CAA de LYON, 5ème chambre, 06/06/2024, 22LY02064, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure

La société anonyme à responsabilité limitée (SARL) Ulbar a demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos les 30 septembre 2013 et 30 septembre 2015.

Par un jugement n° 2005855 du 3 mai 2022, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.


Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 juillet 2022 et 24 février 2023, la SARL Ulbar, représentée par Me Vidal, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et de lui accorder la décharge sollicitée outre les intérêts moratoires ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.




Elle soutient que :
- la décote opérée au titre des travaux obligatoires à réaliser sur l'immeuble " Le Galaxie " détenu en stock est justifiée par le procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires du 25 juin 2013 qui justifie du principe, des délais et de l'importance des travaux à réaliser sur cet immeuble ;
- elle est fondée à solliciter à titre subsidiaire l'inscription en comptabilité d'une provision pour travaux à hauteur de 300 000 euros pour les exercices clos en 2013 et 2015 ainsi qu'elle l'a fait par voie de déclarations de résultats rectificatives à l'appui de sa réclamation du 20 décembre 2019.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 janvier 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Une ordonnance du 30 mars 2023 a fixé la clôture de l'instruction au 26 mai 2023.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère,
- et les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique ;


Considérant ce qui suit :


1. La société à responsabilité limitée (SARL) Ulbar, qui exerce une activité de marchand de biens immobiliers, a acquis le 23 novembre 2012 plusieurs lots de l'immeuble " Le Galaxie ", situé 75-89 rue de la Villette à Lyon. A la clôture des exercices clos le 30 septembre 2013 et le 30 septembre 2015, elle a déduit de la valeur de ces lots, inscrits en stocks, une décote directe d'un montant de 300 000 euros. Par proposition de rectification du 23 novembre 2016, l'administration fiscale a notamment remis en cause cette décote. La société Ulbar relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre de la réintégration de cette somme de 300 000 euros dans ses stocks pour les exercices clos en 2013 et 2015.

2. D'une part, aux termes de l'article 38 du code général des impôts, dans sa version alors applicable : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. / (...) / 3. Pour l'application des 1 et 2, les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient. / Les travaux en cours sont évalués au prix de revient. (...) ".
3. Il résulte de l'instruction qu'à la clôture des exercices 2013 et 2015, la SARL Ulbar a comptabilisé une décote de 300 000 euros correspondant à la quote-part de travaux susceptible d'être mise à sa charge pour des travaux de rénovation énergétique de l'immeuble " Le Galaxie ". La société requérante produit plusieurs documents dont des estimations du coût des travaux par la société Nexity, une attestation du syndicat de copropriété de l'immeuble " Le Galaxie " selon laquelle des travaux de rénovation complète du bâtiment sont envisagés depuis 2013, le rapport d'audit énergétique du cabinet E2C du 12 avril 2013 sur le déroulé de la maîtrise d'œuvre et la lettre de l'architecte M. A... du 23 septembre 2013 faisant état de la nécessité de réaliser une étude de faisabilité avant de décider quelle pourrait être la nature exacte des travaux à réaliser sur la façade. Elle se prévaut également du procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires de l'immeuble du 25 juin 2013. Toutefois, ces documents se bornent à faire état de travaux à réaliser, dans le cadre de la législation applicable, travaux dont ni la consistance, ni le montant ni le calendrier de réalisation n'étaient, à la date de clôture de chacun des exercices en cause, précisément arrêtés et définis. A ce titre, le procès-verbal en cause, qui n'apporte pas contrairement à ce que soutient la SARL Ulbar la preuve du principe, des délais et de l'importance des travaux à réaliser sur l'immeuble Le Galaxie, mentionne que les copropriétaires n'ont pas décidé à l'issue de la séance du scenario choisi pour les travaux ni de la date de démarrage de ceux-ci. La circonstance que lesdits travaux aient été rendus obligatoires par la législation applicable est sans incidence sur le bien-fondé de la décote comptabilisée. Par suite, la société appelante n'apporte pas davantage en appel qu'en première instance d'élément probant permettant de justifier de la réalité et du montant de la perte de valeur ainsi retenue. Dès lors, l'administration a pu à bon droit réintégrer dans les résultats des exercices clos en 2013 et 2015 la décote de 300 000 euros comptabilisée à tort.
4. D'autre part, il résulte du 5° du 1. de l'article 39 du code général des impôts et du 3 de l'article 38 du même code, applicables pour la détermination de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code, que lorsqu'une entreprise constate que l'ensemble des matières ou produits qu'elle possède en stock ou une catégorie déterminée d'entre eux a, à la date de clôture de l'exercice, une valeur probable de réalisation inférieure au prix de revient, elle est en droit de constituer, à concurrence de l'écart constaté, une provision pour dépréciation. Une telle provision ne peut cependant être admise que si l'entreprise est en mesure de justifier de la réalité de cet écart et d'en déterminer le montant avec une approximation suffisante.
5. La SARL Ulbar soutient que l'administration doit tenir compte des déclarations rectificatives de résultats qu'elle a déposées pour les exercices clos en 2013 et 2015 à l'appui de sa réclamation du 20 décembre 2019 faisant apparaître une provision pour dépréciation de stocks à hauteur de 300 000 euros. Toutefois, la société requérante se borne à se prévaloir des mêmes documents que ceux visés au point 3 lesquels ne sont pas de nature à justifier du principe et du montant du taux de décote appliqué à ce stock et ainsi de la déductibilité de la provision pour dépréciation de stocks comptabilisée. Il s'en suit que c'est à bon droit que l'administration a refusé la provision constituée à ce titre.
6. Il résulte de ce qui précède que la SARL Ulbar n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.



Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la SARL Ulbar la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Ulbar est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Ulbar et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 23 mai 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Dèche, présidente,
Mme Vergnaud, première conseillère,
Mme Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 juin 2024.

La rapporteure,




V. Rémy-NérisLa présidente,




P. Dèche
Le greffier en chef,
C. Gomez

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,
Le greffier en chef
2
N° 22LY02064
kc



Retourner en haut de la page