CAA de BORDEAUX, 4ème chambre, 09/11/2022, 20BX03564, Inédit au recueil Lebon
CAA de BORDEAUX, 4ème chambre, 09/11/2022, 20BX03564, Inédit au recueil Lebon
CAA de BORDEAUX - 4ème chambre
- N° 20BX03564
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
mercredi
09 novembre 2022
- Président
- Mme BALZAMO
- Rapporteur
- M. Nicolas NORMAND
- Avocat(s)
- LABATTUT & ASSOCIES
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Berkem Développement a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'ordonner le remboursement de la somme de 171 176 euros correspondant à une créance de crédit d'impôt recherche acquise à raison des dépenses qu'elle a engagées en vue de la mise sur le marché national ou de l'Union européenne de produits biocides.
Par un jugement n° 1801927 du 11 août 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 30 octobre 2020 et des mémoires enregistrés les 13 septembre 2021 et 13 avril 2022, la société Berkem Développement, représentée par Me Labattut demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 11 août 2020 ;
2°) d'ordonner le remboursement de la somme de 171 247 euros correspondant à une créance de crédit d'impôt recherche ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 7 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le remboursement du crédit d'impôt recherche sollicité au titre de l'année 2015 comprenant des dépenses de sous-traitance nécessaires à ses opérations de recherche et confiées aux agences de sécurité sanitaire européennes, constitue une prise de position formelle de l'administration opposable à celle-ci au sens de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ; de même, une société filiale à 100 % de la société Berkem Developpement a fait l'objet en 2015 d'une vérification de comptabilité portant notamment sur le crédit d'impôt recherche 2013 à l'issue duquel les services fiscaux ont validé la prise en compte de dépenses de sous-traitance auprès des mêmes agences de santé ;
- les travaux d'essai et d'analyse réalisés avant l'obtention d'une autorisation de mise sur le marché sont éligibles au crédit d'impôt recherche au sens de la doctrine administrative de base référencée BOI-BIC-RICI-10-10-10-20 qui précise que sont éligibles les travaux évaluant " l'efficacité et l'absence de risque " des médicaments, médicaments vétérinaires ou autre " avant leur autorisation de mise sur le marché " ; cette analyse est reprise dans le Guide du crédit d'impôt recherche publié par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche ;
- les dépenses engagées auprès des sous-traitants pour l'obtention d'autorisation de mise sur le marché constituent des dépenses éligibles au crédit d'impôt recherche au sens de l'article 244 quater B du code général des impôts ; les agences de sécurité sanitaire européennes ont procédé à une évaluation scientifique des risques et de l'efficacité des produits innovants en cours de formulation et d'élaboration.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 22 avril 2021, 11 avril 2022 et 19 avril 2022, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 21 mars 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 21 avril 2022 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A... B...,
- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. La société Berkem Développement, qui exerce une activité de recherche-développement dans le domaine des biocides, a déposé une demande de remboursement de crédit d'impôt recherche d'un montant de 219 127 euros au titre des dépenses engagées en 2016 en vue de la mise sur le marché national ou de l'Union européenne de produits biocides. Cette demande a été rejetée, le 12 mars 2018, à hauteur de 172 162 euros. La société Berkem Développement relève appel du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 11 août 2020 qui a rejeté sa demande tendant au remboursement de ce crédit d'impôt recherche.
Sur le terrain de la loi :
2. En premier lieu, aux termes du I de l'article 199 ter B du code général des impôts, rendu applicable en matière d'impôt sur les sociétés par l'article 220 B du même code : " Le crédit d'impôt pour dépenses de recherche défini à l'article 244 quater B est imputé sur l'impôt sur le revenu dû par le contribuable au titre de l'année au cours de laquelle les dépenses de recherche prises en compte pour le calcul du crédit d'impôt ont été exposées. L'excédent de crédit d'impôt constitue au profit de l'entreprise une créance sur l'Etat d'égal montant. Cette créance est utilisée pour le paiement de l'impôt sur le revenu dû au titre des trois années suivant celle au titre de laquelle elle est constatée puis, s'il y a lieu, la fraction non utilisée est remboursée à l'expiration de cette période ". Et aux termes de l'article 244 quater B de ce code : " I. - Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 septies, 44 octies, 44 octies A, 44 duodecies, 44 terdecies à 44 septdecies peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année (...) II. - Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : (...) / a) Les dotations aux amortissements des immobilisations, (...) affectées directement à la réalisation d'opérations de recherche scientifique et technique, y compris la réalisation d'opérations de conception de prototypes ou d'installations pilotes. (...) / b) Les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche directement et exclusivement affectés à ces opérations. (...) / c) les autres dépenses de fonctionnement exposées dans les mêmes opérations ; (...) / d) Les dépenses exposées pour la réalisation d'opérations de même nature confiées à : / 1° Des organismes de recherche publics ; (...) ". Pour l'application de ces dispositions, lorsqu'une entreprise confie à un organisme mentionné au d du II de l'article 244 quater B du code général des impôts l'exécution de prestations nécessaires à la réalisation d'opérations de recherche qu'elle mène, les dépenses correspondantes peuvent être prises en compte pour la détermination du montant de son crédit d'impôt quand bien même les prestations sous-traitées, prises isolément, ne constitueraient pas des opérations de recherche. S'il appartient au juge de l'impôt, au vu des éléments de l'instruction, d'apprécier si des dépenses sont éligibles au dispositif du crédit d'impôt, c'est en tenant compte des éléments de preuve apportés par le débat contradictoire entre les parties et, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments en sa possession ou à apporter la preuve contraire.
3. Il résulte de l'instruction que la société Berkem Développement a déposé au titre d'un crédit d'impôt recherche de l'année 2016, un dossier visant deux projets, le premier correspondant au développement de produits de traitement pour le bois (notamment " antitermites ") associant biocides et extraits végétaux qui innove par la recherche d'un impact environnemental minimisé pour une efficacité au moins égale et le second correspondant au développement d'une technique d'immunomarquage de biocides dans le bois qui permettrait l'analyse de l'efficacité de traitement du bois (imprégnation, répartition) au travers de mesures de contrôle rapides et simplifiées. Elle estime, à ce titre, être éligible au crédit d'impôt recherche 2016 des dépenses de sous-traitance versées d'une part, à des organismes publics pour un montant de 570 585 euros qui correspondent à des demandes d'autorisation de mise sur le marché national ou de l'Union européenne ou à des redevances payées au titre de la reconnaissance mutuelle d'une autorisation délivrée par un autre Etat membre et d'autre part, à des organismes de recherche privé pour un montant de 240 euros qui correspondent à des dépenses de traduction d'un acte d'autorisation de mise sur le marché. Toutefois, il résulte de l'instruction notamment de l'intitulé des factures produites et des deux rapports d'évaluation communiqués émanant de l'ANSES et de l'agence européenne des produits chimiques que les opérations réalisées, qui visent à vérifier l'efficacité et l'innocuité des produits issus de la recherche pour permettre leur commercialisation ne sont pas intervenues dans le cadre de la conception et la réalisation des produits et n'ont donc pas participé à des travaux de recherche. Ces dépenses ne peuvent donc être prises en compte pour la détermination du montant du crédit d'impôt. La société Berkem Développement n'est, par suite, pas fondée à soutenir que c'est à tort que le service a considéré que les travaux confiés par la société requérante à ces organismes ne pouvaient être regardés comme présentant les caractéristiques d'une opération de recherche au sens de l'article 244 quater B du code général des impôts.
Sur le terrain de la doctrine fiscale :
4. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales: " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été à 1'époque, formellement admise par 1'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente (...) ". Aux termes de l'article L. 80 B du même livre " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable 1° lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal: (...) ".
5. En premier lieu, la décision de restitution du crédit d'impôt recherche au titre de l'année 2015 invoquée par la requérante qui ne comporte aucune motivation et qui concerne, au demeurant, une imposition initiale ne constitue pas une prise de position formelle de l'administration opposable sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales.
6. En deuxième lieu, la circonstance que l'administration fiscale ait admis à l'issue de la vérification de comptabilité d'une filiale de la société requérante, la prise en compte de ses dépenses de sous-traitance dans le calcul d'un crédit d'impôt recherche de 2013 ne constitue pas une prise de position formelle de l'administration opposable sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales.
7. En troisième lieu, la société Berkem Développement n'est pas fondée à se prévaloir de la doctrine administrative référencée BOI-BIC-RICI-10-10-10-20 en ce que celle-ci ne cite pas les dépenses supportées en vue de l'obtention de l'autorisation de mise sur le marché et ne comporte donc aucune interprétation contraire de la loi fiscale qui lui a été appliquée.
8. En dernier lieu, le guide du crédit d'impôt recherche 2016 qui n'a pas la valeur d'une instruction fiscale, n'est pas opposable à l'administration.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la société Berkem Développement n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à ce que l'Etat soit condamné au versement d'une somme d'argent au titre des frais de justice ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Berkem Développement est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Berkem Développement et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 18 octobre 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Evelyne Balzamo, présidente,
Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,
M. Nicolas Normand, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 novembre 2022.
Le rapporteur,
Nicolas B...
La présidente,
Evelyne Balzamo
Le greffier,
Christophe Pelletier
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 20BX03564
Procédure contentieuse antérieure :
La société Berkem Développement a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'ordonner le remboursement de la somme de 171 176 euros correspondant à une créance de crédit d'impôt recherche acquise à raison des dépenses qu'elle a engagées en vue de la mise sur le marché national ou de l'Union européenne de produits biocides.
Par un jugement n° 1801927 du 11 août 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 30 octobre 2020 et des mémoires enregistrés les 13 septembre 2021 et 13 avril 2022, la société Berkem Développement, représentée par Me Labattut demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 11 août 2020 ;
2°) d'ordonner le remboursement de la somme de 171 247 euros correspondant à une créance de crédit d'impôt recherche ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 7 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le remboursement du crédit d'impôt recherche sollicité au titre de l'année 2015 comprenant des dépenses de sous-traitance nécessaires à ses opérations de recherche et confiées aux agences de sécurité sanitaire européennes, constitue une prise de position formelle de l'administration opposable à celle-ci au sens de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ; de même, une société filiale à 100 % de la société Berkem Developpement a fait l'objet en 2015 d'une vérification de comptabilité portant notamment sur le crédit d'impôt recherche 2013 à l'issue duquel les services fiscaux ont validé la prise en compte de dépenses de sous-traitance auprès des mêmes agences de santé ;
- les travaux d'essai et d'analyse réalisés avant l'obtention d'une autorisation de mise sur le marché sont éligibles au crédit d'impôt recherche au sens de la doctrine administrative de base référencée BOI-BIC-RICI-10-10-10-20 qui précise que sont éligibles les travaux évaluant " l'efficacité et l'absence de risque " des médicaments, médicaments vétérinaires ou autre " avant leur autorisation de mise sur le marché " ; cette analyse est reprise dans le Guide du crédit d'impôt recherche publié par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche ;
- les dépenses engagées auprès des sous-traitants pour l'obtention d'autorisation de mise sur le marché constituent des dépenses éligibles au crédit d'impôt recherche au sens de l'article 244 quater B du code général des impôts ; les agences de sécurité sanitaire européennes ont procédé à une évaluation scientifique des risques et de l'efficacité des produits innovants en cours de formulation et d'élaboration.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 22 avril 2021, 11 avril 2022 et 19 avril 2022, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 21 mars 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 21 avril 2022 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A... B...,
- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. La société Berkem Développement, qui exerce une activité de recherche-développement dans le domaine des biocides, a déposé une demande de remboursement de crédit d'impôt recherche d'un montant de 219 127 euros au titre des dépenses engagées en 2016 en vue de la mise sur le marché national ou de l'Union européenne de produits biocides. Cette demande a été rejetée, le 12 mars 2018, à hauteur de 172 162 euros. La société Berkem Développement relève appel du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 11 août 2020 qui a rejeté sa demande tendant au remboursement de ce crédit d'impôt recherche.
Sur le terrain de la loi :
2. En premier lieu, aux termes du I de l'article 199 ter B du code général des impôts, rendu applicable en matière d'impôt sur les sociétés par l'article 220 B du même code : " Le crédit d'impôt pour dépenses de recherche défini à l'article 244 quater B est imputé sur l'impôt sur le revenu dû par le contribuable au titre de l'année au cours de laquelle les dépenses de recherche prises en compte pour le calcul du crédit d'impôt ont été exposées. L'excédent de crédit d'impôt constitue au profit de l'entreprise une créance sur l'Etat d'égal montant. Cette créance est utilisée pour le paiement de l'impôt sur le revenu dû au titre des trois années suivant celle au titre de laquelle elle est constatée puis, s'il y a lieu, la fraction non utilisée est remboursée à l'expiration de cette période ". Et aux termes de l'article 244 quater B de ce code : " I. - Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 septies, 44 octies, 44 octies A, 44 duodecies, 44 terdecies à 44 septdecies peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année (...) II. - Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : (...) / a) Les dotations aux amortissements des immobilisations, (...) affectées directement à la réalisation d'opérations de recherche scientifique et technique, y compris la réalisation d'opérations de conception de prototypes ou d'installations pilotes. (...) / b) Les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche directement et exclusivement affectés à ces opérations. (...) / c) les autres dépenses de fonctionnement exposées dans les mêmes opérations ; (...) / d) Les dépenses exposées pour la réalisation d'opérations de même nature confiées à : / 1° Des organismes de recherche publics ; (...) ". Pour l'application de ces dispositions, lorsqu'une entreprise confie à un organisme mentionné au d du II de l'article 244 quater B du code général des impôts l'exécution de prestations nécessaires à la réalisation d'opérations de recherche qu'elle mène, les dépenses correspondantes peuvent être prises en compte pour la détermination du montant de son crédit d'impôt quand bien même les prestations sous-traitées, prises isolément, ne constitueraient pas des opérations de recherche. S'il appartient au juge de l'impôt, au vu des éléments de l'instruction, d'apprécier si des dépenses sont éligibles au dispositif du crédit d'impôt, c'est en tenant compte des éléments de preuve apportés par le débat contradictoire entre les parties et, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments en sa possession ou à apporter la preuve contraire.
3. Il résulte de l'instruction que la société Berkem Développement a déposé au titre d'un crédit d'impôt recherche de l'année 2016, un dossier visant deux projets, le premier correspondant au développement de produits de traitement pour le bois (notamment " antitermites ") associant biocides et extraits végétaux qui innove par la recherche d'un impact environnemental minimisé pour une efficacité au moins égale et le second correspondant au développement d'une technique d'immunomarquage de biocides dans le bois qui permettrait l'analyse de l'efficacité de traitement du bois (imprégnation, répartition) au travers de mesures de contrôle rapides et simplifiées. Elle estime, à ce titre, être éligible au crédit d'impôt recherche 2016 des dépenses de sous-traitance versées d'une part, à des organismes publics pour un montant de 570 585 euros qui correspondent à des demandes d'autorisation de mise sur le marché national ou de l'Union européenne ou à des redevances payées au titre de la reconnaissance mutuelle d'une autorisation délivrée par un autre Etat membre et d'autre part, à des organismes de recherche privé pour un montant de 240 euros qui correspondent à des dépenses de traduction d'un acte d'autorisation de mise sur le marché. Toutefois, il résulte de l'instruction notamment de l'intitulé des factures produites et des deux rapports d'évaluation communiqués émanant de l'ANSES et de l'agence européenne des produits chimiques que les opérations réalisées, qui visent à vérifier l'efficacité et l'innocuité des produits issus de la recherche pour permettre leur commercialisation ne sont pas intervenues dans le cadre de la conception et la réalisation des produits et n'ont donc pas participé à des travaux de recherche. Ces dépenses ne peuvent donc être prises en compte pour la détermination du montant du crédit d'impôt. La société Berkem Développement n'est, par suite, pas fondée à soutenir que c'est à tort que le service a considéré que les travaux confiés par la société requérante à ces organismes ne pouvaient être regardés comme présentant les caractéristiques d'une opération de recherche au sens de l'article 244 quater B du code général des impôts.
Sur le terrain de la doctrine fiscale :
4. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales: " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été à 1'époque, formellement admise par 1'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente (...) ". Aux termes de l'article L. 80 B du même livre " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable 1° lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal: (...) ".
5. En premier lieu, la décision de restitution du crédit d'impôt recherche au titre de l'année 2015 invoquée par la requérante qui ne comporte aucune motivation et qui concerne, au demeurant, une imposition initiale ne constitue pas une prise de position formelle de l'administration opposable sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales.
6. En deuxième lieu, la circonstance que l'administration fiscale ait admis à l'issue de la vérification de comptabilité d'une filiale de la société requérante, la prise en compte de ses dépenses de sous-traitance dans le calcul d'un crédit d'impôt recherche de 2013 ne constitue pas une prise de position formelle de l'administration opposable sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales.
7. En troisième lieu, la société Berkem Développement n'est pas fondée à se prévaloir de la doctrine administrative référencée BOI-BIC-RICI-10-10-10-20 en ce que celle-ci ne cite pas les dépenses supportées en vue de l'obtention de l'autorisation de mise sur le marché et ne comporte donc aucune interprétation contraire de la loi fiscale qui lui a été appliquée.
8. En dernier lieu, le guide du crédit d'impôt recherche 2016 qui n'a pas la valeur d'une instruction fiscale, n'est pas opposable à l'administration.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la société Berkem Développement n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à ce que l'Etat soit condamné au versement d'une somme d'argent au titre des frais de justice ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Berkem Développement est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Berkem Développement et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 18 octobre 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Evelyne Balzamo, présidente,
Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,
M. Nicolas Normand, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 novembre 2022.
Le rapporteur,
Nicolas B...
La présidente,
Evelyne Balzamo
Le greffier,
Christophe Pelletier
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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