CAA de PARIS, 8ème chambre, 14/11/2022, 21PA03465, Inédit au recueil Lebon
CAA de PARIS, 8ème chambre, 14/11/2022, 21PA03465, Inédit au recueil Lebon
CAA de PARIS - 8ème chambre
- N° 21PA03465
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
lundi
14 novembre 2022
- Président
- M. HO SI FAT
- Rapporteur
- Mme Aude COLLET
- Avocat(s)
- KADIMA KANDE
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 30 avril 2021 par lequel le préfet de Seine-et-Marne l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination d'une mesure d'éloignement.
Par une ordonnance n°2104854 du 25 mai 2021, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 23 juin 2021, M. B..., représenté par Me Kadima Kande, demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n°2104854 du 25 mai 2021 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
3°) d'annuler l'arrêté du 30 avril 2021 par lequel le préfet de Seine-et-Marne l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination d'une mesure d'éloignement ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- dès lors que l'arrêté attaqué comporte des mentions contradictoires concernant les délais et voies de recours, le délai de recours contentieux de 30 jours ne lui est pas opposable, sa requête de première instance n'est donc pas tardive ;
- l'obligation de quitter le territoire français a été prise par une autorité incompétente ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle n'a pas été précédée d'un examen sérieux et particulier de sa situation personnelle ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le pays de destination n'a pas été précédée d'un examen sérieux et particulier de sa situation personnelle ;
- elle est entachée d'une manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision excluant l'Italie comme pays de destination ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été transmise au préfet de Seine-et-Marne qui n'a pas produit d'observations.
Par une décision du 23 juillet 2021, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a rejeté la demande d'aide juridictionnelle de M. B....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n°2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Mme C... a présenté son rapport au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... est un ressortissant de la République démocratique du Congo né le 9 septembre 1985. Par arrêté du 30 avril 2021, le préfet de Seine-et-Marne l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné. Par ordonnance n°2104854 du 25 mai 2021, dont M. B... relève appel, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté pour tardiveté de la requête.
Sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire :
2. Par une décision du 23 juillet 2021, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a rejeté la demande de M. B... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, il n'y a pas lieu de se prononcer sur les conclusions tendant à son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
3. D'une part, aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ".
4. D'autre part, aux termes de l'article L. 512-1 I bis du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable à la date de la décision attaquée : " (...) I bis. -L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 1°, 2°, 4° ou 6° du I de l'article L. 511-1 et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II du même article L. 511-1 peut, dans un délai de quinze jours à compter de sa notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. (...) ". Aux termes de l'article R. 776-2 du code de justice administrative : " (...) Conformément aux dispositions du I bis de l'article L. 512-1 du même code, la notification d'une obligation de quitter le territoire français avec délai de départ volontaire, prise en application des 1°, 2°, 4° ou 6° du I de l'article L. 511-1 du même code, fait courir un délai de quinze jours pour contester cette obligation (...) ". Aux termes de l'article R.776-5 du même code : " (...) II. - Les délais de quarante-huit heures mentionnés aux articles R. 776-2 et R. 776-4 et les délais de quinze jours mentionnés aux articles R. 776-2 et R. 776-3 ne sont susceptibles d'aucune prorogation. (...) ".
5. Si l'arrêté attaqué a été notifié à M. B... par voie administrative le 30 avril 2021, il ressort des termes mêmes de l'article 6 de l'arrêté qu'il est susceptible de faire l'objet d'un recours contentieux dans un délai de 30 jours. Par suite, le délai de 15 jours prévu par les dispositions précitées de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne pouvait pas être opposé au requérant et c'est à tort que le premier juge a rejeté comme irrecevable la demande dont il était saisi, laquelle a été déposée le 20 mai 2021 soit avant l'expiration du délai plus favorable de 30 jours à compter de la notification de l'arrêté attaqué seul délai opposable à l'intéressé même s'il a été mentionné à tort. Il s'ensuit que l'ordonnance du 25 mai 2021 du Tribunal administratif de Melun doit être annulée.
6. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le Tribunal administratif de Melun.
Sur la légalité de l'arrêté du 30 avril 2021 du préfet de Seine-et-Marne :
7. En premier lieu, le requérant soutient que l'arrêté attaqué a été signé par une autorité incompétente. Cependant, cet arrêté a été signé par M. F... E..., directeur de l'immigration et de l'intégration, qui bénéficiait d'une délégation de signature du préfet de Seine-et-Marne en vertu d'un arrêté n° 21/BC/017 du 28 janvier 2021, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du lendemain. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait été signé par une autorité incompétente doit être écarté
8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa numérotation alors applicable : " I. - (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. (...) ".
9. Le requérant soutient que l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé. Toutefois, l'arrêté du 30 avril 2021 du préfet de Seine-et-Marne mentionne de façon suffisamment précise et non stéréotypée les motifs de droit et les circonstances de fait qui constituent le fondement de l'obligation de quitter le territoire français. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté comme manquant en fait.
10. En troisième lieu, le requérant allègue que le préfet ne serait pas livré à un examen sérieux et particulier de sa situation personnelle. Cependant, il ne ressort pas des pièces du dossier que la situation de M. B... n'aurait pas fait l'objet d'un examen particulier de la part de l'administration au regard des éléments dont elle avait connaissance à la date de la décision d'obligation de quitter le territoire français contestée, et notamment des déclarations de l'intéressé. De plus, si le requérant conteste la circonstance que le préfet de Seine-et-Marne lui a opposé son impossibilité de justifier de sa date d'entrée effective sur le territoire français le 31 mars 2021, de sorte qu'il n'est pas établi qu'il séjournerait depuis moins de 3 mois sur le territoire français il ne produit aucun élément à l'appui de ses allégations permettant d'en apprécier le bien-fondé. Enfin, si le requérant soutient que c'est à tort que le préfet de Seine-et-Marne a considéré qu'il se trouvait sans domicile fixe personnel et certain, il n'établit pas davantage avoir produit audit préfet des pièces permettant d'établir le contraire. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de Seine-et-Marne ne se serait pas livré à un examen réel et sérieux de la situation personnelle du requérant préalablement à la prise de décision attaquée ne peut qu'être écarté.
11. En quatrième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
12. M. B... soutient que l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation. Il fait valoir qu'il réside habituellement en Italie où il est titulaire d'un titre de séjour à titre humanitaire depuis 2012 renouvelable tous les deux ans et produit un titre de séjour délivré par les autorités italiennes valable jusqu'au 8 novembre 2020 qu'il présente comme étant un titre de séjour humanitaire ainsi qu'un document non traduit correspondant selon lui à une demande de renouvellement de titre de séjour datée du 16 septembre 2020. Il précise qu'il effectue des séjours en France ne dépassant pas trois mois chacun au cours desquels il a rencontré une ressortissante française avec laquelle il entretient une relation. Il ajoute que cette dernière est reconnue handicapée à plus de 50 % par la maison départementale des personnes handicapées de Seine-et-Marne et qu'elle a besoin de l'assistance d'une tierce personne pour l'aider dans certains actes de la vie quotidienne notamment l'entretien de la maison et les courses, ce que ne permettent toutefois pas d'établir l'attestation rédigée par sa compagne le 13 mai 2021 et le seul compte rendu opératoire du 1er avril 2021 lequel ne mentionne la nécessité d'accompagnement uniquement pour la sortie après l'opération et pour la nuit suivante. Si M. B... se prévaut d'une communauté de vie avec sa compagne, le contrat souscrit auprès de la société Engie avec Mme D... depuis le 27 novembre 2020 n'est pas suffisant pour établir une telle communauté. Par suite, dans les circonstances de l'espèce il ne résulte pas de ce qui précède que le préfet de Seine-et-Marne aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni qu'il aurait entaché d'erreur manifeste son appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle du requérant.
13. En cinquième lieu, lieu, dès lors que M. B... n'établit pas, par les seules pièces produites, au demeurant non traduites, être en situation régulière en Italie à la date de la décision contestée fixant le pays de destination, le préfet de Seine-et-Marne n'a pas entaché d'erreur manifeste son appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle du requérant en excluant implicitement l'Italie comme pays de destination en mentionnant à son article premier qu'il devra quitter le territoire français dans le délai de 30 jours pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité ou tout autre pays non membre de l'Union européenne ou avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen où il est légalement admissible.
14. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
15. M. B..., en se bornant à soutenir qu'il a été titulaire d'un titre de séjour italien à caractère humanitaire, ne fournit aucun élément permettant d'établir qu'il encourt personnellement des risques de subir des traitements inhumains et dégradants en cas de retour en République démocratique du Congo. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
16. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander à l'annulation de l'arrêté du 30 avril 2021 par lequel le préfet de Seine-et-Marne l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. B... tendant à être admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.
Article 2 : L'ordonnance du 25 mai 2021 du Tribunal administratif de Melun est annulée.
Article 3 : La demande présentée par M. B... devant le Tribunal administratif de Melun est rejetée.
Article 4 : Le surplus des conclusions d'appel de M. B... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 18 octobre 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Ho Si Fat, président de la formation de jugement,
- Mme Jayer, première conseillère,
- Mme Collet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 novembre 2022.
La rapporteure,
A. C... Le président,
F. HO SI FAT
Le greffier,
P. TISSERAND
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 21PA03465
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 30 avril 2021 par lequel le préfet de Seine-et-Marne l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination d'une mesure d'éloignement.
Par une ordonnance n°2104854 du 25 mai 2021, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 23 juin 2021, M. B..., représenté par Me Kadima Kande, demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n°2104854 du 25 mai 2021 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
3°) d'annuler l'arrêté du 30 avril 2021 par lequel le préfet de Seine-et-Marne l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination d'une mesure d'éloignement ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- dès lors que l'arrêté attaqué comporte des mentions contradictoires concernant les délais et voies de recours, le délai de recours contentieux de 30 jours ne lui est pas opposable, sa requête de première instance n'est donc pas tardive ;
- l'obligation de quitter le territoire français a été prise par une autorité incompétente ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle n'a pas été précédée d'un examen sérieux et particulier de sa situation personnelle ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le pays de destination n'a pas été précédée d'un examen sérieux et particulier de sa situation personnelle ;
- elle est entachée d'une manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision excluant l'Italie comme pays de destination ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été transmise au préfet de Seine-et-Marne qui n'a pas produit d'observations.
Par une décision du 23 juillet 2021, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a rejeté la demande d'aide juridictionnelle de M. B....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n°2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Mme C... a présenté son rapport au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... est un ressortissant de la République démocratique du Congo né le 9 septembre 1985. Par arrêté du 30 avril 2021, le préfet de Seine-et-Marne l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné. Par ordonnance n°2104854 du 25 mai 2021, dont M. B... relève appel, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté pour tardiveté de la requête.
Sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire :
2. Par une décision du 23 juillet 2021, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a rejeté la demande de M. B... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, il n'y a pas lieu de se prononcer sur les conclusions tendant à son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
3. D'une part, aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ".
4. D'autre part, aux termes de l'article L. 512-1 I bis du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable à la date de la décision attaquée : " (...) I bis. -L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 1°, 2°, 4° ou 6° du I de l'article L. 511-1 et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II du même article L. 511-1 peut, dans un délai de quinze jours à compter de sa notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. (...) ". Aux termes de l'article R. 776-2 du code de justice administrative : " (...) Conformément aux dispositions du I bis de l'article L. 512-1 du même code, la notification d'une obligation de quitter le territoire français avec délai de départ volontaire, prise en application des 1°, 2°, 4° ou 6° du I de l'article L. 511-1 du même code, fait courir un délai de quinze jours pour contester cette obligation (...) ". Aux termes de l'article R.776-5 du même code : " (...) II. - Les délais de quarante-huit heures mentionnés aux articles R. 776-2 et R. 776-4 et les délais de quinze jours mentionnés aux articles R. 776-2 et R. 776-3 ne sont susceptibles d'aucune prorogation. (...) ".
5. Si l'arrêté attaqué a été notifié à M. B... par voie administrative le 30 avril 2021, il ressort des termes mêmes de l'article 6 de l'arrêté qu'il est susceptible de faire l'objet d'un recours contentieux dans un délai de 30 jours. Par suite, le délai de 15 jours prévu par les dispositions précitées de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne pouvait pas être opposé au requérant et c'est à tort que le premier juge a rejeté comme irrecevable la demande dont il était saisi, laquelle a été déposée le 20 mai 2021 soit avant l'expiration du délai plus favorable de 30 jours à compter de la notification de l'arrêté attaqué seul délai opposable à l'intéressé même s'il a été mentionné à tort. Il s'ensuit que l'ordonnance du 25 mai 2021 du Tribunal administratif de Melun doit être annulée.
6. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le Tribunal administratif de Melun.
Sur la légalité de l'arrêté du 30 avril 2021 du préfet de Seine-et-Marne :
7. En premier lieu, le requérant soutient que l'arrêté attaqué a été signé par une autorité incompétente. Cependant, cet arrêté a été signé par M. F... E..., directeur de l'immigration et de l'intégration, qui bénéficiait d'une délégation de signature du préfet de Seine-et-Marne en vertu d'un arrêté n° 21/BC/017 du 28 janvier 2021, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du lendemain. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait été signé par une autorité incompétente doit être écarté
8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa numérotation alors applicable : " I. - (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. (...) ".
9. Le requérant soutient que l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé. Toutefois, l'arrêté du 30 avril 2021 du préfet de Seine-et-Marne mentionne de façon suffisamment précise et non stéréotypée les motifs de droit et les circonstances de fait qui constituent le fondement de l'obligation de quitter le territoire français. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté comme manquant en fait.
10. En troisième lieu, le requérant allègue que le préfet ne serait pas livré à un examen sérieux et particulier de sa situation personnelle. Cependant, il ne ressort pas des pièces du dossier que la situation de M. B... n'aurait pas fait l'objet d'un examen particulier de la part de l'administration au regard des éléments dont elle avait connaissance à la date de la décision d'obligation de quitter le territoire français contestée, et notamment des déclarations de l'intéressé. De plus, si le requérant conteste la circonstance que le préfet de Seine-et-Marne lui a opposé son impossibilité de justifier de sa date d'entrée effective sur le territoire français le 31 mars 2021, de sorte qu'il n'est pas établi qu'il séjournerait depuis moins de 3 mois sur le territoire français il ne produit aucun élément à l'appui de ses allégations permettant d'en apprécier le bien-fondé. Enfin, si le requérant soutient que c'est à tort que le préfet de Seine-et-Marne a considéré qu'il se trouvait sans domicile fixe personnel et certain, il n'établit pas davantage avoir produit audit préfet des pièces permettant d'établir le contraire. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de Seine-et-Marne ne se serait pas livré à un examen réel et sérieux de la situation personnelle du requérant préalablement à la prise de décision attaquée ne peut qu'être écarté.
11. En quatrième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
12. M. B... soutient que l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation. Il fait valoir qu'il réside habituellement en Italie où il est titulaire d'un titre de séjour à titre humanitaire depuis 2012 renouvelable tous les deux ans et produit un titre de séjour délivré par les autorités italiennes valable jusqu'au 8 novembre 2020 qu'il présente comme étant un titre de séjour humanitaire ainsi qu'un document non traduit correspondant selon lui à une demande de renouvellement de titre de séjour datée du 16 septembre 2020. Il précise qu'il effectue des séjours en France ne dépassant pas trois mois chacun au cours desquels il a rencontré une ressortissante française avec laquelle il entretient une relation. Il ajoute que cette dernière est reconnue handicapée à plus de 50 % par la maison départementale des personnes handicapées de Seine-et-Marne et qu'elle a besoin de l'assistance d'une tierce personne pour l'aider dans certains actes de la vie quotidienne notamment l'entretien de la maison et les courses, ce que ne permettent toutefois pas d'établir l'attestation rédigée par sa compagne le 13 mai 2021 et le seul compte rendu opératoire du 1er avril 2021 lequel ne mentionne la nécessité d'accompagnement uniquement pour la sortie après l'opération et pour la nuit suivante. Si M. B... se prévaut d'une communauté de vie avec sa compagne, le contrat souscrit auprès de la société Engie avec Mme D... depuis le 27 novembre 2020 n'est pas suffisant pour établir une telle communauté. Par suite, dans les circonstances de l'espèce il ne résulte pas de ce qui précède que le préfet de Seine-et-Marne aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni qu'il aurait entaché d'erreur manifeste son appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle du requérant.
13. En cinquième lieu, lieu, dès lors que M. B... n'établit pas, par les seules pièces produites, au demeurant non traduites, être en situation régulière en Italie à la date de la décision contestée fixant le pays de destination, le préfet de Seine-et-Marne n'a pas entaché d'erreur manifeste son appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle du requérant en excluant implicitement l'Italie comme pays de destination en mentionnant à son article premier qu'il devra quitter le territoire français dans le délai de 30 jours pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité ou tout autre pays non membre de l'Union européenne ou avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen où il est légalement admissible.
14. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
15. M. B..., en se bornant à soutenir qu'il a été titulaire d'un titre de séjour italien à caractère humanitaire, ne fournit aucun élément permettant d'établir qu'il encourt personnellement des risques de subir des traitements inhumains et dégradants en cas de retour en République démocratique du Congo. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
16. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander à l'annulation de l'arrêté du 30 avril 2021 par lequel le préfet de Seine-et-Marne l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. B... tendant à être admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.
Article 2 : L'ordonnance du 25 mai 2021 du Tribunal administratif de Melun est annulée.
Article 3 : La demande présentée par M. B... devant le Tribunal administratif de Melun est rejetée.
Article 4 : Le surplus des conclusions d'appel de M. B... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 18 octobre 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Ho Si Fat, président de la formation de jugement,
- Mme Jayer, première conseillère,
- Mme Collet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 novembre 2022.
La rapporteure,
A. C... Le président,
F. HO SI FAT
Le greffier,
P. TISSERAND
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA03465