CAA de NANTES, 4ème chambre, 20/01/2023, 21NT02585, Inédit au recueil Lebon
CAA de NANTES, 4ème chambre, 20/01/2023, 21NT02585, Inédit au recueil Lebon
CAA de NANTES - 4ème chambre
- N° 21NT02585
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
vendredi
20 janvier 2023
- Président
- M. LAINE
- Rapporteur
- M. Stéphane DERLANGE
- Avocat(s)
- LABRUSSE
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La communauté urbaine Caen la Mer a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner solidairement les sociétés Jean Guervilly, Economie et coordination en bâtiments (ECB), Sofresid Engineering, Qualiconsult, CTI BAT et Baudin-Châteauneuf à lui verser la somme de 384 482,40 euros toutes taxes comprises (TTC) correspondant au coût des travaux de reprise des désordres affectant les murs rideaux du stade nautique de Caen, la somme de 45 000 euros au titre de son préjudice d'exploitation pendant les travaux de reprise des désordres, avec intérêts au taux légal, capitalisation des intérêts et indexation sur le dernier indice du coût de la construction publié au jour du dépôt du rapport d'expertise judiciaire, ainsi que la somme de 2 000 euros au titre des frais d'avocat exposés pour son assistance pendant l'expertise.
Par un jugement n° 1901143 du 28 juillet 2021, le tribunal administratif de Caen, d'une part, a condamné in solidum les sociétés Jean Guervilly, CTI BAT, ECB et Baudin-Châteauneuf à verser la somme de 429 428,40 euros à la communauté urbaine Caen la Mer, assortie des intérêts et de leur capitalisation (article 1er) et a mis à leur charge solidaire les frais d'expertise s'élevant à 48 191,44 euros (article 2), d'autre part, a condamné la société Jean Guervilly à garantir la société ECB à hauteur de 39,5 % de la part excédant 5 % des condamnations prononcées aux articles 1er et 2, et les sociétés CTI BAT et Baudin-Châteauneuf à garantir la société ECB à hauteur respectivement de 20 % et de 30 % de ces mêmes condamnations dans les mêmes conditions (article 3), a condamné la société ECB à garantir la société Jean Guervilly à hauteur de 10,5 % du montant total des condamnations prononcées aux articles 1er et 2, la société CTI BAT à garantir la société Jean Guervilly à hauteur de 20 % de ce montant et la société Baudin-Châteauneuf à garantir la société Jean Guervilly à hauteur de 30 % dudit montant (article 4), a condamné la société ECB à garantir la société CTI BAT à hauteur de 10,5 %, la société Jean Guervilly à garantir la société CTI BAT à hauteur de 39,5 % et la société Baudin-Châteauneuf à garantir la société CTI BAT à hauteur de 30 % (article 5), a condamné la société ECB à garantir la société Baudin-Châteauneuf à hauteur de 10,5 %, la société Jean Guervilly à garantir la société Baudin-Châteauneuf à hauteur de 39,5 %, et la société CTI BAT à garantir la société Baudin-Châteauneuf à hauteur de 20 % (article 6), enfin, au titre de l'article L. 761-1 du CJA, a mis à la charge solidaire des sociétés Jean Guervilly, CTI BAT, ECB et Baudin-Châteauneuf le versement à la communauté urbaine Caen la Mer d'une somme de 1 500 euros (article 7), a mis à la charge de la communauté urbaine Caen la Mer le versement à la société Qualiconsult d'une somme de 1 500 euros (article 8) et le versement à la société Sofresid Engineering d'une somme également de 1 500 euros (article 9), puis a rejeté le surplus des conclusions des parties (article 10).
Procédures devant la cour :
I. Par une requête n° 21NT02585, enregistrée le 16 septembre 2021, la SARL ECB, représentée par Me Bouchard, demande à la cour :
1°) à titre principal, d'annuler le jugement du 28 juillet 2021 et de rejeter toute demande de la communauté urbaine Caen la Mer à son encontre ;
2°) à titre subsidiaire, de réformer le jugement du 28 juillet 2021 en limitant le montant de la condamnation prononcée à son égard à 5% de l'ensemble des condamnations et de les prononcer hors taxes ;
3°) à titre infiniment subsidiaire, de condamner les sociétés Jean Guervilly, CTI BAT, Sofresid engineering, Qualiconsult et Baudin-Châteauneuf à la garantir de toute condamnation prononcée à son égard au-delà de 5% de l'ensemble des condamnations ;
4°) de mettre à la charge de la communauté urbaine Caen la Mer la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les déformations admissibles pour les ouvrages du " lot charpente / métallique " ont été déterminées par les bureaux d'études Lequesne et BSO, chargés des plans de l'étude de projet et de toutes pièces à caractère technique, si bien qu'elle n'est pas responsable du dommage, son rôle se limitant à la description des ouvrages sur la base de ces éléments ;
- la société Baudin-Châteauneuf ne pouvait ignorer le risque auquel était exposé la charpente métallique ;
- le bureau d'études Lequesne s'est rendu compte du manque de cohérence entre la charpente et les murs rideaux ce qui l'a conduit à élaborer une méthodologie pour y pallier, qui n'a pas été ou a été mal mise en œuvre ;
- les entreprises, notamment la société Baudin-Châteauneuf chargé des plans d'exécution, étaient avisées de la difficulté mais n'ont pas exécuté convenablement une méthodologie de pose permettant de compenser la déformation de la structure ;
- le tribunal ne pouvait mettre à sa charge plus que la part de 5% retenue par l'expert ;
- le prototype ne fait pas partie des sommes convenues dans le contrat de construction et ne pouvait dès lors faire l'objet d'une indemnisation ;
- le préjudice de perte d'exploitation n'est pas justifié par les dommages subis par les vitrages.
Par des mémoires, enregistrés les 28 septembre 2021, 28 février 2022, 24 mars 2022, 28 avril 2022 et 25 mai 2022, la communauté urbaine Caen la Mer, représentée par Me Bouthors-Neveu, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) de rejeter la requête de la SARL ECB, ainsi que les conclusions d'appel incident et provoqué des sociétés Jean Guervilly, Sofresid Engineering, Qualiconsult, CTI BAT et Baudin-Châteauneuf et les conclusions de la société Jean Guervilly en paiement du solde du marché ;
2°) par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de réformer le jugement du 28 juillet 2021 en condamnant solidairement les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, Qualiconsult, CTI BAT et Baudin-Châteauneuf à lui verser la somme de 384 482,40 euros toutes taxes comprises au titre des murs rideaux et la somme de 45 000 euros au titre de son préjudice d'exploitation, avec intérêts au taux légal à compter de l'introduction de la requête en vue de la désignation d'un expert, capitalisation des intérêts et indexation sur le dernier indice du coût de la construction publié au jour du dépôt du rapport d'expertise judiciaire et de mettre à leur charge solidaire les frais liés à l'expertise, pour un total de 50 191,44 euros toutes taxes comprises ;
3°) de fixer au passif de la société CTI BAT les sommes de 384 482,40 euros toutes taxes comprises correspondant au coût des travaux de reprise des désordres, de 45 000 euros au titre de son préjudice d'exploitation, de 50 191,44 euros toutes taxes comprises au titre des frais d'expertise, de 2 000 euros au titre des frais d'avocat exposés pour son assistance pendant l'expertise, de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de rendre son arrêt commun et opposable à l'administrateur et au mandataire judiciaires ;
4°) de mettre à la charge solidaire de autres parties la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les manquements relevés par l'expert, liés au cahier des clauses techniques particulières (CCTP) sont imputables à la maîtrise d'œuvre et donc à la SARL ECB qui en fait partie, du fait des lacunes dans la rédaction des documents dont elle était chargée ;
- la société Jean Guervilly est responsable pour un défaut de conception, de rédaction des CCTP et avoir mal réparti les tâches entre les entreprises et du fait des manquements de la SARL Lepourry et Bernard, son sous-traitant maître d'œuvre d'exécution, et du bureau d'études structure Lequesne intervenu pour leur compte ;
- la maîtrise d'œuvre aurait dû interrompre les travaux de pose des vitrages ;
- la société Sofresid engineering est responsable faute d'être intervenue auprès du maître d'œuvre d'exécution pour que le chantier soit arrêté ;
- la société Qualiconsult est responsable de ne pas avoir identifié le défaut de conception et les incohérences des référentiels de déformations à la lecture des pièces écrites du marché et n'a pas émis d'avis défavorable à la pose des vitrages malgré le non-respect de la méthodologie préconisée par le bureau d'études structure Lequesne ;
- la société CTI BAT est responsable du fait du non-respect des préconisations du bureau d'études structure Lequesne et pour défaut d'exécution dans la pose des vitrages ;
- la société Baudin-Châteauneuf est responsable du fait du non-respect des préconisations du bureau d'études structure Lequesne et pour défaut d'exécution dans le réglage des tirants ;
- la part de responsabilité de chaque entreprise a été déterminée par l'expert ;
- le prototype était nécessaire dans le cadre de la reprise des désordres et n'a
aucunement été source d'un enrichissement de la collectivité ;
- l'expert s'est basé sur le dernier devis transmis ;
- les pertes d'exploitation sont établies alors que la fermeture de la piscine s'imposait durant les travaux de reprise des désordres, qu'elle n'avait pas reçu les fonds pour entreprendre les travaux et que la crise sanitaire a limité ses marges de manœuvre ;
- l'indemnité due par les constructeurs au maître de l'ouvrage en réparation de désordres
affectant l'ouvrage doit comprendre la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) que l'administration non exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée supporte pour les travaux de réfection des désordres affectant l'immeuble, quand bien même elle bénéficie du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) ;
- les premiers juges n'auraient pas dû mettre hors de cause les sociétés Qualiconsult et Sofresid Engineering eu égard aux manquements qu'elles ont commis ;
- au vu de la jurisprudence, ils auraient dû inscrire sa créance au passif de la société CTI BAT et rendre sa décision commune et opposable à l'administrateur et à son mandataire judiciaires ;
- le coût des travaux de reprise s'élève à la somme de 384 482,40 euros toutes taxes comprises, le préjudice d'exploitation à 45 000 euros et les dépens et frais d'assistance en cours d'expertise à la somme de 50 191,44 euros ;
- sa demande d'indexation sur le coût de la construction est justifiée par la crise sanitaire et l'obligation de mettre en concurrence des entreprises devant réparer les désordres ;
- la demande reconventionnelle de la société Guervilly en paiement du solde de ses honoraires est infondée par application de l'avenant n°3 signé par la maîtrise d'œuvre et alors que les condamnations de première instance ne sont pas assimilables à une levée des réserves ;
- la demande reconventionnelle présentée par la SARL Jean Guervilly en paiement du solde du marché de maîtrise d'œuvre est irrecevable faute de réclamation préalable en application de l'article 37 du CCAG des marchés publics de prestations intellectuelles (CCAG PI).
Par des mémoires, enregistrés les 6 janvier 2022 et 4 mars 2022, la société Sofresid Engineering, représentée par Me Majerholc-Oiknine, demande à la cour :
1°) à titre principal, de confirmer le jugement du 28 juillet 2021 en
ce qu'il a rejeté toutes les demandes formées à son encontre et de rejeter l'ensemble des conclusions formées en cause d'appel contre elle ;
2°) à titre subsidiaire, de limiter à 10 737,06 euros toutes taxes comprises le montant total des condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre et d'exclure toute solidarité dans ces condamnations ;
3°) à titre plus subsidiaire, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de condamner in solidum toutes autres parties succombantes à la garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre au-delà de la somme de 10 737,06 euros ;
4°) de condamner in solidum toutes parties succombantes à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à raison que les premiers juges ont écarté sa responsabilité malgré l'avis de l'expert alors que conformément à l'article 10 du décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993, le rôle de la personne en charge de l'ordonnancement, du pilotage et de la coordination (OPC) est spécifique et circonscrit si bien qu'elle ne se substitue pas au maître d'œuvre pour assurer la direction de l'exécution des travaux (DET) ;
- aucune disposition du CCTP ne lui confiait la mission d'apprécier
la valeur d'une proposition de méthodologie non contractuelle de montage des vitrages, et
encore moins de l'imposer aux entreprises, ni ne lui permettait de s'immiscer
dans des validations techniques spécifiques ou dans la procédure de montage des murs
rideaux des sociétés Baudin-Châteauneuf et CTI BAT pour imposer une méthodologie de montage des vitrages qui n'était que préconisée par le bureau d'études structure Lequesne ;
- les intervenants à l'opération ne peuvent être solidairement tenus envers le
maître de l'ouvrage que dans le cadre d'une solidarité légale ou conventionnelle en application de l'article 1310 du code civil, totalement exclue en l'espèce ;
- elle ne fait pas partie du groupement de maîtrise d'œuvre et n'a pas commis de fautes
indivisibles avec les autres défendeurs ayant entrainé la réalisation d'un dommage unique justifiant qu'elle garantisse d'autres intervenants ;
- sa condamnation ne saurait, en tout état de cause, excéder la part de 2,5 %
conformément à l'avis de l'expert, pour un total de 10 737,06 euros ;
- les préjudices de la communauté urbaine Caen la Mer ne sont pas établis.
Par un mémoire, enregistré le 19 janvier 2022, la société Qualiconsult, représentée par Me Launey, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter l'ensemble des conclusions formées en cause d'appel contre elle ;
2°) à titre subsidiaire, en cas de réformation du jugement attaqué, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de rejeter les conclusions de la communauté urbaine de Caen la Mer au titre de ses pertes d'exploitations, de la taxe sur la valeur ajoutée et de l'indexation sur l'indice du coût des travaux, et de limiter toute condamnation éventuelle à la somme de 320 357 euros hors taxes et à une quote-part maximale de 5%, de le réformer en ce qu'il a alloué à la communauté urbaine de Caen la Mer la somme de 384 428,40 euros toutes taxes comprises au titre des travaux de reprise et de 45 000 euros au titre d'une perte d'exploitation et de condamner les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, CTI BAT et Baudin-Châteauneuf à la garantir de toutes condamnations ;
3°) de condamner in solidum toutes parties succombantes à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa responsabilité quasi-délictuelle en tant que contrôleur technique, au regard des articles L. 111-24 et L. 111-25 du code de la construction et de l'habitation et 4.1.7 de la norme AFNOR NF P 03-100 n'est pas susceptible d'être engagée alors qu'elle a rempli ses propres obligations, notamment en faisant des observations sur les déformations admissibles du vitrage et qu'aucune norme applicable méconnue ne lui est opposée ;
- le dommage résulte de la mauvaise exécution par les sociétés CTI BAT et Baudin-Châteauneuf de la méthodologie de pose des vitrages et l'insuffisance de coordination assurée par le maître d'œuvre d'exécution, du fait de la rédaction du CCTP par le bureau d'études Lequesne et parce que celui-ci, la société Jean Guervilly et la société Sofresid Engineering n'ont pas suspendu les travaux ;
- elle ne s'est pas désintéressée de sa mission puisqu'elle a émis un avis relatif notamment
à l'admissibilité des vitrages à supporter une flèche de 10 mm du support ;
- il ne lui appartenait pas d'émettre un " avis défavorable " sur la pose des vitrages compte
tenu du non-respect de la méthodologie proposée par le bureau d'étude Lequesne ;
- en tout état de cause, les entreprises étaient déjà averties par le maître d'œuvre du problème rencontré, dont elles n'ont pas tenu compte ;
- le montant de 320 402 euros retenu par l'expert comporte des tirants non nécessaires au regard du prototype réalisé par l'entreprise en cours d'expertise ;
- les indemnisations devaient être prononcées hors TVA par application du 1er alinéa de l'article 256 B du code général des impôts faute pour la communauté urbaine de Caen la Mer de démontrer qu'elle y est assujettie et qu'elle ne bénéficierait pas du FCTVA ;
- l'indexation sur le coût des travaux ne se justifie pas à défaut de démonstration que les travaux de reprise ne pouvaient pas être mis en œuvre dès le dépôt du rapport d'expertise ;
- le préjudice éventuel du maître d'ouvrage doit être apprécié le cas échéant en fonction du solde manifestement dû à la maîtrise d'œuvre ;
- les pertes d'exploitation de la communauté urbaine Caen la Mer ne sont pas justifiées ;
- elle ne peut être jugée solidaire alors qu'elle n'est pas liée par un contrat avec les autres intervenants à l'acte de construire et que l'article L. 111-24 du code de la construction et de l'habitation limite la responsabilité du contrôleur technique ;
- l'expert a limité sa responsabilité à 5%.
Par des mémoires, enregistrés les 24 janvier 2022 et 25 mai 2022, la société Baudin-Châteauneuf, représentée par Me Labrusse, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête de la SARL ECB et, par la voie de l'appel provoqué, de rejeter les conclusions de la communauté urbaine Caen la Mer à son encontre et de réformer le jugement en ce qu'il a alloué à la communauté urbaine une indemnité de 429 428,40 euros et l'a condamnée à supporter 30% de la charge de la réparation ;
2°) à titre subsidiaire, de réduire le montant des sommes allouées à la communauté urbaine Caen la Mer ;
3°) par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de condamner les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, CTI BAT, Qualiconsult et le bureau d'études Lequesne à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;
4°) de condamner toutes parties succombantes à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la seule norme qui s'imposait contractuellement à elle est le DTU 32.1 travaux de charpente métallique ;
- les interventions des sociétés CTI BAT et Sofresid Engineering ont créé une incompréhension ;
- il appartenait à la société CTI BAT de procéder au réglage des tirants au fur et à mesure du chargement des lisses par le verre ; elle a posé les vitrages sans respecter la méthodologie prévue ;
- la société Baudin-Châteauneuf n'est intervenue, dans un second temps, qu'à la demande de la maîtrise d'œuvre ;
- la coordination des travaux appartenait à la maîtrise d'œuvre et à l'OPC ;
- l'origine du sinistre est la conséquence d'un défaut de conception ;
- elle a confié l'intégralité des études techniques de la charpente au cabinet Leclerc qui a lui-même sous-traité le dimensionnement de la charpente au cabinet Lequesne, qui en est donc responsable ;
- sa part de responsabilité ne peut excéder 20% ;
- les sommes retenues par le tribunal administratif au titre des travaux de reprise sont manifestement surévaluées et devront être revues à de plus justes proportions ;
- leur indexation sur le coût de la construction doit être exclue alors qu'il n'est pas justifié par la collectivité publique qu'elle n'aurait pas été en mesure d'entreprendre les travaux de reprise à l'issue des opérations d'expertise ;
- la fourniture et la pose des vitrages étaient initialement à la charge
de CTI BAT, si bien que rien ne justifie de mettre à sa charge la somme de 76 920 euros pour leur remplacement ;
- le devis de la société CTI BAT du 5 janvier 2018 devait être retenu ;
- l'indemnisation du prototype n'est pas justifiée ;
- rien ne justifie de mettre à sa charge le remplacement des 247 tirants ;
- la perte d'exploitation n'est pas justifiée ;
- elle est fondée en cas de condamnation à appeler en garantie sur le fondement délictuel les différents intervenants à l'acte de construire dont la responsabilité a été retenue par l'expert judiciaire à savoir les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, CTI BAT, Qualiconsult et le bureau d'études Lequesne et ce dernier également sur un fondement contractuel dans le cadre de la sous-traitance.
Par un mémoire, enregistré le 24 mars 2022, la société CTI BAT, représentée par Me Hellot, demande à la cour :
1°) à titre principal, de confirmer le jugement du 28 juillet 2021 en ce qu'il a déclaré incompétente la juridiction administrative pour fixer la créance à son bilan et n'a pas indexé la condamnation sur l'index du coût de la construction et, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de rejeter toute condamnation et appel en garantie à son encontre et débouter la communauté urbaine Caen la Mer de sa demande au titre du préjudice d'exploitation ;
2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de condamner in solidum les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, Qualiconsult et Baudin-Châteauneuf à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;
3°) de condamner toutes parties succombantes à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la juridiction administrative est incompétente pour fixer une créance à son passif dès lors qu'elle a fait l'objet d'un plan de sauvegarde et de la nomination d'un mandataire et d'un administrateur judiciaires par jugement en date du 22 mars 2017 ;
- toute demande est irrecevable à son encontre, en application des
dispositions de l'article L. 622-21 du code de commerce, alors qu'elle est sous procédure de sauvegarde et faute de justification d'une déclaration de créance ;
- les premiers juges ont, à raison, refusé l'indexation sur le coût de la construction alors que la communauté urbaine de Caen la Mer n'a pas démontré qu'elle était dans l'incapacité technique et financière de réaliser les travaux au moment du dépôt du rapport d'expertise ;
- le préjudice d'exploitation allégué n'est pas établi ;
- l'expert judiciaire n'a pas précisé en quoi les vitrages posés n'auraient pas respecté les préconisations établies par le bureau d'études Lequesne ;
- il ne lui appartenait pas de compenser l'erreur de conception de la maîtrise d'œuvre ;
- les désordres liés à un défaut de conception, qu'elle a d'ailleurs signalés, étaient trop importants pour qu'elle puisse y pallier à son niveau ;
- la SARL ECB en est responsable alors qu'elle a rédigé le CCTP ;
- elle est fondée à demander à la société Jean Guervilly de la garantir en tant que mandataire solidaire en raison du manque de cohérence et de la mauvaise répartition à l'intérieur de l'équipe de conception des tâches ;
- elle est fondée à demander à la SARL ECB de la garantir pour n'avoir pas su apprécier la nécessaire cohérence entre la règlementation au titre du lot des murs rideaux et celle applicable au titre du lot charpente ;
- elle est fondée à demander à la société Qualiconsult de la garantir pour ne pas
avoir décelé les erreurs d'exécution, notamment au titre du lot charpente et ne pas avoir su
décelé les difficultés de la conception et les risques qui en découlaient ;
- elle est fondée à demander à la société Sofresid Engineering de la garantir au titre de la coordination, faute d'avoir constaté que l'entreprise Baudin-Châteauneuf ne procédait pas au réglage des tirants afin que puisse être prise une décision sur un arrêt de chantier ;
- elle est fondée à demander à la société Baudin Châteauneuf de la garantir pour les fautes commises quant au non-respect des exigences dimensionnelles et de flexion qui ont été portées à sa connaissance par la société CTI BAT et sans annoncer qu'elle était dans l'incapacité de les respecter ;
- il ne lui appartenait pas de supprimer les jeux de charpente pour la pose des
vitrages, la situation résultant d'une incapacité de la société Baudin-Châteauneuf à livrer une charpente qui respecte les dimensionnements demandés.
Par une ordonnance du 2 mai 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 25 mai 2022.
La société Jean Guervilly a produit un mémoire, enregistré le 30 septembre 2022.
II. Par une requête n° 21NT02696 et des mémoires, enregistrés les 28 septembre 2021, 28 février 2022, 24 mars 2022, 28 avril 2022 et 25 mai 2022, la communauté urbaine Caen la Mer, représentée par Me Bouthors-Neveu, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) de réformer le jugement du 28 juillet 2021 en condamnant solidairement les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, Qualiconsult, CTI BAT et Baudin-Châteauneuf à lui verser la somme de 384 482,40 euros toutes taxes comprises au titre des murs rideaux et la somme de 45 000 euros au titre de son préjudice d'exploitation, avec intérêts au taux légal à compter de l'introduction de la requête en vue de la désignation d'un expert, capitalisation des intérêts et indexation sur le dernier indice du coût de la construction publié au jour du dépôt du rapport d'expertise judiciaire, et de mettre à leur charge solidaire les frais liés à l'expertise, pour un total de 50 191,44 euros toutes taxes comprises ;
2°) de fixer au passif de la société CTI BAT les sommes de 384 482,40 euros toutes taxes comprises correspondant au coût des travaux de reprise des désordres, de 45 000 euros au titre de son préjudice d'exploitation, de 48 191,44 euros toutes taxes comprises au titre des frais d'expertise, de 2 000 euros au titre des frais d'avocat exposés pour son assistance pendant l'expertise, de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de rendre son arrêt commun et opposable à l'administrateur et à son mandataire judiciaires ;
3°) de rejeter les conclusions d'appel incident des sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, Qualiconsult, CTI BAT et Baudin-Châteauneuf et les conclusions de la société Jean Guervilly en paiement du solde du marché ;
4°) de mettre à la charge solidaire de autres parties la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la société Jean Guervilly est responsable pour un défaut de conception, de rédaction des CCTP et avoir mal réparti les tâches entre les entreprises et du fait des manquements de la SARL Lepourry et Bernard, son sous-traitant maître d'œuvre d'exécution, et du bureau d'études structures Lequesne intervenu pour leur compte ;
- la SARL ECB est responsable du fait des lacunes dans la rédaction des documents dont elle était chargée ;
- la société Sofresid engineering est responsable faute d'être intervenue auprès du maître d'œuvre d'exécution pour que le chantier soit arrêté ;
- la société Qualiconsult est responsable de ne pas avoir identifié le défaut de conception et les incohérences des référentiels de déformations à la lecture des pièces écrites du marché et qui n'a pas émis d'avis défavorable à la pose des vitrages malgré le non-respect de la méthodologie préconisée par le bureau d'études structure Lequesne ;
- la société CTI BAT est responsable du fait du non-respect des préconisations du bureau d'études structure Lequesne et pour défaut d'exécution dans la pose des vitrages ;
- la société Baudin-Châteauneuf est responsable du fait du non-respect des préconisations du bureau d'études structure Lequesne et pour défaut d'exécution dans le réglage des tirants ;
- les premiers juges n'auraient pas dû mettre hors de cause les sociétés Qualiconsult et Sofresid Engineering eu égard aux manquements qu'elles ont commis ;
- au vu de la jurisprudence, ils auraient dû inscrire sa créance au passif de la société CTI BAT et rendre sa décision commune et opposable à l'administrateur et à son mandataire judiciaires ;
- la part de responsabilité de chaque entreprise a été déterminée par l'expert ;
- le coût des travaux de reprise s'élève à la somme de 384 482,40 euros toutes taxes comprises, le préjudice d'exploitation à 45 000 euros et les dépens et frais d'assistance en cours d'expertise à la somme de 50 191,44 euros ;
- sa demande d'indexation sur le coût de la construction est justifiée par la crise sanitaire et l'obligation de mettre en concurrence des entreprises devant réparer les désordres ;
- la demande reconventionnelle de la société Guervilly en paiement du solde de ses honoraires est infondée par application de l'avenant n°3 signé par la maîtrise d'œuvre et alors que les condamnations de première instance ne sont pas assimilables à une levée des réserves ;
- le caractère conjoint d'un groupement ne fait pas obstacle à la condamnation solidaire de ceux de ses membres qui ont, par leur faute commune, contribué au dommage subi par le maître de l'ouvrage ;
- les différents intervenants défendeurs ne peuvent que voir leur responsabilité solidaire engagée dans la mesure où ils ont tous concouru au même désordre ;
- l'indemnité due par les constructeurs au maître de l'ouvrage en réparation de désordres
affectant l'ouvrage doit comprendre la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) que l'administration non exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée supporte pour les travaux de réfection des désordres affectant l'immeuble, quand bien même elle bénéficie du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) ;
- le prototype était nécessaire dans le cadre de la reprise des désordres et n'a
aucunement été source d'un enrichissement de la collectivité ;
- l'expert s'est basé sur le dernier devis transmis ;
- les pertes d'exploitation sont établies alors que la fermeture de la piscine s'imposait durant les travaux de reprise des désordres, qu'elle n'avait pas reçu les fonds pour entreprendre les travaux et que la crise sanitaire a limité ses marges de manœuvre ;
- la demande reconventionnelle présentée par la SARL Jean Guervilly en paiement du solde du marché de maîtrise d'œuvre est irrecevable faute de réclamation préalable en application de l'article 37 du CCAG des marchés publics de prestations intellectuelles.
Par un mémoire, enregistré le 25 octobre 2021, la SARL ECB, représentée par Me Bouchard, demande à la cour :
1°) à titre principal, d'annuler le jugement du 28 juillet 2021 et de rejeter la demande de la communauté urbaine Caen la Mer présentée devant le tribunal administratif ;
2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de réformer le jugement du 28 juillet 2021 en limitant le montant de la condamnation prononcée à son égard à 5% de l'ensemble des condamnations et de les prononcer hors taxes et sans condamnation à garantir d'autres parties ;
3°) à titre infiniment subsidiaire, par la voie de l'appel provoqué, de condamner les sociétés Jean Guervilly, CTI BAT, ECB, Sofresid engineering et Baudin-Châteauneuf à la garantir de tout condamnation prononcée à son égard au-delà de 5% de l'ensemble des condamnations ;
4°) de mettre à la charge de la communauté urbaine Caen la Mer la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les déformations admissibles pour les ouvrages du " lot charpente métallique " ont été déterminées par les bureaux d'études Lequesne et BSO, chargés des plans de l'étude de projet et de toutes pièces à caractère technique, si bien qu'elle n'est pas responsable du dommage, son rôle se limitant à la description des ouvrages sur la base de ces éléments ;
- la société Baudin-Châteauneuf ne pouvait ignorer le risque auquel était exposé la charpente métallique ;
- le bureau d'études Lequesne s'est rendu compte du manque de cohérence entre la charpente et les murs rideaux ce qui l'a conduit à élaborer une méthodologie pour y pallier, qui n'a pas été ou a été mal mise en œuvre ;
- les entreprises, notamment la société Baudin-Châteauneuf chargé des plans d'exécution, étaient avisées de la difficulté mais n'ont pas exécuté convenablement une méthodologie de pose permettant de compenser la déformation de la structure ;
- le tribunal ne pouvait mettre à sa charge plus que la part de 5% retenue par l'expert ;
- le prototype ne fait pas partie des sommes convenues dans le contrat de construction ;
- le préjudice de perte d'exploitation n'est pas justifié par les dommages subis par les vitrages.
Par un mémoire, enregistré le 19 janvier 2022, la société Qualiconsult, représentée par Me Launey, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter l'ensemble des conclusions formées en cause d'appel contre elle ;
2°) à titre subsidiaire, en cas de réformation du jugement attaqué, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de rejeter les conclusions de la communauté urbaine de Caen la Mer au titre de ses pertes d'exploitations, de la taxe sur la valeur ajoutée et de l'indexation sur l'indice du coût des travaux et de limiter tout condamnation éventuelle à la somme de 320 357 euros hors taxes et à une quote-part maximale de 5%, de le réformer en ce qu'il a alloué à la communauté urbaine de Caen la Mer la somme de 384 428,40 euros toutes taxes comprises au titre des travaux de reprise et de 45 000 euros au titre d'une perte d'exploitation et de condamner les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, CTI BAT et Baudin-Châteauneuf à la garantir de toutes condamnations ;
3°) de condamner in solidum toutes parties succombantes aux dépens et à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le contrôleur technique n'est pas débiteur de la garantie de parfait achèvement qui constitue une obligation de faire des travaux, incombant exclusivement aux constructeurs ayant réalisé l'ouvrage ;
- sa responsabilité quasi-délictuelle en tant que contrôleur technique, au regard des articles L. 111-23 à L. 111-25 du code de la construction et de l'habitation et 4.1.7 de la norme AFNOR NF P 03-100 n'est pas susceptible d'être engagée alors qu'elle a rempli ses propres obligations, notamment en faisant des observations sur les déformations admissibles du vitrage et qu'aucune norme applicable méconnue ne lui est opposée ;
- le dommage résulte de la mauvaise exécution par les sociétés CTI BAT et Baudin-Châteauneuf de la méthodologie de pose des vitrages et l'insuffisance de coordination assurée par le maître d'œuvre d'exécution, du fait de la rédaction du CCTP par le bureau d'études Lequesne et parce que celui-ci, la société Jean Guervilly et la société Sofresid Engineering n'ont pas suspendu les travaux ;
- elle ne s'est pas désintéressée de sa mission puisqu'elle a émis un avis relatif notamment
à l'admissibilité des vitrages à supporter une flèche de 10 mm du support ;
- il ne lui appartenait pas d'émettre un " avis défavorable " sur la pose des vitrages compte
tenu du non-respect de la méthodologie proposée par le bureau d'étude Lequesne ;
- en tout état de cause, les entreprises étaient déjà averties par le maître d'œuvre du problème rencontré, dont elles n'ont pas tenu compte ;
- le montant de 320 402 euros retenu par l'expert comporte des tirants non nécessaires au regard du prototype réalisé par l'entreprise en cours d'expertise ;
- les indemnisations devaient être prononcées hors TVA par application du 1er alinéa de l'article 256 B du code général des impôts faute pour la communauté urbaine de Caen la Mer de démontrer qu'elle y est assujettie et qu'elle ne bénéficierait pas du FCTVA ;
- l'indexation sur le coût des travaux ne se justifie pas à défaut de démonstration que les travaux de reprise ne pouvaient pas être mis en œuvre dès le dépôt du rapport d'expertise ;
- le préjudice éventuel du maître d'ouvrage doit être apprécié le cas échéant en fonction du solde manifestement dû à la maîtrise d'œuvre ;
- les pertes d'exploitation de la communauté urbaine Caen la Mer ne sont pas justifiées ;
- elle ne peut être jugée solidaire alors qu'elle n'est pas liée par un contrat avec les autres intervenants à l'acte de construire et que l'article L. 111-24 du code de la construction et de l'habitation limite la responsabilité du contrôleur technique ;
- l'expert a limité sa responsabilité à 5%.
Par des mémoires, enregistrés les 24 janvier 2022 et 25 mai 2022, la société Baudin-Châteauneuf, représentée par Me Labrusse, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête de la communauté urbaine Caen la Mer, de réformer le jugement du 28 juillet 2021 en ce qu'il a alloué à la communauté urbaine une indemnité de 429 428,40 euros et l'a condamnée à supporter 30% de la charge de la condamnation et de rejeter ces demandes à son encontre ;
2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel incident, de réduire le montant des sommes allouées à la communauté urbaine Caen la Mer ;
3°) par la voie de l'appel provoqué, de condamner les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, CTI BAT, Qualiconsult et le bureau d'études Lequesne à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;
4°) de condamner toutes parties succombantes à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la seule norme qui s'imposait contractuellement à elle est le DTU 32.1 travaux de charpente métallique ;
- les interventions des sociétés CTI BAT et Sofresid Engineering ont créé une incompréhension ;
- il appartenait à la société CTI BAT de procéder au réglage des tirants au fur et à mesure du chargement des lisses par le verre ; elle a posé les vitrages sans respecter la méthodologie prévue ;
- la société Baudin-Châteauneuf n'est intervenue, dans un second temps, qu'à la demande de la maîtrise d'œuvre ;
- la coordination des travaux appartenait à la maîtrise d'œuvre et à l'OPC ;
- l'origine du sinistre est la conséquence d'un défaut de conception ;
- elle a confié l'intégralité des études techniques de la charpente au cabinet Leclerc qui a lui-même sous-traité le dimensionnement de la charpente au cabinet Lequesne, qui en est donc responsable ;
- sa part de responsabilité ne peut excéder 20% ;
- les sommes retenues par le tribunal administratif au titre des travaux de reprise sont manifestement surévaluées et devront être revues à de plus justes proportions ;
- leur indexation sur le coût de la construction doit être exclue alors qu'il n'est pas justifié par la collectivité publique qu'elle n'aurait pas été en mesure d'entreprendre les travaux de reprise à l'issue des opérations d'expertise ;
- la fourniture et la pose des vitrages étaient initialement à la charge
de CTI BAT, si bien que rien ne justifie de mettre à sa charge la somme de 76 920 euros pour leur remplacement ;
- le devis de la société CTI BAT du 5 janvier 2018 devait être retenu ;
- l'indemnisation du prototype n'est pas justifiée ;
- rien ne justifie de mettre à sa charge le remplacement des 247 tirants ;
- la perte d'exploitation n'est pas justifiée ;
- elle est fondée en cas de condamnation à appeler en garantie sur le fondement délictuel les différents intervenants à l'acte de construire dont la responsabilité a été retenue par l'expert judiciaire à savoir les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, CTI BAT, Qualiconsult et le bureau d'études Lequesne et ce dernier également sur un fondement contractuel dans le cadre de la sous-traitance.
Par un mémoire, enregistré le 24 mars 2022, la société CTI BAT, représentée par Me Hellot, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter l'ensemble des conclusions formées en cause d'appel contre elle ;
2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel provoqué, de condamner in solidum les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, Qualiconsult et Baudin-Châteauneuf à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;
3°) de condamner toutes parties succombantes à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la juridiction administrative est incompétente pour fixer une créance à son passif dès lors qu'elle a fait l'objet d'un plan de sauvegarde et de la nomination d'un mandataire et d'un administrateur judiciaires par jugement en date du 22 mars 2017 ;
- toute demande est irrecevable à son encontre, en application des
dispositions de l'article L. 622-21 du code de commerce, alors qu'elle est sous procédure de sauvegarde et faute de justification d'une déclaration de créance ;
- l'expert judiciaire n'a pas précisé en quoi les vitrages posés n'auraient pas respecté les préconisations établies par le bureau d'études Lequesne ;
- il ne lui appartenait pas de compenser l'erreur de conception de la maîtrise d'œuvre ;
- les désordres liés à un défaut de conception, qu'elle a d'ailleurs signalés, étaient trop importants pour qu'elle puisse y pallier à son niveau ;
- le préjudice d'exploitation allégué n'est pas établi ;
- elle est fondée à demander à la société Jean Guervilly de la garantir en tant que mandataire solidaire en raison du manque de cohérence et de la mauvaise répartition à l'intérieur de l'équipe de conception des tâches ;
- elle est fondée à demander à la SARL ECB de la garantir pour n'avoir pas su apprécier la nécessaire cohérence entre la règlementation au titre du lot des murs rideaux et celle applicable au titre du lot charpente ;
- elle est fondée à demander à la société Qualiconsult de la garantir pour ne pas
avoir décelé les erreurs d'exécution, notamment au titre du lot charpente, et ne pas avoir su
décelé les difficultés de la conception et les risques qui en découlaient ;
- elle est fondée à demander à la société Sofresid Engineering de la garantir au titre de la coordination, faute d'avoir constaté que l'entreprise Baudin-Châteauneuf ne procédait pas au réglage des tirants afin que puisse être prise une décision sur un arrêt de chantier ;
- elle est fondée à demander à la société Baudin-Châteauneuf de la garantir pour les fautes commises quant au non-respect des exigences dimensionnelles et de flexion qui ont été portées à sa connaissance par la société CTI BAT et sans annoncer qu'elle était dans l'incapacité de les respecter ;
- il ne lui appartenait pas de supprimer les jeux de charpente pour la pose des
vitrages, la situation résultant d'une incapacité de la société Baudin-Châteauneuf à livrer une charpente qui respecte les dimensionnements demandés.
III. Par une requête n° 21NT02730, enregistrée le 30 septembre 2021, la société Jean Guervilly, représentée par Me Griffiths, demande à la cour :
1°) à titre principal, d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 28 juillet 2021 en tant qu'il l'a condamnée et de rejeter les demandes formées à son encontre ;
2°) à titre subsidiaire, de limiter sa responsabilité à 12,5% de l'ensemble des condamnations prononcées au profit de la communauté urbaine Caen la Mer, en excluant sa condamnation solidaire et au coût des travaux de reprise hors taxes ou avec une taxe sur la valeur ajoutée réduite à 10% ;
3°) à titre plus subsidiaire, de condamner les sociétés ECB, Sofresid Engineering, Qualiconsult, CTI BAT et Baudin-Chateauneuf à la garantir de toutes sommes mises à sa charge au profit de la communauté urbaine Caen la Mer ;
4°) de condamner la communauté urbaine Caen la Mer à lui régler la somme de 101 865,09 euros toutes taxes comprises en qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'œuvre ;
5°) de condamner tout succombant à lui verser la somme de 15 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle n'a commis aucune faute, de même que ses sous-traitants ;
- la rédaction du CCTP incombait à la SARL ECB, qui à dire de l'expert aurait dû solliciter l'aide d'un bureau d'études ;
- il appartenait aux entreprises de réaliser des études complémentaires au stade de l'exécution pour assurer une cohésion entre la charpente métallique et les murs rideaux ;
- le bureau d'études Lequesne, qui n'est pas sous-traitant du cabinet Lepourry-Bernard mais est intervenu en cours d'exécution du chantier comme sous-traitant de la société Baudin-Châteauneuf pour résoudre le problème rencontré, n'a pas été sollicité à cet égard ;
- le cabinet Lepourry-Bernard avait fait réaliser des prototypes pour éviter des approximations au moment de l'exécution et le bureau d'études Lequesne a diffusé une méthodologie précise de mise en œuvre en phase d'exécution du chantier, qui n'ont donné lieu à aucun retour des entreprises ;
- la décision d'arrêter le chantier, à la supposer justifiée et possible, appartenait en tout état de cause à la société Sofresid Engineering ;
- les préjudices de la communauté urbaine Caen la Mer ne sont pas établis ;
- la communauté urbaine Caen le Mer ne justifie pas de son assujettissement à la TVA ;
- il n'existe aucune solidarité légale entre constructeurs pour des désordres survenus avant réception des travaux ;
- le fait qu'elle soit mandataire du groupement de maîtrise d'œuvre n'implique pas de la considérer comme solidaire ;
- elle doit être garantie par la SARL ECB du fait de ses erreurs de conception, les sociétés Baudin Châteauneuf et CTI BAT du fait de leurs défauts d'exécution et non-respect de la méthodologie de montage des ouvrages et les sociétés Sofresid Engineering et Qualiconsult du fait de leur absence de réactions face aux difficultés rencontrées ;
- elle a droit par ailleurs au règlement de ses honoraires à hauteur de 101 865,09 euros toutes taxes comprises.
Par un mémoire, enregistré le 25 octobre 2021, la SARL ECB, représentée par Me Bouchard, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête de la société Jean Guervilly en tant qu'elle est dirigée contre elle, et, par la voie de l'appel provoqué, d'annuler le jugement du 28 juillet 2021 et de rejeter la demande de la communauté urbaine Caen la Mer ;
2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de réformer le jugement du 28 juillet 2021 en limitant le montant de la condamnation prononcée à son égard à 5% de l'ensemble des condamnations et de les prononcer hors taxes et sans condamnation à garantir d'autres parties ;
3°) à titre infiniment subsidiaire, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de condamner les sociétés Jean Guervilly, CTI BAT, ECB, Sofresid engineering et Baudin-Châteauneuf à la garantir de tout condamnation prononcée à son égard au-delà de 5% de l'ensemble des condamnations ;
4°) de mettre à la charge de la communauté urbaine Caen la Mer la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les déformations admissibles pour les ouvrages du " lot charpente métallique " ont été déterminées par les bureaux d'études Lequesne et BSO, chargés des plans de l'étude de projet et de toutes pièces à caractère technique, si bien qu'elle n'est pas responsable du dommage, son rôle se limitant à la description des ouvrages sur la base de ces éléments ;
- la société Baudin-Châteauneuf ne pouvait ignorer le risque auquel était exposé la charpente métallique ;
- le bureau d'études Lequesne s'est rendu compte du manque de cohérence entre la charpente et les murs rideaux ce qui l'a conduit à élaborer une méthodologie pour y pallier, qui n'a pas été ou a été mal mise en œuvre ;
- les entreprises, notamment la société Baudin-Châteauneuf, chargées des plans d'exécution, étaient avisées de la difficulté mais n'ont pas exécuté convenablement une méthodologie de pose permettant de compenser la déformation de la structure ;
- le tribunal ne pouvait mettre à sa charge plus que la part de 5% retenue par l'expert ;
- le prototype ne fait pas partie des sommes convenues dans le contrat de construction ;
- le préjudice de perte d'exploitation n'est pas justifié par les dommages subis par les vitrages.
Par des mémoires, enregistrés les 16 novembre 2021 et 8 mars 2022, la société Sofresid engineering, représentée par Me Majerholc-Oiknine, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête de la société Jean Guervilly et de rejeter l'ensemble des conclusions formées en cause d'appel contre elle ;
2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de limiter à 10 737,06 euros toutes taxes comprises le montant total des condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre et d'exclure toute solidarité dans ces condamnations ;
3°) à titre plus subsidiaire, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de condamner in solidum toutes autres parties succombantes à la garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre au-delà de la somme de 10 737,06 euros ;
4°) de condamner in solidum toutes parties succombantes à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à raison que les premiers juges ont écarté sa responsabilité malgré l'avis de l'expert alors que conformément à l'article 10 du décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993, le rôle de la personne en charge de l'ordonnancement, du pilotage et de la coordination (OPC) est spécifique et circonscrit si bien qu'elle ne se substitue pas au maître d'œuvre pour assurer la direction de l'exécution des travaux (DET) ;
- aucune disposition du CCTP ne lui confiait la mission d'apprécier
la valeur d'une proposition de méthodologie non contractuelle de montage des vitrages, et
encore moins de l'imposer aux entreprises, ni ne lui permettait de s'immiscer
dans des validations techniques spécifiques ou dans la procédure de montage des murs
rideaux des sociétés Baudin-Châteauneuf et CTI BAT pour imposer une méthodologie de montage des vitrages qui n'était que préconisée par le bureau d'études structure Lequesne ;
- la SARL Jean Guervilly n'a jamais notifié aux entreprises que la méthodologie du bureau d'études Lequesne devait être mise en œuvre ;
- les intervenants à l'opération ne peuvent être solidairement tenus envers le
maître de l'ouvrage que dans le cadre d'une solidarité légale ou conventionnelle en application de l'article 1310 du code civil, totalement exclue en l'espèce ;
- elle ne fait pas partie du groupement de maîtrise d'œuvre et n'a pas commis de fautes
indivisibles avec les autres défendeurs ayant entrainé la réalisation d'un dommage unique justifiant qu'elle garantisse d'autres intervenants ;
- sa condamnation ne saurait, en tout état de cause, excéder la part de 2,5 %
conformément à l'avis de l'expert, pour un total de 10 737,06 euros ;
- les préjudices de la communauté urbaine Caen la Mer ne sont pas établis.
Par un mémoire, enregistré le 19 janvier 2022, la société Qualiconsult, représentée par Me Launey, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête de la société Jean Guervilly, et de rejeter l'ensemble des conclusions formées en cause d'appel contre elle ;
2°) à titre subsidiaire, en cas de réformation du jugement attaqué, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de rejeter les conclusions de la communauté urbaine de Caen la Mer au titre de ses pertes d'exploitations, de la taxe sur la valeur ajoutée et de l'indexation sur l'indice du coût des travaux et de limiter tout condamnation éventuelle à la somme de 320 357 euros hors taxes et à une quote-part maximale de 5%, de le réformer en ce qu'il a alloué à la communauté urbaine de Caen la Mer la somme de 384 428,40 euros toutes taxes comprises au titre des travaux de reprise et de 45 000 euros au titre d'une perte d'exploitation et de condamner les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, CTI BAT et Baudin-Châteauneuf à la garantir de toutes condamnations ;
3°) de condamner in solidum toutes parties succombantes aux dépens et à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa responsabilité quasi-délictuelle en tant que contrôleur technique, au regard des articles L. 111-23 à L. 111-25 du code de la construction et de l'habitation et 4.1.7 de la norme AFNOR NF P 03-100 n'est pas susceptible d'être engagée alors qu'elle a rempli ses propres obligations, notamment en faisant des observations sur les déformations admissibles du vitrage et qu'aucune norme applicable méconnue ne lui est opposée ;
- le dommage résulte de la mauvaise exécution par les sociétés CTI BAT et Baudin-Châteauneuf de la méthodologie de pose des vitrages et l'insuffisance de coordination assurée par le maître d'œuvre d'exécution, du fait de la rédaction du CCTP par le bureau d'études Lequesne et parce que celui-ci, la société Jean Guervilly et la société Sofresid Engineering n'ont pas suspendu les travaux ;
- elle ne s'est pas désintéressée de sa mission puisqu'elle a émis un avis relatif notamment
à l'admissibilité des vitrages à supporter une flèche de 10 mm du support ;
- il ne lui appartenait pas d'émettre un " avis défavorable " sur la pose des vitrages compte
tenu du non-respect de la méthodologie proposée par le bureau d'étude Lequesne ;
- en tout état de cause, les entreprises étaient déjà averties par le maître d'œuvre du problème rencontré, dont elles n'ont pas tenu compte ;
- le montant de 320 402 euros retenu par l'expert comporte des tirants non nécessaires au regard du prototype réalisé par l'entreprise en cours d'expertise ;
- les indemnisations devaient être prononcées hors TVA par application du 1er alinéa de l'article 256 B du code général des impôts faute pour la communauté urbaine de Caen la Mer de démontrer qu'elle y est assujettie et qu'elle ne bénéficierait pas du FCTVA ;
- l'indexation sur le coût des travaux ne se justifie pas à défaut de démonstration que les travaux de reprise ne pouvaient pas être mis en œuvre dès le dépôt du rapport d'expertise ;
- le préjudice éventuel du maître d'ouvrage doit être apprécié le cas échéant en fonction du solde manifestement dû à la maîtrise d'œuvre ;
- les pertes d'exploitation de la communauté urbaine Caen la Mer ne sont pas justifiées ;
- elle ne peut être jugée solidaire alors qu'elle n'est pas liée par un contrat avec les autres intervenants à l'acte de construire et que l'article L. 111-24 du code de la construction et de l'habitation limite la responsabilité du contrôleur technique ;
- l'expert a limité sa responsabilité à 5%.
Par des mémoires, enregistrés les 24 janvier 2022 et 25 mai 2022, la société Baudin-Châteauneuf, représentée par Me Labrusse, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête de la SARL Jean Guervilly et, par la voie de l'appel provoqué, de rejeter les conclusions de la communauté urbaine Caen la Mer à son encontre, et de réformer le jugement du 28 juillet 2021 en ce qu'il a alloué à la communauté urbaine une indemnité de 429 428,40 euros et l'a condamnée à supporter 30% de la charge de la condamnation ;
2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel provoqué, de réduire le montant des sommes allouées à la communauté urbaine Caen la Mer ;
3°) de condamner les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, CTI BAT, Qualiconsult et le bureau d'études Lequesne à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;
4°) de condamner toutes parties succombantes à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la seule norme qui s'imposait contractuellement à elle est le DTU 32.1 travaux de charpente métallique ;
- les interventions des sociétés CTI BAT et Sofresid Engineering ont créé une incompréhension ;
- il appartenait à la société CTI BAT de procéder au réglage des tirants au fur et à mesure du chargement des lisses par le verre ; elle a posé les vitrages sans respecter la méthodologie prévue ;
- la société Baudin-Châteauneuf n'est intervenue, dans un second temps, qu'à la demande de la maîtrise d'œuvre ;
- la coordination des travaux appartenait à la maîtrise d'œuvre et à l'OPC ;
- l'origine du sinistre est la conséquence d'un défaut de conception ;
- elle a confié l'intégralité des études techniques de la charpente au cabinet Leclerc qui a lui-même sous-traité le dimensionnement de la charpente au cabinet Lequesne, qui en est donc responsable ;
- sa part de responsabilité ne peut excéder 20% ;
- les sommes retenues par le tribunal administratif au titre des travaux de reprise sont manifestement surévaluées et devront être revues à de plus justes proportions ;
- leur indexation sur le coût de la construction doit être exclue alors qu'il n'est pas justifié par la collectivité publique qu'elle n'aurait pas été en mesure d'entreprendre les travaux de reprise à l'issue des opérations d'expertise ;
- la fourniture et la pose des vitrages étaient initialement à la charge
de CTI BAT, si bien que rien ne justifie de mettre à sa charge la somme de 76 920 euros pour leur remplacement ;
- le devis de la société CTI BAT du 5 janvier 2018 devait être retenu ;
- l'indemnisation du prototype n'est pas justifiée ;
- rien ne justifie de mettre à sa charge le remplacement des 247 tirants ;
- la perte d'exploitation n'est pas justifiée ;
- elle est fondée en cas de condamnation à appeler en garantie sur le fondement délictuel les différents intervenants à l'acte de construire dont la responsabilité a été retenue par l'expert judiciaire, à savoir les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, CTI BAT, Qualiconsult et le bureau d'études Lequesne et ce dernier également sur un fondement contractuel dans le cadre de la sous-traitance.
Par des mémoires, enregistrés les 28 février 2022, 24 mars 2022, 28 avril 2022 et 25 mai 2022, la communauté urbaine Caen la Mer, représentée par Me Bouthors-Neveu, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) de rejeter la requête de la SARL Jean Guervilly, ainsi que, par la voie de l'appel provoqué, les conclusions des sociétés ECB, Sofresid Engineering, Qualiconsult, CTI BAT et Baudin-Châteauneuf et, par la voie de l'appel incident, les conclusions de la société Jean Guervilly en paiement du solde du marché ;
2°) par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de réformer le jugement du 28 juillet 2021 en condamnant solidairement les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, Qualiconsult, CTI BAT et Baudin-Châteauneuf à lui verser la somme de 384 482,40 euros toutes taxes comprises au titre des murs rideaux et la somme de 45 000 euros au titre de son préjudice d'exploitation, avec intérêts au taux légal à compter de l'introduction de la requête en vue de la désignation d'un expert, capitalisation des intérêts et indexation sur le dernier indice du coût de la construction publié au jour du dépôt du rapport d'expertise judiciaire et de mettre à leur charge solidaire les frais liés à l'expertise, pour un total de 50 191,44 euros toutes taxes comprises ;
3°) de fixer au passif de la société CTI BAT les sommes de 384 482,40 euros toutes taxes comprises correspondant au coût des travaux de reprise des désordres, de 45 000 euros au titre de son préjudice d'exploitation, de 48 191,44 euros toutes taxes comprises au titre des frais d'expertise, de 2 000 euros au titre des frais d'avocat exposés pour son assistance pendant l'expertise, de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de rendre son arrêt commun et opposable à l'administrateur et à son mandataire judiciaires ;
4°) de mettre à la charge solidaire de autres parties la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les manquements relevés par l'expert, liés au cahier des clauses techniques particulières (CCTP) sont imputables à la maîtrise d'œuvre ;
- la société Jean Guervilly est responsable pour un défaut de conception, de rédaction des CCTP et avoir mal réparti les tâches entre les entreprises et du fait des manquements de la SARL Lepourry et Bernard, son sous-traitant maître d'œuvre d'exécution et du bureau d'études structure Lequesne intervenu pour leur compte ;
- la maîtrise d'œuvre aurait dû interrompre les travaux de pose des vitrages ;
- la société Sofresid Engineering est responsable faute d'être intervenue auprès du maître d'œuvre d'exécution pour que le chantier soit arrêté ;
- la société Qualiconsult est responsable de ne pas avoir identifié le défaut de conception et les incohérences des référentiels de déformations à la lecture des pièces écrites du marché et n'a pas émis d'avis défavorable à la pose des vitrages malgré le non-respect de la méthodologie préconisée par le bureau d'études structures Lequesne ;
- la société CTI BAT est responsable du fait du non-respect des préconisations du bureau d'études structure Lequesne et pour défaut d'exécution dans la pose des vitrages ;
- la société Baudin-Châteauneuf est responsable du fait du non-respect des préconisations du bureau d'études structures Lequesne et pour défaut d'exécution dans le réglage des tirants ;
- la part de responsabilité de chaque entreprise a été déterminée par l'expert ;
- l'indemnité due par les constructeurs au maître de l'ouvrage en réparation de désordres
affectant l'ouvrage doit comprendre la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) que l'administration non exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée supporte pour les travaux de réfection des désordres affectant l'immeuble, quand bien même elle bénéficie du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) ;
- le prototype était nécessaire dans le cadre de la reprise des désordres et n'a
aucunement été source d'un enrichissement de la collectivité ;
- les pertes d'exploitation sont établies alors que la fermeture de la piscine s'imposait durant les travaux de reprise des désordres, qu'elle n'avait pas reçu les fonds pour entreprendre les travaux et que la crise sanitaire a limité ses marges de manœuvre ;
- l'expert s'est basé sur le dernier devis transmis ;
- les premiers juges n'auraient pas dû mettre hors de cause les sociétés Qualiconsult et Sofresid Engineering eu égard aux manquements qu'elles ont commis ;
- au vu de la jurisprudence, ils auraient dû inscrire sa créance au passif de la société CTI BAT et rendre sa décision commune et opposable à l'administrateur et à son mandataire judiciaires ;
- le coût des travaux de reprise s'élève à la somme de 384 482,40 euros toutes taxes comprises, le préjudice d'exploitation à 45 000 euros et les dépens et frais d'assistance en cours d'expertise à la somme de 50 191,44 euros ;
- sa demande d'indexation sur le coût de la construction est justifiée par la crise sanitaire et l'obligation de mettre en concurrence des entreprises devant réparer les désordres ;
- la demande reconventionnelle de la société Guervilly en paiement du solde de ses honoraires est infondée par application de l'avenant n°3 signé par la maîtrise d'œuvre et alors que les condamnations de première instance ne sont pas assimilables à une levée des réserves ;
- la demande reconventionnelle présentée par la SARL Jean Guervilly en paiement de solde est irrecevable faute de réclamation préalable en application de l'article 37 du CCAG des marchés publics de prestations intellectuelles.
Par un mémoire, enregistré le 24 mars 2022, la société CTI BAT, représentée par Me Hellot, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête de la société Jean Guervilly et, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de rejeter toute condamnation et appel en garantie à son encontre et débouter la communauté urbaine Caen la Mer de sa demande au titre du préjudice d'exploitation ;
2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de condamner in solidum les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, Qualiconsult et Baudin-Châteauneuf à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;
3°) de condamner toutes parties succombantes à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la juridiction administrative est incompétente pour fixer une créance à son passif dès lors qu'elle a fait l'objet d'un plan de sauvegarde et de la nomination d'un mandataire et d'un administrateur judiciaires par jugement en date du 22 mars 2017 ;
- toute demande est irrecevable à son encontre, en application des
dispositions de l'article L. 622-21 du code de commerce, alors qu'elle est sous procédure de sauvegarde et faute de justification d'une déclaration de créance ;
- l'expert judiciaire n'a pas précisé en quoi les vitrages posés n'auraient pas respecté les préconisations établies par le bureau d'études Lequesne ;
- il ne lui appartenait pas de compenser l'erreur de conception de la maîtrise d'œuvre ;
- les désordres liés à un défaut de conception, qu'elle a d'ailleurs signalés, étaient trop importants pour qu'elle puisse y pallier à son niveau ;
- le préjudice d'exploitation allégué n'est pas établi ;
- elle est fondée à demander à la société Jean Guervilly de la garantir en tant que mandataire solidaire en raison du manque de cohérence et de la mauvaise répartition à l'intérieur de l'équipe de conception des tâches ;
- elle est fondée à demander à la SARL ECB de la garantir pour n'avoir pas su apprécier la nécessaire cohérence entre la règlementation au titre du lot des murs rideaux et celle applicable au titre du lot charpente ;
- elle est fondée à demander à la société Qualiconsult de la garantir pour ne pas
avoir décelé les erreurs d'exécution, notamment au titre du lot charpente et ne pas avoir su
déceler les difficultés de la conception et les risques qui en découlaient ;
- elle est fondée à demander à la société Sofresid Engineering de la garantir au titre de la coordination, faute d'avoir constaté que l'entreprise Baudin-Châteauneuf ne procédait pas au réglage des tirants afin que puisse être prise une décision sur un arrêt de chantier ;
- elle est fondée à demander à la société Baudin-Châteauneuf de la garantir pour les fautes commises quant au non-respect des exigences dimensionnelles et de flexion qui ont été portées à sa connaissance par la société CTI BAT et sans annoncer qu'elle était dans l'incapacité de les respecter ;
- il ne lui appartenait pas de supprimer les jeux de charpente pour la pose des
vitrages, la situation résultant d'une incapacité de la société Baudin-Châteauneuf à livrer une charpente qui respecte les dimensionnements demandés.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code civil ;
- le code de commerce ;
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code général des impôts ;
- le code des marchés publics ;
- le décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 ;
- l'arrêté du 16 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Derlange, président assesseur,
- les conclusions de M. Pons, rapporteur public,
- et les observations de Me Bouthors, pour la communauté urbaine Caen la Mer, de Me Spoerry pour la société Qualiconsult et de Me Hellot pour la société CTI BAT.
Considérant ce qui suit :
1. La communauté d'agglomération devenue communauté urbaine Caen la Mer a passé un marché public de travaux pour la restructuration du stade nautique de Caen. La maîtrise d'œuvre a été confiée, par acte d'engagement du 21 décembre 2010, à un groupement conjoint composé notamment de la société Jean Guervilly, architecte, mandataire solidaire, la société Economie et coordination en bâtiments (ECB), économiste de la construction, ainsi que le bureau d'études techniques BSO. Par acte d'engagement du 25 mars 2011, la mission de contrôle technique a été confiée à la société Qualiconsult. Par acte d'engagement du 9 janvier 2012, la mission de l'ordonnancement, du pilotage et de la coordination (OPC) a été confiée à la société Sofresid Engineering. Par deux actes d'engagement du 2 octobre 2012, le lot n° 4 " charpente métallique " a été confié à la société Baudin-Châteauneuf et le lot n° 6 " menuiseries aluminium - façades rideaux - bardage " a été confié à la société CTI BAT. La réception des lots n° 4 et n° 6 a été prononcée le 16 mai 2014 avec des réserves notamment au sujet des murs rideaux du fait de la rupture de vitrages ou de l'impossibilité de les mettre en place comme prévu. La communauté d'agglomération Caen la Mer a formé une demande d'expertise judiciaire à laquelle le juge des référés du tribunal administratif a fait droit par ordonnance du 3 octobre 2014. L'expert désigné a remis son rapport le 22 novembre 2018. La communauté urbaine Caen la Mer, qui a succédé à la communauté d'agglomération Caen la Mer, a saisi le tribunal administratif de Caen aux fins de voir condamner les sociétés Jean Guervilly, ECB, Qualiconsult, Sofresid Engineering, Baudin-Châteauneuf et CTI BAT à l'indemniser en raison des désordres constatés sur ces murs rideaux. Par un jugement du 28 juillet 2021, le tribunal administratif de Caen, d'une part, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, a condamné solidairement les sociétés Jean Guervilly, CTI BAT, ECB et Baudin-Châteauneuf à verser la somme de 429 428,40 euros, assortie des intérêts et de leur capitalisation, à la communauté urbaine Caen la Mer, en réparation du coût de la reprise des désordres et du préjudice d'exploitation (article 1er), et a mis à leur charge solidaire les frais d'expertise s'élevant à 48 191,44 euros (article 2), d'autre part, a condamné la société Jean Guervilly à garantir la société ECB à hauteur de 39,5 % de la part excédant 5 % des condamnations prononcées aux articles 1er et 2, et les sociétés CTI BAT et Baudin-Châteauneuf à garantir la société ECB à hauteur respectivement de 20 % et de 30 % de ces mêmes condamnations dans les mêmes conditions (article 3), a condamné la société ECB à garantir la société Jean Guervilly à hauteur de 10,5 % du montant total des condamnations prononcées aux articles 1er et 2, la société CTI BAT à garantir la société Jean Guervilly à hauteur de 20 % de ce montant et la société Baudin-Châteauneuf à garantir la société Jean Guervilly à hauteur de 30 % dudit montant (article 4), a condamné la société ECB à garantir la société CTI BAT à hauteur de 10,5 %, la société Jean Guervilly à garantir la société CTI BAT à hauteur de 39,5 % et la société Baudin-Châteauneuf à garantir la société CTI BAT à hauteur de 30 % (article 5), a condamné la société ECB à garantir la société Baudin-Châteauneuf à hauteur de 10,5 %, la société Jean Guervilly à garantir la société Baudin-Châteauneuf à hauteur de 39,5 %, et la société CTI BAT à garantir la société Baudin-Châteauneuf à hauteur de 20 % (article 6), enfin, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, a mis à la charge solidaire des sociétés Jean Guervilly, CTI BAT, ECB et Baudin-Châteauneuf le versement à la communauté urbaine Caen la Mer d'une somme de 1 500 euros (article 7), a mis à la charge de la communauté urbaine Caen la Mer le versement à la société Qualiconsult d'une somme de 1 500 euros (article 8) et le versement à la société Sofresid Engineering d'une somme également de 1 500 euros (article 9), puis a rejeté le surplus des conclusions des parties (article 10). La société ECB, sous le n° 21NT02585, la communauté urbaine Caen la Mer, sous le n° 21NT02696, et la société Jean Guervilly, sous le n° 21NT02730, relèvent respectivement appel de ce jugement.
2. Ces requêtes n°s 21NT02585, 21NT02696 et 21NT02730 présentées respectivement pour la SARL ECB, la communauté urbaine Caen la Mer et la SARL Jean Guervilly sont relatives aux conséquences des désordres affectant le même ouvrage public, sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise, que la cause de la rupture des vitrages est une mise en compression de ceux-ci sous l'action de leur poids propre due à une déformation trop importante de la structure porteuse, charpente métallique et ossature support des vitrages. Ainsi, les services de la collectivité maître d'ouvrage ont relevé, le 21 janvier 2005, 48 vitrages cassés, l'expert constatant que " Les 45 petits vitrages cassés sont situés au-dessus des vitrages reposant sur le sol et soumis au poids des vitrages supérieurs de la façade. " et l'expert a procédé à un nouveau décompte le 16 juin 2015 en recensant " 43 vitrages cassés. Des vitrages ont été changés, des nouveaux vitrages se sont rompus. ". Ce constat n'est contesté par aucune des parties et il résulte de l'instruction que la réception des lots n° 4 et n° 6 a été prononcée le 16 mai 2014 avec des réserves portant notamment sur les désordres relatifs aux murs rideaux.
En ce qui concerne les conclusions d'appel principal de la société ECB :
4. En premier lieu, il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise, qu'a été commise par la maîtrise d'œuvre une erreur de conception à l'origine des désordres consistant à ne pas avoir prévu des déformations limites, pour les éléments de la charpente métallique et pour les barres d'acier, ou " tirants ", sur lesquelles reposent les vitrages et leur armature de soutien, alors que la norme NF EN 132830, " applicable à cette opération " comme le rappelle l'expert, impose une telle déformation limite. Les murs rideaux s'appuyant sur la charpente métallique, leurs déformations limites devaient être imposées aux ouvrages de cette charpente et le cahier des clauses techniques particulières (CCTP) du lot n° 4 aurait dû imposer, comme le rapporte l'expert, " les déformations limites de 1/500e de la portée ou 3 mm sous l'action du poids propre, ce qui n'a pas été fait ". Par ailleurs, l'expert relève une deuxième erreur de conception consistant en une répartition inadéquate de certaines tâches entre le lot n° 6 " menuiseries aluminium - façades rideaux " et le lot n° 4 " charpente métallique ", dès lors que les tirants soutenant les éléments servant d'appui aux lisses soutenant les vitrages relevaient du lot charpente métallique et leurs réglages après la pose des vitrages étaient de ce fait à la charge de l'entreprise Baudin-Châteauneuf, ce qui a eu pour conséquence, comme le constate l'expert, que " Dans les faits, ces réglages ont été mal réalisés et peu efficaces. ".
5. Il résulte de l'instruction qu'eu égard à la répartition des missions ressortant de l'annexe au marché attribué au groupement de maîtrise d'œuvre, l'économiste de la construction, dénommé économiste prescripteur E, avait pour mission de rédiger la " description technique et détaillée suivant le respect des DTU et diverses réglementations ", ce dont il résulte que l'absence de précision au CCTP des déformations applicables aux ouvrages du lot " charpente métallique " lui est imputable. La mauvaise répartition des tâches entre les deux lots en cause constitue quant à elle une erreur de l'architecte. Il résulte ainsi du rapport d'expertise que si, au sein du groupement de maîtrise d'œuvre, la responsabilité de l'architecte est plus importante, des manquements sont également imputables à l'économiste de la construction. La société ECB avait en effet notamment en charge la rédaction des CCTP des lots 4 et 6 et a omis d'y inscrire les déformations limites adéquates pour l'ouvrage, elle a ainsi commis une erreur dans l'exécution de ses obligations contractuelles. La circonstance que, d'après l'affirmation non assortie de justification de l'expert, une telle prescription ne serait pas de sa compétence, ne modifie pas l'imputabilité du manquement car, dès lors que la rédaction des CCTP lui incombait et qu'elle a souscrit à ces obligations contractuelles en acceptant de signer le marché par l'intermédiaire de l'architecte mandataire du groupement, il lui appartenait de s'entourer des compétences nécessaires, au besoin en s'attachant les services d'un bureau d'études techniques compétent. De plus, l'économiste de la construction, qui a pour rôle de déterminer le prix de revient de l'ouvrage en calculant en particulier les quantités de matériaux, ne saurait ignorer totalement les caractéristiques de ces matériaux, lesquelles sont susceptibles d'influer sur leur quantité et leur coût. Les moyens de la société ECB tenant à ce qu'elle devrait être exonérée de toute responsabilité doivent donc être écartés.
6. En deuxième lieu, d'une part, la seule participation de la société ECB à la réalisation des désordres suffit à justifier sa condamnation solidaire avec les autres constructeurs responsables. D'autre part, au regard de l'importance de l'erreur commise du fait de l'omission dans les CCTP des lots en cause de la mention des déformations limites adéquates, en mettant à la charge de la société ECB une fraction de 10,5 % de la réparation des préjudices résultant des désordres, le tribunal administratif n'a pas fait une évaluation exagérée de la part de responsabilité lui incombant, ce pourcentage relativement peu élevé tenant compte de la circonstance que l'architecte mandataire aurait pu mieux répartir les tâches entre les membres du groupement. Enfin, en se bornant à affirmer que " le tribunal administratif ne peut décider contrairement aux préconisations de l'expert judiciaire ", alors que le rapport de ce dernier ne lie pas le juge, la société ECB n'établit pas que, comme elle le demande, elle devrait être garantie de toute condamnation excédant le pourcentage de 5 % par les sociétés Jean Guervilly, Sofresid Engineering, Qualiconsult, CTI BAT et Baudin-Chateauneuf. Doivent donc être également écartés ses moyens soutenant, à titre subsidiaire, que sa part de responsabilité ne pourrait être supérieure à 5 % et qu'elle ne pouvait être condamnée de manière solidaire.
7. En troisième lieu, la société ECB conteste le montant des condamnations prononcées sur trois points. D'une part, sur le premier point, il résulte du rapport que l'expert a chiffré le coût des travaux de reprise des désordres après avoir fait vérifier la structure existante des murs rideaux du centre nautique de Caen par un sapiteur issu d'un bureau d'études techniques de structures et en tire la conclusion que " L'ensemble des vitrages devra être déposé et reposé avec une méthodologie précise de pose pour compenser les déformations de la structure au fur et à mesure de la pose. ". Ce constat l'amène à définir les travaux de reprise suivants " - remplacement des vitrages 76 920, - prototype tirants 14 370, - remplacement 247 tirants 186 992, - attaches nouveaux tirants 30 120 ", soit avec les études techniques, la mission de maîtrise d'œuvre pour la direction de l'exécution des travaux et les missions de contrôle technique et de coordinateur SPS, un montant total de 384 482,40 euros TTC, qui a été retenu par les premiers juges. La nécessité de définir une méthodologie précise de pose rend ainsi nécessaire la réalisation d'un prototype de tirants permettant de valider la méthodologie et l'évaluation à 14 370 euros du coût de ce prototype par l'expert et son sapiteur n'apparaît pas exagérée.
8. D'autre part, il résulte de l'instruction, en particulier du rapport du sapiteur expert-comptable, qu'en réalisant une partie des travaux pendant la période de vidange des bassins en hiver la période de fermeture du centre nautique pour les travaux de reprise peut être limitée à trois semaines et que, si doivent être écartés les frais de personnels permanents car ceux-ci constituent une charge fixe dont le montant ne varie pas avec les désordres, le sapiteur refuse en revanche de déduire de la perte de recettes les charges correspondant aux frais de chauffage et d'entretien aux motifs que " le remplacement du vitrage va occasionner pour le bâtiment abritant le bassin de 25 mètres une ouverture sur l'extérieur, à une époque où les températures sont les plus basses, ce qui immanquablement va générer des frais de chauffage importants " et que " s'agissant des frais d'entretien, ceux-ci ne devraient pas être significativement réduits, en raison du nettoyage du chantier après la réalisation des travaux. ". Une fréquentation moyenne en hiver, calculée à partir des chiffres de fréquentation constatés sur les dix dernières semaines de 2017 et les dix premières semaines de 2018, aboutit ainsi à estimer la perte d'exploitation imputable aux travaux de reprise des désordres à 15 000 euros par semaine, soit un préjudice total de 45 000 euros. Cette évaluation n'est pas sérieusement contestée par les parties condamnées solidairement à indemniser ce chef de préjudice, et notamment pas par la société ECB.
9. Enfin, le montant du préjudice dont le maître d'ouvrage est fondé à demander l'indemnisation aux constructeurs correspond aux frais qu'il doit engager pour les travaux de réfection. Or ces frais comprennent, en règle générale, la taxe sur la valeur ajoutée, élément indissociable du coût des travaux, à moins que le maître d'ouvrage ne relève d'un régime fiscal lui permettant normalement de déduire tout ou partie de cette taxe de celle qu'il a collectée à raison de ses propres opérations. Dans ces conditions, il appartient aux constructeurs mis en cause d'apporter au juge tout élément de nature à remettre en cause la présomption de non assujettissement des collectivités territoriales et de leurs groupements à la taxe sur la valeur ajoutée et à établir que le montant de celle-ci ne doit pas être inclus dans le montant du préjudice indemnisable. Par ailleurs, aux termes du premier alinéa de l'article 256 B du code général des impôts : " Les personnes morales de droit public ne sont pas assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée pour l'activité de leurs services administratifs, sociaux, éducatifs, culturels et sportifs lorsque leur non-assujettissement n'entraîne pas de distorsions dans les conditions de la concurrence ". Si les collectivités locales et leurs établissements publics bénéficient, dans certaines conditions, de dotations du fond de compensation de la TVA, destinées à permettre un remboursement progressif d'une partie de la taxe ayant grevé leurs dépenses d'investissement, le régime fiscal de leurs opérations ne s'en trouve pas modifié et cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) grevant les travaux immobiliers, tels que ceux de la rénovation du centre nautique de Caen, soit incluse dans le montant des indemnités dues. En l'espèce, les autres parties n'établissent aucunement que la communauté urbaine Caen la Mer serait, pour le service dont relève l'ouvrage en cause, assujettie à la TVA et pourrait récupérer celle-ci. Les indemnités dues à la collectivité publique maître d'ouvrage doivent donc comprendre la TVA.
10. Il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 9 que la société ECB n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué en ce qu'il l'a condamnée.
En ce qui concerne les conclusions d'appel principal de la communauté urbaine Caen la Mer :
11. En premier lieu, la communauté urbaine Caen La Mer conteste la mise hors de cause de la société Sofresid Engineering, qui exerçait la fonction d'OPC, et du contrôleur technique Qualiconsult. Toutefois, d'une part, il résulte de l'instruction que c'est à la maîtrise d'œuvre, non au titulaire de la fonction OPC, qu'est imputable le défaut d'organisation du chantier et l'absence de la décision d'arrêt du chantier qui aurait dû être prise devant le constat que la méthodologie de pose des vitrages arrêtée en cours de travaux sur proposition du bureau d'études techniques (BET) Lequesne n'était pas respectée. Ainsi l'expert constate que " Cette méthodologie destinée à compenser l'erreur de conception de la maîtrise d'œuvre était difficile à mettre en œuvre. La maîtrise d'œuvre a décidé de la mettre en application lors de la réunion technique du 15 avril 2013. Elle nécessitait une organisation rigoureuse sur le chantier qui n'a pas été mise en place par la maîtrise d'œuvre d'exécution. Lorsque la maîtrise d'œuvre s'est aperçue que la méthodologie n'était toujours pas respectée au bout de plusieurs semaines, elle aurait dû arrêter le chantier. ". L'expert indique également dans son rapport que " La société Sofresid a bien informé tous les intervenants de la méthodologie établie par le BE Lequesne et en particulier le réglage des tirants. Elle l'a rappelé de nombreuses fois dans le déroulement de sa mission sans résultat. " et souligne que le maître d'oeuvre d'exécution n'a pas pris les mesures pour obliger les entreprises à respecter cette méthodologie, en rappelant que " Dans sa mission, l'OPC n'a pas de compétences techniques si ce n'est l'organisation, la planification et la coordination des tâches. C'était au maître d'œuvre de réagir sur les dangers de la mauvaise pose des vitrages. ".
12. D'autre part, il ne résulte pas des pièces du marché que le contrôleur technique était chargé d'une mission de vérification de l'adéquation des normes de déformations limites fixées dans le CCTP. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que lors de la phase d'exécution des travaux la société Qualiconsult n'a pas ignoré les problèmes liés à la définition inadéquate des normes de déformations admissibles dans le CCTP, d'où sont issus les désordres affectant les vitrages de certains murs rideaux. Il ressort en effet de son " bordereau récapitulatif d'examen de documents " du 15 janvier 2015 adressé au maître d'ouvrage qu'elle a rendu à ce sujet un " avis suspendu " après l'examen des plans d'exécution des murs rideaux, en signalant d'une part à propos de quatre d'entre eux " Profilés de reprise des dilatations du mur rideau à préciser sur les plans ", d'autre part surtout " Préciser les déformations admissibles du vitrage ", enfin en demandant que lui soit adressées les " Notes de calcul de l'ensemble des murs rideaux ". De même, dans le bordereau d'examen de documents du 17 mars 2015, le contrôleur technique émet un avis suspendu en notant des observations portant sur les " Profilés de reprise des dilatations du mur rideau à préciser sur les plans " et encore " Préciser les déformations admissibles du vitrage ", ainsi que toujours la même demande de documents. Enfin, ces mêmes observations sont reprises dans les documents " Liste récapitulative des observations non levées " adressés par le contrôleur technique à la communauté urbaine Caen la Mer le 10 septembre 2015 et le 25 novembre 2015. Dans ces conditions, la communauté urbaine Caen la Mer n'établit pas que c'est à tort que le jugement attaqué exclut la responsabilité contractuelle des sociétés Sofresid Engineering et Qualiconsult.
13. En deuxième lieu, les articles L. 622-21 à L. 622-25 du code de commerce régissent les conditions dans lesquelles peuvent être produites puis payées les créances détenues sur une entreprise qui fait l'objet d'une procédure collective. En particulier, l'article L. 622-21 de ce code fixe le principe de la suspension ou de l'interdiction, à compter du jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde, de toute action en justice tendant au paiement d'une somme d'argent ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent de la part de tous les créanciers autres que ceux détenteurs d'une créance postérieure privilégiée. Ainsi, il résulte de ces dispositions qu'il appartient de manière exclusive à l'autorité judiciaire de statuer sur l'admission ou la non admission des créances déclarées, alors même qu'il appartient au juge administratif d'examiner si la collectivité publique, dont l'action tend à faire reconnaître et évaluer ses droits à la suite des désordres constatés dans un ouvrage construit pour elle par une entreprise admise ultérieurement à la procédure collective a droit à réparation et de fixer le montant des indemnités qui lui sont dues à ce titre par l'entreprise défaillante, soit à titre définitif, soit à titre provisionnel, sans préjudice des suites que la procédure judiciaire est susceptible d'avoir sur le recouvrement de cette créance. Il s'ensuit que la communauté de commune Caen la Mer n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté, comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaitre, sa demande tendant à faire inscrire ses créances à l'égard de la société CTI BAT au passif de cette société.
14. En troisième lieu, la communauté urbaine Caen la Mer conteste le montant de l'indemnité qui lui a été allouée par les premiers juges sur deux points. D'une part, si la collectivité publique maître d'ouvrage demande l'indexation des sommes allouées sur l'indice du coût de la construction, l'évaluation des dommages subis doit être faite à la date à laquelle, leur cause ayant été déterminée et leur étendue prévisible étant connue, il pouvait être procédé aux travaux destinés à y remédier et à les réparer. En l'espèce, cette date est celle du 22 novembre 2018 à laquelle l'expert a déposé son rapport, lequel définit avec une précision suffisante la nature et l'étendue des travaux de reprise nécessaires. La communauté urbaine Caen la Mer ne justifie aucunement s'être trouvée dans l'impossibilité technique ou financière de faire effectuer les travaux à partir de cette période en se bornant à invoquer les difficultés dues à l'épidémie de covid, laquelle n'est au surplus intervenue et n'a pu avoir des effets économiques qu'à compter de mars 2020. Sa demande d'indexation ne peut donc être accueillie.
15. D'autre part, il résulte du point 28 du jugement attaqué que le tribunal administratif a refusé l'indemnisation des frais d'avocat pour assistance pendant l'expertise au motif que " la communauté urbaine Caen la Mer ne produit aucune pièce de nature à établir l'existence et l'étendue de ce préjudice. Par suite, elle n'est pas fondée à demander à ce qu'une réparation lui soit versée à ce titre par les parties perdantes. ". Devant la cour, elle ne produit pas davantage de justificatifs ni ne donne aucune explication pertinente sur cette absence de justificatifs. Dès lors qu'il n'est pas davantage justifié de ce chef de préjudice, le rejet de la demande sur ce point ne peut qu'être confirmé.
16. En quatrième lieu, en ce qui concerne les intérêts et leur capitalisation, en application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, la communauté urbaine Caen la Mer a droit aux intérêts au taux légal à compter du 22 mai 2019, date d'enregistrement de sa requête introductive d'instance devant le tribunal administratif de Caen, et non à compter de la date d'enregistrement de sa requête en référé tendant à ce que soit ordonnée une expertise, laquelle ne saurait valoir demande de paiement. Les intérêts seront capitalisés à compter du 22 mai 2020, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
17. Il résulte de ce qui a été dit aux points 11 à 16 que les conclusions de la communauté urbaine Caen la Mer tendant à la réformation du jugement du tribunal administratif de Caen du 28 juillet 2021 en tant qu'il ne lui a pas donné entièrement satisfaction doivent être rejetées.
En ce qui concerne les conclusions d'appel principal de la SARL Jean Guervilly :
S'agissant des conclusions tendant à être déchargée de toute responsabilité :
18. La SARL Jean Guervilly soutient qu'elle n'a commis aucune faute et que la part de responsabilité de 39,5 % qui lui est imputée n'est pas justifiée, elle conclut en conséquence au rejet de toutes les demandes de la communauté urbaine Caen la Mer la visant et subsidiairement à ce qu'elle soit garantie par les sociétés ECB, Baudin-Châteauneuf, CTI BAT, Sofresid Engineering et Qualiconsult. Mais il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise, que le maître d'œuvre a commis deux erreurs de conception.
19. En premier lieu, comme il a été dit au point 4, alors qu'il résulte de la norme NF EN 132830, applicable à cette opération, que sous le poids propre des vitrages la déformation des traverses supportant les vitrages doit être limitée à la valeur la plus faible 1/500e de la portée ou 3 mm, dès lors que les murs rideaux s'appuient sur la charpente métallique, des déformations limites des murs rideaux devaient être imposées aux ouvrages de charpente métallique et prescrites en conséquence au CCTP, ce qui n'a pas été prévu dans la conception de l'ouvrage, dont l'architecte était chargé.
20. En deuxième lieu, ainsi qu'il a également été dit au point 4, les prestations concernant les ouvrages de charpente métallique et des murs rideaux ont été partiellement mélangées dans la mesure où la pose des tirants soutenant les éléments servant d'appui aux vitrages a été inscrite dans le lot charpente métallique au lieu du lot " menuiseries aluminium - façades rideaux ", ce qui a eu pour effet que leurs réglages après la pose des vitrages étaient à la charge de l'entreprise Baudin-Châteauneuf et ont été " mal réalisés et peu efficaces ". Il résulte d'ailleurs aussi de l'instruction, comme l'indique l'expert dans ses conclusions, que pour la deuxième tranche des travaux la conception et la répartition des tâches ont été modifiées, avec succès, pour ne pas répéter les problèmes rencontrés lors de la réalisation du premier bassin.
21. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que si le bureau d'études techniques Lequesne a proposé une méthodologie de pose destinée à compenser les déformations des tirants afin de les rendre acceptables pour les vitrages, et que l'application de cette méthodologie a été décidée lors d'une réunion technique du 15 avril 2013, l'organisation rigoureuse du chantier qu'elle impliquait n'a pas été mise en place par la maîtrise d'œuvre d'exécution qui n'a pas pris les mesures nécessaires pour obliger les entreprises à la respecter. Or la maîtrise d'œuvre d'exécution avait été confiée à la SCP d'architecte Lepourry-Bernard, sous-traitant de la société Jean Guervilly qui doit donc en répondre, et comme l'indique l'expert le maître d'œuvre aurait dû arrêter le chantier lorsqu'il s'est aperçu que la méthodologie n'était toujours pas respectée au bout de plusieurs semaines.
22. Dans ces conditions, d'une part, la SARL Jean Guervilly, architecte mandataire du groupement de maîtrise d'œuvre, a participé à la réalisation des dommages, ce dont il résulte qu'elle pouvait être solidairement condamnée avec les autres constructeurs responsables. D'autre part, compte tenu de la gravité des erreurs sus-décrites, la part de 39,5 % de la réparation laissée à sa charge par les premiers juges par le biais des appels en garantie apparaît suffisamment justifiée et elle n'est pas fondée à demander à être garantie par les autres constructeurs responsables au-delà de 60,5 %.
23. Enfin, il résulte de ce qui a déjà été dit aux points 7 à 9 que la SARL Jean Guervilly n'est fondée à soutenir ni que les préjudices de la communauté urbaine Caen la Mer ne seraient pas établis ni que leur indemnisation aurait dû être prononcée hors TVA.
S'agissant des conclusions tendant au paiement du solde du marché de maîtrise d'oeuvre :
24. Aux termes de l'article 37 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de prestations intellectuelles (CCAG-PI), approuvé par l'arrêté du 16 septembre 2009 susvisé, applicable au marché en vertu de l'article 2 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) de la mission de maîtrise d'œuvre : " Différends entre les parties /(...) Tout différend entre le titulaire et le pouvoir adjudicateur doit faire l'objet, de la part du titulaire, d'une lettre de réclamation exposant les motifs de son désaccord et indiquant, le cas échéant, le montant des sommes réclamées. Cette lettre doit être communiquée au pouvoir adjudicateur dans le délai de deux mois, courant à compter du jour où le différend est apparu, sous peine de forclusion (...) ".
25. Faute de justifier d'une lettre de réclamation adressée à la communauté urbaine Caen la Mer relative à une demande de règlement du solde du marché du groupement conjoint de maîtrise d'œuvre, la société Jean Guervilly n'est pas recevable à demander le versement d'une somme de 101 865,09 euros à ce titre.
26. Il résulte de ce qui a été dit aux points 18 à 25 que les conclusions d'appel principal de la SARL Jean Guervilly doivent être rejetées.
En ce qui concerne les conclusions d'appel incident et provoqué de la société Baudin-Châteauneuf :
27. En premier lieu, la société Baudin Châteauneuf, titulaire du lot n° 4 " charpente métallique ", conclut à titre principal à la réformation du jugement en tant qu'il a alloué à la communauté urbaine de Caen la Mer une indemnité globale de 429 428,40 euros et condamné la société à supporter 30% de la charge définitive du sinistre. En tant qu'elles sont dirigées contre les sociétés ECB et Jean Guervilly ou contre la communauté urbaine Caen la Mer, ces conclusions ont la nature d'un appel incident. D'une part, il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise et des comptes rendus de chantier, que de nombreux rappels ont été faits à l'entreprise Baudin-Châteauneuf pour qu'elle respecte la méthodologie de pose des vitrages et de réglage des tirants définie par le BET Lequesne, reprise par la maîtrise d'œuvre en avril 2013, et qu'après de nombreuses relances sans effet l'entreprise est intervenue trop tardivement pour procéder au réglage des tirants, alors que les vitrages étaient déjà posés. De ce fait, la société Baudin-Châteauneuf a participé à la réalisation des désordres et ne saurait prétendre qu'elle ne pouvait être solidairement condamnée à indemniser la collectivité maître d'ouvrage avec les autres constructeurs responsables. D'autre part, il résulte de ce qui a déjà été dit aux points 7 à 9 que la société Baudin-Châteauneuf ne peut sérieusement prétendre ni que l'indemnisation des travaux de reprise des désordres aurait été surévaluée ou que la réalisation d'un prototype ne devait pas être prise en compte, ni que la perte d'exploitation ne serait pas justifiée. Enfin, compte tenu de la gravité de ses manquements, la part de 30 % de la réparation laissée à sa charge par les premiers juges apparaît suffisamment justifiée et elle n'est pas fondée à demander à être garantie par les autres constructeurs responsables au-delà de 70 %.
28. En second lieu, en tant qu'elles sont dirigées contre d'autres parties que les appelants principaux, les conclusions de la société Baudin-Châteauneuf ont la nature d'un appel provoqué, qui est irrecevable dès lors que ce qui est jugé par le présent arrêt n'aggrave pas la situation de cette société.
En ce qui concerne les conclusions d'appel incident et provoqué de la société CTI BAT :
29. Il résulte en premier lieu de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que, si elle a alerté les autres intervenants sur les problèmes rencontrés, la société CTI BAT, attributaire du lot n° 6 " menuiseries aluminium - façades rideaux - bardage ", n'a pas posé les vitrages en respectant les préconisations définies par le BET Lequesne et reprises par la maîtrise d'œuvre et qu'au lieu de mettre en œuvre à chaque vitrage un plan de calages, rendu nécessaire par les déformations de la structure, elle a adapté empiriquement les calages sur place lors de la pose des vitrages. Elle a ainsi participé à la réalisation des désordres et pouvait dès lors être condamnée solidairement à les réparer. Dans ces conditions, au regard de la gravité de ses manquements, la part de 20 % de la réparation laissée à sa charge par le jugement attaqué apparaît suffisamment justifiée et elle n'est pas fondée à demander à être garantie par les autres constructeurs responsables au-delà de 80 %.
30. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 8 que la société CTI BAT n'est pas fondée à soutenir que le préjudice d'exploitation subi par la communauté urbaine Caen la Mer ne serait pas établi. Par ailleurs, la société CTI BAT n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a considéré qu'elle pouvait être condamnée du fait de sa responsabilité dans la survenance des désordres intervenus au cours de l'exécution du marché conclu le 2 octobre 2012, quand bien même la communauté urbaine Caen la Mer n'aurait pas déclaré sa créance éventuelle dans les conditions fixées par les dispositions du code de commerce.
31. En troisième lieu, en tant qu'elles sont dirigées contre d'autres parties que les appelants principaux, les conclusions de la société CTI BAT ont la nature d'un appel provoqué, qui est irrecevable dès lors que ce qui est jugé par le présent arrêt n'aggrave pas la situation de cette société.
32. Il résulte de tout ce qui a été dit que les requêtes de la société ECB, de la communauté urbaine Caen la Mer et de la SARL Jean Guervilly, comme les conclusions d'appel incident et provoqué des sociétés Baudin-Châteauneuf et CTI BAT, doivent être rejetées.
Sur les dépens :
33. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise (...) Ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagée entre les parties (...) ". En l'espèce, il résulte de l'instruction que les frais d'expertise ont été liquidés et taxés à la somme de 48 191,44 euros toutes taxes comprises par une ordonnance du 16 janvier 2019, qui les a mis provisoirement à la charge de la communauté urbaine Caen la Mer. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre cette somme à la charge solidaire des sociétés Jean Guervilly, CTI BAT, Baudin-Châteauneuf et ECB, comme le prévoit l'article 2 du jugement attaqué.
Sur les frais liés au litige :
34. Les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative des sociétés ECB, Jean Guervilly, Baudin-Châteauneuf et CTI BAT, parties tenues aux dépens, ne peuvent qu'être rejetées. Il en va de même pour les conclusions à ce titre de la communauté urbaine Caen la Mer, partie perdante en appel au regard de ses conclusions d'appel principal. Par ailleurs, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge des autres parties les sommes qu'elles réclament au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête n° 21NT02585 de la société Economie et Coordination en Bâtiments (ECB), la requête n° 21NT02696 de la communauté urbaine Caen la Mer et la requête n° 21NT02730 de la SARL Jean Guervilly sont rejetées.
Article 2 : Les conclusions d'appel incident et provoqué de la société Baudin-Châteauneuf et de la société CTI BAT sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de l'ensemble des parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté urbaine Caen la Mer, aux sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, Qualiconsult, Baudin-Châteauneuf, CTI BAT, à Me Pascaline Goubard, représentant la SELARL Bruno Cambon, ès qualités de mandataire judiciaire de la société CTI BAT et à la société AJIRE, administrateur judiciaire de la société CTI BAT.
Délibéré après l'audience du 3 janvier 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Derlange, président assesseur,
- Mme Chollet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 janvier 2023.
Le rapporteur,
S. DERLANGE
Le président,
L. LAINÉ
La greffière,
S. LEVANT
La République mande et ordonne au préfet du Calvados en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°s 21NT02585, 21NT02696, 21NT02730
Procédure contentieuse antérieure :
La communauté urbaine Caen la Mer a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner solidairement les sociétés Jean Guervilly, Economie et coordination en bâtiments (ECB), Sofresid Engineering, Qualiconsult, CTI BAT et Baudin-Châteauneuf à lui verser la somme de 384 482,40 euros toutes taxes comprises (TTC) correspondant au coût des travaux de reprise des désordres affectant les murs rideaux du stade nautique de Caen, la somme de 45 000 euros au titre de son préjudice d'exploitation pendant les travaux de reprise des désordres, avec intérêts au taux légal, capitalisation des intérêts et indexation sur le dernier indice du coût de la construction publié au jour du dépôt du rapport d'expertise judiciaire, ainsi que la somme de 2 000 euros au titre des frais d'avocat exposés pour son assistance pendant l'expertise.
Par un jugement n° 1901143 du 28 juillet 2021, le tribunal administratif de Caen, d'une part, a condamné in solidum les sociétés Jean Guervilly, CTI BAT, ECB et Baudin-Châteauneuf à verser la somme de 429 428,40 euros à la communauté urbaine Caen la Mer, assortie des intérêts et de leur capitalisation (article 1er) et a mis à leur charge solidaire les frais d'expertise s'élevant à 48 191,44 euros (article 2), d'autre part, a condamné la société Jean Guervilly à garantir la société ECB à hauteur de 39,5 % de la part excédant 5 % des condamnations prononcées aux articles 1er et 2, et les sociétés CTI BAT et Baudin-Châteauneuf à garantir la société ECB à hauteur respectivement de 20 % et de 30 % de ces mêmes condamnations dans les mêmes conditions (article 3), a condamné la société ECB à garantir la société Jean Guervilly à hauteur de 10,5 % du montant total des condamnations prononcées aux articles 1er et 2, la société CTI BAT à garantir la société Jean Guervilly à hauteur de 20 % de ce montant et la société Baudin-Châteauneuf à garantir la société Jean Guervilly à hauteur de 30 % dudit montant (article 4), a condamné la société ECB à garantir la société CTI BAT à hauteur de 10,5 %, la société Jean Guervilly à garantir la société CTI BAT à hauteur de 39,5 % et la société Baudin-Châteauneuf à garantir la société CTI BAT à hauteur de 30 % (article 5), a condamné la société ECB à garantir la société Baudin-Châteauneuf à hauteur de 10,5 %, la société Jean Guervilly à garantir la société Baudin-Châteauneuf à hauteur de 39,5 %, et la société CTI BAT à garantir la société Baudin-Châteauneuf à hauteur de 20 % (article 6), enfin, au titre de l'article L. 761-1 du CJA, a mis à la charge solidaire des sociétés Jean Guervilly, CTI BAT, ECB et Baudin-Châteauneuf le versement à la communauté urbaine Caen la Mer d'une somme de 1 500 euros (article 7), a mis à la charge de la communauté urbaine Caen la Mer le versement à la société Qualiconsult d'une somme de 1 500 euros (article 8) et le versement à la société Sofresid Engineering d'une somme également de 1 500 euros (article 9), puis a rejeté le surplus des conclusions des parties (article 10).
Procédures devant la cour :
I. Par une requête n° 21NT02585, enregistrée le 16 septembre 2021, la SARL ECB, représentée par Me Bouchard, demande à la cour :
1°) à titre principal, d'annuler le jugement du 28 juillet 2021 et de rejeter toute demande de la communauté urbaine Caen la Mer à son encontre ;
2°) à titre subsidiaire, de réformer le jugement du 28 juillet 2021 en limitant le montant de la condamnation prononcée à son égard à 5% de l'ensemble des condamnations et de les prononcer hors taxes ;
3°) à titre infiniment subsidiaire, de condamner les sociétés Jean Guervilly, CTI BAT, Sofresid engineering, Qualiconsult et Baudin-Châteauneuf à la garantir de toute condamnation prononcée à son égard au-delà de 5% de l'ensemble des condamnations ;
4°) de mettre à la charge de la communauté urbaine Caen la Mer la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les déformations admissibles pour les ouvrages du " lot charpente / métallique " ont été déterminées par les bureaux d'études Lequesne et BSO, chargés des plans de l'étude de projet et de toutes pièces à caractère technique, si bien qu'elle n'est pas responsable du dommage, son rôle se limitant à la description des ouvrages sur la base de ces éléments ;
- la société Baudin-Châteauneuf ne pouvait ignorer le risque auquel était exposé la charpente métallique ;
- le bureau d'études Lequesne s'est rendu compte du manque de cohérence entre la charpente et les murs rideaux ce qui l'a conduit à élaborer une méthodologie pour y pallier, qui n'a pas été ou a été mal mise en œuvre ;
- les entreprises, notamment la société Baudin-Châteauneuf chargé des plans d'exécution, étaient avisées de la difficulté mais n'ont pas exécuté convenablement une méthodologie de pose permettant de compenser la déformation de la structure ;
- le tribunal ne pouvait mettre à sa charge plus que la part de 5% retenue par l'expert ;
- le prototype ne fait pas partie des sommes convenues dans le contrat de construction et ne pouvait dès lors faire l'objet d'une indemnisation ;
- le préjudice de perte d'exploitation n'est pas justifié par les dommages subis par les vitrages.
Par des mémoires, enregistrés les 28 septembre 2021, 28 février 2022, 24 mars 2022, 28 avril 2022 et 25 mai 2022, la communauté urbaine Caen la Mer, représentée par Me Bouthors-Neveu, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) de rejeter la requête de la SARL ECB, ainsi que les conclusions d'appel incident et provoqué des sociétés Jean Guervilly, Sofresid Engineering, Qualiconsult, CTI BAT et Baudin-Châteauneuf et les conclusions de la société Jean Guervilly en paiement du solde du marché ;
2°) par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de réformer le jugement du 28 juillet 2021 en condamnant solidairement les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, Qualiconsult, CTI BAT et Baudin-Châteauneuf à lui verser la somme de 384 482,40 euros toutes taxes comprises au titre des murs rideaux et la somme de 45 000 euros au titre de son préjudice d'exploitation, avec intérêts au taux légal à compter de l'introduction de la requête en vue de la désignation d'un expert, capitalisation des intérêts et indexation sur le dernier indice du coût de la construction publié au jour du dépôt du rapport d'expertise judiciaire et de mettre à leur charge solidaire les frais liés à l'expertise, pour un total de 50 191,44 euros toutes taxes comprises ;
3°) de fixer au passif de la société CTI BAT les sommes de 384 482,40 euros toutes taxes comprises correspondant au coût des travaux de reprise des désordres, de 45 000 euros au titre de son préjudice d'exploitation, de 50 191,44 euros toutes taxes comprises au titre des frais d'expertise, de 2 000 euros au titre des frais d'avocat exposés pour son assistance pendant l'expertise, de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de rendre son arrêt commun et opposable à l'administrateur et au mandataire judiciaires ;
4°) de mettre à la charge solidaire de autres parties la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les manquements relevés par l'expert, liés au cahier des clauses techniques particulières (CCTP) sont imputables à la maîtrise d'œuvre et donc à la SARL ECB qui en fait partie, du fait des lacunes dans la rédaction des documents dont elle était chargée ;
- la société Jean Guervilly est responsable pour un défaut de conception, de rédaction des CCTP et avoir mal réparti les tâches entre les entreprises et du fait des manquements de la SARL Lepourry et Bernard, son sous-traitant maître d'œuvre d'exécution, et du bureau d'études structure Lequesne intervenu pour leur compte ;
- la maîtrise d'œuvre aurait dû interrompre les travaux de pose des vitrages ;
- la société Sofresid engineering est responsable faute d'être intervenue auprès du maître d'œuvre d'exécution pour que le chantier soit arrêté ;
- la société Qualiconsult est responsable de ne pas avoir identifié le défaut de conception et les incohérences des référentiels de déformations à la lecture des pièces écrites du marché et n'a pas émis d'avis défavorable à la pose des vitrages malgré le non-respect de la méthodologie préconisée par le bureau d'études structure Lequesne ;
- la société CTI BAT est responsable du fait du non-respect des préconisations du bureau d'études structure Lequesne et pour défaut d'exécution dans la pose des vitrages ;
- la société Baudin-Châteauneuf est responsable du fait du non-respect des préconisations du bureau d'études structure Lequesne et pour défaut d'exécution dans le réglage des tirants ;
- la part de responsabilité de chaque entreprise a été déterminée par l'expert ;
- le prototype était nécessaire dans le cadre de la reprise des désordres et n'a
aucunement été source d'un enrichissement de la collectivité ;
- l'expert s'est basé sur le dernier devis transmis ;
- les pertes d'exploitation sont établies alors que la fermeture de la piscine s'imposait durant les travaux de reprise des désordres, qu'elle n'avait pas reçu les fonds pour entreprendre les travaux et que la crise sanitaire a limité ses marges de manœuvre ;
- l'indemnité due par les constructeurs au maître de l'ouvrage en réparation de désordres
affectant l'ouvrage doit comprendre la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) que l'administration non exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée supporte pour les travaux de réfection des désordres affectant l'immeuble, quand bien même elle bénéficie du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) ;
- les premiers juges n'auraient pas dû mettre hors de cause les sociétés Qualiconsult et Sofresid Engineering eu égard aux manquements qu'elles ont commis ;
- au vu de la jurisprudence, ils auraient dû inscrire sa créance au passif de la société CTI BAT et rendre sa décision commune et opposable à l'administrateur et à son mandataire judiciaires ;
- le coût des travaux de reprise s'élève à la somme de 384 482,40 euros toutes taxes comprises, le préjudice d'exploitation à 45 000 euros et les dépens et frais d'assistance en cours d'expertise à la somme de 50 191,44 euros ;
- sa demande d'indexation sur le coût de la construction est justifiée par la crise sanitaire et l'obligation de mettre en concurrence des entreprises devant réparer les désordres ;
- la demande reconventionnelle de la société Guervilly en paiement du solde de ses honoraires est infondée par application de l'avenant n°3 signé par la maîtrise d'œuvre et alors que les condamnations de première instance ne sont pas assimilables à une levée des réserves ;
- la demande reconventionnelle présentée par la SARL Jean Guervilly en paiement du solde du marché de maîtrise d'œuvre est irrecevable faute de réclamation préalable en application de l'article 37 du CCAG des marchés publics de prestations intellectuelles (CCAG PI).
Par des mémoires, enregistrés les 6 janvier 2022 et 4 mars 2022, la société Sofresid Engineering, représentée par Me Majerholc-Oiknine, demande à la cour :
1°) à titre principal, de confirmer le jugement du 28 juillet 2021 en
ce qu'il a rejeté toutes les demandes formées à son encontre et de rejeter l'ensemble des conclusions formées en cause d'appel contre elle ;
2°) à titre subsidiaire, de limiter à 10 737,06 euros toutes taxes comprises le montant total des condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre et d'exclure toute solidarité dans ces condamnations ;
3°) à titre plus subsidiaire, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de condamner in solidum toutes autres parties succombantes à la garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre au-delà de la somme de 10 737,06 euros ;
4°) de condamner in solidum toutes parties succombantes à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à raison que les premiers juges ont écarté sa responsabilité malgré l'avis de l'expert alors que conformément à l'article 10 du décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993, le rôle de la personne en charge de l'ordonnancement, du pilotage et de la coordination (OPC) est spécifique et circonscrit si bien qu'elle ne se substitue pas au maître d'œuvre pour assurer la direction de l'exécution des travaux (DET) ;
- aucune disposition du CCTP ne lui confiait la mission d'apprécier
la valeur d'une proposition de méthodologie non contractuelle de montage des vitrages, et
encore moins de l'imposer aux entreprises, ni ne lui permettait de s'immiscer
dans des validations techniques spécifiques ou dans la procédure de montage des murs
rideaux des sociétés Baudin-Châteauneuf et CTI BAT pour imposer une méthodologie de montage des vitrages qui n'était que préconisée par le bureau d'études structure Lequesne ;
- les intervenants à l'opération ne peuvent être solidairement tenus envers le
maître de l'ouvrage que dans le cadre d'une solidarité légale ou conventionnelle en application de l'article 1310 du code civil, totalement exclue en l'espèce ;
- elle ne fait pas partie du groupement de maîtrise d'œuvre et n'a pas commis de fautes
indivisibles avec les autres défendeurs ayant entrainé la réalisation d'un dommage unique justifiant qu'elle garantisse d'autres intervenants ;
- sa condamnation ne saurait, en tout état de cause, excéder la part de 2,5 %
conformément à l'avis de l'expert, pour un total de 10 737,06 euros ;
- les préjudices de la communauté urbaine Caen la Mer ne sont pas établis.
Par un mémoire, enregistré le 19 janvier 2022, la société Qualiconsult, représentée par Me Launey, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter l'ensemble des conclusions formées en cause d'appel contre elle ;
2°) à titre subsidiaire, en cas de réformation du jugement attaqué, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de rejeter les conclusions de la communauté urbaine de Caen la Mer au titre de ses pertes d'exploitations, de la taxe sur la valeur ajoutée et de l'indexation sur l'indice du coût des travaux, et de limiter toute condamnation éventuelle à la somme de 320 357 euros hors taxes et à une quote-part maximale de 5%, de le réformer en ce qu'il a alloué à la communauté urbaine de Caen la Mer la somme de 384 428,40 euros toutes taxes comprises au titre des travaux de reprise et de 45 000 euros au titre d'une perte d'exploitation et de condamner les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, CTI BAT et Baudin-Châteauneuf à la garantir de toutes condamnations ;
3°) de condamner in solidum toutes parties succombantes à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa responsabilité quasi-délictuelle en tant que contrôleur technique, au regard des articles L. 111-24 et L. 111-25 du code de la construction et de l'habitation et 4.1.7 de la norme AFNOR NF P 03-100 n'est pas susceptible d'être engagée alors qu'elle a rempli ses propres obligations, notamment en faisant des observations sur les déformations admissibles du vitrage et qu'aucune norme applicable méconnue ne lui est opposée ;
- le dommage résulte de la mauvaise exécution par les sociétés CTI BAT et Baudin-Châteauneuf de la méthodologie de pose des vitrages et l'insuffisance de coordination assurée par le maître d'œuvre d'exécution, du fait de la rédaction du CCTP par le bureau d'études Lequesne et parce que celui-ci, la société Jean Guervilly et la société Sofresid Engineering n'ont pas suspendu les travaux ;
- elle ne s'est pas désintéressée de sa mission puisqu'elle a émis un avis relatif notamment
à l'admissibilité des vitrages à supporter une flèche de 10 mm du support ;
- il ne lui appartenait pas d'émettre un " avis défavorable " sur la pose des vitrages compte
tenu du non-respect de la méthodologie proposée par le bureau d'étude Lequesne ;
- en tout état de cause, les entreprises étaient déjà averties par le maître d'œuvre du problème rencontré, dont elles n'ont pas tenu compte ;
- le montant de 320 402 euros retenu par l'expert comporte des tirants non nécessaires au regard du prototype réalisé par l'entreprise en cours d'expertise ;
- les indemnisations devaient être prononcées hors TVA par application du 1er alinéa de l'article 256 B du code général des impôts faute pour la communauté urbaine de Caen la Mer de démontrer qu'elle y est assujettie et qu'elle ne bénéficierait pas du FCTVA ;
- l'indexation sur le coût des travaux ne se justifie pas à défaut de démonstration que les travaux de reprise ne pouvaient pas être mis en œuvre dès le dépôt du rapport d'expertise ;
- le préjudice éventuel du maître d'ouvrage doit être apprécié le cas échéant en fonction du solde manifestement dû à la maîtrise d'œuvre ;
- les pertes d'exploitation de la communauté urbaine Caen la Mer ne sont pas justifiées ;
- elle ne peut être jugée solidaire alors qu'elle n'est pas liée par un contrat avec les autres intervenants à l'acte de construire et que l'article L. 111-24 du code de la construction et de l'habitation limite la responsabilité du contrôleur technique ;
- l'expert a limité sa responsabilité à 5%.
Par des mémoires, enregistrés les 24 janvier 2022 et 25 mai 2022, la société Baudin-Châteauneuf, représentée par Me Labrusse, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête de la SARL ECB et, par la voie de l'appel provoqué, de rejeter les conclusions de la communauté urbaine Caen la Mer à son encontre et de réformer le jugement en ce qu'il a alloué à la communauté urbaine une indemnité de 429 428,40 euros et l'a condamnée à supporter 30% de la charge de la réparation ;
2°) à titre subsidiaire, de réduire le montant des sommes allouées à la communauté urbaine Caen la Mer ;
3°) par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de condamner les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, CTI BAT, Qualiconsult et le bureau d'études Lequesne à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;
4°) de condamner toutes parties succombantes à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la seule norme qui s'imposait contractuellement à elle est le DTU 32.1 travaux de charpente métallique ;
- les interventions des sociétés CTI BAT et Sofresid Engineering ont créé une incompréhension ;
- il appartenait à la société CTI BAT de procéder au réglage des tirants au fur et à mesure du chargement des lisses par le verre ; elle a posé les vitrages sans respecter la méthodologie prévue ;
- la société Baudin-Châteauneuf n'est intervenue, dans un second temps, qu'à la demande de la maîtrise d'œuvre ;
- la coordination des travaux appartenait à la maîtrise d'œuvre et à l'OPC ;
- l'origine du sinistre est la conséquence d'un défaut de conception ;
- elle a confié l'intégralité des études techniques de la charpente au cabinet Leclerc qui a lui-même sous-traité le dimensionnement de la charpente au cabinet Lequesne, qui en est donc responsable ;
- sa part de responsabilité ne peut excéder 20% ;
- les sommes retenues par le tribunal administratif au titre des travaux de reprise sont manifestement surévaluées et devront être revues à de plus justes proportions ;
- leur indexation sur le coût de la construction doit être exclue alors qu'il n'est pas justifié par la collectivité publique qu'elle n'aurait pas été en mesure d'entreprendre les travaux de reprise à l'issue des opérations d'expertise ;
- la fourniture et la pose des vitrages étaient initialement à la charge
de CTI BAT, si bien que rien ne justifie de mettre à sa charge la somme de 76 920 euros pour leur remplacement ;
- le devis de la société CTI BAT du 5 janvier 2018 devait être retenu ;
- l'indemnisation du prototype n'est pas justifiée ;
- rien ne justifie de mettre à sa charge le remplacement des 247 tirants ;
- la perte d'exploitation n'est pas justifiée ;
- elle est fondée en cas de condamnation à appeler en garantie sur le fondement délictuel les différents intervenants à l'acte de construire dont la responsabilité a été retenue par l'expert judiciaire à savoir les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, CTI BAT, Qualiconsult et le bureau d'études Lequesne et ce dernier également sur un fondement contractuel dans le cadre de la sous-traitance.
Par un mémoire, enregistré le 24 mars 2022, la société CTI BAT, représentée par Me Hellot, demande à la cour :
1°) à titre principal, de confirmer le jugement du 28 juillet 2021 en ce qu'il a déclaré incompétente la juridiction administrative pour fixer la créance à son bilan et n'a pas indexé la condamnation sur l'index du coût de la construction et, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de rejeter toute condamnation et appel en garantie à son encontre et débouter la communauté urbaine Caen la Mer de sa demande au titre du préjudice d'exploitation ;
2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de condamner in solidum les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, Qualiconsult et Baudin-Châteauneuf à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;
3°) de condamner toutes parties succombantes à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la juridiction administrative est incompétente pour fixer une créance à son passif dès lors qu'elle a fait l'objet d'un plan de sauvegarde et de la nomination d'un mandataire et d'un administrateur judiciaires par jugement en date du 22 mars 2017 ;
- toute demande est irrecevable à son encontre, en application des
dispositions de l'article L. 622-21 du code de commerce, alors qu'elle est sous procédure de sauvegarde et faute de justification d'une déclaration de créance ;
- les premiers juges ont, à raison, refusé l'indexation sur le coût de la construction alors que la communauté urbaine de Caen la Mer n'a pas démontré qu'elle était dans l'incapacité technique et financière de réaliser les travaux au moment du dépôt du rapport d'expertise ;
- le préjudice d'exploitation allégué n'est pas établi ;
- l'expert judiciaire n'a pas précisé en quoi les vitrages posés n'auraient pas respecté les préconisations établies par le bureau d'études Lequesne ;
- il ne lui appartenait pas de compenser l'erreur de conception de la maîtrise d'œuvre ;
- les désordres liés à un défaut de conception, qu'elle a d'ailleurs signalés, étaient trop importants pour qu'elle puisse y pallier à son niveau ;
- la SARL ECB en est responsable alors qu'elle a rédigé le CCTP ;
- elle est fondée à demander à la société Jean Guervilly de la garantir en tant que mandataire solidaire en raison du manque de cohérence et de la mauvaise répartition à l'intérieur de l'équipe de conception des tâches ;
- elle est fondée à demander à la SARL ECB de la garantir pour n'avoir pas su apprécier la nécessaire cohérence entre la règlementation au titre du lot des murs rideaux et celle applicable au titre du lot charpente ;
- elle est fondée à demander à la société Qualiconsult de la garantir pour ne pas
avoir décelé les erreurs d'exécution, notamment au titre du lot charpente et ne pas avoir su
décelé les difficultés de la conception et les risques qui en découlaient ;
- elle est fondée à demander à la société Sofresid Engineering de la garantir au titre de la coordination, faute d'avoir constaté que l'entreprise Baudin-Châteauneuf ne procédait pas au réglage des tirants afin que puisse être prise une décision sur un arrêt de chantier ;
- elle est fondée à demander à la société Baudin Châteauneuf de la garantir pour les fautes commises quant au non-respect des exigences dimensionnelles et de flexion qui ont été portées à sa connaissance par la société CTI BAT et sans annoncer qu'elle était dans l'incapacité de les respecter ;
- il ne lui appartenait pas de supprimer les jeux de charpente pour la pose des
vitrages, la situation résultant d'une incapacité de la société Baudin-Châteauneuf à livrer une charpente qui respecte les dimensionnements demandés.
Par une ordonnance du 2 mai 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 25 mai 2022.
La société Jean Guervilly a produit un mémoire, enregistré le 30 septembre 2022.
II. Par une requête n° 21NT02696 et des mémoires, enregistrés les 28 septembre 2021, 28 février 2022, 24 mars 2022, 28 avril 2022 et 25 mai 2022, la communauté urbaine Caen la Mer, représentée par Me Bouthors-Neveu, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) de réformer le jugement du 28 juillet 2021 en condamnant solidairement les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, Qualiconsult, CTI BAT et Baudin-Châteauneuf à lui verser la somme de 384 482,40 euros toutes taxes comprises au titre des murs rideaux et la somme de 45 000 euros au titre de son préjudice d'exploitation, avec intérêts au taux légal à compter de l'introduction de la requête en vue de la désignation d'un expert, capitalisation des intérêts et indexation sur le dernier indice du coût de la construction publié au jour du dépôt du rapport d'expertise judiciaire, et de mettre à leur charge solidaire les frais liés à l'expertise, pour un total de 50 191,44 euros toutes taxes comprises ;
2°) de fixer au passif de la société CTI BAT les sommes de 384 482,40 euros toutes taxes comprises correspondant au coût des travaux de reprise des désordres, de 45 000 euros au titre de son préjudice d'exploitation, de 48 191,44 euros toutes taxes comprises au titre des frais d'expertise, de 2 000 euros au titre des frais d'avocat exposés pour son assistance pendant l'expertise, de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de rendre son arrêt commun et opposable à l'administrateur et à son mandataire judiciaires ;
3°) de rejeter les conclusions d'appel incident des sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, Qualiconsult, CTI BAT et Baudin-Châteauneuf et les conclusions de la société Jean Guervilly en paiement du solde du marché ;
4°) de mettre à la charge solidaire de autres parties la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la société Jean Guervilly est responsable pour un défaut de conception, de rédaction des CCTP et avoir mal réparti les tâches entre les entreprises et du fait des manquements de la SARL Lepourry et Bernard, son sous-traitant maître d'œuvre d'exécution, et du bureau d'études structures Lequesne intervenu pour leur compte ;
- la SARL ECB est responsable du fait des lacunes dans la rédaction des documents dont elle était chargée ;
- la société Sofresid engineering est responsable faute d'être intervenue auprès du maître d'œuvre d'exécution pour que le chantier soit arrêté ;
- la société Qualiconsult est responsable de ne pas avoir identifié le défaut de conception et les incohérences des référentiels de déformations à la lecture des pièces écrites du marché et qui n'a pas émis d'avis défavorable à la pose des vitrages malgré le non-respect de la méthodologie préconisée par le bureau d'études structure Lequesne ;
- la société CTI BAT est responsable du fait du non-respect des préconisations du bureau d'études structure Lequesne et pour défaut d'exécution dans la pose des vitrages ;
- la société Baudin-Châteauneuf est responsable du fait du non-respect des préconisations du bureau d'études structure Lequesne et pour défaut d'exécution dans le réglage des tirants ;
- les premiers juges n'auraient pas dû mettre hors de cause les sociétés Qualiconsult et Sofresid Engineering eu égard aux manquements qu'elles ont commis ;
- au vu de la jurisprudence, ils auraient dû inscrire sa créance au passif de la société CTI BAT et rendre sa décision commune et opposable à l'administrateur et à son mandataire judiciaires ;
- la part de responsabilité de chaque entreprise a été déterminée par l'expert ;
- le coût des travaux de reprise s'élève à la somme de 384 482,40 euros toutes taxes comprises, le préjudice d'exploitation à 45 000 euros et les dépens et frais d'assistance en cours d'expertise à la somme de 50 191,44 euros ;
- sa demande d'indexation sur le coût de la construction est justifiée par la crise sanitaire et l'obligation de mettre en concurrence des entreprises devant réparer les désordres ;
- la demande reconventionnelle de la société Guervilly en paiement du solde de ses honoraires est infondée par application de l'avenant n°3 signé par la maîtrise d'œuvre et alors que les condamnations de première instance ne sont pas assimilables à une levée des réserves ;
- le caractère conjoint d'un groupement ne fait pas obstacle à la condamnation solidaire de ceux de ses membres qui ont, par leur faute commune, contribué au dommage subi par le maître de l'ouvrage ;
- les différents intervenants défendeurs ne peuvent que voir leur responsabilité solidaire engagée dans la mesure où ils ont tous concouru au même désordre ;
- l'indemnité due par les constructeurs au maître de l'ouvrage en réparation de désordres
affectant l'ouvrage doit comprendre la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) que l'administration non exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée supporte pour les travaux de réfection des désordres affectant l'immeuble, quand bien même elle bénéficie du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) ;
- le prototype était nécessaire dans le cadre de la reprise des désordres et n'a
aucunement été source d'un enrichissement de la collectivité ;
- l'expert s'est basé sur le dernier devis transmis ;
- les pertes d'exploitation sont établies alors que la fermeture de la piscine s'imposait durant les travaux de reprise des désordres, qu'elle n'avait pas reçu les fonds pour entreprendre les travaux et que la crise sanitaire a limité ses marges de manœuvre ;
- la demande reconventionnelle présentée par la SARL Jean Guervilly en paiement du solde du marché de maîtrise d'œuvre est irrecevable faute de réclamation préalable en application de l'article 37 du CCAG des marchés publics de prestations intellectuelles.
Par un mémoire, enregistré le 25 octobre 2021, la SARL ECB, représentée par Me Bouchard, demande à la cour :
1°) à titre principal, d'annuler le jugement du 28 juillet 2021 et de rejeter la demande de la communauté urbaine Caen la Mer présentée devant le tribunal administratif ;
2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de réformer le jugement du 28 juillet 2021 en limitant le montant de la condamnation prononcée à son égard à 5% de l'ensemble des condamnations et de les prononcer hors taxes et sans condamnation à garantir d'autres parties ;
3°) à titre infiniment subsidiaire, par la voie de l'appel provoqué, de condamner les sociétés Jean Guervilly, CTI BAT, ECB, Sofresid engineering et Baudin-Châteauneuf à la garantir de tout condamnation prononcée à son égard au-delà de 5% de l'ensemble des condamnations ;
4°) de mettre à la charge de la communauté urbaine Caen la Mer la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les déformations admissibles pour les ouvrages du " lot charpente métallique " ont été déterminées par les bureaux d'études Lequesne et BSO, chargés des plans de l'étude de projet et de toutes pièces à caractère technique, si bien qu'elle n'est pas responsable du dommage, son rôle se limitant à la description des ouvrages sur la base de ces éléments ;
- la société Baudin-Châteauneuf ne pouvait ignorer le risque auquel était exposé la charpente métallique ;
- le bureau d'études Lequesne s'est rendu compte du manque de cohérence entre la charpente et les murs rideaux ce qui l'a conduit à élaborer une méthodologie pour y pallier, qui n'a pas été ou a été mal mise en œuvre ;
- les entreprises, notamment la société Baudin-Châteauneuf chargé des plans d'exécution, étaient avisées de la difficulté mais n'ont pas exécuté convenablement une méthodologie de pose permettant de compenser la déformation de la structure ;
- le tribunal ne pouvait mettre à sa charge plus que la part de 5% retenue par l'expert ;
- le prototype ne fait pas partie des sommes convenues dans le contrat de construction ;
- le préjudice de perte d'exploitation n'est pas justifié par les dommages subis par les vitrages.
Par un mémoire, enregistré le 19 janvier 2022, la société Qualiconsult, représentée par Me Launey, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter l'ensemble des conclusions formées en cause d'appel contre elle ;
2°) à titre subsidiaire, en cas de réformation du jugement attaqué, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de rejeter les conclusions de la communauté urbaine de Caen la Mer au titre de ses pertes d'exploitations, de la taxe sur la valeur ajoutée et de l'indexation sur l'indice du coût des travaux et de limiter tout condamnation éventuelle à la somme de 320 357 euros hors taxes et à une quote-part maximale de 5%, de le réformer en ce qu'il a alloué à la communauté urbaine de Caen la Mer la somme de 384 428,40 euros toutes taxes comprises au titre des travaux de reprise et de 45 000 euros au titre d'une perte d'exploitation et de condamner les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, CTI BAT et Baudin-Châteauneuf à la garantir de toutes condamnations ;
3°) de condamner in solidum toutes parties succombantes aux dépens et à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le contrôleur technique n'est pas débiteur de la garantie de parfait achèvement qui constitue une obligation de faire des travaux, incombant exclusivement aux constructeurs ayant réalisé l'ouvrage ;
- sa responsabilité quasi-délictuelle en tant que contrôleur technique, au regard des articles L. 111-23 à L. 111-25 du code de la construction et de l'habitation et 4.1.7 de la norme AFNOR NF P 03-100 n'est pas susceptible d'être engagée alors qu'elle a rempli ses propres obligations, notamment en faisant des observations sur les déformations admissibles du vitrage et qu'aucune norme applicable méconnue ne lui est opposée ;
- le dommage résulte de la mauvaise exécution par les sociétés CTI BAT et Baudin-Châteauneuf de la méthodologie de pose des vitrages et l'insuffisance de coordination assurée par le maître d'œuvre d'exécution, du fait de la rédaction du CCTP par le bureau d'études Lequesne et parce que celui-ci, la société Jean Guervilly et la société Sofresid Engineering n'ont pas suspendu les travaux ;
- elle ne s'est pas désintéressée de sa mission puisqu'elle a émis un avis relatif notamment
à l'admissibilité des vitrages à supporter une flèche de 10 mm du support ;
- il ne lui appartenait pas d'émettre un " avis défavorable " sur la pose des vitrages compte
tenu du non-respect de la méthodologie proposée par le bureau d'étude Lequesne ;
- en tout état de cause, les entreprises étaient déjà averties par le maître d'œuvre du problème rencontré, dont elles n'ont pas tenu compte ;
- le montant de 320 402 euros retenu par l'expert comporte des tirants non nécessaires au regard du prototype réalisé par l'entreprise en cours d'expertise ;
- les indemnisations devaient être prononcées hors TVA par application du 1er alinéa de l'article 256 B du code général des impôts faute pour la communauté urbaine de Caen la Mer de démontrer qu'elle y est assujettie et qu'elle ne bénéficierait pas du FCTVA ;
- l'indexation sur le coût des travaux ne se justifie pas à défaut de démonstration que les travaux de reprise ne pouvaient pas être mis en œuvre dès le dépôt du rapport d'expertise ;
- le préjudice éventuel du maître d'ouvrage doit être apprécié le cas échéant en fonction du solde manifestement dû à la maîtrise d'œuvre ;
- les pertes d'exploitation de la communauté urbaine Caen la Mer ne sont pas justifiées ;
- elle ne peut être jugée solidaire alors qu'elle n'est pas liée par un contrat avec les autres intervenants à l'acte de construire et que l'article L. 111-24 du code de la construction et de l'habitation limite la responsabilité du contrôleur technique ;
- l'expert a limité sa responsabilité à 5%.
Par des mémoires, enregistrés les 24 janvier 2022 et 25 mai 2022, la société Baudin-Châteauneuf, représentée par Me Labrusse, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête de la communauté urbaine Caen la Mer, de réformer le jugement du 28 juillet 2021 en ce qu'il a alloué à la communauté urbaine une indemnité de 429 428,40 euros et l'a condamnée à supporter 30% de la charge de la condamnation et de rejeter ces demandes à son encontre ;
2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel incident, de réduire le montant des sommes allouées à la communauté urbaine Caen la Mer ;
3°) par la voie de l'appel provoqué, de condamner les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, CTI BAT, Qualiconsult et le bureau d'études Lequesne à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;
4°) de condamner toutes parties succombantes à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la seule norme qui s'imposait contractuellement à elle est le DTU 32.1 travaux de charpente métallique ;
- les interventions des sociétés CTI BAT et Sofresid Engineering ont créé une incompréhension ;
- il appartenait à la société CTI BAT de procéder au réglage des tirants au fur et à mesure du chargement des lisses par le verre ; elle a posé les vitrages sans respecter la méthodologie prévue ;
- la société Baudin-Châteauneuf n'est intervenue, dans un second temps, qu'à la demande de la maîtrise d'œuvre ;
- la coordination des travaux appartenait à la maîtrise d'œuvre et à l'OPC ;
- l'origine du sinistre est la conséquence d'un défaut de conception ;
- elle a confié l'intégralité des études techniques de la charpente au cabinet Leclerc qui a lui-même sous-traité le dimensionnement de la charpente au cabinet Lequesne, qui en est donc responsable ;
- sa part de responsabilité ne peut excéder 20% ;
- les sommes retenues par le tribunal administratif au titre des travaux de reprise sont manifestement surévaluées et devront être revues à de plus justes proportions ;
- leur indexation sur le coût de la construction doit être exclue alors qu'il n'est pas justifié par la collectivité publique qu'elle n'aurait pas été en mesure d'entreprendre les travaux de reprise à l'issue des opérations d'expertise ;
- la fourniture et la pose des vitrages étaient initialement à la charge
de CTI BAT, si bien que rien ne justifie de mettre à sa charge la somme de 76 920 euros pour leur remplacement ;
- le devis de la société CTI BAT du 5 janvier 2018 devait être retenu ;
- l'indemnisation du prototype n'est pas justifiée ;
- rien ne justifie de mettre à sa charge le remplacement des 247 tirants ;
- la perte d'exploitation n'est pas justifiée ;
- elle est fondée en cas de condamnation à appeler en garantie sur le fondement délictuel les différents intervenants à l'acte de construire dont la responsabilité a été retenue par l'expert judiciaire à savoir les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, CTI BAT, Qualiconsult et le bureau d'études Lequesne et ce dernier également sur un fondement contractuel dans le cadre de la sous-traitance.
Par un mémoire, enregistré le 24 mars 2022, la société CTI BAT, représentée par Me Hellot, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter l'ensemble des conclusions formées en cause d'appel contre elle ;
2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel provoqué, de condamner in solidum les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, Qualiconsult et Baudin-Châteauneuf à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;
3°) de condamner toutes parties succombantes à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la juridiction administrative est incompétente pour fixer une créance à son passif dès lors qu'elle a fait l'objet d'un plan de sauvegarde et de la nomination d'un mandataire et d'un administrateur judiciaires par jugement en date du 22 mars 2017 ;
- toute demande est irrecevable à son encontre, en application des
dispositions de l'article L. 622-21 du code de commerce, alors qu'elle est sous procédure de sauvegarde et faute de justification d'une déclaration de créance ;
- l'expert judiciaire n'a pas précisé en quoi les vitrages posés n'auraient pas respecté les préconisations établies par le bureau d'études Lequesne ;
- il ne lui appartenait pas de compenser l'erreur de conception de la maîtrise d'œuvre ;
- les désordres liés à un défaut de conception, qu'elle a d'ailleurs signalés, étaient trop importants pour qu'elle puisse y pallier à son niveau ;
- le préjudice d'exploitation allégué n'est pas établi ;
- elle est fondée à demander à la société Jean Guervilly de la garantir en tant que mandataire solidaire en raison du manque de cohérence et de la mauvaise répartition à l'intérieur de l'équipe de conception des tâches ;
- elle est fondée à demander à la SARL ECB de la garantir pour n'avoir pas su apprécier la nécessaire cohérence entre la règlementation au titre du lot des murs rideaux et celle applicable au titre du lot charpente ;
- elle est fondée à demander à la société Qualiconsult de la garantir pour ne pas
avoir décelé les erreurs d'exécution, notamment au titre du lot charpente, et ne pas avoir su
décelé les difficultés de la conception et les risques qui en découlaient ;
- elle est fondée à demander à la société Sofresid Engineering de la garantir au titre de la coordination, faute d'avoir constaté que l'entreprise Baudin-Châteauneuf ne procédait pas au réglage des tirants afin que puisse être prise une décision sur un arrêt de chantier ;
- elle est fondée à demander à la société Baudin-Châteauneuf de la garantir pour les fautes commises quant au non-respect des exigences dimensionnelles et de flexion qui ont été portées à sa connaissance par la société CTI BAT et sans annoncer qu'elle était dans l'incapacité de les respecter ;
- il ne lui appartenait pas de supprimer les jeux de charpente pour la pose des
vitrages, la situation résultant d'une incapacité de la société Baudin-Châteauneuf à livrer une charpente qui respecte les dimensionnements demandés.
III. Par une requête n° 21NT02730, enregistrée le 30 septembre 2021, la société Jean Guervilly, représentée par Me Griffiths, demande à la cour :
1°) à titre principal, d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 28 juillet 2021 en tant qu'il l'a condamnée et de rejeter les demandes formées à son encontre ;
2°) à titre subsidiaire, de limiter sa responsabilité à 12,5% de l'ensemble des condamnations prononcées au profit de la communauté urbaine Caen la Mer, en excluant sa condamnation solidaire et au coût des travaux de reprise hors taxes ou avec une taxe sur la valeur ajoutée réduite à 10% ;
3°) à titre plus subsidiaire, de condamner les sociétés ECB, Sofresid Engineering, Qualiconsult, CTI BAT et Baudin-Chateauneuf à la garantir de toutes sommes mises à sa charge au profit de la communauté urbaine Caen la Mer ;
4°) de condamner la communauté urbaine Caen la Mer à lui régler la somme de 101 865,09 euros toutes taxes comprises en qualité de mandataire du groupement de maîtrise d'œuvre ;
5°) de condamner tout succombant à lui verser la somme de 15 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle n'a commis aucune faute, de même que ses sous-traitants ;
- la rédaction du CCTP incombait à la SARL ECB, qui à dire de l'expert aurait dû solliciter l'aide d'un bureau d'études ;
- il appartenait aux entreprises de réaliser des études complémentaires au stade de l'exécution pour assurer une cohésion entre la charpente métallique et les murs rideaux ;
- le bureau d'études Lequesne, qui n'est pas sous-traitant du cabinet Lepourry-Bernard mais est intervenu en cours d'exécution du chantier comme sous-traitant de la société Baudin-Châteauneuf pour résoudre le problème rencontré, n'a pas été sollicité à cet égard ;
- le cabinet Lepourry-Bernard avait fait réaliser des prototypes pour éviter des approximations au moment de l'exécution et le bureau d'études Lequesne a diffusé une méthodologie précise de mise en œuvre en phase d'exécution du chantier, qui n'ont donné lieu à aucun retour des entreprises ;
- la décision d'arrêter le chantier, à la supposer justifiée et possible, appartenait en tout état de cause à la société Sofresid Engineering ;
- les préjudices de la communauté urbaine Caen la Mer ne sont pas établis ;
- la communauté urbaine Caen le Mer ne justifie pas de son assujettissement à la TVA ;
- il n'existe aucune solidarité légale entre constructeurs pour des désordres survenus avant réception des travaux ;
- le fait qu'elle soit mandataire du groupement de maîtrise d'œuvre n'implique pas de la considérer comme solidaire ;
- elle doit être garantie par la SARL ECB du fait de ses erreurs de conception, les sociétés Baudin Châteauneuf et CTI BAT du fait de leurs défauts d'exécution et non-respect de la méthodologie de montage des ouvrages et les sociétés Sofresid Engineering et Qualiconsult du fait de leur absence de réactions face aux difficultés rencontrées ;
- elle a droit par ailleurs au règlement de ses honoraires à hauteur de 101 865,09 euros toutes taxes comprises.
Par un mémoire, enregistré le 25 octobre 2021, la SARL ECB, représentée par Me Bouchard, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête de la société Jean Guervilly en tant qu'elle est dirigée contre elle, et, par la voie de l'appel provoqué, d'annuler le jugement du 28 juillet 2021 et de rejeter la demande de la communauté urbaine Caen la Mer ;
2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de réformer le jugement du 28 juillet 2021 en limitant le montant de la condamnation prononcée à son égard à 5% de l'ensemble des condamnations et de les prononcer hors taxes et sans condamnation à garantir d'autres parties ;
3°) à titre infiniment subsidiaire, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de condamner les sociétés Jean Guervilly, CTI BAT, ECB, Sofresid engineering et Baudin-Châteauneuf à la garantir de tout condamnation prononcée à son égard au-delà de 5% de l'ensemble des condamnations ;
4°) de mettre à la charge de la communauté urbaine Caen la Mer la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les déformations admissibles pour les ouvrages du " lot charpente métallique " ont été déterminées par les bureaux d'études Lequesne et BSO, chargés des plans de l'étude de projet et de toutes pièces à caractère technique, si bien qu'elle n'est pas responsable du dommage, son rôle se limitant à la description des ouvrages sur la base de ces éléments ;
- la société Baudin-Châteauneuf ne pouvait ignorer le risque auquel était exposé la charpente métallique ;
- le bureau d'études Lequesne s'est rendu compte du manque de cohérence entre la charpente et les murs rideaux ce qui l'a conduit à élaborer une méthodologie pour y pallier, qui n'a pas été ou a été mal mise en œuvre ;
- les entreprises, notamment la société Baudin-Châteauneuf, chargées des plans d'exécution, étaient avisées de la difficulté mais n'ont pas exécuté convenablement une méthodologie de pose permettant de compenser la déformation de la structure ;
- le tribunal ne pouvait mettre à sa charge plus que la part de 5% retenue par l'expert ;
- le prototype ne fait pas partie des sommes convenues dans le contrat de construction ;
- le préjudice de perte d'exploitation n'est pas justifié par les dommages subis par les vitrages.
Par des mémoires, enregistrés les 16 novembre 2021 et 8 mars 2022, la société Sofresid engineering, représentée par Me Majerholc-Oiknine, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête de la société Jean Guervilly et de rejeter l'ensemble des conclusions formées en cause d'appel contre elle ;
2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de limiter à 10 737,06 euros toutes taxes comprises le montant total des condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre et d'exclure toute solidarité dans ces condamnations ;
3°) à titre plus subsidiaire, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de condamner in solidum toutes autres parties succombantes à la garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre au-delà de la somme de 10 737,06 euros ;
4°) de condamner in solidum toutes parties succombantes à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à raison que les premiers juges ont écarté sa responsabilité malgré l'avis de l'expert alors que conformément à l'article 10 du décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993, le rôle de la personne en charge de l'ordonnancement, du pilotage et de la coordination (OPC) est spécifique et circonscrit si bien qu'elle ne se substitue pas au maître d'œuvre pour assurer la direction de l'exécution des travaux (DET) ;
- aucune disposition du CCTP ne lui confiait la mission d'apprécier
la valeur d'une proposition de méthodologie non contractuelle de montage des vitrages, et
encore moins de l'imposer aux entreprises, ni ne lui permettait de s'immiscer
dans des validations techniques spécifiques ou dans la procédure de montage des murs
rideaux des sociétés Baudin-Châteauneuf et CTI BAT pour imposer une méthodologie de montage des vitrages qui n'était que préconisée par le bureau d'études structure Lequesne ;
- la SARL Jean Guervilly n'a jamais notifié aux entreprises que la méthodologie du bureau d'études Lequesne devait être mise en œuvre ;
- les intervenants à l'opération ne peuvent être solidairement tenus envers le
maître de l'ouvrage que dans le cadre d'une solidarité légale ou conventionnelle en application de l'article 1310 du code civil, totalement exclue en l'espèce ;
- elle ne fait pas partie du groupement de maîtrise d'œuvre et n'a pas commis de fautes
indivisibles avec les autres défendeurs ayant entrainé la réalisation d'un dommage unique justifiant qu'elle garantisse d'autres intervenants ;
- sa condamnation ne saurait, en tout état de cause, excéder la part de 2,5 %
conformément à l'avis de l'expert, pour un total de 10 737,06 euros ;
- les préjudices de la communauté urbaine Caen la Mer ne sont pas établis.
Par un mémoire, enregistré le 19 janvier 2022, la société Qualiconsult, représentée par Me Launey, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête de la société Jean Guervilly, et de rejeter l'ensemble des conclusions formées en cause d'appel contre elle ;
2°) à titre subsidiaire, en cas de réformation du jugement attaqué, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de rejeter les conclusions de la communauté urbaine de Caen la Mer au titre de ses pertes d'exploitations, de la taxe sur la valeur ajoutée et de l'indexation sur l'indice du coût des travaux et de limiter tout condamnation éventuelle à la somme de 320 357 euros hors taxes et à une quote-part maximale de 5%, de le réformer en ce qu'il a alloué à la communauté urbaine de Caen la Mer la somme de 384 428,40 euros toutes taxes comprises au titre des travaux de reprise et de 45 000 euros au titre d'une perte d'exploitation et de condamner les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, CTI BAT et Baudin-Châteauneuf à la garantir de toutes condamnations ;
3°) de condamner in solidum toutes parties succombantes aux dépens et à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa responsabilité quasi-délictuelle en tant que contrôleur technique, au regard des articles L. 111-23 à L. 111-25 du code de la construction et de l'habitation et 4.1.7 de la norme AFNOR NF P 03-100 n'est pas susceptible d'être engagée alors qu'elle a rempli ses propres obligations, notamment en faisant des observations sur les déformations admissibles du vitrage et qu'aucune norme applicable méconnue ne lui est opposée ;
- le dommage résulte de la mauvaise exécution par les sociétés CTI BAT et Baudin-Châteauneuf de la méthodologie de pose des vitrages et l'insuffisance de coordination assurée par le maître d'œuvre d'exécution, du fait de la rédaction du CCTP par le bureau d'études Lequesne et parce que celui-ci, la société Jean Guervilly et la société Sofresid Engineering n'ont pas suspendu les travaux ;
- elle ne s'est pas désintéressée de sa mission puisqu'elle a émis un avis relatif notamment
à l'admissibilité des vitrages à supporter une flèche de 10 mm du support ;
- il ne lui appartenait pas d'émettre un " avis défavorable " sur la pose des vitrages compte
tenu du non-respect de la méthodologie proposée par le bureau d'étude Lequesne ;
- en tout état de cause, les entreprises étaient déjà averties par le maître d'œuvre du problème rencontré, dont elles n'ont pas tenu compte ;
- le montant de 320 402 euros retenu par l'expert comporte des tirants non nécessaires au regard du prototype réalisé par l'entreprise en cours d'expertise ;
- les indemnisations devaient être prononcées hors TVA par application du 1er alinéa de l'article 256 B du code général des impôts faute pour la communauté urbaine de Caen la Mer de démontrer qu'elle y est assujettie et qu'elle ne bénéficierait pas du FCTVA ;
- l'indexation sur le coût des travaux ne se justifie pas à défaut de démonstration que les travaux de reprise ne pouvaient pas être mis en œuvre dès le dépôt du rapport d'expertise ;
- le préjudice éventuel du maître d'ouvrage doit être apprécié le cas échéant en fonction du solde manifestement dû à la maîtrise d'œuvre ;
- les pertes d'exploitation de la communauté urbaine Caen la Mer ne sont pas justifiées ;
- elle ne peut être jugée solidaire alors qu'elle n'est pas liée par un contrat avec les autres intervenants à l'acte de construire et que l'article L. 111-24 du code de la construction et de l'habitation limite la responsabilité du contrôleur technique ;
- l'expert a limité sa responsabilité à 5%.
Par des mémoires, enregistrés les 24 janvier 2022 et 25 mai 2022, la société Baudin-Châteauneuf, représentée par Me Labrusse, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête de la SARL Jean Guervilly et, par la voie de l'appel provoqué, de rejeter les conclusions de la communauté urbaine Caen la Mer à son encontre, et de réformer le jugement du 28 juillet 2021 en ce qu'il a alloué à la communauté urbaine une indemnité de 429 428,40 euros et l'a condamnée à supporter 30% de la charge de la condamnation ;
2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel provoqué, de réduire le montant des sommes allouées à la communauté urbaine Caen la Mer ;
3°) de condamner les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, CTI BAT, Qualiconsult et le bureau d'études Lequesne à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;
4°) de condamner toutes parties succombantes à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la seule norme qui s'imposait contractuellement à elle est le DTU 32.1 travaux de charpente métallique ;
- les interventions des sociétés CTI BAT et Sofresid Engineering ont créé une incompréhension ;
- il appartenait à la société CTI BAT de procéder au réglage des tirants au fur et à mesure du chargement des lisses par le verre ; elle a posé les vitrages sans respecter la méthodologie prévue ;
- la société Baudin-Châteauneuf n'est intervenue, dans un second temps, qu'à la demande de la maîtrise d'œuvre ;
- la coordination des travaux appartenait à la maîtrise d'œuvre et à l'OPC ;
- l'origine du sinistre est la conséquence d'un défaut de conception ;
- elle a confié l'intégralité des études techniques de la charpente au cabinet Leclerc qui a lui-même sous-traité le dimensionnement de la charpente au cabinet Lequesne, qui en est donc responsable ;
- sa part de responsabilité ne peut excéder 20% ;
- les sommes retenues par le tribunal administratif au titre des travaux de reprise sont manifestement surévaluées et devront être revues à de plus justes proportions ;
- leur indexation sur le coût de la construction doit être exclue alors qu'il n'est pas justifié par la collectivité publique qu'elle n'aurait pas été en mesure d'entreprendre les travaux de reprise à l'issue des opérations d'expertise ;
- la fourniture et la pose des vitrages étaient initialement à la charge
de CTI BAT, si bien que rien ne justifie de mettre à sa charge la somme de 76 920 euros pour leur remplacement ;
- le devis de la société CTI BAT du 5 janvier 2018 devait être retenu ;
- l'indemnisation du prototype n'est pas justifiée ;
- rien ne justifie de mettre à sa charge le remplacement des 247 tirants ;
- la perte d'exploitation n'est pas justifiée ;
- elle est fondée en cas de condamnation à appeler en garantie sur le fondement délictuel les différents intervenants à l'acte de construire dont la responsabilité a été retenue par l'expert judiciaire, à savoir les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, CTI BAT, Qualiconsult et le bureau d'études Lequesne et ce dernier également sur un fondement contractuel dans le cadre de la sous-traitance.
Par des mémoires, enregistrés les 28 février 2022, 24 mars 2022, 28 avril 2022 et 25 mai 2022, la communauté urbaine Caen la Mer, représentée par Me Bouthors-Neveu, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) de rejeter la requête de la SARL Jean Guervilly, ainsi que, par la voie de l'appel provoqué, les conclusions des sociétés ECB, Sofresid Engineering, Qualiconsult, CTI BAT et Baudin-Châteauneuf et, par la voie de l'appel incident, les conclusions de la société Jean Guervilly en paiement du solde du marché ;
2°) par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de réformer le jugement du 28 juillet 2021 en condamnant solidairement les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, Qualiconsult, CTI BAT et Baudin-Châteauneuf à lui verser la somme de 384 482,40 euros toutes taxes comprises au titre des murs rideaux et la somme de 45 000 euros au titre de son préjudice d'exploitation, avec intérêts au taux légal à compter de l'introduction de la requête en vue de la désignation d'un expert, capitalisation des intérêts et indexation sur le dernier indice du coût de la construction publié au jour du dépôt du rapport d'expertise judiciaire et de mettre à leur charge solidaire les frais liés à l'expertise, pour un total de 50 191,44 euros toutes taxes comprises ;
3°) de fixer au passif de la société CTI BAT les sommes de 384 482,40 euros toutes taxes comprises correspondant au coût des travaux de reprise des désordres, de 45 000 euros au titre de son préjudice d'exploitation, de 48 191,44 euros toutes taxes comprises au titre des frais d'expertise, de 2 000 euros au titre des frais d'avocat exposés pour son assistance pendant l'expertise, de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de rendre son arrêt commun et opposable à l'administrateur et à son mandataire judiciaires ;
4°) de mettre à la charge solidaire de autres parties la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les manquements relevés par l'expert, liés au cahier des clauses techniques particulières (CCTP) sont imputables à la maîtrise d'œuvre ;
- la société Jean Guervilly est responsable pour un défaut de conception, de rédaction des CCTP et avoir mal réparti les tâches entre les entreprises et du fait des manquements de la SARL Lepourry et Bernard, son sous-traitant maître d'œuvre d'exécution et du bureau d'études structure Lequesne intervenu pour leur compte ;
- la maîtrise d'œuvre aurait dû interrompre les travaux de pose des vitrages ;
- la société Sofresid Engineering est responsable faute d'être intervenue auprès du maître d'œuvre d'exécution pour que le chantier soit arrêté ;
- la société Qualiconsult est responsable de ne pas avoir identifié le défaut de conception et les incohérences des référentiels de déformations à la lecture des pièces écrites du marché et n'a pas émis d'avis défavorable à la pose des vitrages malgré le non-respect de la méthodologie préconisée par le bureau d'études structures Lequesne ;
- la société CTI BAT est responsable du fait du non-respect des préconisations du bureau d'études structure Lequesne et pour défaut d'exécution dans la pose des vitrages ;
- la société Baudin-Châteauneuf est responsable du fait du non-respect des préconisations du bureau d'études structures Lequesne et pour défaut d'exécution dans le réglage des tirants ;
- la part de responsabilité de chaque entreprise a été déterminée par l'expert ;
- l'indemnité due par les constructeurs au maître de l'ouvrage en réparation de désordres
affectant l'ouvrage doit comprendre la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) que l'administration non exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée supporte pour les travaux de réfection des désordres affectant l'immeuble, quand bien même elle bénéficie du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) ;
- le prototype était nécessaire dans le cadre de la reprise des désordres et n'a
aucunement été source d'un enrichissement de la collectivité ;
- les pertes d'exploitation sont établies alors que la fermeture de la piscine s'imposait durant les travaux de reprise des désordres, qu'elle n'avait pas reçu les fonds pour entreprendre les travaux et que la crise sanitaire a limité ses marges de manœuvre ;
- l'expert s'est basé sur le dernier devis transmis ;
- les premiers juges n'auraient pas dû mettre hors de cause les sociétés Qualiconsult et Sofresid Engineering eu égard aux manquements qu'elles ont commis ;
- au vu de la jurisprudence, ils auraient dû inscrire sa créance au passif de la société CTI BAT et rendre sa décision commune et opposable à l'administrateur et à son mandataire judiciaires ;
- le coût des travaux de reprise s'élève à la somme de 384 482,40 euros toutes taxes comprises, le préjudice d'exploitation à 45 000 euros et les dépens et frais d'assistance en cours d'expertise à la somme de 50 191,44 euros ;
- sa demande d'indexation sur le coût de la construction est justifiée par la crise sanitaire et l'obligation de mettre en concurrence des entreprises devant réparer les désordres ;
- la demande reconventionnelle de la société Guervilly en paiement du solde de ses honoraires est infondée par application de l'avenant n°3 signé par la maîtrise d'œuvre et alors que les condamnations de première instance ne sont pas assimilables à une levée des réserves ;
- la demande reconventionnelle présentée par la SARL Jean Guervilly en paiement de solde est irrecevable faute de réclamation préalable en application de l'article 37 du CCAG des marchés publics de prestations intellectuelles.
Par un mémoire, enregistré le 24 mars 2022, la société CTI BAT, représentée par Me Hellot, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête de la société Jean Guervilly et, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de rejeter toute condamnation et appel en garantie à son encontre et débouter la communauté urbaine Caen la Mer de sa demande au titre du préjudice d'exploitation ;
2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel incident et de l'appel provoqué, de condamner in solidum les sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, Qualiconsult et Baudin-Châteauneuf à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;
3°) de condamner toutes parties succombantes à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la juridiction administrative est incompétente pour fixer une créance à son passif dès lors qu'elle a fait l'objet d'un plan de sauvegarde et de la nomination d'un mandataire et d'un administrateur judiciaires par jugement en date du 22 mars 2017 ;
- toute demande est irrecevable à son encontre, en application des
dispositions de l'article L. 622-21 du code de commerce, alors qu'elle est sous procédure de sauvegarde et faute de justification d'une déclaration de créance ;
- l'expert judiciaire n'a pas précisé en quoi les vitrages posés n'auraient pas respecté les préconisations établies par le bureau d'études Lequesne ;
- il ne lui appartenait pas de compenser l'erreur de conception de la maîtrise d'œuvre ;
- les désordres liés à un défaut de conception, qu'elle a d'ailleurs signalés, étaient trop importants pour qu'elle puisse y pallier à son niveau ;
- le préjudice d'exploitation allégué n'est pas établi ;
- elle est fondée à demander à la société Jean Guervilly de la garantir en tant que mandataire solidaire en raison du manque de cohérence et de la mauvaise répartition à l'intérieur de l'équipe de conception des tâches ;
- elle est fondée à demander à la SARL ECB de la garantir pour n'avoir pas su apprécier la nécessaire cohérence entre la règlementation au titre du lot des murs rideaux et celle applicable au titre du lot charpente ;
- elle est fondée à demander à la société Qualiconsult de la garantir pour ne pas
avoir décelé les erreurs d'exécution, notamment au titre du lot charpente et ne pas avoir su
déceler les difficultés de la conception et les risques qui en découlaient ;
- elle est fondée à demander à la société Sofresid Engineering de la garantir au titre de la coordination, faute d'avoir constaté que l'entreprise Baudin-Châteauneuf ne procédait pas au réglage des tirants afin que puisse être prise une décision sur un arrêt de chantier ;
- elle est fondée à demander à la société Baudin-Châteauneuf de la garantir pour les fautes commises quant au non-respect des exigences dimensionnelles et de flexion qui ont été portées à sa connaissance par la société CTI BAT et sans annoncer qu'elle était dans l'incapacité de les respecter ;
- il ne lui appartenait pas de supprimer les jeux de charpente pour la pose des
vitrages, la situation résultant d'une incapacité de la société Baudin-Châteauneuf à livrer une charpente qui respecte les dimensionnements demandés.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code civil ;
- le code de commerce ;
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code général des impôts ;
- le code des marchés publics ;
- le décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 ;
- l'arrêté du 16 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Derlange, président assesseur,
- les conclusions de M. Pons, rapporteur public,
- et les observations de Me Bouthors, pour la communauté urbaine Caen la Mer, de Me Spoerry pour la société Qualiconsult et de Me Hellot pour la société CTI BAT.
Considérant ce qui suit :
1. La communauté d'agglomération devenue communauté urbaine Caen la Mer a passé un marché public de travaux pour la restructuration du stade nautique de Caen. La maîtrise d'œuvre a été confiée, par acte d'engagement du 21 décembre 2010, à un groupement conjoint composé notamment de la société Jean Guervilly, architecte, mandataire solidaire, la société Economie et coordination en bâtiments (ECB), économiste de la construction, ainsi que le bureau d'études techniques BSO. Par acte d'engagement du 25 mars 2011, la mission de contrôle technique a été confiée à la société Qualiconsult. Par acte d'engagement du 9 janvier 2012, la mission de l'ordonnancement, du pilotage et de la coordination (OPC) a été confiée à la société Sofresid Engineering. Par deux actes d'engagement du 2 octobre 2012, le lot n° 4 " charpente métallique " a été confié à la société Baudin-Châteauneuf et le lot n° 6 " menuiseries aluminium - façades rideaux - bardage " a été confié à la société CTI BAT. La réception des lots n° 4 et n° 6 a été prononcée le 16 mai 2014 avec des réserves notamment au sujet des murs rideaux du fait de la rupture de vitrages ou de l'impossibilité de les mettre en place comme prévu. La communauté d'agglomération Caen la Mer a formé une demande d'expertise judiciaire à laquelle le juge des référés du tribunal administratif a fait droit par ordonnance du 3 octobre 2014. L'expert désigné a remis son rapport le 22 novembre 2018. La communauté urbaine Caen la Mer, qui a succédé à la communauté d'agglomération Caen la Mer, a saisi le tribunal administratif de Caen aux fins de voir condamner les sociétés Jean Guervilly, ECB, Qualiconsult, Sofresid Engineering, Baudin-Châteauneuf et CTI BAT à l'indemniser en raison des désordres constatés sur ces murs rideaux. Par un jugement du 28 juillet 2021, le tribunal administratif de Caen, d'une part, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, a condamné solidairement les sociétés Jean Guervilly, CTI BAT, ECB et Baudin-Châteauneuf à verser la somme de 429 428,40 euros, assortie des intérêts et de leur capitalisation, à la communauté urbaine Caen la Mer, en réparation du coût de la reprise des désordres et du préjudice d'exploitation (article 1er), et a mis à leur charge solidaire les frais d'expertise s'élevant à 48 191,44 euros (article 2), d'autre part, a condamné la société Jean Guervilly à garantir la société ECB à hauteur de 39,5 % de la part excédant 5 % des condamnations prononcées aux articles 1er et 2, et les sociétés CTI BAT et Baudin-Châteauneuf à garantir la société ECB à hauteur respectivement de 20 % et de 30 % de ces mêmes condamnations dans les mêmes conditions (article 3), a condamné la société ECB à garantir la société Jean Guervilly à hauteur de 10,5 % du montant total des condamnations prononcées aux articles 1er et 2, la société CTI BAT à garantir la société Jean Guervilly à hauteur de 20 % de ce montant et la société Baudin-Châteauneuf à garantir la société Jean Guervilly à hauteur de 30 % dudit montant (article 4), a condamné la société ECB à garantir la société CTI BAT à hauteur de 10,5 %, la société Jean Guervilly à garantir la société CTI BAT à hauteur de 39,5 % et la société Baudin-Châteauneuf à garantir la société CTI BAT à hauteur de 30 % (article 5), a condamné la société ECB à garantir la société Baudin-Châteauneuf à hauteur de 10,5 %, la société Jean Guervilly à garantir la société Baudin-Châteauneuf à hauteur de 39,5 %, et la société CTI BAT à garantir la société Baudin-Châteauneuf à hauteur de 20 % (article 6), enfin, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, a mis à la charge solidaire des sociétés Jean Guervilly, CTI BAT, ECB et Baudin-Châteauneuf le versement à la communauté urbaine Caen la Mer d'une somme de 1 500 euros (article 7), a mis à la charge de la communauté urbaine Caen la Mer le versement à la société Qualiconsult d'une somme de 1 500 euros (article 8) et le versement à la société Sofresid Engineering d'une somme également de 1 500 euros (article 9), puis a rejeté le surplus des conclusions des parties (article 10). La société ECB, sous le n° 21NT02585, la communauté urbaine Caen la Mer, sous le n° 21NT02696, et la société Jean Guervilly, sous le n° 21NT02730, relèvent respectivement appel de ce jugement.
2. Ces requêtes n°s 21NT02585, 21NT02696 et 21NT02730 présentées respectivement pour la SARL ECB, la communauté urbaine Caen la Mer et la SARL Jean Guervilly sont relatives aux conséquences des désordres affectant le même ouvrage public, sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise, que la cause de la rupture des vitrages est une mise en compression de ceux-ci sous l'action de leur poids propre due à une déformation trop importante de la structure porteuse, charpente métallique et ossature support des vitrages. Ainsi, les services de la collectivité maître d'ouvrage ont relevé, le 21 janvier 2005, 48 vitrages cassés, l'expert constatant que " Les 45 petits vitrages cassés sont situés au-dessus des vitrages reposant sur le sol et soumis au poids des vitrages supérieurs de la façade. " et l'expert a procédé à un nouveau décompte le 16 juin 2015 en recensant " 43 vitrages cassés. Des vitrages ont été changés, des nouveaux vitrages se sont rompus. ". Ce constat n'est contesté par aucune des parties et il résulte de l'instruction que la réception des lots n° 4 et n° 6 a été prononcée le 16 mai 2014 avec des réserves portant notamment sur les désordres relatifs aux murs rideaux.
En ce qui concerne les conclusions d'appel principal de la société ECB :
4. En premier lieu, il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise, qu'a été commise par la maîtrise d'œuvre une erreur de conception à l'origine des désordres consistant à ne pas avoir prévu des déformations limites, pour les éléments de la charpente métallique et pour les barres d'acier, ou " tirants ", sur lesquelles reposent les vitrages et leur armature de soutien, alors que la norme NF EN 132830, " applicable à cette opération " comme le rappelle l'expert, impose une telle déformation limite. Les murs rideaux s'appuyant sur la charpente métallique, leurs déformations limites devaient être imposées aux ouvrages de cette charpente et le cahier des clauses techniques particulières (CCTP) du lot n° 4 aurait dû imposer, comme le rapporte l'expert, " les déformations limites de 1/500e de la portée ou 3 mm sous l'action du poids propre, ce qui n'a pas été fait ". Par ailleurs, l'expert relève une deuxième erreur de conception consistant en une répartition inadéquate de certaines tâches entre le lot n° 6 " menuiseries aluminium - façades rideaux " et le lot n° 4 " charpente métallique ", dès lors que les tirants soutenant les éléments servant d'appui aux lisses soutenant les vitrages relevaient du lot charpente métallique et leurs réglages après la pose des vitrages étaient de ce fait à la charge de l'entreprise Baudin-Châteauneuf, ce qui a eu pour conséquence, comme le constate l'expert, que " Dans les faits, ces réglages ont été mal réalisés et peu efficaces. ".
5. Il résulte de l'instruction qu'eu égard à la répartition des missions ressortant de l'annexe au marché attribué au groupement de maîtrise d'œuvre, l'économiste de la construction, dénommé économiste prescripteur E, avait pour mission de rédiger la " description technique et détaillée suivant le respect des DTU et diverses réglementations ", ce dont il résulte que l'absence de précision au CCTP des déformations applicables aux ouvrages du lot " charpente métallique " lui est imputable. La mauvaise répartition des tâches entre les deux lots en cause constitue quant à elle une erreur de l'architecte. Il résulte ainsi du rapport d'expertise que si, au sein du groupement de maîtrise d'œuvre, la responsabilité de l'architecte est plus importante, des manquements sont également imputables à l'économiste de la construction. La société ECB avait en effet notamment en charge la rédaction des CCTP des lots 4 et 6 et a omis d'y inscrire les déformations limites adéquates pour l'ouvrage, elle a ainsi commis une erreur dans l'exécution de ses obligations contractuelles. La circonstance que, d'après l'affirmation non assortie de justification de l'expert, une telle prescription ne serait pas de sa compétence, ne modifie pas l'imputabilité du manquement car, dès lors que la rédaction des CCTP lui incombait et qu'elle a souscrit à ces obligations contractuelles en acceptant de signer le marché par l'intermédiaire de l'architecte mandataire du groupement, il lui appartenait de s'entourer des compétences nécessaires, au besoin en s'attachant les services d'un bureau d'études techniques compétent. De plus, l'économiste de la construction, qui a pour rôle de déterminer le prix de revient de l'ouvrage en calculant en particulier les quantités de matériaux, ne saurait ignorer totalement les caractéristiques de ces matériaux, lesquelles sont susceptibles d'influer sur leur quantité et leur coût. Les moyens de la société ECB tenant à ce qu'elle devrait être exonérée de toute responsabilité doivent donc être écartés.
6. En deuxième lieu, d'une part, la seule participation de la société ECB à la réalisation des désordres suffit à justifier sa condamnation solidaire avec les autres constructeurs responsables. D'autre part, au regard de l'importance de l'erreur commise du fait de l'omission dans les CCTP des lots en cause de la mention des déformations limites adéquates, en mettant à la charge de la société ECB une fraction de 10,5 % de la réparation des préjudices résultant des désordres, le tribunal administratif n'a pas fait une évaluation exagérée de la part de responsabilité lui incombant, ce pourcentage relativement peu élevé tenant compte de la circonstance que l'architecte mandataire aurait pu mieux répartir les tâches entre les membres du groupement. Enfin, en se bornant à affirmer que " le tribunal administratif ne peut décider contrairement aux préconisations de l'expert judiciaire ", alors que le rapport de ce dernier ne lie pas le juge, la société ECB n'établit pas que, comme elle le demande, elle devrait être garantie de toute condamnation excédant le pourcentage de 5 % par les sociétés Jean Guervilly, Sofresid Engineering, Qualiconsult, CTI BAT et Baudin-Chateauneuf. Doivent donc être également écartés ses moyens soutenant, à titre subsidiaire, que sa part de responsabilité ne pourrait être supérieure à 5 % et qu'elle ne pouvait être condamnée de manière solidaire.
7. En troisième lieu, la société ECB conteste le montant des condamnations prononcées sur trois points. D'une part, sur le premier point, il résulte du rapport que l'expert a chiffré le coût des travaux de reprise des désordres après avoir fait vérifier la structure existante des murs rideaux du centre nautique de Caen par un sapiteur issu d'un bureau d'études techniques de structures et en tire la conclusion que " L'ensemble des vitrages devra être déposé et reposé avec une méthodologie précise de pose pour compenser les déformations de la structure au fur et à mesure de la pose. ". Ce constat l'amène à définir les travaux de reprise suivants " - remplacement des vitrages 76 920, - prototype tirants 14 370, - remplacement 247 tirants 186 992, - attaches nouveaux tirants 30 120 ", soit avec les études techniques, la mission de maîtrise d'œuvre pour la direction de l'exécution des travaux et les missions de contrôle technique et de coordinateur SPS, un montant total de 384 482,40 euros TTC, qui a été retenu par les premiers juges. La nécessité de définir une méthodologie précise de pose rend ainsi nécessaire la réalisation d'un prototype de tirants permettant de valider la méthodologie et l'évaluation à 14 370 euros du coût de ce prototype par l'expert et son sapiteur n'apparaît pas exagérée.
8. D'autre part, il résulte de l'instruction, en particulier du rapport du sapiteur expert-comptable, qu'en réalisant une partie des travaux pendant la période de vidange des bassins en hiver la période de fermeture du centre nautique pour les travaux de reprise peut être limitée à trois semaines et que, si doivent être écartés les frais de personnels permanents car ceux-ci constituent une charge fixe dont le montant ne varie pas avec les désordres, le sapiteur refuse en revanche de déduire de la perte de recettes les charges correspondant aux frais de chauffage et d'entretien aux motifs que " le remplacement du vitrage va occasionner pour le bâtiment abritant le bassin de 25 mètres une ouverture sur l'extérieur, à une époque où les températures sont les plus basses, ce qui immanquablement va générer des frais de chauffage importants " et que " s'agissant des frais d'entretien, ceux-ci ne devraient pas être significativement réduits, en raison du nettoyage du chantier après la réalisation des travaux. ". Une fréquentation moyenne en hiver, calculée à partir des chiffres de fréquentation constatés sur les dix dernières semaines de 2017 et les dix premières semaines de 2018, aboutit ainsi à estimer la perte d'exploitation imputable aux travaux de reprise des désordres à 15 000 euros par semaine, soit un préjudice total de 45 000 euros. Cette évaluation n'est pas sérieusement contestée par les parties condamnées solidairement à indemniser ce chef de préjudice, et notamment pas par la société ECB.
9. Enfin, le montant du préjudice dont le maître d'ouvrage est fondé à demander l'indemnisation aux constructeurs correspond aux frais qu'il doit engager pour les travaux de réfection. Or ces frais comprennent, en règle générale, la taxe sur la valeur ajoutée, élément indissociable du coût des travaux, à moins que le maître d'ouvrage ne relève d'un régime fiscal lui permettant normalement de déduire tout ou partie de cette taxe de celle qu'il a collectée à raison de ses propres opérations. Dans ces conditions, il appartient aux constructeurs mis en cause d'apporter au juge tout élément de nature à remettre en cause la présomption de non assujettissement des collectivités territoriales et de leurs groupements à la taxe sur la valeur ajoutée et à établir que le montant de celle-ci ne doit pas être inclus dans le montant du préjudice indemnisable. Par ailleurs, aux termes du premier alinéa de l'article 256 B du code général des impôts : " Les personnes morales de droit public ne sont pas assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée pour l'activité de leurs services administratifs, sociaux, éducatifs, culturels et sportifs lorsque leur non-assujettissement n'entraîne pas de distorsions dans les conditions de la concurrence ". Si les collectivités locales et leurs établissements publics bénéficient, dans certaines conditions, de dotations du fond de compensation de la TVA, destinées à permettre un remboursement progressif d'une partie de la taxe ayant grevé leurs dépenses d'investissement, le régime fiscal de leurs opérations ne s'en trouve pas modifié et cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) grevant les travaux immobiliers, tels que ceux de la rénovation du centre nautique de Caen, soit incluse dans le montant des indemnités dues. En l'espèce, les autres parties n'établissent aucunement que la communauté urbaine Caen la Mer serait, pour le service dont relève l'ouvrage en cause, assujettie à la TVA et pourrait récupérer celle-ci. Les indemnités dues à la collectivité publique maître d'ouvrage doivent donc comprendre la TVA.
10. Il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 9 que la société ECB n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué en ce qu'il l'a condamnée.
En ce qui concerne les conclusions d'appel principal de la communauté urbaine Caen la Mer :
11. En premier lieu, la communauté urbaine Caen La Mer conteste la mise hors de cause de la société Sofresid Engineering, qui exerçait la fonction d'OPC, et du contrôleur technique Qualiconsult. Toutefois, d'une part, il résulte de l'instruction que c'est à la maîtrise d'œuvre, non au titulaire de la fonction OPC, qu'est imputable le défaut d'organisation du chantier et l'absence de la décision d'arrêt du chantier qui aurait dû être prise devant le constat que la méthodologie de pose des vitrages arrêtée en cours de travaux sur proposition du bureau d'études techniques (BET) Lequesne n'était pas respectée. Ainsi l'expert constate que " Cette méthodologie destinée à compenser l'erreur de conception de la maîtrise d'œuvre était difficile à mettre en œuvre. La maîtrise d'œuvre a décidé de la mettre en application lors de la réunion technique du 15 avril 2013. Elle nécessitait une organisation rigoureuse sur le chantier qui n'a pas été mise en place par la maîtrise d'œuvre d'exécution. Lorsque la maîtrise d'œuvre s'est aperçue que la méthodologie n'était toujours pas respectée au bout de plusieurs semaines, elle aurait dû arrêter le chantier. ". L'expert indique également dans son rapport que " La société Sofresid a bien informé tous les intervenants de la méthodologie établie par le BE Lequesne et en particulier le réglage des tirants. Elle l'a rappelé de nombreuses fois dans le déroulement de sa mission sans résultat. " et souligne que le maître d'oeuvre d'exécution n'a pas pris les mesures pour obliger les entreprises à respecter cette méthodologie, en rappelant que " Dans sa mission, l'OPC n'a pas de compétences techniques si ce n'est l'organisation, la planification et la coordination des tâches. C'était au maître d'œuvre de réagir sur les dangers de la mauvaise pose des vitrages. ".
12. D'autre part, il ne résulte pas des pièces du marché que le contrôleur technique était chargé d'une mission de vérification de l'adéquation des normes de déformations limites fixées dans le CCTP. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que lors de la phase d'exécution des travaux la société Qualiconsult n'a pas ignoré les problèmes liés à la définition inadéquate des normes de déformations admissibles dans le CCTP, d'où sont issus les désordres affectant les vitrages de certains murs rideaux. Il ressort en effet de son " bordereau récapitulatif d'examen de documents " du 15 janvier 2015 adressé au maître d'ouvrage qu'elle a rendu à ce sujet un " avis suspendu " après l'examen des plans d'exécution des murs rideaux, en signalant d'une part à propos de quatre d'entre eux " Profilés de reprise des dilatations du mur rideau à préciser sur les plans ", d'autre part surtout " Préciser les déformations admissibles du vitrage ", enfin en demandant que lui soit adressées les " Notes de calcul de l'ensemble des murs rideaux ". De même, dans le bordereau d'examen de documents du 17 mars 2015, le contrôleur technique émet un avis suspendu en notant des observations portant sur les " Profilés de reprise des dilatations du mur rideau à préciser sur les plans " et encore " Préciser les déformations admissibles du vitrage ", ainsi que toujours la même demande de documents. Enfin, ces mêmes observations sont reprises dans les documents " Liste récapitulative des observations non levées " adressés par le contrôleur technique à la communauté urbaine Caen la Mer le 10 septembre 2015 et le 25 novembre 2015. Dans ces conditions, la communauté urbaine Caen la Mer n'établit pas que c'est à tort que le jugement attaqué exclut la responsabilité contractuelle des sociétés Sofresid Engineering et Qualiconsult.
13. En deuxième lieu, les articles L. 622-21 à L. 622-25 du code de commerce régissent les conditions dans lesquelles peuvent être produites puis payées les créances détenues sur une entreprise qui fait l'objet d'une procédure collective. En particulier, l'article L. 622-21 de ce code fixe le principe de la suspension ou de l'interdiction, à compter du jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde, de toute action en justice tendant au paiement d'une somme d'argent ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent de la part de tous les créanciers autres que ceux détenteurs d'une créance postérieure privilégiée. Ainsi, il résulte de ces dispositions qu'il appartient de manière exclusive à l'autorité judiciaire de statuer sur l'admission ou la non admission des créances déclarées, alors même qu'il appartient au juge administratif d'examiner si la collectivité publique, dont l'action tend à faire reconnaître et évaluer ses droits à la suite des désordres constatés dans un ouvrage construit pour elle par une entreprise admise ultérieurement à la procédure collective a droit à réparation et de fixer le montant des indemnités qui lui sont dues à ce titre par l'entreprise défaillante, soit à titre définitif, soit à titre provisionnel, sans préjudice des suites que la procédure judiciaire est susceptible d'avoir sur le recouvrement de cette créance. Il s'ensuit que la communauté de commune Caen la Mer n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté, comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaitre, sa demande tendant à faire inscrire ses créances à l'égard de la société CTI BAT au passif de cette société.
14. En troisième lieu, la communauté urbaine Caen la Mer conteste le montant de l'indemnité qui lui a été allouée par les premiers juges sur deux points. D'une part, si la collectivité publique maître d'ouvrage demande l'indexation des sommes allouées sur l'indice du coût de la construction, l'évaluation des dommages subis doit être faite à la date à laquelle, leur cause ayant été déterminée et leur étendue prévisible étant connue, il pouvait être procédé aux travaux destinés à y remédier et à les réparer. En l'espèce, cette date est celle du 22 novembre 2018 à laquelle l'expert a déposé son rapport, lequel définit avec une précision suffisante la nature et l'étendue des travaux de reprise nécessaires. La communauté urbaine Caen la Mer ne justifie aucunement s'être trouvée dans l'impossibilité technique ou financière de faire effectuer les travaux à partir de cette période en se bornant à invoquer les difficultés dues à l'épidémie de covid, laquelle n'est au surplus intervenue et n'a pu avoir des effets économiques qu'à compter de mars 2020. Sa demande d'indexation ne peut donc être accueillie.
15. D'autre part, il résulte du point 28 du jugement attaqué que le tribunal administratif a refusé l'indemnisation des frais d'avocat pour assistance pendant l'expertise au motif que " la communauté urbaine Caen la Mer ne produit aucune pièce de nature à établir l'existence et l'étendue de ce préjudice. Par suite, elle n'est pas fondée à demander à ce qu'une réparation lui soit versée à ce titre par les parties perdantes. ". Devant la cour, elle ne produit pas davantage de justificatifs ni ne donne aucune explication pertinente sur cette absence de justificatifs. Dès lors qu'il n'est pas davantage justifié de ce chef de préjudice, le rejet de la demande sur ce point ne peut qu'être confirmé.
16. En quatrième lieu, en ce qui concerne les intérêts et leur capitalisation, en application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, la communauté urbaine Caen la Mer a droit aux intérêts au taux légal à compter du 22 mai 2019, date d'enregistrement de sa requête introductive d'instance devant le tribunal administratif de Caen, et non à compter de la date d'enregistrement de sa requête en référé tendant à ce que soit ordonnée une expertise, laquelle ne saurait valoir demande de paiement. Les intérêts seront capitalisés à compter du 22 mai 2020, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
17. Il résulte de ce qui a été dit aux points 11 à 16 que les conclusions de la communauté urbaine Caen la Mer tendant à la réformation du jugement du tribunal administratif de Caen du 28 juillet 2021 en tant qu'il ne lui a pas donné entièrement satisfaction doivent être rejetées.
En ce qui concerne les conclusions d'appel principal de la SARL Jean Guervilly :
S'agissant des conclusions tendant à être déchargée de toute responsabilité :
18. La SARL Jean Guervilly soutient qu'elle n'a commis aucune faute et que la part de responsabilité de 39,5 % qui lui est imputée n'est pas justifiée, elle conclut en conséquence au rejet de toutes les demandes de la communauté urbaine Caen la Mer la visant et subsidiairement à ce qu'elle soit garantie par les sociétés ECB, Baudin-Châteauneuf, CTI BAT, Sofresid Engineering et Qualiconsult. Mais il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise, que le maître d'œuvre a commis deux erreurs de conception.
19. En premier lieu, comme il a été dit au point 4, alors qu'il résulte de la norme NF EN 132830, applicable à cette opération, que sous le poids propre des vitrages la déformation des traverses supportant les vitrages doit être limitée à la valeur la plus faible 1/500e de la portée ou 3 mm, dès lors que les murs rideaux s'appuient sur la charpente métallique, des déformations limites des murs rideaux devaient être imposées aux ouvrages de charpente métallique et prescrites en conséquence au CCTP, ce qui n'a pas été prévu dans la conception de l'ouvrage, dont l'architecte était chargé.
20. En deuxième lieu, ainsi qu'il a également été dit au point 4, les prestations concernant les ouvrages de charpente métallique et des murs rideaux ont été partiellement mélangées dans la mesure où la pose des tirants soutenant les éléments servant d'appui aux vitrages a été inscrite dans le lot charpente métallique au lieu du lot " menuiseries aluminium - façades rideaux ", ce qui a eu pour effet que leurs réglages après la pose des vitrages étaient à la charge de l'entreprise Baudin-Châteauneuf et ont été " mal réalisés et peu efficaces ". Il résulte d'ailleurs aussi de l'instruction, comme l'indique l'expert dans ses conclusions, que pour la deuxième tranche des travaux la conception et la répartition des tâches ont été modifiées, avec succès, pour ne pas répéter les problèmes rencontrés lors de la réalisation du premier bassin.
21. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que si le bureau d'études techniques Lequesne a proposé une méthodologie de pose destinée à compenser les déformations des tirants afin de les rendre acceptables pour les vitrages, et que l'application de cette méthodologie a été décidée lors d'une réunion technique du 15 avril 2013, l'organisation rigoureuse du chantier qu'elle impliquait n'a pas été mise en place par la maîtrise d'œuvre d'exécution qui n'a pas pris les mesures nécessaires pour obliger les entreprises à la respecter. Or la maîtrise d'œuvre d'exécution avait été confiée à la SCP d'architecte Lepourry-Bernard, sous-traitant de la société Jean Guervilly qui doit donc en répondre, et comme l'indique l'expert le maître d'œuvre aurait dû arrêter le chantier lorsqu'il s'est aperçu que la méthodologie n'était toujours pas respectée au bout de plusieurs semaines.
22. Dans ces conditions, d'une part, la SARL Jean Guervilly, architecte mandataire du groupement de maîtrise d'œuvre, a participé à la réalisation des dommages, ce dont il résulte qu'elle pouvait être solidairement condamnée avec les autres constructeurs responsables. D'autre part, compte tenu de la gravité des erreurs sus-décrites, la part de 39,5 % de la réparation laissée à sa charge par les premiers juges par le biais des appels en garantie apparaît suffisamment justifiée et elle n'est pas fondée à demander à être garantie par les autres constructeurs responsables au-delà de 60,5 %.
23. Enfin, il résulte de ce qui a déjà été dit aux points 7 à 9 que la SARL Jean Guervilly n'est fondée à soutenir ni que les préjudices de la communauté urbaine Caen la Mer ne seraient pas établis ni que leur indemnisation aurait dû être prononcée hors TVA.
S'agissant des conclusions tendant au paiement du solde du marché de maîtrise d'oeuvre :
24. Aux termes de l'article 37 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de prestations intellectuelles (CCAG-PI), approuvé par l'arrêté du 16 septembre 2009 susvisé, applicable au marché en vertu de l'article 2 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) de la mission de maîtrise d'œuvre : " Différends entre les parties /(...) Tout différend entre le titulaire et le pouvoir adjudicateur doit faire l'objet, de la part du titulaire, d'une lettre de réclamation exposant les motifs de son désaccord et indiquant, le cas échéant, le montant des sommes réclamées. Cette lettre doit être communiquée au pouvoir adjudicateur dans le délai de deux mois, courant à compter du jour où le différend est apparu, sous peine de forclusion (...) ".
25. Faute de justifier d'une lettre de réclamation adressée à la communauté urbaine Caen la Mer relative à une demande de règlement du solde du marché du groupement conjoint de maîtrise d'œuvre, la société Jean Guervilly n'est pas recevable à demander le versement d'une somme de 101 865,09 euros à ce titre.
26. Il résulte de ce qui a été dit aux points 18 à 25 que les conclusions d'appel principal de la SARL Jean Guervilly doivent être rejetées.
En ce qui concerne les conclusions d'appel incident et provoqué de la société Baudin-Châteauneuf :
27. En premier lieu, la société Baudin Châteauneuf, titulaire du lot n° 4 " charpente métallique ", conclut à titre principal à la réformation du jugement en tant qu'il a alloué à la communauté urbaine de Caen la Mer une indemnité globale de 429 428,40 euros et condamné la société à supporter 30% de la charge définitive du sinistre. En tant qu'elles sont dirigées contre les sociétés ECB et Jean Guervilly ou contre la communauté urbaine Caen la Mer, ces conclusions ont la nature d'un appel incident. D'une part, il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise et des comptes rendus de chantier, que de nombreux rappels ont été faits à l'entreprise Baudin-Châteauneuf pour qu'elle respecte la méthodologie de pose des vitrages et de réglage des tirants définie par le BET Lequesne, reprise par la maîtrise d'œuvre en avril 2013, et qu'après de nombreuses relances sans effet l'entreprise est intervenue trop tardivement pour procéder au réglage des tirants, alors que les vitrages étaient déjà posés. De ce fait, la société Baudin-Châteauneuf a participé à la réalisation des désordres et ne saurait prétendre qu'elle ne pouvait être solidairement condamnée à indemniser la collectivité maître d'ouvrage avec les autres constructeurs responsables. D'autre part, il résulte de ce qui a déjà été dit aux points 7 à 9 que la société Baudin-Châteauneuf ne peut sérieusement prétendre ni que l'indemnisation des travaux de reprise des désordres aurait été surévaluée ou que la réalisation d'un prototype ne devait pas être prise en compte, ni que la perte d'exploitation ne serait pas justifiée. Enfin, compte tenu de la gravité de ses manquements, la part de 30 % de la réparation laissée à sa charge par les premiers juges apparaît suffisamment justifiée et elle n'est pas fondée à demander à être garantie par les autres constructeurs responsables au-delà de 70 %.
28. En second lieu, en tant qu'elles sont dirigées contre d'autres parties que les appelants principaux, les conclusions de la société Baudin-Châteauneuf ont la nature d'un appel provoqué, qui est irrecevable dès lors que ce qui est jugé par le présent arrêt n'aggrave pas la situation de cette société.
En ce qui concerne les conclusions d'appel incident et provoqué de la société CTI BAT :
29. Il résulte en premier lieu de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que, si elle a alerté les autres intervenants sur les problèmes rencontrés, la société CTI BAT, attributaire du lot n° 6 " menuiseries aluminium - façades rideaux - bardage ", n'a pas posé les vitrages en respectant les préconisations définies par le BET Lequesne et reprises par la maîtrise d'œuvre et qu'au lieu de mettre en œuvre à chaque vitrage un plan de calages, rendu nécessaire par les déformations de la structure, elle a adapté empiriquement les calages sur place lors de la pose des vitrages. Elle a ainsi participé à la réalisation des désordres et pouvait dès lors être condamnée solidairement à les réparer. Dans ces conditions, au regard de la gravité de ses manquements, la part de 20 % de la réparation laissée à sa charge par le jugement attaqué apparaît suffisamment justifiée et elle n'est pas fondée à demander à être garantie par les autres constructeurs responsables au-delà de 80 %.
30. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 8 que la société CTI BAT n'est pas fondée à soutenir que le préjudice d'exploitation subi par la communauté urbaine Caen la Mer ne serait pas établi. Par ailleurs, la société CTI BAT n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a considéré qu'elle pouvait être condamnée du fait de sa responsabilité dans la survenance des désordres intervenus au cours de l'exécution du marché conclu le 2 octobre 2012, quand bien même la communauté urbaine Caen la Mer n'aurait pas déclaré sa créance éventuelle dans les conditions fixées par les dispositions du code de commerce.
31. En troisième lieu, en tant qu'elles sont dirigées contre d'autres parties que les appelants principaux, les conclusions de la société CTI BAT ont la nature d'un appel provoqué, qui est irrecevable dès lors que ce qui est jugé par le présent arrêt n'aggrave pas la situation de cette société.
32. Il résulte de tout ce qui a été dit que les requêtes de la société ECB, de la communauté urbaine Caen la Mer et de la SARL Jean Guervilly, comme les conclusions d'appel incident et provoqué des sociétés Baudin-Châteauneuf et CTI BAT, doivent être rejetées.
Sur les dépens :
33. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise (...) Ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagée entre les parties (...) ". En l'espèce, il résulte de l'instruction que les frais d'expertise ont été liquidés et taxés à la somme de 48 191,44 euros toutes taxes comprises par une ordonnance du 16 janvier 2019, qui les a mis provisoirement à la charge de la communauté urbaine Caen la Mer. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre cette somme à la charge solidaire des sociétés Jean Guervilly, CTI BAT, Baudin-Châteauneuf et ECB, comme le prévoit l'article 2 du jugement attaqué.
Sur les frais liés au litige :
34. Les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative des sociétés ECB, Jean Guervilly, Baudin-Châteauneuf et CTI BAT, parties tenues aux dépens, ne peuvent qu'être rejetées. Il en va de même pour les conclusions à ce titre de la communauté urbaine Caen la Mer, partie perdante en appel au regard de ses conclusions d'appel principal. Par ailleurs, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge des autres parties les sommes qu'elles réclament au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête n° 21NT02585 de la société Economie et Coordination en Bâtiments (ECB), la requête n° 21NT02696 de la communauté urbaine Caen la Mer et la requête n° 21NT02730 de la SARL Jean Guervilly sont rejetées.
Article 2 : Les conclusions d'appel incident et provoqué de la société Baudin-Châteauneuf et de la société CTI BAT sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de l'ensemble des parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté urbaine Caen la Mer, aux sociétés Jean Guervilly, ECB, Sofresid Engineering, Qualiconsult, Baudin-Châteauneuf, CTI BAT, à Me Pascaline Goubard, représentant la SELARL Bruno Cambon, ès qualités de mandataire judiciaire de la société CTI BAT et à la société AJIRE, administrateur judiciaire de la société CTI BAT.
Délibéré après l'audience du 3 janvier 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Derlange, président assesseur,
- Mme Chollet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 janvier 2023.
Le rapporteur,
S. DERLANGE
Le président,
L. LAINÉ
La greffière,
S. LEVANT
La République mande et ordonne au préfet du Calvados en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N°s 21NT02585, 21NT02696, 21NT02730