CAA de MARSEILLE, 1ère chambre, 01/02/2024, 22MA02362, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la délibération du 18 décembre 2018 par laquelle le conseil municipal de Saint-Rémy-de-Provence a approuvé le plan local d'urbanisme en tant qu'elle classe ses parcelles cadastrées AO n° 200, 467 et 84 en zones AU et N et en ce qu'elle instaure l'OAP Valat-neuf ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux du 13 février 2019.

Par un jugement n° 1905165 du 30 juin 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 26 août 2022, et un mémoire, enregistré le 2 mars 2023, M. B... A..., représenté par Me Faure-Bonaccorsi, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 30 juin 2022 ;

2°) d'annuler la délibération du 18 décembre 2018 par laquelle le conseil municipal de Saint-Rémy-de-Provence a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre à la commune de Saint-Rémy-de-Provence d'engager la procédure adéquate afin de procéder au reclassement de ses parcelles en zone U ou, à défaut, en zone AU, dans un délai de deux mois, le cas échéant sous astreinte ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Rémy-de-Provence la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les modifications apportées, à l'issue de l'enquête publique, au plan local d'urbanisme initialement soumis à cette enquête remettent en cause son économie générale et nécessitaient de procéder à une enquête publique complémentaire avant son approbation ;
- le classement en zone naturelle des parcelles cadastrées section AO n° 200 et n° 467 est entaché d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elles ne sont pas exposées à un risque d'inondation par les eaux de ruissellement.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 23 janvier 2023 et le 13 mars 2023, la commune de Saint-Rémy-de-Provence, représentée par Me Buffet, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à la mise en œuvre des dispositions de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme et à ce que soit mise à la charge de M. A... la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Claudé-Mougel,
- les conclusions de M. Quenette, rapporteur public,
- et les observations de Me Gonzales-Lopez, représentant M. A..., et celles de Me Marquet, représentant la commune de Saint-Rémy-de-Provence.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 18 décembre 2018, le conseil municipal de la commune de Saint-Rémy-de-Provence a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune. M. A... relève appel du jugement du 30 juin 2022 du tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette délibération en tant que le plan local d'urbanisme qu'elle approuve classe les parcelles cadastrées section AO n° 200 et 467 dont il est propriétaire en zone naturelle.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme : " A l'issue de l'enquête, le plan local d'urbanisme, éventuellement modifié pour tenir compte des avis qui ont été joints au dossier, des observations du public et du rapport du commissaire ou de la commission d'enquête, est approuvé par :/(...) 2°) le conseil municipal (...). " Il résulte de ces dispositions que le projet de plan ne peut subir de modifications, entre la date de sa soumission à l'enquête publique et celle de son approbation, qu'à la double condition que ces modifications ne remettent pas en cause l'économie générale du projet et qu'elles procèdent de l'enquête. Doivent être regardées comme procédant de l'enquête les modifications destinées à tenir compte des réserves et recommandations du commissaire enquêteur ou de la commission d'enquête, des observations du public et des avis émis par les autorités, collectivités et instances consultées et joints au dossier de l'enquête.

3. M. A... soutient que les modifications apportées au plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Rémy-de-Provence entre sa soumission à l'enquête publique et son approbation portant sur la suppression de certains emplacements réservés, la réduction de certaines zones, l'extension de la servitude de mixité sociale, la modification de la cartographie du risque inondation, des orientations d'aménagement et de programmation (OAP), des servitudes d'utilité publique et du règlement de ce plan, quant au lexique, aux conditions des constructions nouvelles en zone 1AU, des règles de hauteur et des habitations en zone économique, ainsi que sur la suppression des règles sur les exhaussements et les affouillements en zone naturelle, sont telles qu'elles en remettent en cause l'économie générale, en méconnaissant ainsi le principe rappelé au point 2. Toutefois, les suppressions d'emplacements réservés ne portent que sur deux bassins de rétention et la modification de voies d'accès sur une emprise de très faible ampleur, allant de 2 à 25 m². Contrairement à ce que soutient M. A..., le classement du secteur de la Massane n'a pas été modifié, en demeurant en zone AU, mais a été inclus dans la catégorie dite " classe d'enjeu " " autres zones urbanisées " qui ne constitue pas un zonage, à la suite de la suppression de la catégorie dites des " zones stratégiques de développement économique de la commune ", à la demande du préfet des Bouches-du-Rhône. A cet égard, il ne ressort pas des pièces du dossier que la cartographie du risque d'inondation dans ce secteur aurait été modifiée, et l'appelant n'allègue pas même que la nature de ce risque aurait été modifiée du fait de ce changement de classe d'enjeu, ou était différent de celui attaché à ces zones stratégiques de développement économique. S'agissant de l'intégration d'une zone 2AUgv au sein de la zone AU du secteur du Chalamon, elle est destinée à la création d'une aire d'accueil des gens du voyage d'une surface de 0,5 hectares, constituant une modification par conséquent très limitée, comme l'est l'ajout de prescriptions relatives à la réalisation d'aménagements hydrauliques dans cette zone qui n'a pas pour effet de la rendre inconstructible. Il en est de même de l'identification du vallon des Portanieu en tant que zone visuellement sensible, sans changement de zonage. Quant à l'intégration du secteur de Saint Paul en zone agricole, alors qu'il relevait de la zone Uda dans le plan soumis à enquête publique, il porte sur des parcelles d'une surface de 3,9 hectares, représentant 0,05 % du territoire de la commune. Par ailleurs, l'extension de la servitude de mixité sociale, consistant à imposer 25 % de logements sociaux à la zone AU ne peut être regardée comme remettant en cause l'économie générale du projet soumis à enquête, alors que cette servitude s'appliquait déjà, dans ce projet, aux zones UB, UC et UD, et que son extension est seulement destinée à améliorer les objectifs de la commune en la matière, en réponse également à une réserve du préfet, et suivant les objectifs affichés par le plan d'aménagement et de développement durable soumis à enquête. Si M. A... soutient encore qu'au sein des OAP, des cheminements doux ont été intégrés, la trame verte et bleue a été modifiée et qu'un reclassement en espaces boisés classés a été opéré, ces changements demeurent également d'une ampleur limitée, de même que ceux portant sur les servitudes d'utilité publique, au sujet desquels la commune fait d'ailleurs valoir sans être contredite qu'elles étaient déjà intégrées au projet soumis à enquête. Sont également d'ampleur limitée les modifications du lexique et de dispositions générales dans le règlement, la modification de la réglementation des habitations en zone économique, de celle relative aux annexes et aux extensions, la suppression des dispositions relatives aux affouillements et exhaussements en zone A et N, dont l'appelant, au demeurant, ne précise ni la consistance, ni l'ampleur. Enfin, la baisse de la hauteur maximale autorisée en zone AU consiste seulement à abaisser cette hauteur de 12 à 9 mètres. Ainsi, prises ensemble ou séparément, les modifications du plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Rémy-de-Provence dont fait état M. A..., intervenues à la suite de l'enquête publique, et toutes destinées à prendre en compte les réserves du préfet des Bouches-du-Rhône et les observations du commissaire enquêteur et des avis émis par les autorités, collectivités et instances consultées ne remettent pas en cause l'économie générale du projet soumis à enquête. Ce moyen doit donc être écarté.

4. En second lieu, aux termes de l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison :1° Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ;2° Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; 3° Soit de leur caractère d'espaces naturels ; 4° Soit de la nécessité de préserver ou restaurer les ressources naturelles ; 5° Soit de la nécessité de prévenir les risques notamment d'expansion des crues. ".

5. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. S'ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des différents secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, leur appréciation peut cependant être censurée par le juge administratif au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

6. Il ressort des pièces du dossier que le classement en zone naturelle des parcelles cadastrées section AO n° 200 et n° 467 appartenant à M. A... résulte du risque d'inondation par ruissellement, identifié dans la partie Est du site dit C... à partir de l'atlas régional des zones inondables et d'études complémentaires réalisées notamment dans le cadre de l'élaboration du plan local d'urbanisme. Contrairement à ce que soutient M. A..., la cartographie de l'aléa ruissellement pluvial annexée à l'étude de caractérisation du ruissellement centennal, laquelle croise la hauteur d'eau possible avec sa vitesse d'écoulement pour caractériser le risque pour un individu d'être emporté lors d'une période de forte pluie, fait apparaître un aléa fort et modéré sur les parcelles en cause, selon un axe Sud-Nord. Si M. A... soutient que ces parcelles présentent une déclivité empêchant l'eau de ruisseler vers l'intérieur du terrain, il ne l'établit pas alors qu'il ressort de la carte de ruissellement que le terrain est en forte pente du Sud vers le Nord, avec une déclivité d'une dizaine de mètres, en présentant de légères ruptures de pente de niveau créant une concentration de l'eau. S'il soutient, en outre que ces parcelles sont bordées, au Nord, le long de l'avenue Denis Pelissier, et à l'Est, de fossés destinés à canaliser et à évacuer les eaux de ruissellement, ceux-ci sont situés le long du chemin C... alors que les chemins de ruissellement se situent plus à l'Ouest. Alors enfin que les parcelles cadastrées section AO 200 et AO 467 ne supportent aucune construction, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le classement de la première et de la partie Est de la seconde en zone naturelle serait fondé sur des faits matériellement inexacts, ou entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 18 décembre 2018 du conseil municipal de la commune de Saint-Rémy-de-Provence en ce que le plan local d'urbanisme qu'elle approuve classe les parcelles cadastrées section AO n° 200 et n° 467 en zone naturelle.

Sur les frais liés au litige :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de laisser à chacune des parties la charge des frais qu'elles ont exposés dans la présente instance et non compris dans les dépens.


D É C I D E
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Rémy-de-Provence fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de Saint-Rémy-de-Provence.
Délibéré après l'audience du 18 janvier 2024, où siégeaient :

- M. Portail, président,
- M. D..., vice-président,
- M. Claudé-Mougel, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er février 2024.
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N° 22MA02362




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