Conseil d'État, 4ème - 1ère chambres réunies, 31/10/2023, 467870
Conseil d'État, 4ème - 1ère chambres réunies, 31/10/2023, 467870
Conseil d'État - 4ème - 1ère chambres réunies
- N° 467870
- ECLI:FR:CECHR:2023:467870.20231031
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
mardi
31 octobre 2023
- Rapporteur
- M. Julien Fradel
- Avocat(s)
- SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER ; HAAS
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
La société Kookaï a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 6 septembre 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a fixé le montant des honoraires exigibles par le cabinet Boisseau au titre de l'expertise du projet de licenciement collectif pour motif économique de la société et de l'assistance aux organisations syndicales. Par une ordonnance n° 2201018/3-1 du 14 mars 2022, la présidente de la 3ème section du tribunal administratif a rejeté cette demande.
Par un arrêt n° 22PA02256 du 29 juillet 2022, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la société Kookaï contre cette ordonnance.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 29 septembre et 29 décembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Kookaï demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa requête d'appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du travail ;
- l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Julien Fradel, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Jean-François de Montgolfier, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de la société Kookaï et à Maître Haas, avocat du cabinet Boisseau ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'un projet de réorganisation et un projet de plan de sauvegarde de l'emploi ont été présentés au comité social et économique de la société Kookaï le 19 février 2021. Par une délibération du même jour, le comité social et économique de la société Kookaï a décidé de recourir à l'assistance d'un expert-comptable, en application de l'article L. 1233-34 du code du travail, et a mandaté à cette fin le cabinet d'expertise comptable Boisseau. Par courriel du 29 mars 2021, la société Kookaï a informé le cabinet Boisseau de la suspension de son projet de licenciement collectif. Lors d'une réunion extraordinaire, le 30 juillet 2021, du comité social et économique, la société Kookaï a informé celui-ci de la reprise de ce projet. Par lettres du 31 juillet 2021, le cabinet Boisseau a communiqué à l'employeur ses honoraires prévisionnels actualisés d'un montant de 151 500 euros hors taxes au titre de sa mission d'assistance auprès du comité, et d'un montant de 14 520 euros hors taxes au titre de sa mission d'assistance auprès des organisations syndicales dans le cadre de la négociation d'un accord collectif majoritaire fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi. Saisi d'une contestation de la société Kookaï sur le fondement de l'article L. 1233-35-1 du code du travail, le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a, par une décision du
6 septembre 2021, ramené le montant des honoraires prévisionnels exigibles par le cabinet Boisseau à 115 050 euros hors taxes au titre de sa mission d'assistance auprès du comité social et économique, et à 9 000 euros hors taxes au titre de sa mission d'assistance auprès des organisations syndicales. Par une décision du 17 novembre 2021, le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a validé l'accord collectif majoritaire fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi signé le 27 octobre 2021. Par une ordonnance du 14 mars 2022, la présidente de la 3ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté, comme tardive, la demande de la société Kookaï tendant à l'annulation de la décision du 6 septembre 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a fixé le montant des honoraires prévisionnels exigibles par le cabinet Boisseau. Par un arrêt du
29 juillet 2022, contre lequel la société Kookaï se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la société contre cette ordonnance, en substituant au motif d'irrecevabilité retenu dans celle-ci celui tiré de ce que les conclusions de la société Kookaï tendant à l'annulation de la décision du 6 septembre 2021 ne pouvaient faire l'objet d'un litige distinct de celui relatif à la contestation de la décision du 17 novembre 2021 de validation de l'accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi de la société.
2. D'une part, aux termes de l'article L. 1233-34 du code du travail : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, le comité social et économique peut, le cas échéant sur proposition des commissions constituées en son sein, décider, lors de la première réunion prévue à l'article L. 1233-30, de recourir à une expertise pouvant porter sur les domaines économique et comptable ainsi que sur la santé, la sécurité ou les effets potentiels du projet sur les conditions de travail. / (...) / Le comité social et économique peut également mandater un expert afin qu'il apporte toute analyse utile aux organisations syndicales pour mener la négociation prévue à l'article L. 1233-24-1. / (...) ", laquelle a pour objet la signature d'un accord collectif déterminant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi.
3. D'autre part, l'article L. 2135-86 du code du travail prévoit que le juge judiciaire est compétent pour connaître des recours formés par l'employeur relativement aux expertises décidées par le comité social et économique, " sauf dans le cas prévu à l'article L. 1233-35-1 ". Aux termes de l'article L. 1233-35-1 du même code, créé par l'ordonnance du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et à la sécurisation des relations de travail : " Toute contestation relative à l'expertise est adressée, avant transmission de la demande de validation [de l'accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi] ou d'homologation [du document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi] prévue à l'article L. 1233-57-4, à l'autorité administrative, qui se prononce dans un délai de cinq jours. Cette décision peut être contestée dans les conditions prévues à l'article L. 1235-7-1. ".
4. Enfin, aux termes de l'article L. 1235-7-1 de ce code : " L'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1, le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, les décisions prises par l'administration au titre de l'article L. 1233-57-5 et la régularité de la procédure de licenciement collectif ne peuvent faire l'objet d'un litige distinct de celui relatif à la décision de validation ou d'homologation mentionnée à l'article L. 1233-57-4. / Ces litiges relèvent de la compétence, en premier ressort, du tribunal administratif, à l'exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux. / Le recours est présenté dans un délai de deux mois par l'employeur à compter de la notification de la décision de validation ou d'homologation, et par les organisations syndicales et les salariés à compter de la date à laquelle cette décision a été portée à leur connaissance conformément à l'article L. 1233-57-4. / Le tribunal administratif statue dans un délai de trois mois. Si, à l'issue de ce délai, il ne s'est pas prononcé ou en cas d'appel, le litige est porté devant la cour administrative d'appel, qui statue dans un délai de trois mois. Si, à l'issue de ce délai, elle ne s'est pas prononcée ou en cas de pourvoi en cassation, le litige est porté devant le Conseil d'Etat. / Le livre V du code de justice administrative est applicable. ".
5. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que l'employeur est recevable à contester devant le juge administratif la décision de l'administration se prononçant sur le montant des honoraires prévisionnels de l'expert mandaté par le comité social et économique sur le fondement des dispositions de l'article L. 1233-34 du code du travail, cité au point 2, y compris en l'absence de litige relatif à la décision de validation de l'accord collectif ou d'homologation du document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi. Dans cette dernière hypothèse, si la contestation de la décision de l'administration portant sur le montant des honoraires prévisionnels de l'expertise doit, en vertu des dispositions de l'article L. 1235-7-1 du même code, citées au point 4, auxquelles renvoie l'article L. 1233-35-1 de ce code, cité au point 3, être formée dans le délai de deux mois à compter de la notification à l'employeur de la décision de validation ou d'homologation auprès du tribunal administratif compétent pour connaître d'un litige relatif à cette dernière décision, le tribunal administratif n'est pas tenu de statuer sur cette contestation autonome dans un délai de trois mois.
6. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué qu'après avoir relevé que la décision du 17 novembre 2021 validant l'accord collectif majoritaire fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de la société Kookaï n'avait pas été contestée devant le juge administratif, la cour administrative d'appel de Paris a jugé que, dès lors que la contestation de la décision administrative se prononçant sur le montant des honoraires prévisionnels de l'expert mandaté en application de l'article L. 1233-34 du code du travail ne peut faire l'objet d'un litige distinct de celui tendant à l'annulation de la décision de validation de l'accord collectif ou d'homologation du document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi, la demande de la société Kookaï, qui ne contestait que la décision administrative relative aux honoraires prévisionnels du cabinet d'expertise mandaté dans le cadre de l'élaboration de son plan de sauvegarde de l'emploi, n'était pas recevable. En statuant ainsi, la cour a, eu égard à ce qui a été dit au point 5, commis une erreur de droit.
7. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen de son pourvoi, la société Kookaï est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la société Kookaï qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à la société Kookaï au titre des mêmes dispositions.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt du 29 juillet 2022 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris.
Article 3 : L'Etat versera à la société Kookaï une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par le cabinet Boisseau au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Kookaï, au cabinet Boisseau et au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.
Copie pour information sera transmise à la SELARLU Ascagne AJ, en la personne de Me Julie Lavoir, et à la SELARL AJRS, en la personne de Me Catherine Poli, en leur qualité d'administrateurs judiciaires de la société Kookaï avec pour mission d'assister.
ECLI:FR:CECHR:2023:467870.20231031
La société Kookaï a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 6 septembre 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a fixé le montant des honoraires exigibles par le cabinet Boisseau au titre de l'expertise du projet de licenciement collectif pour motif économique de la société et de l'assistance aux organisations syndicales. Par une ordonnance n° 2201018/3-1 du 14 mars 2022, la présidente de la 3ème section du tribunal administratif a rejeté cette demande.
Par un arrêt n° 22PA02256 du 29 juillet 2022, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la société Kookaï contre cette ordonnance.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 29 septembre et 29 décembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Kookaï demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa requête d'appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du travail ;
- l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Julien Fradel, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Jean-François de Montgolfier, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de la société Kookaï et à Maître Haas, avocat du cabinet Boisseau ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'un projet de réorganisation et un projet de plan de sauvegarde de l'emploi ont été présentés au comité social et économique de la société Kookaï le 19 février 2021. Par une délibération du même jour, le comité social et économique de la société Kookaï a décidé de recourir à l'assistance d'un expert-comptable, en application de l'article L. 1233-34 du code du travail, et a mandaté à cette fin le cabinet d'expertise comptable Boisseau. Par courriel du 29 mars 2021, la société Kookaï a informé le cabinet Boisseau de la suspension de son projet de licenciement collectif. Lors d'une réunion extraordinaire, le 30 juillet 2021, du comité social et économique, la société Kookaï a informé celui-ci de la reprise de ce projet. Par lettres du 31 juillet 2021, le cabinet Boisseau a communiqué à l'employeur ses honoraires prévisionnels actualisés d'un montant de 151 500 euros hors taxes au titre de sa mission d'assistance auprès du comité, et d'un montant de 14 520 euros hors taxes au titre de sa mission d'assistance auprès des organisations syndicales dans le cadre de la négociation d'un accord collectif majoritaire fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi. Saisi d'une contestation de la société Kookaï sur le fondement de l'article L. 1233-35-1 du code du travail, le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a, par une décision du
6 septembre 2021, ramené le montant des honoraires prévisionnels exigibles par le cabinet Boisseau à 115 050 euros hors taxes au titre de sa mission d'assistance auprès du comité social et économique, et à 9 000 euros hors taxes au titre de sa mission d'assistance auprès des organisations syndicales. Par une décision du 17 novembre 2021, le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a validé l'accord collectif majoritaire fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi signé le 27 octobre 2021. Par une ordonnance du 14 mars 2022, la présidente de la 3ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté, comme tardive, la demande de la société Kookaï tendant à l'annulation de la décision du 6 septembre 2021 par laquelle le directeur régional et interdépartemental de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Ile-de-France a fixé le montant des honoraires prévisionnels exigibles par le cabinet Boisseau. Par un arrêt du
29 juillet 2022, contre lequel la société Kookaï se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la société contre cette ordonnance, en substituant au motif d'irrecevabilité retenu dans celle-ci celui tiré de ce que les conclusions de la société Kookaï tendant à l'annulation de la décision du 6 septembre 2021 ne pouvaient faire l'objet d'un litige distinct de celui relatif à la contestation de la décision du 17 novembre 2021 de validation de l'accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi de la société.
2. D'une part, aux termes de l'article L. 1233-34 du code du travail : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, le comité social et économique peut, le cas échéant sur proposition des commissions constituées en son sein, décider, lors de la première réunion prévue à l'article L. 1233-30, de recourir à une expertise pouvant porter sur les domaines économique et comptable ainsi que sur la santé, la sécurité ou les effets potentiels du projet sur les conditions de travail. / (...) / Le comité social et économique peut également mandater un expert afin qu'il apporte toute analyse utile aux organisations syndicales pour mener la négociation prévue à l'article L. 1233-24-1. / (...) ", laquelle a pour objet la signature d'un accord collectif déterminant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi.
3. D'autre part, l'article L. 2135-86 du code du travail prévoit que le juge judiciaire est compétent pour connaître des recours formés par l'employeur relativement aux expertises décidées par le comité social et économique, " sauf dans le cas prévu à l'article L. 1233-35-1 ". Aux termes de l'article L. 1233-35-1 du même code, créé par l'ordonnance du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et à la sécurisation des relations de travail : " Toute contestation relative à l'expertise est adressée, avant transmission de la demande de validation [de l'accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi] ou d'homologation [du document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi] prévue à l'article L. 1233-57-4, à l'autorité administrative, qui se prononce dans un délai de cinq jours. Cette décision peut être contestée dans les conditions prévues à l'article L. 1235-7-1. ".
4. Enfin, aux termes de l'article L. 1235-7-1 de ce code : " L'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1, le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, les décisions prises par l'administration au titre de l'article L. 1233-57-5 et la régularité de la procédure de licenciement collectif ne peuvent faire l'objet d'un litige distinct de celui relatif à la décision de validation ou d'homologation mentionnée à l'article L. 1233-57-4. / Ces litiges relèvent de la compétence, en premier ressort, du tribunal administratif, à l'exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux. / Le recours est présenté dans un délai de deux mois par l'employeur à compter de la notification de la décision de validation ou d'homologation, et par les organisations syndicales et les salariés à compter de la date à laquelle cette décision a été portée à leur connaissance conformément à l'article L. 1233-57-4. / Le tribunal administratif statue dans un délai de trois mois. Si, à l'issue de ce délai, il ne s'est pas prononcé ou en cas d'appel, le litige est porté devant la cour administrative d'appel, qui statue dans un délai de trois mois. Si, à l'issue de ce délai, elle ne s'est pas prononcée ou en cas de pourvoi en cassation, le litige est porté devant le Conseil d'Etat. / Le livre V du code de justice administrative est applicable. ".
5. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que l'employeur est recevable à contester devant le juge administratif la décision de l'administration se prononçant sur le montant des honoraires prévisionnels de l'expert mandaté par le comité social et économique sur le fondement des dispositions de l'article L. 1233-34 du code du travail, cité au point 2, y compris en l'absence de litige relatif à la décision de validation de l'accord collectif ou d'homologation du document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi. Dans cette dernière hypothèse, si la contestation de la décision de l'administration portant sur le montant des honoraires prévisionnels de l'expertise doit, en vertu des dispositions de l'article L. 1235-7-1 du même code, citées au point 4, auxquelles renvoie l'article L. 1233-35-1 de ce code, cité au point 3, être formée dans le délai de deux mois à compter de la notification à l'employeur de la décision de validation ou d'homologation auprès du tribunal administratif compétent pour connaître d'un litige relatif à cette dernière décision, le tribunal administratif n'est pas tenu de statuer sur cette contestation autonome dans un délai de trois mois.
6. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué qu'après avoir relevé que la décision du 17 novembre 2021 validant l'accord collectif majoritaire fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de la société Kookaï n'avait pas été contestée devant le juge administratif, la cour administrative d'appel de Paris a jugé que, dès lors que la contestation de la décision administrative se prononçant sur le montant des honoraires prévisionnels de l'expert mandaté en application de l'article L. 1233-34 du code du travail ne peut faire l'objet d'un litige distinct de celui tendant à l'annulation de la décision de validation de l'accord collectif ou d'homologation du document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi, la demande de la société Kookaï, qui ne contestait que la décision administrative relative aux honoraires prévisionnels du cabinet d'expertise mandaté dans le cadre de l'élaboration de son plan de sauvegarde de l'emploi, n'était pas recevable. En statuant ainsi, la cour a, eu égard à ce qui a été dit au point 5, commis une erreur de droit.
7. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen de son pourvoi, la société Kookaï est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la société Kookaï qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à la société Kookaï au titre des mêmes dispositions.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt du 29 juillet 2022 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris.
Article 3 : L'Etat versera à la société Kookaï une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par le cabinet Boisseau au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Kookaï, au cabinet Boisseau et au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion.
Copie pour information sera transmise à la SELARLU Ascagne AJ, en la personne de Me Julie Lavoir, et à la SELARL AJRS, en la personne de Me Catherine Poli, en leur qualité d'administrateurs judiciaires de la société Kookaï avec pour mission d'assister.