CAA de MARSEILLE, 3ème chambre, 18/01/2024, 23MA00053, Inédit au recueil Lebon
CAA de MARSEILLE, 3ème chambre, 18/01/2024, 23MA00053, Inédit au recueil Lebon
CAA de MARSEILLE - 3ème chambre
- N° 23MA00053
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
jeudi
18 janvier 2024
- Président
- Mme PAIX
- Rapporteur
- Mme Florence MASTRANTUONO
- Avocat(s)
- DARMON
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 12 mai 2022 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2202722 du 29 décembre 2022, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 9 janvier 2023, M. A..., représenté par Me Darmon, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 29 décembre 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 12 mai 2022 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) à défaut, de lui enjoindre de réexaminer sa demande de titre de séjour sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision de refus de séjour méconnait les articles L. 421-1 et R. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;
- la décision portant refus de séjour a été prise en méconnaissance de l'article 6-1° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le préfet a méconnu la circulaire ministérielle du 28 novembre 2012.
La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Mastrantuono a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant algérien né en 1970, relève appel du jugement du 29 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 mai 2022 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Sur la légalité de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 12 mai 2022 :
2. En soutenant que le préfet a méconnu l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatif à la délivrance de la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", M. A..., dont la situation au regard du séjour relève de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, doit être regardé comme soutenant que le préfet a méconnu l'article 7-b) de cet accord, aux termes duquel : " (...) Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat visé par les services du ministère chargé de l'emploi, un certificat de résidence valable un an pour toutes professions et toutes régions, renouvelable et portant la mention " salarié " (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui a présenté une demande de changement de statut de " commerçant " à " salarié ", et travaille en qualité de livreur en vertu d'un contrat de travail à durée indéterminée conclu avec la société Royal Food le 2 mars 2018, modifié par un avenant du 5 novembre 2019, bénéficie d'une autorisation de travail à ce titre, accordée le 21 mars 2022. L'obtention de cette autorisation par son employeur, moins de deux mois avant la date de l'arrêté en litige, faisait obstacle à ce que le préfet refuse la délivrance du titre de séjour sollicité au motif que l'intéressé n'a ni produit l'autorisation de travail prévue notamment par l'article L. 5221-2 du code du travail, ni justifié de la présentation d'une demande d'autorisation de travail par son employeur. Dans ces conditions, M. A... est fondé à soutenir qu'en rejetant sa demande de titre de séjour en qualité de salarié, le préfet a méconnu les stipulations de l'article 7-b) de l'accord franco-algérien.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Le jugement en litige et l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 12 mai 2022 doivent par suite être annulés.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution (...) ".
6. Il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à M. A... un certificat de résidence algérien d'une durée d'un an portant la mention " salarié " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, en revanche, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à M. A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n°2202722 du 29 décembre 2022 du tribunal administratif de Nice et l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 12 mai 2022 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à M. A... un certificat de résidence algérien d'une durée d'un an portant la mention " salarié " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Nice.
Délibéré après l'audience du 21 décembre 2023, où siégeaient :
- Mme Paix, présidente,
- M. Platillero, président assesseur,
- Mme Mastrantuono, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 janvier 2024.
2
N° 23MA00053
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 12 mai 2022 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2202722 du 29 décembre 2022, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 9 janvier 2023, M. A..., représenté par Me Darmon, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 29 décembre 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 12 mai 2022 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) à défaut, de lui enjoindre de réexaminer sa demande de titre de séjour sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision de refus de séjour méconnait les articles L. 421-1 et R. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;
- la décision portant refus de séjour a été prise en méconnaissance de l'article 6-1° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le préfet a méconnu la circulaire ministérielle du 28 novembre 2012.
La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Mastrantuono a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant algérien né en 1970, relève appel du jugement du 29 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 mai 2022 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Sur la légalité de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 12 mai 2022 :
2. En soutenant que le préfet a méconnu l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatif à la délivrance de la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", M. A..., dont la situation au regard du séjour relève de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, doit être regardé comme soutenant que le préfet a méconnu l'article 7-b) de cet accord, aux termes duquel : " (...) Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat visé par les services du ministère chargé de l'emploi, un certificat de résidence valable un an pour toutes professions et toutes régions, renouvelable et portant la mention " salarié " (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui a présenté une demande de changement de statut de " commerçant " à " salarié ", et travaille en qualité de livreur en vertu d'un contrat de travail à durée indéterminée conclu avec la société Royal Food le 2 mars 2018, modifié par un avenant du 5 novembre 2019, bénéficie d'une autorisation de travail à ce titre, accordée le 21 mars 2022. L'obtention de cette autorisation par son employeur, moins de deux mois avant la date de l'arrêté en litige, faisait obstacle à ce que le préfet refuse la délivrance du titre de séjour sollicité au motif que l'intéressé n'a ni produit l'autorisation de travail prévue notamment par l'article L. 5221-2 du code du travail, ni justifié de la présentation d'une demande d'autorisation de travail par son employeur. Dans ces conditions, M. A... est fondé à soutenir qu'en rejetant sa demande de titre de séjour en qualité de salarié, le préfet a méconnu les stipulations de l'article 7-b) de l'accord franco-algérien.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Le jugement en litige et l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 12 mai 2022 doivent par suite être annulés.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution (...) ".
6. Il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à M. A... un certificat de résidence algérien d'une durée d'un an portant la mention " salarié " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, en revanche, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à M. A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n°2202722 du 29 décembre 2022 du tribunal administratif de Nice et l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 12 mai 2022 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à M. A... un certificat de résidence algérien d'une durée d'un an portant la mention " salarié " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Nice.
Délibéré après l'audience du 21 décembre 2023, où siégeaient :
- Mme Paix, présidente,
- M. Platillero, président assesseur,
- Mme Mastrantuono, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 janvier 2024.
2
N° 23MA00053