Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 22/12/2023, 472933
Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 22/12/2023, 472933
Conseil d'État - 7ème - 2ème chambres réunies
- N° 472933
- ECLI:FR:CECHR:2023:472933.20231222
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
vendredi
22 décembre 2023
- Rapporteur
- M. Alexandre Adam
- Avocat(s)
- SCP GURY & MAITRE
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler le titre de pension du 14 octobre 2019 dont il a reçu notification, en tant qu'il n'a pas été tenu compte, pour le calcul de sa pension, des services qu'il a effectués du 14 octobre 2017 au 13 octobre 2019, ainsi que la décision implicite du service des retraites de l'Etat rejetant son recours gracieux, et d'enjoindre à ce service de prendre en compte ces services et d'en tirer les conséquences sur le calcul du montant de sa pension de retraite à compter du 14 octobre 2019.
Par un jugement n° 2001924 du 10 février 2023, ce tribunal a fait droit à sa demande.
Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 11 avril et 20 octobre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande au Conseil d'Etat d'annuler ce jugement.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Alexandre Adam, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Nicolas Labrune, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gury et Maître, avocat de M. A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A..., agent technique principal d'accueil, de surveillance et de magasinage du ministère de la culture, né en 1951, qui a atteint la limite d'âge de son grade, fixée à soixante-cinq ans et quatre mois, le 14 avril 2017, a déposé, le 19 septembre 2016, une demande de prolongation d'activité sur le fondement de l'article 1-1 de la loi du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public. Par une décision du 21 novembre 2016, la ministre de la culture a fait droit à cette demande dans la limite de deux trimestres en précisant que, conformément à cet article, il pourrait présenter, six mois avant l'échéance de la prolongation ainsi accordée, une nouvelle demande de prolongation d'activité dans la limite du nombre de trimestres auquel ces dispositions lui donnaient droit. Ayant usé de cette faculté, M. A... a bénéficié au total de cinq autorisations de prolongation d'activité de deux trimestres chacune puis a été radié des cadres et admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 14 octobre 2019. Pour le calcul de ses droits à pension, le service des retraites de l'Etat a refusé de prendre en compte les huit derniers trimestres effectués dans le cadre de ces prolongations successives d'activité. Par un jugement du 10 février 2023, contre lequel le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de Paris a annulé le titre de pension du 14 octobre 2019 en tant qu'il ne prend pas en compte, pour le calcul de la pension de M. A..., les services effectués, pendant la prolongation d'activité, du 14 octobre 2017 au 13 octobre 2019 et a enjoint au service des pensions de l'Etat de reconstituer les droits à pension de M. A... en prenant en compte ces services.
2. Aux termes de l'article 1-1 de la loi du 13 septembre 1984, alors applicable : " Sous réserve des droits au recul des limites d'âge reconnus au titre des dispositions de la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté, les fonctionnaires dont la durée des services liquidables est inférieure à celle définie à l'article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite peuvent, lorsqu'ils atteignent les limites d'âge applicables aux corps auxquels ils appartiennent, sur leur demande, sous réserve de l'intérêt du service et de leur aptitude physique, être maintenus en activité. / La prolongation d'activité prévue à l'alinéa précédent ne peut avoir pour effet de maintenir le fonctionnaire concerné en activité au-delà de la durée des services liquidables prévue à l'article L. 13 du même code ni au-delà d'une durée de dix trimestres. / Cette prolongation d'activité est prise en compte au titre de la constitution et de la liquidation du droit à pension ".
3. Il résulte de ces dispositions que lorsqu'un agent a obtenu, avant la survenance de la limite d'âge, l'autorisation de prolonger son activité au-delà de celle-ci, l'administration peut, sous réserve de l'intérêt du service et de son aptitude physique, lui accorder, y compris après la limite d'âge, d'autres autorisations successives de prolongation d'activité, dans la limite globale de dix trimestres, dès lors que chacune de ces décisions intervient avant la rupture du lien de l'agent avec le service sans avoir pour effet de le maintenir en activité au-delà de la durée des services nécessaire à l'obtention du pourcentage maximum de la pension.
4. Il suit de là qu'après avoir relevé que chacune des autorisations successives de prolongation d'activité accordées à M. A..., pour un total de dix trimestres et sans qu'elles aient pour effet de le maintenir en activité au-delà de la durée de service prévue par l'article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite, était intervenue avant la rupture de son lien avec le service, le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que l'Etat était tenu de prendre en compte l'ensemble des périodes correspondantes pour la détermination des droits à pension de l'intéressé, alors même qu'une partie de ces autorisations lui avaient été accordées après la survenance de sa limite d'âge.
5. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à M. A... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à M. B... A....
ECLI:FR:CECHR:2023:472933.20231222
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler le titre de pension du 14 octobre 2019 dont il a reçu notification, en tant qu'il n'a pas été tenu compte, pour le calcul de sa pension, des services qu'il a effectués du 14 octobre 2017 au 13 octobre 2019, ainsi que la décision implicite du service des retraites de l'Etat rejetant son recours gracieux, et d'enjoindre à ce service de prendre en compte ces services et d'en tirer les conséquences sur le calcul du montant de sa pension de retraite à compter du 14 octobre 2019.
Par un jugement n° 2001924 du 10 février 2023, ce tribunal a fait droit à sa demande.
Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 11 avril et 20 octobre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande au Conseil d'Etat d'annuler ce jugement.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Alexandre Adam, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Nicolas Labrune, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gury et Maître, avocat de M. A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A..., agent technique principal d'accueil, de surveillance et de magasinage du ministère de la culture, né en 1951, qui a atteint la limite d'âge de son grade, fixée à soixante-cinq ans et quatre mois, le 14 avril 2017, a déposé, le 19 septembre 2016, une demande de prolongation d'activité sur le fondement de l'article 1-1 de la loi du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public. Par une décision du 21 novembre 2016, la ministre de la culture a fait droit à cette demande dans la limite de deux trimestres en précisant que, conformément à cet article, il pourrait présenter, six mois avant l'échéance de la prolongation ainsi accordée, une nouvelle demande de prolongation d'activité dans la limite du nombre de trimestres auquel ces dispositions lui donnaient droit. Ayant usé de cette faculté, M. A... a bénéficié au total de cinq autorisations de prolongation d'activité de deux trimestres chacune puis a été radié des cadres et admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 14 octobre 2019. Pour le calcul de ses droits à pension, le service des retraites de l'Etat a refusé de prendre en compte les huit derniers trimestres effectués dans le cadre de ces prolongations successives d'activité. Par un jugement du 10 février 2023, contre lequel le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de Paris a annulé le titre de pension du 14 octobre 2019 en tant qu'il ne prend pas en compte, pour le calcul de la pension de M. A..., les services effectués, pendant la prolongation d'activité, du 14 octobre 2017 au 13 octobre 2019 et a enjoint au service des pensions de l'Etat de reconstituer les droits à pension de M. A... en prenant en compte ces services.
2. Aux termes de l'article 1-1 de la loi du 13 septembre 1984, alors applicable : " Sous réserve des droits au recul des limites d'âge reconnus au titre des dispositions de la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté, les fonctionnaires dont la durée des services liquidables est inférieure à celle définie à l'article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite peuvent, lorsqu'ils atteignent les limites d'âge applicables aux corps auxquels ils appartiennent, sur leur demande, sous réserve de l'intérêt du service et de leur aptitude physique, être maintenus en activité. / La prolongation d'activité prévue à l'alinéa précédent ne peut avoir pour effet de maintenir le fonctionnaire concerné en activité au-delà de la durée des services liquidables prévue à l'article L. 13 du même code ni au-delà d'une durée de dix trimestres. / Cette prolongation d'activité est prise en compte au titre de la constitution et de la liquidation du droit à pension ".
3. Il résulte de ces dispositions que lorsqu'un agent a obtenu, avant la survenance de la limite d'âge, l'autorisation de prolonger son activité au-delà de celle-ci, l'administration peut, sous réserve de l'intérêt du service et de son aptitude physique, lui accorder, y compris après la limite d'âge, d'autres autorisations successives de prolongation d'activité, dans la limite globale de dix trimestres, dès lors que chacune de ces décisions intervient avant la rupture du lien de l'agent avec le service sans avoir pour effet de le maintenir en activité au-delà de la durée des services nécessaire à l'obtention du pourcentage maximum de la pension.
4. Il suit de là qu'après avoir relevé que chacune des autorisations successives de prolongation d'activité accordées à M. A..., pour un total de dix trimestres et sans qu'elles aient pour effet de le maintenir en activité au-delà de la durée de service prévue par l'article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite, était intervenue avant la rupture de son lien avec le service, le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que l'Etat était tenu de prendre en compte l'ensemble des périodes correspondantes pour la détermination des droits à pension de l'intéressé, alors même qu'une partie de ces autorisations lui avaient été accordées après la survenance de sa limite d'âge.
5. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à M. A... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à M. B... A....