Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 05/03/2024, 489189
Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 05/03/2024, 489189
Conseil d'État - 2ème - 7ème chambres réunies
- N° 489189
- ECLI:FR:CECHR:2024:489189.20240305
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
mardi
05 mars 2024
- Rapporteur
- M. Christophe Pourreau
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par une décision n° 2203936 du 27 octobre 2023, enregistrée le 2 novembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le tribunal administratif de Grenoble, avant de statuer sur la demande de M. J... F... tendant à l'annulation de la décision du 20 mai 2022 par laquelle le préfet de l'Isère a rejeté la demande d'autorisation de travail présentée à son profit par la société Italia Carrelage et à ce qu'il soit enjoint au préfet de l'Isère, à titre principal, de lui délivrer dans un délai de 15 jours une autorisation de travail, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation, a décidé, en application des dispositions de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier de cette demande au Conseil d'Etat, en soumettant à son examen les questions suivantes :
1°) une décision générée automatiquement adressée au nom du service instructeur d'une plateforme interrégionale de la main-d'œuvre étrangère et clôturant comme étant sans objet une demande d'autorisation de travail entre-t-elle dans le champ de l'article L. 212-2 du code des relations entre le public et l'administration '
2°) à défaut, y a-t-il lieu de considérer qu'une telle décision est réputée émaner du préfet désigné comme étant l'autorité compétente par l'article R. 5221-17 du code du travail '
3°) en cas de réponse négative aux deux précédentes questions, comment le juge administratif peut-il exercer son contrôle sur la compétence de l'auteur d'une décision générée automatiquement telle que celle en litige '
Des observations, enregistrées le 9 février 2024, ont été présentées par le ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code du travail ;
- l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 ;
- le code de justice administrative, notamment son article L. 113-1 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Christophe Pourreau, conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Dorothée Pradines, rapporteure publique ;
REND L'AVIS SUIVANT :
1. D'une part, aux termes du II de l'article 1er de l'ordonnance du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives : " Sont considérés, au sens de la présente ordonnance : / (...) 4° Comme téléservice, tout système d'information permettant aux usagers de procéder par voie électronique à des démarches ou formalités administratives ". Aux termes de l'article L. 112-9 du code des relations entre le public et l'administration : " L'administration met en place un ou plusieurs téléservices, dans le respect (...) des règles de sécurité et d'interopérabilité prévues aux chapitres IV et V de l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives. / (...) Lorsqu'elle a mis en place un téléservice réservé à l'accomplissement de certaines démarches administratives, une administration n'est régulièrement saisie par voie électronique que par l'usage de ce téléservice. (...) ". Aux termes de l'article L. 212-1 du même code : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci (...) ". Aux termes de l'article L. 212-2 du même code : " Sont dispensés de la signature de leur auteur, dès lors qu'ils comportent ses prénom, nom et qualité ainsi que la mention du service auquel celui-ci appartient, les actes suivants : / 1° Les décisions administratives qui sont notifiées au public par l'intermédiaire d'un téléservice conforme à l'article L. 112-9 (...) ".
2. D'autre part, en vertu des articles L. 5221-2, L. 5221-5, R. 5221-3 et R. 5221-20 du code du travail, pour exercer une activité professionnelle salariée en France, un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, titulaire d'un contrat de travail, doit détenir une autorisation de travail, qui est accordée au vu du respect de conditions qui tiennent notamment à la nature de l'emploi offert, au respect par l'employeur des conditions réglementaires d'exercice de son activité et à la rémunération proposée. En application du II de l'article R. 5221-1 et de l'article R. 5221-15 du même code, la demande d'autorisation de travail est adressée par l'employeur, au moyen d'un téléservice, au préfet du département du siège de l'établissement employeur. Enfin, en vertu de l'article R. 5221-17 du même code, la décision relative à la demande d'autorisation de travail est prise par le préfet et notifiée à l'employeur et à l'étranger.
3. Une telle décision, prise par le préfet ou par une personne disposant d'une délégation à cet effet, entre, en l'absence de texte législatif en disposant autrement, dans le champ d'application des articles L. 212-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration, relatifs à la signature des actes administratifs. Il en résulte que si sa notification par l'intermédiaire d'un téléservice permet, en vertu des dispositions précitées de l'article L. 212-2 de ce code, de déroger à l'obligation d'y faire figurer la signature de son auteur, elle ne dispense pas de l'obligation tenant à ce qu'elle comporte les prénom, nom et qualité de celui-ci ainsi que la mention du service auquel il appartient.
4. Le présent avis sera notifié au tribunal administratif de Grenoble, à M. J... F... et au préfet de l'Isère.
Il sera publié au Journal officiel de la République française.
Délibéré à l'issue de la séance du 12 février 2024 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. G... H..., M. Olivier Japiot, présidents de chambre ; Mme A... I..., M. D... L..., M. E... K..., M. Jean-Yves Ollier, conseillers d'Etat ; M. Christophe Pourreau, conseiller d'Etat-rapporteur et M. Frédéric Gueudar Delahaye, conseiller d'Etat.
Rendu le 5 mars 2024
Le président :
Signé : M. Pierre Collin
Le Conseiller d'Etat-Rapporteur :
Signé : M. Christophe Pourreau
La secrétaire :
Signé : Mme B... C...
ECLI:FR:CECHR:2024:489189.20240305
Par une décision n° 2203936 du 27 octobre 2023, enregistrée le 2 novembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le tribunal administratif de Grenoble, avant de statuer sur la demande de M. J... F... tendant à l'annulation de la décision du 20 mai 2022 par laquelle le préfet de l'Isère a rejeté la demande d'autorisation de travail présentée à son profit par la société Italia Carrelage et à ce qu'il soit enjoint au préfet de l'Isère, à titre principal, de lui délivrer dans un délai de 15 jours une autorisation de travail, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation, a décidé, en application des dispositions de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier de cette demande au Conseil d'Etat, en soumettant à son examen les questions suivantes :
1°) une décision générée automatiquement adressée au nom du service instructeur d'une plateforme interrégionale de la main-d'œuvre étrangère et clôturant comme étant sans objet une demande d'autorisation de travail entre-t-elle dans le champ de l'article L. 212-2 du code des relations entre le public et l'administration '
2°) à défaut, y a-t-il lieu de considérer qu'une telle décision est réputée émaner du préfet désigné comme étant l'autorité compétente par l'article R. 5221-17 du code du travail '
3°) en cas de réponse négative aux deux précédentes questions, comment le juge administratif peut-il exercer son contrôle sur la compétence de l'auteur d'une décision générée automatiquement telle que celle en litige '
Des observations, enregistrées le 9 février 2024, ont été présentées par le ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code du travail ;
- l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 ;
- le code de justice administrative, notamment son article L. 113-1 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Christophe Pourreau, conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Dorothée Pradines, rapporteure publique ;
REND L'AVIS SUIVANT :
1. D'une part, aux termes du II de l'article 1er de l'ordonnance du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives : " Sont considérés, au sens de la présente ordonnance : / (...) 4° Comme téléservice, tout système d'information permettant aux usagers de procéder par voie électronique à des démarches ou formalités administratives ". Aux termes de l'article L. 112-9 du code des relations entre le public et l'administration : " L'administration met en place un ou plusieurs téléservices, dans le respect (...) des règles de sécurité et d'interopérabilité prévues aux chapitres IV et V de l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives. / (...) Lorsqu'elle a mis en place un téléservice réservé à l'accomplissement de certaines démarches administratives, une administration n'est régulièrement saisie par voie électronique que par l'usage de ce téléservice. (...) ". Aux termes de l'article L. 212-1 du même code : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci (...) ". Aux termes de l'article L. 212-2 du même code : " Sont dispensés de la signature de leur auteur, dès lors qu'ils comportent ses prénom, nom et qualité ainsi que la mention du service auquel celui-ci appartient, les actes suivants : / 1° Les décisions administratives qui sont notifiées au public par l'intermédiaire d'un téléservice conforme à l'article L. 112-9 (...) ".
2. D'autre part, en vertu des articles L. 5221-2, L. 5221-5, R. 5221-3 et R. 5221-20 du code du travail, pour exercer une activité professionnelle salariée en France, un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, titulaire d'un contrat de travail, doit détenir une autorisation de travail, qui est accordée au vu du respect de conditions qui tiennent notamment à la nature de l'emploi offert, au respect par l'employeur des conditions réglementaires d'exercice de son activité et à la rémunération proposée. En application du II de l'article R. 5221-1 et de l'article R. 5221-15 du même code, la demande d'autorisation de travail est adressée par l'employeur, au moyen d'un téléservice, au préfet du département du siège de l'établissement employeur. Enfin, en vertu de l'article R. 5221-17 du même code, la décision relative à la demande d'autorisation de travail est prise par le préfet et notifiée à l'employeur et à l'étranger.
3. Une telle décision, prise par le préfet ou par une personne disposant d'une délégation à cet effet, entre, en l'absence de texte législatif en disposant autrement, dans le champ d'application des articles L. 212-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration, relatifs à la signature des actes administratifs. Il en résulte que si sa notification par l'intermédiaire d'un téléservice permet, en vertu des dispositions précitées de l'article L. 212-2 de ce code, de déroger à l'obligation d'y faire figurer la signature de son auteur, elle ne dispense pas de l'obligation tenant à ce qu'elle comporte les prénom, nom et qualité de celui-ci ainsi que la mention du service auquel il appartient.
4. Le présent avis sera notifié au tribunal administratif de Grenoble, à M. J... F... et au préfet de l'Isère.
Il sera publié au Journal officiel de la République française.
Délibéré à l'issue de la séance du 12 février 2024 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. G... H..., M. Olivier Japiot, présidents de chambre ; Mme A... I..., M. D... L..., M. E... K..., M. Jean-Yves Ollier, conseillers d'Etat ; M. Christophe Pourreau, conseiller d'Etat-rapporteur et M. Frédéric Gueudar Delahaye, conseiller d'Etat.
Rendu le 5 mars 2024
Le président :
Signé : M. Pierre Collin
Le Conseiller d'Etat-Rapporteur :
Signé : M. Christophe Pourreau
La secrétaire :
Signé : Mme B... C...