Conseil d'État, 6ème chambre, 18/04/2024, 471141, Inédit au recueil Lebon
Conseil d'État, 6ème chambre, 18/04/2024, 471141, Inédit au recueil Lebon
Conseil d'État - 6ème chambre
- N° 471141
- ECLI:FR:CECHS:2024:471141.20240418
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
jeudi
18 avril 2024
- Rapporteur
- Mme Juliette Mongin
- Avocat(s)
- SARL CABINET BRIARD ; SCP MARLANGE, DE LA BURGADE
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu les procédures suivantes :
1° Sous le n° 471141, les communes de Tordères, Llauro, Montauriol, Villemolaque, Sainte Colombe de la Commanderie, Terrats, Caixas, Calmeilles, Castelnou et Trouillas ont demandé à la cour administrative d'appel de Toulouse d'annuler l'arrêté du 28 février 2020 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a délivré à la société Parc éolien de Passa l'autorisation environnementale d'exploiter une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent comprenant six éoliennes sur le territoire de la commune de Passa (Pyrénées-Orientales).
Par un arrêt n° 20TL02108 du 8 décembre 2022, la cour administrative d'appel de Toulouse a admis l'intervention de la commune de Tresserre et rejeté la requête de la commune de Tordères et autres.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 7 février 2023, 28 avril 2023 et 8 mars 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les communes de Tordères, Llauro, Montauriol, Villemolaque, Sainte Colombe de la Commanderie, Terrats, Caixas, Calmeilles, Castelnou, Trouillas et Tresserre demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur requête ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société Parc éolien de Passa la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° Sous le n° 471146, Mme R... C..., la Fédération pour les Espaces naturels et l'Environnement des Pyrénées-Orientales (FRENE 66), l'association " Collectif le vent tourne ", M. B... F..., M. G... P..., M. N... J..., M. B... L..., Mme K... M..., Mme T... D..., l'indivision I..., M. H... O..., Mme S... E... et M. A... Q... ont demandé à la cour administrative d'appel de Toulouse d'annuler l'arrêté du 28 février 2020 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a délivré à la société Parc éolien de Passa l'autorisation environnementale d'exploiter une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent comprenant six éoliennes sur le territoire de la commune de Passa (Pyrénées-Orientales).
Par un arrêt n° 20TL02085 du 8 décembre 2022, la cour administrative d'appel de Toulouse a rejeté leur requête.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 7 février 2023, 28 avril 2023 et 8 mars 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association " Collectif le Vent tourne ", l'association FRENE 66, Mme C..., M. F..., M. J..., M. L..., Mme M..., Mme D..., l'indivision I... et M. O... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur requête ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société Parc éolien de Passa la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Juliette Mongin, maîtresse des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de la commune de Tordères et autres, et de l'association " Collectif le Vent tourne " et autres, et à la Sarl cabinet Briard, avocat de la société Parc éolien de Passa ;
Vu les notes en délibéré, enregistrées le 20 mars 2024, présentées par la société Parc éolien de Passa ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces des dossiers soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 28 février 2020, le préfet des Pyrénées-Orientales a délivré à la société Parc éolien de Passa une autorisation environnementale pour l'exploitation d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent comprenant six éoliennes sur le territoire de la commune de Passa, tenant également lieu d'autorisation de défrichement et de dérogation " espèces et habitats protégés ". Cette dérogation concerne 81 espèces d'oiseaux, 23 de chiroptères, 4 d'amphibiens, 7 de reptiles, 1 d'insectes, 2 de mammifères terrestres et 1 espèce de flore. Par deux arrêts du 8 décembre 2022, la cour administrative d'appel de Toulouse a rejeté les demandes de l'association " Collectif le Vent tourne " et autres, d'une part, et de la commune de Tordères et autres, d'autre part, tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 28 février 2020. Par deux pourvois qu'il y a lieu de joindre pour statuer par une seule décision, l'association " Collectif le Vent tourne " et autres et la commune de Tordères et autres se pourvoient en cassation contre ces arrêts.
2. L'article L. 411-1 du code de l'environnement prévoit, lorsque les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation d'espèces animales non domestiques, l'interdiction de " 1° La destruction ou l'enlèvement des œufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d'animaux de ces espèces ou, qu'ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur détention, leur mise en vente, leur vente ou leur achat / 2° La destruction, la coupe, la mutilation, l'arrachage, la cueillette ou l'enlèvement de végétaux de ces espèces, de leurs fructifications ou de toute autre forme prise par ces espèces au cours de leur cycle biologique, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur mise en vente, leur vente ou leur achat, la détention de spécimens prélevés dans le milieu naturel ; / 3° La destruction, l'altération ou la dégradation de ces habitats naturels ou de ces habitats d'espèces (...) ". Le I de l'article L. 411-2 du même code renvoie à un décret en Conseil d'Etat la détermination des conditions dans lesquelles sont fixées, notamment : " 4° La délivrance de dérogations aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1, à condition qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante, pouvant être évaluée par une tierce expertise menée, à la demande de l'autorité compétente, par un organisme extérieur choisi en accord avec elle, aux frais du pétitionnaire, et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle : (...) / c) Dans l'intérêt de la santé et de la sécurité publiques ou pour d'autres raisons impératives d'intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, et pour des motifs qui comporteraient des conséquences bénéfiques primordiales pour l'environnement ; (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'un projet d'aménagement ou de construction d'une personne publique ou privée susceptible d'affecter la conservation d'espèces animales ou végétales protégées et de leurs habitats ne peut être autorisé, à titre dérogatoire, que s'il répond, par sa nature et compte tenu des intérêts économique et sociaux en jeu, à une raison impérative d'intérêt public majeur. En présence d'un tel intérêt, le projet ne peut cependant être autorisé, eu égard aux atteintes portées aux espèces protégées appréciées en tenant compte des mesures de réduction et de compensation prévues, que si, d'une part, il n'existe pas d'autre solution satisfaisante et, d'autre part, cette dérogation ne nuit pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle.
4. Il ressort des énonciations des arrêts attaqués qu'après avoir relevé que la production du parc éolien en projet correspond à l'équivalent de l'alimentation annuelle d'au moins 11 555 foyers soit 25 890 personnes, représentant l'équivalent d'environ 1,3 fois la consommation électrique de la population de la communauté de communes des Aspres, qui représente 19 808 habitants, la cour administrative d'appel a estimé que ce projet de construction d'un parc éolien participait à l'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre en favorisant le développement de la part des énergies renouvelables dans la production d'électricité en France. Elle en a déduit qu'il répondait à une raison impérative d'intérêt public majeur au sens du c) du I de l'article L. 411-2 du code de l'environnement. En statuant ainsi, alors que le projet de parc éolien n'apporterait qu'une contribution modeste à la politique énergétique nationale de développement de la part des énergies renouvelables dans la consommation finale d'énergie dans un département qui ne souffre d'aucune fragilité d'approvisionnement électrique et compte déjà un grand nombre de parcs éoliens, la cour a entaché les arrêts attaqués d'erreur de qualification juridique des faits.
5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens des pourvois, que les requérants sont fondés à demander l'annulation des arrêts attaqués.
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge solidaire de l'Etat et de la société Parc éolien de Passa le versement d'une somme de 3 000 euros, d'une part, à la commune de Tordères et autres, et d'autre part, à l'association " Collectif le Vent tourne " et autres.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Les arrêts de la cour administrative d'appel de Toulouse du 8 décembre 2022 sont annulés.
Article 2 : Les affaires sont renvoyées à la cour administrative d'appel de Toulouse.
Article 3 : L'Etat et la société Parc éolien de Passa verseront solidairement une somme de 3 000 euros, d'une part, à la commune de Tordères et autres, d'autre part, à l'association " Collectif le Vent tourne " et autres.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la commune de Tordères, première dénommée pour l'ensemble des requérantes du pourvoi n° 471141, à l'association " Collectif le Vent tourne ", première dénommée pour l'ensemble des requérants du pourvoi n° 471146, à la société Parc éolien de Passa et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Délibéré à l'issue de la séance du 14 mars 2024 où siégeaient : Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre, présidant ; M. Stéphane Hoynck, conseiller d'Etat et Mme Juliette Mongin, maîtresse des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.
Rendu le 18 avril 2024.
La présidente :
Signé : Mme Isabelle de Silva
La rapporteure :
Signé : Mme Juliette Mongin
La secrétaire :
Signé : Mme Valérie Peyrisse
ECLI:FR:CECHS:2024:471141.20240418
1° Sous le n° 471141, les communes de Tordères, Llauro, Montauriol, Villemolaque, Sainte Colombe de la Commanderie, Terrats, Caixas, Calmeilles, Castelnou et Trouillas ont demandé à la cour administrative d'appel de Toulouse d'annuler l'arrêté du 28 février 2020 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a délivré à la société Parc éolien de Passa l'autorisation environnementale d'exploiter une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent comprenant six éoliennes sur le territoire de la commune de Passa (Pyrénées-Orientales).
Par un arrêt n° 20TL02108 du 8 décembre 2022, la cour administrative d'appel de Toulouse a admis l'intervention de la commune de Tresserre et rejeté la requête de la commune de Tordères et autres.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 7 février 2023, 28 avril 2023 et 8 mars 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les communes de Tordères, Llauro, Montauriol, Villemolaque, Sainte Colombe de la Commanderie, Terrats, Caixas, Calmeilles, Castelnou, Trouillas et Tresserre demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur requête ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société Parc éolien de Passa la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° Sous le n° 471146, Mme R... C..., la Fédération pour les Espaces naturels et l'Environnement des Pyrénées-Orientales (FRENE 66), l'association " Collectif le vent tourne ", M. B... F..., M. G... P..., M. N... J..., M. B... L..., Mme K... M..., Mme T... D..., l'indivision I..., M. H... O..., Mme S... E... et M. A... Q... ont demandé à la cour administrative d'appel de Toulouse d'annuler l'arrêté du 28 février 2020 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a délivré à la société Parc éolien de Passa l'autorisation environnementale d'exploiter une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent comprenant six éoliennes sur le territoire de la commune de Passa (Pyrénées-Orientales).
Par un arrêt n° 20TL02085 du 8 décembre 2022, la cour administrative d'appel de Toulouse a rejeté leur requête.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 7 février 2023, 28 avril 2023 et 8 mars 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association " Collectif le Vent tourne ", l'association FRENE 66, Mme C..., M. F..., M. J..., M. L..., Mme M..., Mme D..., l'indivision I... et M. O... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur requête ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société Parc éolien de Passa la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Juliette Mongin, maîtresse des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de la commune de Tordères et autres, et de l'association " Collectif le Vent tourne " et autres, et à la Sarl cabinet Briard, avocat de la société Parc éolien de Passa ;
Vu les notes en délibéré, enregistrées le 20 mars 2024, présentées par la société Parc éolien de Passa ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces des dossiers soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 28 février 2020, le préfet des Pyrénées-Orientales a délivré à la société Parc éolien de Passa une autorisation environnementale pour l'exploitation d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent comprenant six éoliennes sur le territoire de la commune de Passa, tenant également lieu d'autorisation de défrichement et de dérogation " espèces et habitats protégés ". Cette dérogation concerne 81 espèces d'oiseaux, 23 de chiroptères, 4 d'amphibiens, 7 de reptiles, 1 d'insectes, 2 de mammifères terrestres et 1 espèce de flore. Par deux arrêts du 8 décembre 2022, la cour administrative d'appel de Toulouse a rejeté les demandes de l'association " Collectif le Vent tourne " et autres, d'une part, et de la commune de Tordères et autres, d'autre part, tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 28 février 2020. Par deux pourvois qu'il y a lieu de joindre pour statuer par une seule décision, l'association " Collectif le Vent tourne " et autres et la commune de Tordères et autres se pourvoient en cassation contre ces arrêts.
2. L'article L. 411-1 du code de l'environnement prévoit, lorsque les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation d'espèces animales non domestiques, l'interdiction de " 1° La destruction ou l'enlèvement des œufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d'animaux de ces espèces ou, qu'ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur détention, leur mise en vente, leur vente ou leur achat / 2° La destruction, la coupe, la mutilation, l'arrachage, la cueillette ou l'enlèvement de végétaux de ces espèces, de leurs fructifications ou de toute autre forme prise par ces espèces au cours de leur cycle biologique, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur mise en vente, leur vente ou leur achat, la détention de spécimens prélevés dans le milieu naturel ; / 3° La destruction, l'altération ou la dégradation de ces habitats naturels ou de ces habitats d'espèces (...) ". Le I de l'article L. 411-2 du même code renvoie à un décret en Conseil d'Etat la détermination des conditions dans lesquelles sont fixées, notamment : " 4° La délivrance de dérogations aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1, à condition qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante, pouvant être évaluée par une tierce expertise menée, à la demande de l'autorité compétente, par un organisme extérieur choisi en accord avec elle, aux frais du pétitionnaire, et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle : (...) / c) Dans l'intérêt de la santé et de la sécurité publiques ou pour d'autres raisons impératives d'intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, et pour des motifs qui comporteraient des conséquences bénéfiques primordiales pour l'environnement ; (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'un projet d'aménagement ou de construction d'une personne publique ou privée susceptible d'affecter la conservation d'espèces animales ou végétales protégées et de leurs habitats ne peut être autorisé, à titre dérogatoire, que s'il répond, par sa nature et compte tenu des intérêts économique et sociaux en jeu, à une raison impérative d'intérêt public majeur. En présence d'un tel intérêt, le projet ne peut cependant être autorisé, eu égard aux atteintes portées aux espèces protégées appréciées en tenant compte des mesures de réduction et de compensation prévues, que si, d'une part, il n'existe pas d'autre solution satisfaisante et, d'autre part, cette dérogation ne nuit pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle.
4. Il ressort des énonciations des arrêts attaqués qu'après avoir relevé que la production du parc éolien en projet correspond à l'équivalent de l'alimentation annuelle d'au moins 11 555 foyers soit 25 890 personnes, représentant l'équivalent d'environ 1,3 fois la consommation électrique de la population de la communauté de communes des Aspres, qui représente 19 808 habitants, la cour administrative d'appel a estimé que ce projet de construction d'un parc éolien participait à l'objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre en favorisant le développement de la part des énergies renouvelables dans la production d'électricité en France. Elle en a déduit qu'il répondait à une raison impérative d'intérêt public majeur au sens du c) du I de l'article L. 411-2 du code de l'environnement. En statuant ainsi, alors que le projet de parc éolien n'apporterait qu'une contribution modeste à la politique énergétique nationale de développement de la part des énergies renouvelables dans la consommation finale d'énergie dans un département qui ne souffre d'aucune fragilité d'approvisionnement électrique et compte déjà un grand nombre de parcs éoliens, la cour a entaché les arrêts attaqués d'erreur de qualification juridique des faits.
5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens des pourvois, que les requérants sont fondés à demander l'annulation des arrêts attaqués.
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge solidaire de l'Etat et de la société Parc éolien de Passa le versement d'une somme de 3 000 euros, d'une part, à la commune de Tordères et autres, et d'autre part, à l'association " Collectif le Vent tourne " et autres.
D E C I D E :
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Article 1er : Les arrêts de la cour administrative d'appel de Toulouse du 8 décembre 2022 sont annulés.
Article 2 : Les affaires sont renvoyées à la cour administrative d'appel de Toulouse.
Article 3 : L'Etat et la société Parc éolien de Passa verseront solidairement une somme de 3 000 euros, d'une part, à la commune de Tordères et autres, d'autre part, à l'association " Collectif le Vent tourne " et autres.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la commune de Tordères, première dénommée pour l'ensemble des requérantes du pourvoi n° 471141, à l'association " Collectif le Vent tourne ", première dénommée pour l'ensemble des requérants du pourvoi n° 471146, à la société Parc éolien de Passa et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Délibéré à l'issue de la séance du 14 mars 2024 où siégeaient : Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre, présidant ; M. Stéphane Hoynck, conseiller d'Etat et Mme Juliette Mongin, maîtresse des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.
Rendu le 18 avril 2024.
La présidente :
Signé : Mme Isabelle de Silva
La rapporteure :
Signé : Mme Juliette Mongin
La secrétaire :
Signé : Mme Valérie Peyrisse