Conseil d'État, 6ème - 5ème chambres réunies, 31/05/2024, 464945, Inédit au recueil Lebon
Conseil d'État, 6ème - 5ème chambres réunies, 31/05/2024, 464945, Inédit au recueil Lebon
Conseil d'État - 6ème - 5ème chambres réunies
- N° 464945
- ECLI:FR:CECHR:2024:464945.20240531
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
vendredi
31 mai 2024
- Rapporteur
- M. Antoine Berger
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 13 juin 2022 et le 30 avril 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la fédération de l'hygiène et de l'entretien responsable et la fédération des entreprises de la beauté demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir le dernier alinéa de l'article 1er et le III de l'article 3 du décret n° 2022-748 du 29 avril 2022 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur ;
- le règlement n° 648/2004 du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relatif aux détergents ;
- le règlement n° 1223/2009 du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 relatif aux produits cosmétiques ;
- le règlement n° 655/2013 de la Commission du 10 juillet 2013 établissant les critères communs auxquels les allégations relatives aux produits cosmétiques doivent répondre pour pouvoir être utilisées ;
- le code de la consommation ;
- le code de l'environnement ;
- la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Antoine Berger, auditeur,
- les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 541-9-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction issue de l'article 13 de la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire : " Il est interdit de faire figurer sur un produit ou un emballage les mentions " biodégradable ", " respectueux de l'environnement " ou toute autre mention équivalente (...) / Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article, notamment la définition des qualités et caractéristiques environnementales, les modalités de leur établissement, les catégories de produits concernés ainsi que les modalités d'information des consommateurs ".
2. Il ressort des pièces du dossier qu'en introduisant cette interdiction de faire figurer sur un produit ou un emballage les mentions " biodégradable ", " respectueux de l'environnement " ou toute autre mention équivalente, le législateur a souhaité renforcer la protection de l'environnement, en particulier par l'amélioration du traitement des déchets et de l'information des consommateurs sur les incidences environnementales des produits, en interdisant d'y faire figurer des allégations environnementales qui renvoient à des notions qui ne font l'objet d'aucun consensus scientifique, ou qui, en l'état de la technique, sont trop générales pour être vérifiables. Il ressort à cet égard des pièces du dossier, en particulier de l'étude d'impact de la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, que ces allégations étaient régulièrement employées de manière trompeuse ou ambigüe et que les normes définissant la biodégradabilité d'un produit ou d'une substance sont aujourd'hui insuffisantes pour assurer que ces matières feront l'objet d'une biodégradation complète, notamment en ce qui concerne les microplastiques. Le législateur a ainsi entendu proscrire de telles allégations environnementales pouvant présenter, en l'état de la technique, un caractère trompeur ou ambigu pour le consommateur susceptible de susciter la confusion sur le geste de tri ou l'incidence du produit sur l'environnement.
3. Pour l'application de ces dispositions, le décret du 29 avril 2022 relatif à l'information du consommateur sur les qualités et caractéristiques environnementales des produits générateurs de déchets a notamment introduit dans le code de l'environnement un article R. 541-223 aux termes duquel " il est interdit de faire figurer sur un produit ou un emballage, neuf à destination du consommateur, les mentions " biodégradable ", " respectueux de l'environnement" ou toute autre allégation environnementale équivalente ". Le III de l'article 3 de ce même décret dispose que l'article R. 541-223 entre en vigueur au lendemain de sa publication, et que les produits ou emballages auxquels il s'applique bénéficient d'un délai d'écoulement des stocks jusqu'au 1er janvier 2023 s'ils ont été fabriqués ou importés avant la date de publication du décret. La Fédération de l'hygiène et de l'entretien responsable et la Fédération des entreprises de la beauté, syndicats professionnels, demandent l'annulation pour excès de pouvoir de ce décret.
4. En premier lieu, lorsque, comme en l'espèce, un décret doit être pris en Conseil d'Etat, le texte retenu par le Gouvernement ne peut être différent à la fois du projet qu'il avait soumis au Conseil d'Etat et du texte adopté par ce dernier. Le respect de cette exigence doit être apprécié par ensemble de dispositions ayant un rapport entre elles. Il ressort de l'examen des pièces versées au dossier par le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires que le texte du décret attaqué ne contient pas de disposition qui diffèrerait à la fois du projet initial du Gouvernement et du texte adopté par le Conseil d'Etat. Ainsi, aucune méconnaissance des règles qui gouvernent l'examen par le Conseil d'Etat du projet de décret ne saurait être retenue.
5. En deuxième lieu, les fédérations requérantes soutiennent que les dispositions dont elle a demandé l'annulation méconnaissent les dispositions de la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur. Il ressort toutefois de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que, pour déterminer si des dispositions nationales qui prévoient l'interdiction d'une pratique commerciale sont susceptibles de relever du champ d'application de cette directive, il incombe aux juridictions nationales, seules compétentes pour se prononcer sur l'interprétation du droit interne, de rechercher à titre liminaire si les dispositions en litige poursuivent effectivement des finalités tenant à la protection des consommateurs.
6. Or, il ressort des pièces du dossier que la finalité de l'interdiction de certaines allégations environnementales prévue par les dispositions du décret du 29 avril 2022 dont l'annulation est demandée par les requérantes est, non de protéger les intérêts économiques du consommateur, mais de renforcer la protection de l'environnement, ainsi qu'il a été dit au point 2. Par suite, le moyen tiré de ce que ces dispositions seraient incompatibles avec les dispositions de la directive du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales est inopérant. Par ailleurs, les requérantes ne peuvent utilement invoquer la directive (UE) 2024/825 du Parlement européen et du Conseil du 28 février 2024 modifiant les directives 2005/29/CE et 2011/83/UE pour donner aux consommateurs les moyens d'agir en faveur de la transition verte grâce à une meilleure protection contre les pratiques déloyales et grâce à une meilleure information, dont l'entrée en vigueur est postérieure à celle du décret attaqué.
7. En troisième lieu, selon son article 1er, le règlement n° 1223/2009 du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 relatif aux produits cosmétiques " établit des règles auxquelles doit satisfaire tout produit cosmétique mis à disposition sur le marché, afin de garantir le fonctionnement du marché intérieur et assurer un niveau élevé de protection de la santé humaine ". Aux termes de son article 9 : " Les États membres ne refusent pas, n'interdisent pas et ne restreignent pas, pour des raisons concernant les exigences contenues dans le présent règlement, la mise à disposition sur le marché des produits cosmétiques qui répondent aux prescriptions du présent règlement ". L'article 19 de ce règlement dispose que " les produits cosmétiques ne sont mis à disposition sur le marché que si le récipient et l'emballage des produits cosmétiques portent en caractères indélébiles, facilement lisibles et visibles " les mentions dont il établit la liste. L'article 20 dispose quant à lui que " 1. Pour l'étiquetage, la mise à disposition sur le marché et la publicité des produits cosmétiques, le texte, les dénominations, marques, images ou autres signes figuratifs ou non ne peuvent être utilisés pour attribuer à ces produits des caractéristiques ou des fonctions qu'ils ne possèdent pas (...) / Après consultation du CSSC ou de toute autre autorité compétente, la Commission adopte une liste de critères communs concernant les allégations pouvant être utilisées pour les produits cosmétiques, en conformité avec la procédure de réglementation avec contrôle visée à l'article 32, paragraphe 3, du présent règlement, en tenant compte des dispositions de la directive 2005/29/CE ". En application de ces dernières dispositions, la Commission a adopté le règlement n° 655/2013 du 10 juillet 2013 établissant les critères communs auxquels les allégations relatives aux produits cosmétiques doivent répondre pour pouvoir être utilisées.
8. Si les fédérations requérantes soutiennent que l'article L. 541-9-1 du code de l'environnement et le décret litigieux seraient incompatibles avec ces dispositions, il résulte des dispositions de l'article 1er du règlement du 30 novembre 2009 précité qu'il vise à garantir le fonctionnement du marché intérieur des produits cosmétiques en assurant un niveau élevé de protection de la santé humaine, tandis que les dispositions litigieuses ont pour objet d'améliorer la protection de l'environnement et la gestion des déchets, ainsi qu'il a été dit au point 2, notamment par l'amélioration de l'information des consommateurs de l'ensemble des produits neufs. Il résulte de ce qui précède que, dès lors que les dispositions litigieuses n'entrent pas dans le champ d'application du règlement du 30 novembre 2009 précité, le moyen tiré de leur incompatibilité avec les dispositions de ce règlement ne peut qu'être écarté.
9. En quatrième lieu, le règlement n° 648/2004 du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relatif aux détergents tend à établir des règles visant à assurer la libre circulation, dans le marché intérieur, des détergents et des agents de surface destinés à faire partie de détergents, tout en assurant un degré élevé de protection de l'environnement et de la santé humaine. Aux termes de son article 1er : " le règlement harmonise les règles suivantes de mise sur le marché des détergents et des agents de surface destinés à faire partie de détergents : / - biodégradabilité des agents de surface, - restrictions ou interdictions applicables aux agents de surface pour des raisons de biodégradabilité (...) ". Son article 11, relatif à l'étiquetage des produits, dispose notamment que : " 2. Les indications ci-après doivent figurer en caractères lisibles, visibles et indélébiles sur les emballages dans lesquels les détergents sont mis en vente à l'intention du consommateur: / a) la dénomination et la marque de fabrique/commerce du produit; / b) le nom ou la marque de fabrique/commerce ou la marque déposée et l'adresse complète ainsi que le numéro de téléphone du responsable de la mise sur le marché; / c) l'adresse, l'adresse de courrier électronique éventuelle et le numéro de téléphone auxquels la fiche visée à l'article 9, paragraphe 3, peut être obtenue. / Ces mêmes indications doivent figurer sur tous les documents d'accompagnement des détergents transportés en vrac. / 3. L'emballage des détergents indique le contenu conformément aux spécifications prévues à l'annexe VII, partie A. Il indique aussi le mode d'emploi et, le cas échéant, les précautions particulières à prendre ". L'article 14 de ce même règlement dispose que " 1. Les États membres s'abstiennent d'interdire, de restreindre ou d'entraver la mise à disposition sur le marché de détergents et/ou d'agents de surface destinés à faire partie de détergents, quand ces produits satisfont aux exigences du présent règlement, pour les raisons énumérées au présent règlement ".
10. Les dispositions de l'article L. 541-9-1 du code de l'environnement ont été adoptées afin, ainsi qu'il a été dit au point 2, de renforcer la protection de l'environnement. Il est constant que cette interdiction, qui porte sur les étiquettes des produits et emballages de produits divers dont font partie les détergents, n'est pas au nombre des exigences d'étiquetage énumérées par l'article 11 du règlement du 31 mars 2004 précité. Toutefois, ce réglement ne s'oppose pas à ce qu'un Etat-membre adopte, afin d'améliorer la protection de l'environnement, une interdiction globale des allégations environnementales trop générales pour être exactes ou pour être vérifiables, applicable à l'ensemble des produits neufs et non aux seuls détergents. Le moyen tiré de ce que les dispositions litigieuses méconnaîtraient les dispositions du règlement du 31 mars 2004 précité doit, par suite, être écarté.
11. En cinquième lieu, les articles 34 et 35 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne interdisent les restrictions quantitatives à l'importation et à l'exportation entre les États membres, ainsi que toutes mesures d'effet équivalent. Aux termes de l'article 36 du même traité, ces dispositions ne font cependant pas obstacle aux interdictions ou restrictions d'importation, d'exportation ou de transit " justifiées par des raisons de moralité publique, d'ordre public, de sécurité publique, de protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux ou de préservation des végétaux, de protection des trésors nationaux ayant une valeur artistique, historique ou archéologique ou de protection de la propriété industrielle et commerciale. Toutefois, ces interdictions ou restrictions ne doivent constituer ni un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée dans le commerce entre les États membres. " Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, d'une part, que la notion de " mesure d'effet équivalent " inclut toute réglementation commerciale des Etats membres susceptible d'entraver directement ou indirectement, actuellement ou potentiellement, le commerce intracommunautaire, et, d'autre part, qu'une réglementation nationale qui constitue une mesure d'effet équivalent à une restriction quantitatives est autorisée lorsqu'elle est indistinctement applicable aux produits nationaux et importés et qu'elle est nécessaire pour satisfaire à l'une des raisons d'intérêt général qu'elle retient ou à des exigences impératives, comme la protection de l'environnement. Les dispositions en cause doivent être propres à garantir la réalisation de l'objectif poursuivi et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour qu'il soit atteint.
12. Il ressort des pièces du dossier qu'en adoptant la mesure contestée, le législateur a poursuivi un objectif d'amélioration de la gestion des déchets et de réduction des abandons de ces déchets dans le milieu naturel, dans une perspective de renforcement de la protection de l'environnement, alors qu'il ressort de l'étude d'impact mentionnée au point 2, d'une part, que les normes définissant la biodégradabilité d'un produit ou d'une substance sont insuffisantes pour assurer la biodégradabilité complète de ces matières et, d'autre part, que les allégations environnementales telles que celles proscrites sont, en l'état de la technique, insusceptibles d'être vérifiées.
13. Si les fédérations requérantes font valoir que l'application de ces dispositions est de nature à entraîner des coûts importants, notamment en raison de la nécessité de fabriquer de nouveaux produits et emballages et de l'impossibilité d'écouler les stocks dans les délais prescrits par le III de l'article 3 du décret litigieux, les pièces du dossier ne permettent pas d'établir que, compte tenu des modalités de mise en œuvre des obligations prévues par le texte, qui comprennent un délai d'écoulement des stocks jusqu'au 1er janvier 2023, les coûts supplémentaires induits par la mesure litigieuse entraîneraient une charge disproportionnée pour les professionnels qu'elles représentent. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit au point 2, dès lors que l'interdiction litigieuse porte sur les allégations environnementales insusceptibles d'être vérifiées, telles que les mentions " biodégradable " ou " respectueux de l'environnement ", les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que les dispositions attaquées conduiraient à l'interdiction de toute allégation environnementale ou de tous les labels certifiant les qualités environnementales des produits. Il résulte de tout ce qui précède que les obligations ainsi imposées aux producteurs, qui sont justifiées par l'objectif de protection de l'environnement poursuivi, ne peuvent être regardées comme inadaptées ou comme allant au-delà des contraintes strictement nécessaires à l'atteinte de cet objectif. Il suit de là que le moyen tiré de ce que l'interdiction litigieuse constituerait une entrave injustifiée et disproportionnée à la libre circulation des marchandises, en méconnaissance des articles 34, 35 et 36 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, doit être écarté.
14. En sixième lieu, en prévoyant que l'interdiction s'applique aux mentions telles que " biodégradable " ou " respectueux de l'environnement " et aux allégations environnementales équivalentes, le législateur et le pouvoir réglementaire ont défini avec une précision suffisante le champ de l'interdiction qu'ils énoncent, qui s'applique à l'ensemble des allégations environnementales trop générales pour être exactes ou vérifiables. Il en résulte que les dispositions litigieuses sont dépourvues d'ambiguïté, et que le moyen tiré de ce qu'elles méconnaîtraient le principe de légalité des délits et des peines garanti par les stipulations de l'article 7 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, en tout état de cause, être écarté.
15. Il résulte de tout ce qui précède que la fédération de l'hygiène et de l'entretien responsable et la fédération des entreprises de la beauté ne sont pas fondées à demander l'annulation pour excès de pouvoir des dispositions du décret du 29 avril 2022 qu'elles attaquent. Par suite, leur requête doit être rejetée, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la fédération de l'hygiène et de l'entretien responsable et de la fédération des entreprises de la beauté est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la fédération de l'hygiène et de l'entretien responsable, à la fédération des entreprises de la beauté, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, et au Premier ministre.
Délibéré à l'issue de la séance du 15 mai 2024 où siégeaient : : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, M. Jean-Philippe Mochon, présidents de chambre ; Mme Sophie-Caroline de Margerie, M. Alain Seban, Mme Fabienne Lambolez, M. Cyril Roger-Lacan, M. Stéphane Hoynck, conseillers d'Etat et M. Antoine Berger, auditeur-rapporteur.
Rendu le 31 mai 2024.
Le président :
Signé : M. Rémy Schwartz
Le rapporteur :
Signé : M. Antoine Berger
La secrétaire :
Signé : Mme Laïla Kouas
ECLI:FR:CECHR:2024:464945.20240531
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 13 juin 2022 et le 30 avril 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la fédération de l'hygiène et de l'entretien responsable et la fédération des entreprises de la beauté demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir le dernier alinéa de l'article 1er et le III de l'article 3 du décret n° 2022-748 du 29 avril 2022 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur ;
- le règlement n° 648/2004 du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relatif aux détergents ;
- le règlement n° 1223/2009 du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 relatif aux produits cosmétiques ;
- le règlement n° 655/2013 de la Commission du 10 juillet 2013 établissant les critères communs auxquels les allégations relatives aux produits cosmétiques doivent répondre pour pouvoir être utilisées ;
- le code de la consommation ;
- le code de l'environnement ;
- la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Antoine Berger, auditeur,
- les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 541-9-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction issue de l'article 13 de la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire : " Il est interdit de faire figurer sur un produit ou un emballage les mentions " biodégradable ", " respectueux de l'environnement " ou toute autre mention équivalente (...) / Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article, notamment la définition des qualités et caractéristiques environnementales, les modalités de leur établissement, les catégories de produits concernés ainsi que les modalités d'information des consommateurs ".
2. Il ressort des pièces du dossier qu'en introduisant cette interdiction de faire figurer sur un produit ou un emballage les mentions " biodégradable ", " respectueux de l'environnement " ou toute autre mention équivalente, le législateur a souhaité renforcer la protection de l'environnement, en particulier par l'amélioration du traitement des déchets et de l'information des consommateurs sur les incidences environnementales des produits, en interdisant d'y faire figurer des allégations environnementales qui renvoient à des notions qui ne font l'objet d'aucun consensus scientifique, ou qui, en l'état de la technique, sont trop générales pour être vérifiables. Il ressort à cet égard des pièces du dossier, en particulier de l'étude d'impact de la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, que ces allégations étaient régulièrement employées de manière trompeuse ou ambigüe et que les normes définissant la biodégradabilité d'un produit ou d'une substance sont aujourd'hui insuffisantes pour assurer que ces matières feront l'objet d'une biodégradation complète, notamment en ce qui concerne les microplastiques. Le législateur a ainsi entendu proscrire de telles allégations environnementales pouvant présenter, en l'état de la technique, un caractère trompeur ou ambigu pour le consommateur susceptible de susciter la confusion sur le geste de tri ou l'incidence du produit sur l'environnement.
3. Pour l'application de ces dispositions, le décret du 29 avril 2022 relatif à l'information du consommateur sur les qualités et caractéristiques environnementales des produits générateurs de déchets a notamment introduit dans le code de l'environnement un article R. 541-223 aux termes duquel " il est interdit de faire figurer sur un produit ou un emballage, neuf à destination du consommateur, les mentions " biodégradable ", " respectueux de l'environnement" ou toute autre allégation environnementale équivalente ". Le III de l'article 3 de ce même décret dispose que l'article R. 541-223 entre en vigueur au lendemain de sa publication, et que les produits ou emballages auxquels il s'applique bénéficient d'un délai d'écoulement des stocks jusqu'au 1er janvier 2023 s'ils ont été fabriqués ou importés avant la date de publication du décret. La Fédération de l'hygiène et de l'entretien responsable et la Fédération des entreprises de la beauté, syndicats professionnels, demandent l'annulation pour excès de pouvoir de ce décret.
4. En premier lieu, lorsque, comme en l'espèce, un décret doit être pris en Conseil d'Etat, le texte retenu par le Gouvernement ne peut être différent à la fois du projet qu'il avait soumis au Conseil d'Etat et du texte adopté par ce dernier. Le respect de cette exigence doit être apprécié par ensemble de dispositions ayant un rapport entre elles. Il ressort de l'examen des pièces versées au dossier par le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires que le texte du décret attaqué ne contient pas de disposition qui diffèrerait à la fois du projet initial du Gouvernement et du texte adopté par le Conseil d'Etat. Ainsi, aucune méconnaissance des règles qui gouvernent l'examen par le Conseil d'Etat du projet de décret ne saurait être retenue.
5. En deuxième lieu, les fédérations requérantes soutiennent que les dispositions dont elle a demandé l'annulation méconnaissent les dispositions de la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur. Il ressort toutefois de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que, pour déterminer si des dispositions nationales qui prévoient l'interdiction d'une pratique commerciale sont susceptibles de relever du champ d'application de cette directive, il incombe aux juridictions nationales, seules compétentes pour se prononcer sur l'interprétation du droit interne, de rechercher à titre liminaire si les dispositions en litige poursuivent effectivement des finalités tenant à la protection des consommateurs.
6. Or, il ressort des pièces du dossier que la finalité de l'interdiction de certaines allégations environnementales prévue par les dispositions du décret du 29 avril 2022 dont l'annulation est demandée par les requérantes est, non de protéger les intérêts économiques du consommateur, mais de renforcer la protection de l'environnement, ainsi qu'il a été dit au point 2. Par suite, le moyen tiré de ce que ces dispositions seraient incompatibles avec les dispositions de la directive du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales est inopérant. Par ailleurs, les requérantes ne peuvent utilement invoquer la directive (UE) 2024/825 du Parlement européen et du Conseil du 28 février 2024 modifiant les directives 2005/29/CE et 2011/83/UE pour donner aux consommateurs les moyens d'agir en faveur de la transition verte grâce à une meilleure protection contre les pratiques déloyales et grâce à une meilleure information, dont l'entrée en vigueur est postérieure à celle du décret attaqué.
7. En troisième lieu, selon son article 1er, le règlement n° 1223/2009 du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 relatif aux produits cosmétiques " établit des règles auxquelles doit satisfaire tout produit cosmétique mis à disposition sur le marché, afin de garantir le fonctionnement du marché intérieur et assurer un niveau élevé de protection de la santé humaine ". Aux termes de son article 9 : " Les États membres ne refusent pas, n'interdisent pas et ne restreignent pas, pour des raisons concernant les exigences contenues dans le présent règlement, la mise à disposition sur le marché des produits cosmétiques qui répondent aux prescriptions du présent règlement ". L'article 19 de ce règlement dispose que " les produits cosmétiques ne sont mis à disposition sur le marché que si le récipient et l'emballage des produits cosmétiques portent en caractères indélébiles, facilement lisibles et visibles " les mentions dont il établit la liste. L'article 20 dispose quant à lui que " 1. Pour l'étiquetage, la mise à disposition sur le marché et la publicité des produits cosmétiques, le texte, les dénominations, marques, images ou autres signes figuratifs ou non ne peuvent être utilisés pour attribuer à ces produits des caractéristiques ou des fonctions qu'ils ne possèdent pas (...) / Après consultation du CSSC ou de toute autre autorité compétente, la Commission adopte une liste de critères communs concernant les allégations pouvant être utilisées pour les produits cosmétiques, en conformité avec la procédure de réglementation avec contrôle visée à l'article 32, paragraphe 3, du présent règlement, en tenant compte des dispositions de la directive 2005/29/CE ". En application de ces dernières dispositions, la Commission a adopté le règlement n° 655/2013 du 10 juillet 2013 établissant les critères communs auxquels les allégations relatives aux produits cosmétiques doivent répondre pour pouvoir être utilisées.
8. Si les fédérations requérantes soutiennent que l'article L. 541-9-1 du code de l'environnement et le décret litigieux seraient incompatibles avec ces dispositions, il résulte des dispositions de l'article 1er du règlement du 30 novembre 2009 précité qu'il vise à garantir le fonctionnement du marché intérieur des produits cosmétiques en assurant un niveau élevé de protection de la santé humaine, tandis que les dispositions litigieuses ont pour objet d'améliorer la protection de l'environnement et la gestion des déchets, ainsi qu'il a été dit au point 2, notamment par l'amélioration de l'information des consommateurs de l'ensemble des produits neufs. Il résulte de ce qui précède que, dès lors que les dispositions litigieuses n'entrent pas dans le champ d'application du règlement du 30 novembre 2009 précité, le moyen tiré de leur incompatibilité avec les dispositions de ce règlement ne peut qu'être écarté.
9. En quatrième lieu, le règlement n° 648/2004 du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relatif aux détergents tend à établir des règles visant à assurer la libre circulation, dans le marché intérieur, des détergents et des agents de surface destinés à faire partie de détergents, tout en assurant un degré élevé de protection de l'environnement et de la santé humaine. Aux termes de son article 1er : " le règlement harmonise les règles suivantes de mise sur le marché des détergents et des agents de surface destinés à faire partie de détergents : / - biodégradabilité des agents de surface, - restrictions ou interdictions applicables aux agents de surface pour des raisons de biodégradabilité (...) ". Son article 11, relatif à l'étiquetage des produits, dispose notamment que : " 2. Les indications ci-après doivent figurer en caractères lisibles, visibles et indélébiles sur les emballages dans lesquels les détergents sont mis en vente à l'intention du consommateur: / a) la dénomination et la marque de fabrique/commerce du produit; / b) le nom ou la marque de fabrique/commerce ou la marque déposée et l'adresse complète ainsi que le numéro de téléphone du responsable de la mise sur le marché; / c) l'adresse, l'adresse de courrier électronique éventuelle et le numéro de téléphone auxquels la fiche visée à l'article 9, paragraphe 3, peut être obtenue. / Ces mêmes indications doivent figurer sur tous les documents d'accompagnement des détergents transportés en vrac. / 3. L'emballage des détergents indique le contenu conformément aux spécifications prévues à l'annexe VII, partie A. Il indique aussi le mode d'emploi et, le cas échéant, les précautions particulières à prendre ". L'article 14 de ce même règlement dispose que " 1. Les États membres s'abstiennent d'interdire, de restreindre ou d'entraver la mise à disposition sur le marché de détergents et/ou d'agents de surface destinés à faire partie de détergents, quand ces produits satisfont aux exigences du présent règlement, pour les raisons énumérées au présent règlement ".
10. Les dispositions de l'article L. 541-9-1 du code de l'environnement ont été adoptées afin, ainsi qu'il a été dit au point 2, de renforcer la protection de l'environnement. Il est constant que cette interdiction, qui porte sur les étiquettes des produits et emballages de produits divers dont font partie les détergents, n'est pas au nombre des exigences d'étiquetage énumérées par l'article 11 du règlement du 31 mars 2004 précité. Toutefois, ce réglement ne s'oppose pas à ce qu'un Etat-membre adopte, afin d'améliorer la protection de l'environnement, une interdiction globale des allégations environnementales trop générales pour être exactes ou pour être vérifiables, applicable à l'ensemble des produits neufs et non aux seuls détergents. Le moyen tiré de ce que les dispositions litigieuses méconnaîtraient les dispositions du règlement du 31 mars 2004 précité doit, par suite, être écarté.
11. En cinquième lieu, les articles 34 et 35 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne interdisent les restrictions quantitatives à l'importation et à l'exportation entre les États membres, ainsi que toutes mesures d'effet équivalent. Aux termes de l'article 36 du même traité, ces dispositions ne font cependant pas obstacle aux interdictions ou restrictions d'importation, d'exportation ou de transit " justifiées par des raisons de moralité publique, d'ordre public, de sécurité publique, de protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux ou de préservation des végétaux, de protection des trésors nationaux ayant une valeur artistique, historique ou archéologique ou de protection de la propriété industrielle et commerciale. Toutefois, ces interdictions ou restrictions ne doivent constituer ni un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée dans le commerce entre les États membres. " Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, d'une part, que la notion de " mesure d'effet équivalent " inclut toute réglementation commerciale des Etats membres susceptible d'entraver directement ou indirectement, actuellement ou potentiellement, le commerce intracommunautaire, et, d'autre part, qu'une réglementation nationale qui constitue une mesure d'effet équivalent à une restriction quantitatives est autorisée lorsqu'elle est indistinctement applicable aux produits nationaux et importés et qu'elle est nécessaire pour satisfaire à l'une des raisons d'intérêt général qu'elle retient ou à des exigences impératives, comme la protection de l'environnement. Les dispositions en cause doivent être propres à garantir la réalisation de l'objectif poursuivi et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour qu'il soit atteint.
12. Il ressort des pièces du dossier qu'en adoptant la mesure contestée, le législateur a poursuivi un objectif d'amélioration de la gestion des déchets et de réduction des abandons de ces déchets dans le milieu naturel, dans une perspective de renforcement de la protection de l'environnement, alors qu'il ressort de l'étude d'impact mentionnée au point 2, d'une part, que les normes définissant la biodégradabilité d'un produit ou d'une substance sont insuffisantes pour assurer la biodégradabilité complète de ces matières et, d'autre part, que les allégations environnementales telles que celles proscrites sont, en l'état de la technique, insusceptibles d'être vérifiées.
13. Si les fédérations requérantes font valoir que l'application de ces dispositions est de nature à entraîner des coûts importants, notamment en raison de la nécessité de fabriquer de nouveaux produits et emballages et de l'impossibilité d'écouler les stocks dans les délais prescrits par le III de l'article 3 du décret litigieux, les pièces du dossier ne permettent pas d'établir que, compte tenu des modalités de mise en œuvre des obligations prévues par le texte, qui comprennent un délai d'écoulement des stocks jusqu'au 1er janvier 2023, les coûts supplémentaires induits par la mesure litigieuse entraîneraient une charge disproportionnée pour les professionnels qu'elles représentent. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit au point 2, dès lors que l'interdiction litigieuse porte sur les allégations environnementales insusceptibles d'être vérifiées, telles que les mentions " biodégradable " ou " respectueux de l'environnement ", les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que les dispositions attaquées conduiraient à l'interdiction de toute allégation environnementale ou de tous les labels certifiant les qualités environnementales des produits. Il résulte de tout ce qui précède que les obligations ainsi imposées aux producteurs, qui sont justifiées par l'objectif de protection de l'environnement poursuivi, ne peuvent être regardées comme inadaptées ou comme allant au-delà des contraintes strictement nécessaires à l'atteinte de cet objectif. Il suit de là que le moyen tiré de ce que l'interdiction litigieuse constituerait une entrave injustifiée et disproportionnée à la libre circulation des marchandises, en méconnaissance des articles 34, 35 et 36 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, doit être écarté.
14. En sixième lieu, en prévoyant que l'interdiction s'applique aux mentions telles que " biodégradable " ou " respectueux de l'environnement " et aux allégations environnementales équivalentes, le législateur et le pouvoir réglementaire ont défini avec une précision suffisante le champ de l'interdiction qu'ils énoncent, qui s'applique à l'ensemble des allégations environnementales trop générales pour être exactes ou vérifiables. Il en résulte que les dispositions litigieuses sont dépourvues d'ambiguïté, et que le moyen tiré de ce qu'elles méconnaîtraient le principe de légalité des délits et des peines garanti par les stipulations de l'article 7 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, en tout état de cause, être écarté.
15. Il résulte de tout ce qui précède que la fédération de l'hygiène et de l'entretien responsable et la fédération des entreprises de la beauté ne sont pas fondées à demander l'annulation pour excès de pouvoir des dispositions du décret du 29 avril 2022 qu'elles attaquent. Par suite, leur requête doit être rejetée, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la fédération de l'hygiène et de l'entretien responsable et de la fédération des entreprises de la beauté est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la fédération de l'hygiène et de l'entretien responsable, à la fédération des entreprises de la beauté, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, et au Premier ministre.
Délibéré à l'issue de la séance du 15 mai 2024 où siégeaient : : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, M. Jean-Philippe Mochon, présidents de chambre ; Mme Sophie-Caroline de Margerie, M. Alain Seban, Mme Fabienne Lambolez, M. Cyril Roger-Lacan, M. Stéphane Hoynck, conseillers d'Etat et M. Antoine Berger, auditeur-rapporteur.
Rendu le 31 mai 2024.
Le président :
Signé : M. Rémy Schwartz
Le rapporteur :
Signé : M. Antoine Berger
La secrétaire :
Signé : Mme Laïla Kouas