Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 12/07/2023, 463363
Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 12/07/2023, 463363
Conseil d'État - 9ème - 10ème chambres réunies
- N° 463363
- ECLI:FR:CECHR:2023:463363.20230712
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
mercredi
12 juillet 2023
- Rapporteur
- M. Cyril Martin de Lagarde
- Avocat(s)
- SARL CABINET BRIARD ; CABINET FRANÇOIS PINET
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par une décision du 20 février 2023, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de l'institut technologique FCBA (forêt, cellulose, bois-construction, ameublement) dirigées contre l'arrêt n° 19PA01989 du
18 février 2022 de la cour administrative d'appel de Paris en tant qu'il a statué sur les aides versées par l'interprofession nationale France bois forêt.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de la recherche ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Cyril Martin de Lagarde, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL cabinet Briard, avocat de l'institut technologique FCBA ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'institut technologique FCBA (forêt, cellulose, bois-construction, ameublement), centre technique industriel au sens de l'article L. 521-1 du code de la recherche, en charge des secteurs de la forêt, du bois, de la cellulose et de l'ameublement, a demandé au tribunal administratif de Melun de lui accorder le bénéfice d'un crédit d'impôt en faveur de la recherche à raison des dépenses engagées en matière de recherche et de développement au titre des années 2013 à 2015. Par un jugement du 11 avril 2019, ce tribunal a rejeté sa demande. L'institut FCBA se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 18 février 2022 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel qu'il a formé contre ce jugement. Par une décision du 20 février 2023, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de l'institut technologique FCBA dirigées contre cet arrêt en tant qu'il a statué sur les aides versées par l'organisation interprofessionnelle nationale France bois forêt.
2. Le centre technique interprofessionnel des fruits et légumes, Terres Inovia et l'Institut français des productions cidricoles, qui sont des centres techniques industriels au sens de l'article L. 521-1 du code de la recherche, d'une part, et le centre national interprofessionnel de l'économie laitière, France bois forêt, le comité national interprofessionnel de la pomme de terre, l'association interprofessionnelle des fruits et légumes frais, Terres Univia et l'Union nationale interprofessionnelle cidricole, qui sont des organisations interprofessionnelles reconnues au sens de l'article L. 632-1 du code rural et de la pêche maritime, d'autre part, justifient d'un intérêt suffisant à l'annulation de l'arrêt attaqué. Dès lors, leur intervention est recevable.
3. Aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la période d'imposition en litige : " I. Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année (...). / III. Les subventions publiques reçues par les entreprises à raison des opérations ouvrant droit au crédit d'impôt sont déduites des bases de calcul de ce crédit, qu'elles soient définitivement acquises par elles ou remboursables. (...) Lorsque ces subventions sont remboursables, elles sont ajoutées aux bases de calcul du crédit d'impôt de l'année au cours de laquelle elles sont remboursées à l'organisme qui les a versées. (...) ". Pour l'application du III de l'article 244 quater B du code général des impôts, on entend par " subvention publique " toute aide versée à raison d'opérations ouvrant droit au crédit d'impôt par une personne morale de droit public.
4. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 qu'en jugeant que devait être regardée comme constituant une " subvention publique " au sens de ces dispositions, toute aide versée en vue ou en contrepartie d'un projet de recherche, provenant de l'utilisation de ressources perçues à titre obligatoire et sans contrepartie, que ces aides soient versées par une autorité administrative ou un organisme privé investi d'une mission de service public, la cour a commis une erreur de droit. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, l'institut technologique FCBA est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque en tant qu'il statue sur les aides versées par France bois forêt.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
6. Il résulte de l'instruction que l'organisation interprofessionnelle France bois forêt, reconnue par arrêté du 22 février 2008, est une association à but non lucratif régie par la loi du 1er juillet 1901. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 que les aides versées en 2013 et 2014 pour le financement d'opérations de recherche par cette association à l'institut requérant ne sont pas des " subventions publiques " au sens et pour l'application du III de l'article 244 quater B du code général des impôts. Par suite, les aides en litige n'avaient pas a être déduites, sur le fondement de ces dispositions, des bases de calcul du crédit d'impôt que l'institut a sollicité au titre des années 2013 et 2014. Dès lors, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, l'institut FCBA est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a refusé de lui accorder le bénéfice du crédit d'impôt en faveur de la recherche afférent à ces deux années correspondant à la prise en compte des sommes versées par France bois forêt dans l'assiette de ce crédit d'impôt.
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, pour l'ensemble de la procédure, la somme de 4 500 euros à verser à l'institut FCBA au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'intervention du Centre national interprofessionnel de l'économie laitière et autres est admise.
Article 2 : L'arrêt du 18 février 2022 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé en tant qu'il statue sur les aides versées par l'organisation interprofessionnelle France bois forêt en 2013 et 2014.
Article 3 : L'Etat accordera à l'institut FCBA le crédit d'impôt en faveur de la recherche afférent aux années 2013 et 2014 correspondant à la prise en compte des sommes versées par l'organisation interprofessionnelle France bois forêt dans l'assiette de ce crédit d'impôt.
Article 4 : Le jugement du 11 avril 2019 du tribunal administratif de Melun est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 5 : L'Etat versera à l'institut FCBA la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à l'institut technologique FCBA (forêt, cellulose, bois-construction, ameublement), au Centre national interprofessionnel de l'économie laitière pour l'ensemble des intervenants, et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré à l'issue de la séance du 28 juin 2023 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta,
Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; M. Nicolas Polge, M. Vincent Daumas,
Mme Nathalie Escaut, M. Alexandre Lallet, M. Didier Ribes, conseillers d'Etat et M. Cyril Martin de Lagarde, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.
Rendu le 12 juillet 2023.
Le président :
Signé : M. Rémy Schwartz
Le rapporteur :
Signé : M. Cyril Martin de Lagarde
La secrétaire :
Signé : Mme Fehmida Ghulam
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Pour la secrétaire du contentieux, par délégation
ECLI:FR:CECHR:2023:463363.20230712
Par une décision du 20 février 2023, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de l'institut technologique FCBA (forêt, cellulose, bois-construction, ameublement) dirigées contre l'arrêt n° 19PA01989 du
18 février 2022 de la cour administrative d'appel de Paris en tant qu'il a statué sur les aides versées par l'interprofession nationale France bois forêt.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de la recherche ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Cyril Martin de Lagarde, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL cabinet Briard, avocat de l'institut technologique FCBA ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'institut technologique FCBA (forêt, cellulose, bois-construction, ameublement), centre technique industriel au sens de l'article L. 521-1 du code de la recherche, en charge des secteurs de la forêt, du bois, de la cellulose et de l'ameublement, a demandé au tribunal administratif de Melun de lui accorder le bénéfice d'un crédit d'impôt en faveur de la recherche à raison des dépenses engagées en matière de recherche et de développement au titre des années 2013 à 2015. Par un jugement du 11 avril 2019, ce tribunal a rejeté sa demande. L'institut FCBA se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 18 février 2022 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel qu'il a formé contre ce jugement. Par une décision du 20 février 2023, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de l'institut technologique FCBA dirigées contre cet arrêt en tant qu'il a statué sur les aides versées par l'organisation interprofessionnelle nationale France bois forêt.
2. Le centre technique interprofessionnel des fruits et légumes, Terres Inovia et l'Institut français des productions cidricoles, qui sont des centres techniques industriels au sens de l'article L. 521-1 du code de la recherche, d'une part, et le centre national interprofessionnel de l'économie laitière, France bois forêt, le comité national interprofessionnel de la pomme de terre, l'association interprofessionnelle des fruits et légumes frais, Terres Univia et l'Union nationale interprofessionnelle cidricole, qui sont des organisations interprofessionnelles reconnues au sens de l'article L. 632-1 du code rural et de la pêche maritime, d'autre part, justifient d'un intérêt suffisant à l'annulation de l'arrêt attaqué. Dès lors, leur intervention est recevable.
3. Aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la période d'imposition en litige : " I. Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année (...). / III. Les subventions publiques reçues par les entreprises à raison des opérations ouvrant droit au crédit d'impôt sont déduites des bases de calcul de ce crédit, qu'elles soient définitivement acquises par elles ou remboursables. (...) Lorsque ces subventions sont remboursables, elles sont ajoutées aux bases de calcul du crédit d'impôt de l'année au cours de laquelle elles sont remboursées à l'organisme qui les a versées. (...) ". Pour l'application du III de l'article 244 quater B du code général des impôts, on entend par " subvention publique " toute aide versée à raison d'opérations ouvrant droit au crédit d'impôt par une personne morale de droit public.
4. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 qu'en jugeant que devait être regardée comme constituant une " subvention publique " au sens de ces dispositions, toute aide versée en vue ou en contrepartie d'un projet de recherche, provenant de l'utilisation de ressources perçues à titre obligatoire et sans contrepartie, que ces aides soient versées par une autorité administrative ou un organisme privé investi d'une mission de service public, la cour a commis une erreur de droit. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, l'institut technologique FCBA est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque en tant qu'il statue sur les aides versées par France bois forêt.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
6. Il résulte de l'instruction que l'organisation interprofessionnelle France bois forêt, reconnue par arrêté du 22 février 2008, est une association à but non lucratif régie par la loi du 1er juillet 1901. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 que les aides versées en 2013 et 2014 pour le financement d'opérations de recherche par cette association à l'institut requérant ne sont pas des " subventions publiques " au sens et pour l'application du III de l'article 244 quater B du code général des impôts. Par suite, les aides en litige n'avaient pas a être déduites, sur le fondement de ces dispositions, des bases de calcul du crédit d'impôt que l'institut a sollicité au titre des années 2013 et 2014. Dès lors, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, l'institut FCBA est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a refusé de lui accorder le bénéfice du crédit d'impôt en faveur de la recherche afférent à ces deux années correspondant à la prise en compte des sommes versées par France bois forêt dans l'assiette de ce crédit d'impôt.
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, pour l'ensemble de la procédure, la somme de 4 500 euros à verser à l'institut FCBA au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'intervention du Centre national interprofessionnel de l'économie laitière et autres est admise.
Article 2 : L'arrêt du 18 février 2022 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé en tant qu'il statue sur les aides versées par l'organisation interprofessionnelle France bois forêt en 2013 et 2014.
Article 3 : L'Etat accordera à l'institut FCBA le crédit d'impôt en faveur de la recherche afférent aux années 2013 et 2014 correspondant à la prise en compte des sommes versées par l'organisation interprofessionnelle France bois forêt dans l'assiette de ce crédit d'impôt.
Article 4 : Le jugement du 11 avril 2019 du tribunal administratif de Melun est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 5 : L'Etat versera à l'institut FCBA la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à l'institut technologique FCBA (forêt, cellulose, bois-construction, ameublement), au Centre national interprofessionnel de l'économie laitière pour l'ensemble des intervenants, et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré à l'issue de la séance du 28 juin 2023 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta,
Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; M. Nicolas Polge, M. Vincent Daumas,
Mme Nathalie Escaut, M. Alexandre Lallet, M. Didier Ribes, conseillers d'Etat et M. Cyril Martin de Lagarde, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.
Rendu le 12 juillet 2023.
Le président :
Signé : M. Rémy Schwartz
Le rapporteur :
Signé : M. Cyril Martin de Lagarde
La secrétaire :
Signé : Mme Fehmida Ghulam
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Pour la secrétaire du contentieux, par délégation