire français pour une durée supérieure à trois mois ;
― sur le territoire de la Partie française : les personnes de citoyenneté canadienne ou ayant le statut de résident permanent au Canada, qui sont domiciliées au Québec.
Ils sont soumis le cas échéant :
― aux dispositions législatives et réglementaires de chacune des Parties applicables aux ressortissants étrangers sur son territoire en matière d'immigration professionnelle et d'intégration ;
― aux ententes conclues entre les Parties pour favoriser l'emploi sur leur territoire ;
― aux accords et ententes bilatéraux, échanges de lettres et conventions applicables sur le territoire des Parties relatifs à la mobilité des jeunes, d'étudiants, de stagiaires rémunérés ou non, ou d'autres catégories de travailleurs et de salariés ;
― aux programmes gouvernementaux permettant l'acquisition d'une première expérience professionnelle.
Ils bénéficient :
― au même titre que les ressortissants de la Partie d'accueil, des dispositions légales et réglementaires de la Partie d'accueil et des traités internationaux applicables, pour tout ce qui concerne les relations et conditions de travail, la santé, l'hygiène et la sécurité au travail ;
― des dispositifs de mobilité professionnelle mis en place et découlant des accords, ententes, convention et programme mentionnés au paragraphe précédent ;
― dans le cas de professions et métiers réglementés, des arrangements de reconnaissance mutuelle liés à l'Entente sur la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles ou, en l'absence d'arrangement, des conditions d'exercice définies par l'Etat d'accueil ;
― de la protection sociale, conformément à ce que prévoit l'Entente du 17 décembre 2003 en matière de sécurité sociale entre le Gouvernement du Québec et le Gouvernement de la République française et du Protocole d'entente entre le Gouvernement du Québec et le Gouvernement de la République française relatif à la protection sociale des élèves et étudiants et des participants à la coopération.
Article 3
Autorités gouvernementales compétentes
Les autorités gouvernementales compétentes pour la mise en œuvre de la présente Entente sont :
― pour la Partie française : le ministère de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration ;
― pour la Partie québécoise : le ministère de l'Immigration et des communautés culturelles.
Les Parties s'informent mutuellement des administrations ou organismes qu'elles auront désignés pour mettre en œuvre les dispositions de la présente Entente dans le cadre du protocole d'application prévu à l'article 9.
Article 4
Commission mixte
Les Parties conviennent de créer une commission mixte chargée de l'application, du suivi et des éventuelles propositions de modification des dispositions de la présente Entente.
La Commission mixte est coprésidée par les ministres responsables des ministères désignés comme autorités compétentes aux fins de la présente Entente. Elle est composée de représentants des administrations des deux Parties et des administrations ou organismes chargés de la mise en œuvre de l'Entente.
La commission permanente se réunit au moins une fois par an. Ses réunions se tiennent en alternance sur le territoire des Parties.
La commission permanente est responsable :
― de la bonne exécution de la présente Entente et du suivi périodique de son application ;
― de l'évaluation des résultats des dispositions mentionnées dans la présente Entente ;
― de l'observation des flux des bénéficiaires de l'Entente entre les territoires des deux Parties ;
― et de l'élaboration des outils appropriés pour ce faire ;
― de la formulation de toutes propositions utiles pour en améliorer les effets ;
― du suivi des travaux du Groupe de travail sur les flux migratoires et l'intégration des migrants issu de la Déclaration commune signée le 14 septembre 2009.
Article 5
Champ d'application
Les dispositions de la présente Entente s'appliquent au territoire de la France métropolitaine, des départements d'outre-mer ainsi qu'à Saint-Pierre-et-Miquelon et au territoire du Québec.
Article 6
Entrée, séjour et travail
L'admission au séjour et à l'emploi des bénéficiaires de la présente Entente relève des dispositions et réglementations en vigueur sur le territoire de chaque Partie ainsi que des accords et ententes bilatéraux mentionnés à l'article 2.
Au-delà de ces engagements, les Parties s'efforcent :
― de faciliter les démarches administratives engagées par les bénéficiaires de la présente Entente afin qu'ils puissent obtenir les autorisations et titres d'entrée, de séjour et de travail sur le territoire de chaque Partie dans les meilleurs délais ;
― d'organiser des actions de promotion des différents dispositifs favorisant la mobilité professionnelle entre la France et le Québec ;
― d'accompagner cette mobilité professionnelle par des mesures adaptées.
Article 7
Accompagnement et intégration professionnelle
Afin de faciliter leur insertion professionnelle, les bénéficiaires admis au séjour et à l'emploi en France ou au Québec dans le cadre de la présente Entente ont accès aux dispositifs d'accueil et d'accompagnement existants sur le territoire de la Partie d'accueil. Les Parties s'efforcent de les accompagner dans leurs démarches au plus près de leurs besoins conformément aux modalités en vigueur et à celles prévues au Protocole d'application en ce qui a trait à :
― l'accueil et l'installation sur le territoire de l'autre Partie ;
― l'accès aux dispositifs de reconnaissance des titres, diplômes, compétences et qualifications, y compris dans le cadre des arrangements sur la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles ;
― l'accès aux services publics de l'emploi, à des stages ou à des opportunités d'emploi susceptibles de répondre au profil des bénéficiaires ;
― l'accès aux mesures appropriées d'apprentissage de la langue française, notamment à visée professionnelle.
Article 8
Actions de coopération
Les Parties s'engagent à mettre en place des actions concrètes de coopération dans les domaines des flux migratoires, de l'accueil des migrants et de leur intégration afin d'échanger leurs bonnes pratiques et de favoriser le transfert d'expertise. Ces actions de coopération concernent, entre autres :
― l'apprentissage de la langue française par les migrants ;
― la promotion des valeurs de la société ;
― les pratiques facilitant la mobilité et l'intégration professionnelle ;
― la promotion et la gestion de la diversité dans l'emploi ;
― l'insertion en emploi ;
― l'intégration des femmes et des personnes âgées immigrées ;
― le soutien à la parentalité ;
― l'ingénierie des programmes, la recherche et les statistiques ;
― l'évaluation des politiques.
Article 9
Protocole d'application
Les administrations ou organismes désignés par les Parties concluent un protocole d'application qui définit les actions à mener pour mettre en œuvre les dispositions de la présente Entente et les modalités applicables.
Article 10
Echange de fonctionnaires
Les Parties conviennent d'organiser des échanges de fonctionnaires entre les ministères français et québécois chargés de l'immigration pour faciliter et suivre la mise en œuvre des différentes dispositions de l'Entente, et favoriser le transfert de bonnes pratiques. Les personnes concernées sont des employés des gouvernements français et québécois ainsi que des agents relevant des administrations ou organismes désignés pour mettre en œuvre les dispositions de la présente Entente. Les conditions et modalités de l'échange de fonctionnaires seront définies par un échange de lettres entre les Parties.
Article 11
Echanges d'informations
Les Parties conviennent d'échanger régulièrement les documents relatifs au descriptif des dispositifs et aux procédures administratives applicables.
Article 12
Abrogation
La présente Entente abroge et remplace l'Entente du 9 juin 1989 conclue en vue de favoriser l'établissement à titre permanent ou temporaire aux fins d'emploi au Québec de ressortissants français ou étrangers résidant régulièrement en France.
Article 13
Durée ― renouvellement ― dénonciation
La présente Entente est conclue pour une durée indéterminée. Elle peut être modifiée par accord écrit entre les Parties.
La présente Entente peut être dénoncée, par écrit, par l'une ou l'autre des Parties avec un préavis de trois mois par la voie officielle. La dénonciation ne remet pas en cause les droits et obligations des Parties résultant de la mise en œuvre de la présente Entente, sauf si les Parties en décident autrement d'un commun accord.
Les difficultés d'interprétation et d'application de la présente Entente sont réglées au sein de la Commission mixte mentionnée à l'article 4 de la présente Entente ou, à défaut, par la voie officielle entre les Parties.
Article 14
Entrée en vigueur
La présente Entente entre en vigueur le premier jour du deuxième mois qui suit la date de la dernière notification, par la voie officielle, de l'accomplissement par chacune des Parties des procédures constitutionnelles et légales requises pour l'entrée en vigueur de la présente Entente.
En foi de quoi les soussignés, dûment autorisés à cet effet, ont signé la présente Entente.
Fait à Paris, le 26 novembre 2010, en deux exemplaires originaux en langue française, chaque exemplaire faisant également foi.
Fait le 7 mars 2013.
François Hollande
Par le Président de la République :
Le Premier ministre,
Jean-Marc Ayrault
Le ministre des affaires étrangères,
Laurent Fabius
Pour le Gouvernement
de la République française :
Brice HORTEFEUX
ministre de l'Intérieur,
de l'Outre-mer,
des Collectivités territoriales
et de l'Immigration
Pour le Gouvernement
du Québec :
Monique GAGNON-TREMBLAY
ministre des relations
internationales