CAA de BORDEAUX, 3ème chambre, 16/12/2022, 20BX02954, Inédit au recueil Lebon
CAA de BORDEAUX, 3ème chambre, 16/12/2022, 20BX02954, Inédit au recueil Lebon
CAA de BORDEAUX - 3ème chambre
- N° 20BX02954
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
vendredi
16 décembre 2022
- Président
- M. ARTUS
- Rapporteur
- M. Manuel BOURGEOIS
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Mayotte d'annuler la décision du 26 octobre 2017 par laquelle la première présidente de la cour d'appel de Saint-Denis et le procureur général près cette cour ont suspendu le versement de la majoration de traitement pendant son congé de maladie du 1er au 22 septembre 2017, ensemble la décision du 30 juillet 2018 rejetant son recours gracieux.
Par un jugement n° 1801326 du 2 juillet 2020, le tribunal administratif de Mayotte a fait droit à cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 3 septembre 2020, le garde des sceaux, ministre de la justice, demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Mayotte du 2 juillet 2020 et de rejeter les demandes présentées en première instance par M. C....
Il soutient que le placement en congé maladie de l'intéressé et sa présence en métropole faisaient obstacle à ce qu'il perçoive une majoration de traitement liée à l'exercice de ses fonctions.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984,
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986,
- le décret n° 2010-997 du 26 août 2010,
- le décret n° 2013-964 du 28 octobre 2013,
- le code de justice administrative.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- et les conclusions de Mme Le Bris, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., nommé par décret du président de la République du 21 avril 2017 en qualité de vice-président au tribunal de grande instance de Mamoudzou, chargé du tribunal d'instance de Mamoudzou, a été placé en congé de maladie du 16 août 2017 au 1er mars 2018. Par lettre du 26 octobre 2017, confirmée sur recours gracieux le 30 juillet 2018, la première présidente de la cour d'appel de Saint-Denis et le procureur général près cette cour ont décidé de prononcer la suspension de la majoration de son traitement pour la période du 1er au 26 septembre 2017, qui s'est traduite par une retenue de 1 134 euros sur son salaire de janvier 2018. Le ministre de la justice relève appel du jugement du 2 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Mayotte a annulé ces deux décisions.
2. D'une part, aux termes de l'article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° À des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois " L'article 1er du décret du 26 août 2010 relatif au régime de maintien des primes et indemnités des agents publics de l'Etat et des magistrats de l'ordre judiciaire dans certaines situations de congés dispose, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " I. - 1° Le bénéfice des primes et indemnités versées aux fonctionnaires relevant de la loi du 11 janvier 1984 (...) est maintenu dans les mêmes proportions que le traitement en cas de congés pris en application des 1°, 2° et 5° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 (...) 2° Les dispositions des régimes indemnitaires qui prévoient leur modulation en fonction des résultats et de la manière de servir de l'agent demeurent applicables (...) ".
3. Enfin, il résulte de l'application combinée des articles 25 et 37 du décret du 14 mars 1986 relatif notamment au régime de congés de maladie des fonctionnaires, d'une part, que la rémunération versée aux agents en congé de maladie ordinaire comprend le traitement indiciaire brut ainsi que les primes et indemnités, à l'exception de dix d'entre elles au nombre desquelles ne figurent pas les primes attachées à l'exercice des fonctions à moins qu'elles ne correspondent à des sujétions particulières, d'autre part, que la rémunération versée aux agents en congé de longue maladie ou de longue durée exclut explicitement les indemnités qui sont attachées à l'exercice des fonctions.
4. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions et contrairement à ce que soutient le ministre en appel, que le fonctionnaire de l'Etat ou le magistrat de l'ordre judiciaire placé en congé de maladie ordinaire a droit, pendant trois mois, au maintien de l'intégralité de son traitement indiciaire ainsi qu'à celui des primes attachées à l'exercice des fonctions et, en particulier, à la majoration de traitement attribuée aux magistrats en service à Mayotte dès lors que cette majoration n'est pas modulée en fonction des résultats et de la manière de servir de l'agent et ne correspond pas une sujétion particulière.
5. D'autre part, l'article 1er du décret du 28 octobre 2013 portant création d'une majoration du traitement allouée aux fonctionnaires de l'Etat et de la fonction publique hospitalière et aux magistrats en service dans le département de Mayotte prévoit que : " A compter du 1er janvier 2013, une majoration du traitement indiciaire de base est attribuée aux fonctionnaires relevant des lois des 11 janvier 1984 et 9 janvier 1986 susvisées ainsi qu'aux magistrats en service dans le Département de Mayotte. ".
6. Le ministre de la justice n'est pas davantage fondé à soutenir que le bénéfice de cette majoration de traitement serait subordonné, s'agissant des magistrats en congé, à une résidence effective dans le département de Mayotte dès lors que les dispositions précitées du décret du 28 octobre 2013 instituant cette majoration ne comportent aucune disposition spécifique aux magistrats placés en position de congé et subordonnent seulement le bénéfice de cette prime à l'affection des intéressés à Mayotte au titre de la période considérée.
7. Ainsi, M. C..., qui était en service à Mayotte à compter du 1er septembre 2017, était en droit de percevoir la majoration de traitement correspondante à compter de cette date quand-bien même il était placé en congé maladie ordinaire depuis le 16 août 2017 et n'est arrivé à Mayotte que le 27 septembre suivant.
8. Il résulte de tout ce précède que le ministre de la justice n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont annulé la décision du 26 octobre 2017 prononçant la suspension de la majoration de traitement attribuée à M. C.... Par suite, sa requête doit être rejetée.
DÉCIDE :
Article 1er : la requête du ministre de la justice est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 6 décembre 2022 à laquelle siégeaient :
M. Didier Artus, président,
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 décembre 2022.
Le rapporteur,
Manuel B...
Le président,
Didier ArtusLa greffière,
Sylvie Hayet
La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N°20BX02954 2
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Mayotte d'annuler la décision du 26 octobre 2017 par laquelle la première présidente de la cour d'appel de Saint-Denis et le procureur général près cette cour ont suspendu le versement de la majoration de traitement pendant son congé de maladie du 1er au 22 septembre 2017, ensemble la décision du 30 juillet 2018 rejetant son recours gracieux.
Par un jugement n° 1801326 du 2 juillet 2020, le tribunal administratif de Mayotte a fait droit à cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 3 septembre 2020, le garde des sceaux, ministre de la justice, demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Mayotte du 2 juillet 2020 et de rejeter les demandes présentées en première instance par M. C....
Il soutient que le placement en congé maladie de l'intéressé et sa présence en métropole faisaient obstacle à ce qu'il perçoive une majoration de traitement liée à l'exercice de ses fonctions.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984,
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986,
- le décret n° 2010-997 du 26 août 2010,
- le décret n° 2013-964 du 28 octobre 2013,
- le code de justice administrative.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- et les conclusions de Mme Le Bris, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., nommé par décret du président de la République du 21 avril 2017 en qualité de vice-président au tribunal de grande instance de Mamoudzou, chargé du tribunal d'instance de Mamoudzou, a été placé en congé de maladie du 16 août 2017 au 1er mars 2018. Par lettre du 26 octobre 2017, confirmée sur recours gracieux le 30 juillet 2018, la première présidente de la cour d'appel de Saint-Denis et le procureur général près cette cour ont décidé de prononcer la suspension de la majoration de son traitement pour la période du 1er au 26 septembre 2017, qui s'est traduite par une retenue de 1 134 euros sur son salaire de janvier 2018. Le ministre de la justice relève appel du jugement du 2 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Mayotte a annulé ces deux décisions.
2. D'une part, aux termes de l'article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° À des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois " L'article 1er du décret du 26 août 2010 relatif au régime de maintien des primes et indemnités des agents publics de l'Etat et des magistrats de l'ordre judiciaire dans certaines situations de congés dispose, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " I. - 1° Le bénéfice des primes et indemnités versées aux fonctionnaires relevant de la loi du 11 janvier 1984 (...) est maintenu dans les mêmes proportions que le traitement en cas de congés pris en application des 1°, 2° et 5° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 (...) 2° Les dispositions des régimes indemnitaires qui prévoient leur modulation en fonction des résultats et de la manière de servir de l'agent demeurent applicables (...) ".
3. Enfin, il résulte de l'application combinée des articles 25 et 37 du décret du 14 mars 1986 relatif notamment au régime de congés de maladie des fonctionnaires, d'une part, que la rémunération versée aux agents en congé de maladie ordinaire comprend le traitement indiciaire brut ainsi que les primes et indemnités, à l'exception de dix d'entre elles au nombre desquelles ne figurent pas les primes attachées à l'exercice des fonctions à moins qu'elles ne correspondent à des sujétions particulières, d'autre part, que la rémunération versée aux agents en congé de longue maladie ou de longue durée exclut explicitement les indemnités qui sont attachées à l'exercice des fonctions.
4. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions et contrairement à ce que soutient le ministre en appel, que le fonctionnaire de l'Etat ou le magistrat de l'ordre judiciaire placé en congé de maladie ordinaire a droit, pendant trois mois, au maintien de l'intégralité de son traitement indiciaire ainsi qu'à celui des primes attachées à l'exercice des fonctions et, en particulier, à la majoration de traitement attribuée aux magistrats en service à Mayotte dès lors que cette majoration n'est pas modulée en fonction des résultats et de la manière de servir de l'agent et ne correspond pas une sujétion particulière.
5. D'autre part, l'article 1er du décret du 28 octobre 2013 portant création d'une majoration du traitement allouée aux fonctionnaires de l'Etat et de la fonction publique hospitalière et aux magistrats en service dans le département de Mayotte prévoit que : " A compter du 1er janvier 2013, une majoration du traitement indiciaire de base est attribuée aux fonctionnaires relevant des lois des 11 janvier 1984 et 9 janvier 1986 susvisées ainsi qu'aux magistrats en service dans le Département de Mayotte. ".
6. Le ministre de la justice n'est pas davantage fondé à soutenir que le bénéfice de cette majoration de traitement serait subordonné, s'agissant des magistrats en congé, à une résidence effective dans le département de Mayotte dès lors que les dispositions précitées du décret du 28 octobre 2013 instituant cette majoration ne comportent aucune disposition spécifique aux magistrats placés en position de congé et subordonnent seulement le bénéfice de cette prime à l'affection des intéressés à Mayotte au titre de la période considérée.
7. Ainsi, M. C..., qui était en service à Mayotte à compter du 1er septembre 2017, était en droit de percevoir la majoration de traitement correspondante à compter de cette date quand-bien même il était placé en congé maladie ordinaire depuis le 16 août 2017 et n'est arrivé à Mayotte que le 27 septembre suivant.
8. Il résulte de tout ce précède que le ministre de la justice n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont annulé la décision du 26 octobre 2017 prononçant la suspension de la majoration de traitement attribuée à M. C.... Par suite, sa requête doit être rejetée.
DÉCIDE :
Article 1er : la requête du ministre de la justice est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 6 décembre 2022 à laquelle siégeaient :
M. Didier Artus, président,
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 décembre 2022.
Le rapporteur,
Manuel B...
Le président,
Didier ArtusLa greffière,
Sylvie Hayet
La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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