CAA de NANTES, 6ème chambre, 19/09/2023, 21NT02212, Inédit au recueil Lebon
CAA de NANTES, 6ème chambre, 19/09/2023, 21NT02212, Inédit au recueil Lebon
CAA de NANTES - 6ème chambre
- N° 21NT02212
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
mardi
19 septembre 2023
- Président
- M. GASPON
- Rapporteur
- Mme Valérie GELARD
- Avocat(s)
- SCP MICHEL LEDOUX ET ASSOCIES
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 31 mai 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité.
Par un jugement n° 1905820 du 22 juin 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 3 août 2021, M. B..., représenté par Me Quinquis, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 22 juin 2021 ;
2°) d'annuler la décision du 31 mai 2018 ;
3°) de dire qu'il doit bénéficier d'une pension militaire d'invalidité au titre de l'infimité " cancer du larynx ", le cas échéant après avoir ordonné une expertise médicale dont les frais seront mis à la charge de l'Etat ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que son cancer du larynx est imputable au service au sens des dispositions de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre alors en vigueur ; il établit en effet l'existence d'un lien direct et certain entre sa maladie et le service et plus particulièrement son exposition aux poussières d'amiante durant toute sa carrière alors que l'administration ne démontre pas que d'autres facteurs seraient la cause déterminante de sa pathologie ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 mai 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Gélard,
- les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., né en 1935, a exercé ses fonctions d'électrotechnicien embarqué en salle des machines dans la marine nationale entre le 18 septembre 1952 et le 5 novembre 1984. A compter du 24 janvier 2000, une pension militaire d'invalidité au taux de 30 % lui a été allouée au titre de l'infirmité " plaques pleurales bilatérales de type asbestosique ". Le 28 août 2015, l'intéressé a sollicité une nouvelle pension militaire d'invalidité au titre du cancer du larynx qu'il a développé, en invoquant le lien entre cette pathologie et son exposition aux poussières d'amiante durant sa carrière militaire. Par une décision du 31 mai 2018, la ministre des armées a rejeté sa demande. M. B... a contesté cette décision devant le tribunal administratif de Rennes, devenu compétent par détermination de la loi. Il relève appel du jugement du 22 juin 2021 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa requête.
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision contestée :
2. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dans sa rédaction alors en vigueur : " Ouvrent droit à pension : (...) 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service (...) ". Il résulte de ces dispositions que, lorsque le demandeur d'une pension ne peut bénéficier de la présomption légale d'imputabilité prévue à l'article L. 3 du même code et que, par ailleurs, cette imputabilité n'est pas admise par l'administration, il incombe à l'intéressé d'apporter la preuve de l'imputabilité de l'affection au service par tous moyens de nature à emporter la conviction des juges. Dans les cas où est en cause une affection à évolution lente et susceptible d'être liée à l'exposition du militaire à un environnement ou à des substances toxiques, il appartient aux juges du fond de prendre en considération les éléments du dossier relatifs à l'exposition du militaire à cet environnement ou à ces substances, eu égard notamment aux tâches ou travaux qui lui sont confiés, aux conditions dans lesquelles il a été conduit à les exercer, aux conditions et à la durée de l'exposition ainsi qu'aux pathologies que celle-ci est susceptible de provoquer. Il revient ensuite aux juges du fond de déterminer si, au vu des données admises de la science, il existe une probabilité suffisante que la pathologie qui affecte le demandeur soit en rapport avec son activité professionnelle. Lorsque tel est le cas, la seule circonstance que la pathologie pourrait avoir été favorisée par d'autres facteurs ne suffit pas, à elle seule, à écarter la preuve de l'imputabilité, si l'administration n'est pas en mesure d'établir que ces autres facteurs ont été la cause déterminante de la pathologie.
3. Il résulte de l'instruction que M. B..., incorporé dans la marine nationale à compter du 18 septembre 1952, a été rayé des contrôles le 5 novembre 1984, après avoir exercé toute sa carrière dans la marine nationale. En sa qualité d'électrotechnicien, il était chargé de l'entretien et du dépannage des installations électriques dans les compartiments des machines et des chaudières des navires sur lesquels il était embarqué. Il n'est pas contesté que sur les navires de la marine nationale construits jusqu'à la fin des années quatre-vingt, l'amiante était utilisée de façon courante comme isolant pour calorifuger tant les tuyauteries que certaines parois et certains équipements de bord, de même que les réacteurs et moteurs des avions de l'aéronavale et que ces matériaux d'amiante avaient tendance à se déliter du fait des contraintes physiques imposées à ces matériels, de la chaleur, du vieillissement du calorifugeage, ou de travaux d'entretien en mer ou au bassin. M. B... produit ainsi l'attestation du directeur du personnel militaire de la marine en date du 28 juin 1999 confirmant qu'il a, au cours de sa carrière entre le 1er juin 1953 et le 2 janvier 1984, été exposé aux risques présentés par l'inhalation de poussières d'amiante. Enfin, il est constant que M. B... bénéficie d'une pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " plaques pleurales " découverte dans les années 2000. Par suite, tant les conditions de travail de ce marin embarqué, que ses fonctions, permettent de conclure qu'il a été exposé sur une période de plus de 30 ans à un risque élevé de développer une pathologie en lien avec les poussières d'amiante.
4. Il résulte de l'instruction que M. B... a été soumis à une expertise médicale réalisée le 1er février 2017 par un oto-rhino-laryngologiste. Ce spécialiste rappelle que l'intéressé est suivi pour une lésion cordale gauche de carcinome épidermoïde microinfiltrant T1A, traité le 2 février 2015 par cordectomie, avec une reprise de résection pratiquée le 5 mars 2015. Il précise que la législation allemande, à la différence de celle appliquée en France, reconnaît le lien présumé entre l'amiante et les cancers laryngés. Après avoir constaté que l'intéressé ne présentait pas d'autres facteurs de risque, liés notamment au tabagisme, ce spécialiste en a déduit qu'il existait une présomption " certaine directe et exclusive " que le cancer du larynx de M. B... soit lié à l'amiante. Les 16 mai 2017 et 31 mai 2018, la commission consultative médicale puis la commission de réforme des pensions militaire d'invalidité ont émis un avis contraire au motif notamment que la législation française ne reconnaissait pas cette infirmité comme consécutive à une exposition à l'amiante. En outre, M. B... produit l'avis favorable émis le 5 février 2019 par la commission d'examen des circonstances d'exposition à l'amiante (CECEA). Cet organisme, constitué notamment de deux personnalités et de deux médecins spécialisés en matière d'amiante, a reconnu le lien entre son cancer du larynx et son exposition à l'inhalation de poussières d'amiante. Enfin, le requérant se prévaut d'articles scientifiques et notamment d'une thèse de doctorat en épidémiologie soutenue le 15 octobre 2012, concluant à la participation avérée des fibres amiantées dans la survenue du cancer du larynx. Si le ministre soutient que ces recherches ne font pas l'objet d'un consensus médical, il se borne à se référer au site internet de l'Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) rappelant qu'à ce jour le cancer du larynx n'est pas reconnu comme une maladie professionnelle. Le ministre ne produit aucun autre élément de nature à établir que d'autres facteurs de risque seraient la cause déterminante de la pathologie de M. B.... Dans ces conditions, et compte tenu des justificatifs apportés par M. B..., l'intéressé doit être regardé comme établissant un lien de causalité suffisant entre le cancer du larynx dont il est atteint et son exposition à l'amiante au cours de sa carrière professionnelle au sein de la marine nationale.
5. Il résulte de tout ce qui précède, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Sur l'octroi d'une pension militaire d'invalidité complémentaire à M. B... :
6. Eu égard à tout ce qui précède, il y a lieu de renvoyer M. B... devant le ministre des armées afin qu'il détermine le montant de la pension militaire d'invalidité à laquelle il peut prétendre au titre de cette seconde infirmité, sur la base du taux d'invalidité non contesté de 20 % reconnu tant par la commission consultative médicale que par la commission de réforme des pensions militaires d'invalidité dans leurs avis respectifs des 16 mai 2017 et 31 mai 2018.
Sur les frais liés au litige :
7. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. B... de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1905820 du tribunal administratif de Rennes en date du 22 juin 2021 ainsi que la décision de la ministre des armées du 31 mai 2018 rejetant la demande de pension militaire d'invalidité présentée par M. B... au titre de l'infirmité " carcinome épidermoïde T1 A laryngé traité par cordectomie : dysphonie sans dyspnée " sont annulés.
Article 2 : M. B... est renvoyé devant le ministre des armées afin qu'il détermine le montant de la pension militaire d'invalidité à laquelle il peut prétendre au titre de cette seconde infirmité, sur la base du taux d'invalidité de 20 %.
Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 1er septembre 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Gaspon, président de chambre,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- Mme Gélard, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 septembre 2023.
La rapporteure,
V. GELARDLe président,
O. GASPON
La greffière,
I. PETTON
La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21NT02212
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 31 mai 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté sa demande de pension militaire d'invalidité.
Par un jugement n° 1905820 du 22 juin 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 3 août 2021, M. B..., représenté par Me Quinquis, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 22 juin 2021 ;
2°) d'annuler la décision du 31 mai 2018 ;
3°) de dire qu'il doit bénéficier d'une pension militaire d'invalidité au titre de l'infimité " cancer du larynx ", le cas échéant après avoir ordonné une expertise médicale dont les frais seront mis à la charge de l'Etat ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que son cancer du larynx est imputable au service au sens des dispositions de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre alors en vigueur ; il établit en effet l'existence d'un lien direct et certain entre sa maladie et le service et plus particulièrement son exposition aux poussières d'amiante durant toute sa carrière alors que l'administration ne démontre pas que d'autres facteurs seraient la cause déterminante de sa pathologie ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 mai 2022, le ministre des armées conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Gélard,
- les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., né en 1935, a exercé ses fonctions d'électrotechnicien embarqué en salle des machines dans la marine nationale entre le 18 septembre 1952 et le 5 novembre 1984. A compter du 24 janvier 2000, une pension militaire d'invalidité au taux de 30 % lui a été allouée au titre de l'infirmité " plaques pleurales bilatérales de type asbestosique ". Le 28 août 2015, l'intéressé a sollicité une nouvelle pension militaire d'invalidité au titre du cancer du larynx qu'il a développé, en invoquant le lien entre cette pathologie et son exposition aux poussières d'amiante durant sa carrière militaire. Par une décision du 31 mai 2018, la ministre des armées a rejeté sa demande. M. B... a contesté cette décision devant le tribunal administratif de Rennes, devenu compétent par détermination de la loi. Il relève appel du jugement du 22 juin 2021 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa requête.
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision contestée :
2. Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, dans sa rédaction alors en vigueur : " Ouvrent droit à pension : (...) 2° Les infirmités résultant de maladies contractées par le fait ou à l'occasion du service ; 3° L'aggravation par le fait ou à l'occasion du service d'infirmités étrangères au service (...) ". Il résulte de ces dispositions que, lorsque le demandeur d'une pension ne peut bénéficier de la présomption légale d'imputabilité prévue à l'article L. 3 du même code et que, par ailleurs, cette imputabilité n'est pas admise par l'administration, il incombe à l'intéressé d'apporter la preuve de l'imputabilité de l'affection au service par tous moyens de nature à emporter la conviction des juges. Dans les cas où est en cause une affection à évolution lente et susceptible d'être liée à l'exposition du militaire à un environnement ou à des substances toxiques, il appartient aux juges du fond de prendre en considération les éléments du dossier relatifs à l'exposition du militaire à cet environnement ou à ces substances, eu égard notamment aux tâches ou travaux qui lui sont confiés, aux conditions dans lesquelles il a été conduit à les exercer, aux conditions et à la durée de l'exposition ainsi qu'aux pathologies que celle-ci est susceptible de provoquer. Il revient ensuite aux juges du fond de déterminer si, au vu des données admises de la science, il existe une probabilité suffisante que la pathologie qui affecte le demandeur soit en rapport avec son activité professionnelle. Lorsque tel est le cas, la seule circonstance que la pathologie pourrait avoir été favorisée par d'autres facteurs ne suffit pas, à elle seule, à écarter la preuve de l'imputabilité, si l'administration n'est pas en mesure d'établir que ces autres facteurs ont été la cause déterminante de la pathologie.
3. Il résulte de l'instruction que M. B..., incorporé dans la marine nationale à compter du 18 septembre 1952, a été rayé des contrôles le 5 novembre 1984, après avoir exercé toute sa carrière dans la marine nationale. En sa qualité d'électrotechnicien, il était chargé de l'entretien et du dépannage des installations électriques dans les compartiments des machines et des chaudières des navires sur lesquels il était embarqué. Il n'est pas contesté que sur les navires de la marine nationale construits jusqu'à la fin des années quatre-vingt, l'amiante était utilisée de façon courante comme isolant pour calorifuger tant les tuyauteries que certaines parois et certains équipements de bord, de même que les réacteurs et moteurs des avions de l'aéronavale et que ces matériaux d'amiante avaient tendance à se déliter du fait des contraintes physiques imposées à ces matériels, de la chaleur, du vieillissement du calorifugeage, ou de travaux d'entretien en mer ou au bassin. M. B... produit ainsi l'attestation du directeur du personnel militaire de la marine en date du 28 juin 1999 confirmant qu'il a, au cours de sa carrière entre le 1er juin 1953 et le 2 janvier 1984, été exposé aux risques présentés par l'inhalation de poussières d'amiante. Enfin, il est constant que M. B... bénéficie d'une pension militaire d'invalidité pour l'infirmité " plaques pleurales " découverte dans les années 2000. Par suite, tant les conditions de travail de ce marin embarqué, que ses fonctions, permettent de conclure qu'il a été exposé sur une période de plus de 30 ans à un risque élevé de développer une pathologie en lien avec les poussières d'amiante.
4. Il résulte de l'instruction que M. B... a été soumis à une expertise médicale réalisée le 1er février 2017 par un oto-rhino-laryngologiste. Ce spécialiste rappelle que l'intéressé est suivi pour une lésion cordale gauche de carcinome épidermoïde microinfiltrant T1A, traité le 2 février 2015 par cordectomie, avec une reprise de résection pratiquée le 5 mars 2015. Il précise que la législation allemande, à la différence de celle appliquée en France, reconnaît le lien présumé entre l'amiante et les cancers laryngés. Après avoir constaté que l'intéressé ne présentait pas d'autres facteurs de risque, liés notamment au tabagisme, ce spécialiste en a déduit qu'il existait une présomption " certaine directe et exclusive " que le cancer du larynx de M. B... soit lié à l'amiante. Les 16 mai 2017 et 31 mai 2018, la commission consultative médicale puis la commission de réforme des pensions militaire d'invalidité ont émis un avis contraire au motif notamment que la législation française ne reconnaissait pas cette infirmité comme consécutive à une exposition à l'amiante. En outre, M. B... produit l'avis favorable émis le 5 février 2019 par la commission d'examen des circonstances d'exposition à l'amiante (CECEA). Cet organisme, constitué notamment de deux personnalités et de deux médecins spécialisés en matière d'amiante, a reconnu le lien entre son cancer du larynx et son exposition à l'inhalation de poussières d'amiante. Enfin, le requérant se prévaut d'articles scientifiques et notamment d'une thèse de doctorat en épidémiologie soutenue le 15 octobre 2012, concluant à la participation avérée des fibres amiantées dans la survenue du cancer du larynx. Si le ministre soutient que ces recherches ne font pas l'objet d'un consensus médical, il se borne à se référer au site internet de l'Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) rappelant qu'à ce jour le cancer du larynx n'est pas reconnu comme une maladie professionnelle. Le ministre ne produit aucun autre élément de nature à établir que d'autres facteurs de risque seraient la cause déterminante de la pathologie de M. B.... Dans ces conditions, et compte tenu des justificatifs apportés par M. B..., l'intéressé doit être regardé comme établissant un lien de causalité suffisant entre le cancer du larynx dont il est atteint et son exposition à l'amiante au cours de sa carrière professionnelle au sein de la marine nationale.
5. Il résulte de tout ce qui précède, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Sur l'octroi d'une pension militaire d'invalidité complémentaire à M. B... :
6. Eu égard à tout ce qui précède, il y a lieu de renvoyer M. B... devant le ministre des armées afin qu'il détermine le montant de la pension militaire d'invalidité à laquelle il peut prétendre au titre de cette seconde infirmité, sur la base du taux d'invalidité non contesté de 20 % reconnu tant par la commission consultative médicale que par la commission de réforme des pensions militaires d'invalidité dans leurs avis respectifs des 16 mai 2017 et 31 mai 2018.
Sur les frais liés au litige :
7. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. B... de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1905820 du tribunal administratif de Rennes en date du 22 juin 2021 ainsi que la décision de la ministre des armées du 31 mai 2018 rejetant la demande de pension militaire d'invalidité présentée par M. B... au titre de l'infirmité " carcinome épidermoïde T1 A laryngé traité par cordectomie : dysphonie sans dyspnée " sont annulés.
Article 2 : M. B... est renvoyé devant le ministre des armées afin qu'il détermine le montant de la pension militaire d'invalidité à laquelle il peut prétendre au titre de cette seconde infirmité, sur la base du taux d'invalidité de 20 %.
Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 1er septembre 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Gaspon, président de chambre,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- Mme Gélard, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 septembre 2023.
La rapporteure,
V. GELARDLe président,
O. GASPON
La greffière,
I. PETTON
La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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