Conseil d'État, 5ème - 6ème chambres réunies, 25/06/2024, 467984
Conseil d'État, 5ème - 6ème chambres réunies, 25/06/2024, 467984
Conseil d'État - 5ème - 6ème chambres réunies
- N° 467984
- ECLI:FR:CECHR:2024:467984.20240625
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
mardi
25 juin 2024
- Rapporteur
- M. Jean-Dominique Langlais
- Avocat(s)
- BROUCHOT
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la décision référencée 48SI du 8 septembre 2021 par laquelle le ministre de l'intérieur a porté à sa connaissance un retrait de points de son permis de conduire et l'a informé de la perte de validité de ce titre pour solde de points nul, d'autre part, d'enjoindre au ministre de réaffecter ce permis de quatre points. Par un jugement n° 2123526/3-1 du 2 août 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a annulé la décision du 8 septembre 2021 en tant qu'elle constate la perte de validité du permis de conduire de M. B... et a enjoint au ministre de l'intérieur de rétablir quatre points au capital du permis de conduire de M. B... dans un délai de trois mois.
Par un pourvoi, enregistré le 3 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de M. B....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la route ;
- l'arrêté du ministre de l'intérieur du 26 juin 2012 fixant les conditions d'exploitation des établissements chargés d'organiser les stages de sensibilisation à la sécurité routière ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à Me Brouchot, avocat de M. B....
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, par une décision du 8 septembre 2021, le ministre de l'intérieur et des outre-mer a porté à la connaissance de M. B... un retrait de points de son permis de conduire, a constaté la perte de validité de ce titre pour solde de points nul et lui a enjoint de le restituer. Le ministre de l'intérieur se pourvoit en cassation contre le jugement du 2 août 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé cette décision en tant qu'elle constate la perte de validité du permis de M. B... et lui a, d'autre part, enjoint de rétablir quatre points au capital de ce permis dans un délai de trois mois.
Sur le pourvoi :
2. Il ressort des énonciations du jugement attaqué que, pour écarter le moyen tiré par le ministre de l'intérieur et des outre-mer de ce que le bénéfice du stage de sensibilisation à la sécurité routière effectué les 20 et 21 août 2021 par M. B... ne pouvait être reconnu à l'intéressé, faute pour ce stage d'avoir été validé, le tribunal administratif a estimé que le document portant rejet de la demande de validation d'un stage produit par le ministre ne comportait pas de précisions suffisantes " permettant de le relier à l'organisme qui a dispensé le stage au requérant ". En se prononçant par ces motifs, alors que le document en cause comportait le numéro d'agrément du centre de sensibilisation à la sécurité routière dans lequel M. B... a effectué le stage des 20 et 21 août 2021 et qu'il permettait ainsi son identification, le tribunal administratif a dénaturé les pièces du dossier. Il y a lieu, par suite, d'annuler son jugement.
3. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-1 du code de justice administrative.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
4. D'une part, aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 223-6 du code de la route : " Le titulaire du permis de conduire qui a commis une infraction ayant donné lieu à retrait de points peut obtenir une récupération de points s'il suit un stage de sensibilisation à la sécurité routière (...) ". Et aux termes de l'article R. 223-8 : " I.- Le titulaire de l'agrément prévu au II de l'article R. 213-2 délivre une attestation de stage à toute personne qui a suivi un stage de sensibilisation à la sécurité routière dans le respect de conditions d'assiduité et de participation fixées par arrêté du ministre chargé de la sécurité routière. Il transmet un exemplaire de cette attestation au préfet du département du lieu du stage, dans un délai de quinze jours à compter de la fin de celui-ci. / II.- L'attestation délivrée à l'issue du stage effectué en application des dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 223-6 donne droit à la récupération de quatre points dans la limite du plafond affecté au permis de conduire de son titulaire. / III.- Le préfet mentionné au I ci-dessus procède à la reconstitution du nombre de points dans un délai d'un mois à compter de la réception de l'attestation et notifie cette reconstitution à l'intéressé par lettre simple. La reconstitution prend effet le lendemain de la dernière journée de stage. ".
5. D'autre part, aux termes de l'article L. 212-1 du code de la route : " I. - L'enseignement, à titre onéreux, de la conduite des véhicules à moteur d'une catégorie donnée et de la sécurité routière ainsi que l'animation de stages de sensibilisation à la sécurité routière mentionnés à l'article L. 223-6 sont subordonnés à la délivrance d'une autorisation administrative. (...) ", dont les conditions de délivrance sont fixées par l'article R. 212-1. Aux termes de l'article L. 213-1 : " L'enseignement, à titre onéreux, de la conduite des véhicules à moteur d'une catégorie donnée et de la sécurité routière ainsi que l'animation des stages de sensibilisation à la sécurité routière mentionnés à l'article L. 223-6 ne peuvent être organisés que dans le cadre d'un établissement dont l'exploitation est subordonnée à un agrément délivré par l'autorité administrative. (...) ", dont les conditions de délivrance sont fixées par l'article R. 213-2. Par ailleurs, l'article R. 223-5 dispose que " Le stage de sensibilisation à la sécurité routière prévu à l'article L. 223-6 est destiné à éviter la réitération des comportements dangereux. Il est d'une durée de deux jours consécutifs. Il est organisé dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la sécurité routière ", et l'article R. 223-6 que " Le stage doit comprendre : 1° Un premier module ayant pour objet de poser le cadre et les enjeux du stage de sensibilisation à la sécurité routière ; / 2° Un ou plusieurs modules spécialisés dont l'objet est d'impulser un processus de changement d'attitudes et de comportements chez le conducteur./ Le cadre de référence, le programme et les méthodes d'intervention sont fixés par arrêté du ministre chargé de la sécurité routière. (...) ". Enfin, aux termes de l'article 15 de l'arrêté du 26 juin 2012 fixant les conditions d'exploitation des établissements chargés d'organiser les stages de sensibilisation à la sécurité routière : " L'exploitant de l'établissement chargé d'organiser des stages de sensibilisation à la sécurité routière ou les personnes désignées pour assurer l'accueil et l'encadrement technique et administratif des stages transmettent systématiquement au préfet, dans un délai de quinze jours à compter de la fin de chaque stage, les attestations délivrées ainsi que la feuille d'émargement conforme au modèle prévu à l'annexe 7 ", laquelle prévoit la signature du psychologue encadrant le stage. Et aux termes de l'article 16 : " L'exploitant de l'établissement chargé d'organiser des stages de sensibilisation à la sécurité routière adresse au préfet : / (...) / 2° Au plus tard le 31 décembre de l'année (N-1) le calendrier prévisionnel des stages du premier semestre de l'année (N) et au plus tard le 30 juin de chaque année (N) le calendrier prévisionnel des stages du second semestre de l'année (N) comportant, pour chaque stage, l'identité des animateurs. ".
6. Le bénéfice, pour le titulaire d'un permis de conduire, de la reconstitution de quatre points prévue par les dispositions du II de l'article R. 223-8 du code de la route est subordonné au respect, par l'exploitant d'un établissement organisant des stages de sensibilisation à la sécurité routière et les personnes animant de tels stages, des dispositions citées au point 5 relatives à l'obligation de détention de l'autorisation prévue par l'article L. 212-1 du code de la route ou des agréments prévus par l'article L. 213-1, à la durée du stage et à son contenu. En revanche, la méconnaissance par l'exploitant de l'établissement organisant des stages de sensibilisation des obligations procédurales qui lui incombent à l'égard de l'administration, notamment des obligations déclaratives fixées par les articles 15 et 16 de l'arrêté du 26 juin 2012 cités au point précédent, n'est pas de nature à faire obstacle, à elle seule, au bénéfice de ces dispositions lorsqu'elle est restée sans incidence sur la réalité, la durée ou le contenu du stage en cause.
7. Il ressort du document intitulé " Demande n° 75120210827234331103141 du 27/08/2021 pour attestation formation et attestation de stage " produit par le ministre de l'intérieur et des outre-mer que celui-ci a refusé de valider le stage organisé les 20 et 21 août 2021 par la société JP Montparnasse Formation au motif qu'en méconnaissance des dispositions de l'arrêté du 26 juin 2012 citées au point 5, les intervenants mentionnés sur l'attestation n'avaient pas été déclarés préalablement au préfet par l'exploitant et que l'intervenant psychologue n'avait pas signé la feuille d'émargement du second jour de stage. Toutefois, d'une part, il n'était pas soutenu et ne résultait pas de l'instruction que les intervenants mentionnés sur l'attestation, qui comportait la mention de leur numéro d'autorisation, n'auraient pas effectivement assuré l'animation du stage en cause ou que leur autorisation n'aurait pas été valide. D'autre part, la signature de l'attestation délivrée à M. B... par l'intervenant psychologue au terme du stage était de nature à établir la présence de cet intervenant ce même jour, alors même qu'il aurait omis de signer la feuille d'émargement. Ainsi, la méconnaissance par l'exploitant de l'établissement organisant des stages de sensibilisation des obligations procédurales résultant pour lui des dispositions citées au point 5 est restée sans incidence sur la réalité, la durée ou le contenu du stage en cause, et n'est par suite pas de nature, à elle seule, à priver M. B... du bénéfice des dispositions citées au point 4.
8. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que sa participation au stage organisé les 20 et 21 août 2021 lui ouvrait droit à la récupération de quatre points, et, par voie de conséquence, que la décision 48 SI en litige, en tant qu'elle constate la perte de validité de son permis de conduire, repose sur un décompte erroné de son solde de points. Il est par suite fondé à en demander pour ce motif l'annulation dans cette mesure, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de sa demande.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
9. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ".
10. Le présent jugement implique nécessairement que l'administration procède à la reconstitution du capital de points du permis de conduire de M. B... en tenant compte de la récupération de quatre points consécutive au stage des 20 et 21 août 2021. Il y a lieu de lui enjoindre d'y procéder dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.
11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le jugement du 2 août 2022 du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La décision du 8 septembre 2021 du ministre de l'intérieur et des outre-mer est annulée en tant qu'elle constate la perte de validité du permis de conduire de M. B....
Article 3 : Il est enjoint à l'administration de procéder à la reconstitution du capital de points du permis de conduire de M. B... en tenant compte de la récupération de quatre points consécutive au stage des 20 et 21 août 2021, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.
Article 4 : L'Etat versera à M. B... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. A... B....
Délibéré à l'issue de la séance du 5 juin 2024 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre, M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre ; Mme Sophie-Caroline de Margerie, Mme Fabienne Lambolez, conseillères d'Etat ; M. Alain Seban, M. Cyril Roger-Lacan, M. Stéphane Hoynck, conseillers d'Etat et M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat-rapporteur.
Rendu le 25 juin 2024.
Le président :
Signé : M. Rémy Schwartz
Le rapporteur :
Signé : M. Jean-Dominique Langlais
La secrétaire :
Signé : Mme Anne-Lise Calvaire
ECLI:FR:CECHR:2024:467984.20240625
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la décision référencée 48SI du 8 septembre 2021 par laquelle le ministre de l'intérieur a porté à sa connaissance un retrait de points de son permis de conduire et l'a informé de la perte de validité de ce titre pour solde de points nul, d'autre part, d'enjoindre au ministre de réaffecter ce permis de quatre points. Par un jugement n° 2123526/3-1 du 2 août 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a annulé la décision du 8 septembre 2021 en tant qu'elle constate la perte de validité du permis de conduire de M. B... et a enjoint au ministre de l'intérieur de rétablir quatre points au capital du permis de conduire de M. B... dans un délai de trois mois.
Par un pourvoi, enregistré le 3 octobre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de M. B....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la route ;
- l'arrêté du ministre de l'intérieur du 26 juin 2012 fixant les conditions d'exploitation des établissements chargés d'organiser les stages de sensibilisation à la sécurité routière ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à Me Brouchot, avocat de M. B....
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, par une décision du 8 septembre 2021, le ministre de l'intérieur et des outre-mer a porté à la connaissance de M. B... un retrait de points de son permis de conduire, a constaté la perte de validité de ce titre pour solde de points nul et lui a enjoint de le restituer. Le ministre de l'intérieur se pourvoit en cassation contre le jugement du 2 août 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé cette décision en tant qu'elle constate la perte de validité du permis de M. B... et lui a, d'autre part, enjoint de rétablir quatre points au capital de ce permis dans un délai de trois mois.
Sur le pourvoi :
2. Il ressort des énonciations du jugement attaqué que, pour écarter le moyen tiré par le ministre de l'intérieur et des outre-mer de ce que le bénéfice du stage de sensibilisation à la sécurité routière effectué les 20 et 21 août 2021 par M. B... ne pouvait être reconnu à l'intéressé, faute pour ce stage d'avoir été validé, le tribunal administratif a estimé que le document portant rejet de la demande de validation d'un stage produit par le ministre ne comportait pas de précisions suffisantes " permettant de le relier à l'organisme qui a dispensé le stage au requérant ". En se prononçant par ces motifs, alors que le document en cause comportait le numéro d'agrément du centre de sensibilisation à la sécurité routière dans lequel M. B... a effectué le stage des 20 et 21 août 2021 et qu'il permettait ainsi son identification, le tribunal administratif a dénaturé les pièces du dossier. Il y a lieu, par suite, d'annuler son jugement.
3. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-1 du code de justice administrative.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
4. D'une part, aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 223-6 du code de la route : " Le titulaire du permis de conduire qui a commis une infraction ayant donné lieu à retrait de points peut obtenir une récupération de points s'il suit un stage de sensibilisation à la sécurité routière (...) ". Et aux termes de l'article R. 223-8 : " I.- Le titulaire de l'agrément prévu au II de l'article R. 213-2 délivre une attestation de stage à toute personne qui a suivi un stage de sensibilisation à la sécurité routière dans le respect de conditions d'assiduité et de participation fixées par arrêté du ministre chargé de la sécurité routière. Il transmet un exemplaire de cette attestation au préfet du département du lieu du stage, dans un délai de quinze jours à compter de la fin de celui-ci. / II.- L'attestation délivrée à l'issue du stage effectué en application des dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 223-6 donne droit à la récupération de quatre points dans la limite du plafond affecté au permis de conduire de son titulaire. / III.- Le préfet mentionné au I ci-dessus procède à la reconstitution du nombre de points dans un délai d'un mois à compter de la réception de l'attestation et notifie cette reconstitution à l'intéressé par lettre simple. La reconstitution prend effet le lendemain de la dernière journée de stage. ".
5. D'autre part, aux termes de l'article L. 212-1 du code de la route : " I. - L'enseignement, à titre onéreux, de la conduite des véhicules à moteur d'une catégorie donnée et de la sécurité routière ainsi que l'animation de stages de sensibilisation à la sécurité routière mentionnés à l'article L. 223-6 sont subordonnés à la délivrance d'une autorisation administrative. (...) ", dont les conditions de délivrance sont fixées par l'article R. 212-1. Aux termes de l'article L. 213-1 : " L'enseignement, à titre onéreux, de la conduite des véhicules à moteur d'une catégorie donnée et de la sécurité routière ainsi que l'animation des stages de sensibilisation à la sécurité routière mentionnés à l'article L. 223-6 ne peuvent être organisés que dans le cadre d'un établissement dont l'exploitation est subordonnée à un agrément délivré par l'autorité administrative. (...) ", dont les conditions de délivrance sont fixées par l'article R. 213-2. Par ailleurs, l'article R. 223-5 dispose que " Le stage de sensibilisation à la sécurité routière prévu à l'article L. 223-6 est destiné à éviter la réitération des comportements dangereux. Il est d'une durée de deux jours consécutifs. Il est organisé dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la sécurité routière ", et l'article R. 223-6 que " Le stage doit comprendre : 1° Un premier module ayant pour objet de poser le cadre et les enjeux du stage de sensibilisation à la sécurité routière ; / 2° Un ou plusieurs modules spécialisés dont l'objet est d'impulser un processus de changement d'attitudes et de comportements chez le conducteur./ Le cadre de référence, le programme et les méthodes d'intervention sont fixés par arrêté du ministre chargé de la sécurité routière. (...) ". Enfin, aux termes de l'article 15 de l'arrêté du 26 juin 2012 fixant les conditions d'exploitation des établissements chargés d'organiser les stages de sensibilisation à la sécurité routière : " L'exploitant de l'établissement chargé d'organiser des stages de sensibilisation à la sécurité routière ou les personnes désignées pour assurer l'accueil et l'encadrement technique et administratif des stages transmettent systématiquement au préfet, dans un délai de quinze jours à compter de la fin de chaque stage, les attestations délivrées ainsi que la feuille d'émargement conforme au modèle prévu à l'annexe 7 ", laquelle prévoit la signature du psychologue encadrant le stage. Et aux termes de l'article 16 : " L'exploitant de l'établissement chargé d'organiser des stages de sensibilisation à la sécurité routière adresse au préfet : / (...) / 2° Au plus tard le 31 décembre de l'année (N-1) le calendrier prévisionnel des stages du premier semestre de l'année (N) et au plus tard le 30 juin de chaque année (N) le calendrier prévisionnel des stages du second semestre de l'année (N) comportant, pour chaque stage, l'identité des animateurs. ".
6. Le bénéfice, pour le titulaire d'un permis de conduire, de la reconstitution de quatre points prévue par les dispositions du II de l'article R. 223-8 du code de la route est subordonné au respect, par l'exploitant d'un établissement organisant des stages de sensibilisation à la sécurité routière et les personnes animant de tels stages, des dispositions citées au point 5 relatives à l'obligation de détention de l'autorisation prévue par l'article L. 212-1 du code de la route ou des agréments prévus par l'article L. 213-1, à la durée du stage et à son contenu. En revanche, la méconnaissance par l'exploitant de l'établissement organisant des stages de sensibilisation des obligations procédurales qui lui incombent à l'égard de l'administration, notamment des obligations déclaratives fixées par les articles 15 et 16 de l'arrêté du 26 juin 2012 cités au point précédent, n'est pas de nature à faire obstacle, à elle seule, au bénéfice de ces dispositions lorsqu'elle est restée sans incidence sur la réalité, la durée ou le contenu du stage en cause.
7. Il ressort du document intitulé " Demande n° 75120210827234331103141 du 27/08/2021 pour attestation formation et attestation de stage " produit par le ministre de l'intérieur et des outre-mer que celui-ci a refusé de valider le stage organisé les 20 et 21 août 2021 par la société JP Montparnasse Formation au motif qu'en méconnaissance des dispositions de l'arrêté du 26 juin 2012 citées au point 5, les intervenants mentionnés sur l'attestation n'avaient pas été déclarés préalablement au préfet par l'exploitant et que l'intervenant psychologue n'avait pas signé la feuille d'émargement du second jour de stage. Toutefois, d'une part, il n'était pas soutenu et ne résultait pas de l'instruction que les intervenants mentionnés sur l'attestation, qui comportait la mention de leur numéro d'autorisation, n'auraient pas effectivement assuré l'animation du stage en cause ou que leur autorisation n'aurait pas été valide. D'autre part, la signature de l'attestation délivrée à M. B... par l'intervenant psychologue au terme du stage était de nature à établir la présence de cet intervenant ce même jour, alors même qu'il aurait omis de signer la feuille d'émargement. Ainsi, la méconnaissance par l'exploitant de l'établissement organisant des stages de sensibilisation des obligations procédurales résultant pour lui des dispositions citées au point 5 est restée sans incidence sur la réalité, la durée ou le contenu du stage en cause, et n'est par suite pas de nature, à elle seule, à priver M. B... du bénéfice des dispositions citées au point 4.
8. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que sa participation au stage organisé les 20 et 21 août 2021 lui ouvrait droit à la récupération de quatre points, et, par voie de conséquence, que la décision 48 SI en litige, en tant qu'elle constate la perte de validité de son permis de conduire, repose sur un décompte erroné de son solde de points. Il est par suite fondé à en demander pour ce motif l'annulation dans cette mesure, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de sa demande.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
9. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ".
10. Le présent jugement implique nécessairement que l'administration procède à la reconstitution du capital de points du permis de conduire de M. B... en tenant compte de la récupération de quatre points consécutive au stage des 20 et 21 août 2021. Il y a lieu de lui enjoindre d'y procéder dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.
11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le jugement du 2 août 2022 du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La décision du 8 septembre 2021 du ministre de l'intérieur et des outre-mer est annulée en tant qu'elle constate la perte de validité du permis de conduire de M. B....
Article 3 : Il est enjoint à l'administration de procéder à la reconstitution du capital de points du permis de conduire de M. B... en tenant compte de la récupération de quatre points consécutive au stage des 20 et 21 août 2021, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.
Article 4 : L'Etat versera à M. B... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. A... B....
Délibéré à l'issue de la séance du 5 juin 2024 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre, M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre ; Mme Sophie-Caroline de Margerie, Mme Fabienne Lambolez, conseillères d'Etat ; M. Alain Seban, M. Cyril Roger-Lacan, M. Stéphane Hoynck, conseillers d'Etat et M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat-rapporteur.
Rendu le 25 juin 2024.
Le président :
Signé : M. Rémy Schwartz
Le rapporteur :
Signé : M. Jean-Dominique Langlais
La secrétaire :
Signé : Mme Anne-Lise Calvaire