CAA de DOUAI, 1ère chambre, 22/08/2022, 21DA02807, Inédit au recueil Lebon
CAA de DOUAI, 1ère chambre, 22/08/2022, 21DA02807, Inédit au recueil Lebon
CAA de DOUAI - 1ère chambre
- N° 21DA02807
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
lundi
22 août 2022
- Président
- M. Heinis
- Rapporteur
- Mme Corinne Baes Honoré
- Avocat(s)
- SAMBA
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... D... C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 12 juillet 2021 par lequel la préfète de l'Oise lui a refusé la délivrance d'une autorisation de travail et d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a désigné le Cameroun comme pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée.
Par un jugement n° 2102695 du 10 novembre 2021, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 7 décembre 2021, et un mémoire enregistré le 14 février 2022, Mme C..., représentée par Me Smeth Samba, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) d'enjoindre à la préfète de l'Oise de lui délivrer un titre de séjour portant la mention
" travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de cinquante euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
Sur les moyens dirigés contre l'ensemble de l'arrêté attaqué :
- cet arrêté est entaché d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Sur les moyens dirigés contre la décision portant refus de séjour :
- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 421-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la préfète de l'Oise, qui s'est crue liée par l'avis du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, a entaché sa décision de refus de titre de séjour d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît le principe d'égalité.
Sur les moyens dirigés contre l'obligation de quitter le territoire français et la fixation du pays de renvoi :
- ces décisions doivent être annulées par voie d'exception d'illégalité de la décision sur laquelle elles reposent ;
- elles méconnaissent les articles L. 421-3, L. 423-23 et L. 431-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Sur les moyens dirigés contre la fixation du pays de renvoi :
- cette décision doit être annulée par voie d'exception d'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire ;
- elle méconnaît les articles L. 421-3, L. 423-23 et L. 431-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle lui fait courir des risques en raison de la pandémie mondiale.
La requête et le mémoire de Mme C... ont été communiqués à la préfète de l'Oise qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code du travail ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Baes-Honoré présidente-assesseure.
Considérant ce qui suit :
Sur l'objet du litige :
1. Mme C..., ressortissante camerounaise née le 6 juin 1984, a déclaré être entrée en France le 6 octobre 2018. Par un arrêté du 12 juillet 2021, la préfète de l'Oise a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a désigné le Cameroun comme pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée. Par un jugement du 10 novembre 2021, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté la requête de Mme C... tendant à l'annulation de cet arrêté. Mme C... relève appel de ce jugement.
Sur les conclusions dirigées contre le refus d'autorisation de travail et de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 421-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée déterminée ou qui fait l'objet d'un détachement conformément aux articles L. 1262-1, L. 1262-2 et L. 1262-2-1 du code du travail se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " travailleur temporaire " d'une durée maximale d'un an. La délivrance de cette carte de séjour est subordonnée à la détention préalable d'une autorisation de travail, dans les conditions prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail (...) ".
3. Aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail alors applicable : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : (...) 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ".
4. Aux termes de l'article R. 5221-20 du code du travail alors applicable : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes concourant au service public de l'emploi pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; 2° L'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'étranger et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule ; / Lorsque la demande concerne un étudiant ayant achevé son cursus sur le territoire français cet élément s'apprécie au regard des seules études suivies et seuls diplômes obtenus en France ; (...) 5° Les conditions d'emploi et de rémunération offertes à l'étranger, qui sont comparables à celles des salariés occupant un emploi de même nature dans l'entreprise ou, à défaut, conformes aux rémunérations pratiquées sur le marché du travail pour l'emploi sollicité ; (...) ".
5. Pour rejeter la demande d'autorisation de travail et de titre de séjour présentée par Mme C..., la préfète de l'Oise s'est fondée sur l'avis défavorable émis en 2020 par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRRECTE), laquelle s'est appuyée sur l'absence d'adéquation du diplôme obtenu par l'intéressée avec l'emploi d'agent des services hospitaliers dans un EHPAD qui lui était proposé et sur la circonstance que cette offre portait sur un poste assorti d'un salaire de 1697 euros alors que le montant renseigné sur le formulaire Cerfa atteignait la somme de 1708 euros. La préfète en a déduit que l'intéressée ne disposait pas d'un contrat visé par l'administration et s'est également fondée sur la circonstance que cet emploi ne nécessitait pas un savoir-faire rare sur le marché du travail ou stratégique pour son entreprise qu'elle maîtriserait à la différence des autres demandeurs d'emploi.
En ce qui concerne l'adéquation entre la formation et l'emploi :
6. Il ressort des pièces du dossier que Mme C..., entrée en France avec un visa long séjour " étudiant " en octobre 2018, a obtenu le diplôme universitaire Sorbonne-Université de soins infirmiers en rhumatologie avec la note globale de 14,3/20 et les félicitations du jury, au terme d'un cycle d'études de deux ans, en 2020.
7. D'une part, Mme C..., dans le cadre de ses études, a été employée d'abord à temps partiel comme agent des services hospitaliers du 20 décembre 2018 au 24 février 2019 et du 11 juillet 2019 au 30 juillet 2020, ensuite à temps complet à compter du 31 juillet 2020. La requérante a ainsi acquis une expérience significative sur l'emploi d'agent des services hospitaliers dans le cadre d'une activité exercée sous couvert d'un titre de séjour " étudiant ".
8. D'autre part, si la formation suivie par Mme C... s'adressait à un public d'infirmiers diplômés alors que l'emploi d'agent des services hospitaliers est accessible à un niveau de diplôme inférieur, cette circonstance est à elle seule, s'agissant d'emplois dans le même domaine de la santé et des soins aux personnes âgées et d'un premier emploi après des études, insusceptible d'établir un défaut d'adéquation manifeste entre la qualification de l'intéressée et l'emploi envisagé.
9. Il résulte de ce qui précède, alors que la préfète n'a produit un mémoire en défense ni en première instance ni en appel, que par le premier motif du refus de titre de séjour, la préfète de l'Oise n'a pas fait une exacte application des dispositions citées aux points 2 à 4.
En ce qui concerne les autres motifs du refus d'autorisation de travail et de titre de séjour :
10. D'une part, la requérante expose sans être contredite que la rémunération proposée, conforme à la grille indiciaire de la fonction publique, est celle indiquée par l'employeur sur le formulaire Cerfa. A cet égard, la préfète qui n'a pas produit d'écritures dans la présente instance, n'a apporté aucun élément de nature à expliquer les raisons pour lesquelles cette différence de rémunération de 11 euros entre deux documents serait de nature à justifier le refus qu'elle a opposé.
11. D'autre part, il ne résulte pas davantage de l'instruction que la préfète aurait pris la même décision en se fondant sur l'autre motif de son arrêté tiré de l'absence de spécificité du poste de travail en cause au regard de la situation de l'emploi.
12. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme C... est fondée à demander l'annulation de la décision de la préfète de l'Oise du 12 juillet 2021 ayant refusé de lui délivrer une autorisation de travail et un titre de séjour.
Sur les conclusions à fin d'annulation des autres décisions :
13. Il résulte de ce qui a été indiqué ci-dessus que la décision de refus de titre de séjour est illégale. Il s'ensuit qu'il y a lieu, par voie de conséquence, d'annuler les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination.
14. Il résulte de ce qui précède que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision de la préfète de l'Oise du 12 juillet 2021 portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination.
Sur l'application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative :
15. Les motifs d'annulation retenus par le présent arrêt n'impliquent pas que la préfète délivre à Mme C... une carte de séjour temporaire " salarié " mais seulement qu'elle réexamine sa situation administrative et lui délivre, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour. Il y a donc lieu d'enjoindre à la préfète de l'Oise de prendre ces mesures dans un délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'accueillir cette injonction d'une astreinte.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
16. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1000 euros au titre des frais exposés par Mme C... et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 10 novembre 2021 et l'arrêté de la préfète de l'Oise du 12 juillet 2021 sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à Mme C... la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D... C..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à la préfète de l'Oise.
Délibéré après l'audience publique du 4 juillet 2022 à laquelle siégeaient :
- M. Marc Heinis, président de chambre,
- Mme Baes-Honoré, présidente-assesseure,
- Mme Naïla Boukheloua première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 août 2022.
La présidente- rapporteure,
Signé : C. Baes-HonoréLe président de la 1ère chambre,
Signé : M. B...
La greffière,
Signé : S.Cardot
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
Christine Sire
N° 21DA02807 2
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... D... C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 12 juillet 2021 par lequel la préfète de l'Oise lui a refusé la délivrance d'une autorisation de travail et d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a désigné le Cameroun comme pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée.
Par un jugement n° 2102695 du 10 novembre 2021, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 7 décembre 2021, et un mémoire enregistré le 14 février 2022, Mme C..., représentée par Me Smeth Samba, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) d'enjoindre à la préfète de l'Oise de lui délivrer un titre de séjour portant la mention
" travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale " ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de cinquante euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
Sur les moyens dirigés contre l'ensemble de l'arrêté attaqué :
- cet arrêté est entaché d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Sur les moyens dirigés contre la décision portant refus de séjour :
- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 421-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la préfète de l'Oise, qui s'est crue liée par l'avis du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, a entaché sa décision de refus de titre de séjour d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît le principe d'égalité.
Sur les moyens dirigés contre l'obligation de quitter le territoire français et la fixation du pays de renvoi :
- ces décisions doivent être annulées par voie d'exception d'illégalité de la décision sur laquelle elles reposent ;
- elles méconnaissent les articles L. 421-3, L. 423-23 et L. 431-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Sur les moyens dirigés contre la fixation du pays de renvoi :
- cette décision doit être annulée par voie d'exception d'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire ;
- elle méconnaît les articles L. 421-3, L. 423-23 et L. 431-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle lui fait courir des risques en raison de la pandémie mondiale.
La requête et le mémoire de Mme C... ont été communiqués à la préfète de l'Oise qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code du travail ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Baes-Honoré présidente-assesseure.
Considérant ce qui suit :
Sur l'objet du litige :
1. Mme C..., ressortissante camerounaise née le 6 juin 1984, a déclaré être entrée en France le 6 octobre 2018. Par un arrêté du 12 juillet 2021, la préfète de l'Oise a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a désigné le Cameroun comme pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée. Par un jugement du 10 novembre 2021, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté la requête de Mme C... tendant à l'annulation de cet arrêté. Mme C... relève appel de ce jugement.
Sur les conclusions dirigées contre le refus d'autorisation de travail et de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 421-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée déterminée ou qui fait l'objet d'un détachement conformément aux articles L. 1262-1, L. 1262-2 et L. 1262-2-1 du code du travail se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " travailleur temporaire " d'une durée maximale d'un an. La délivrance de cette carte de séjour est subordonnée à la détention préalable d'une autorisation de travail, dans les conditions prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail (...) ".
3. Aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail alors applicable : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : (...) 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ".
4. Aux termes de l'article R. 5221-20 du code du travail alors applicable : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes concourant au service public de l'emploi pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; 2° L'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'étranger et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule ; / Lorsque la demande concerne un étudiant ayant achevé son cursus sur le territoire français cet élément s'apprécie au regard des seules études suivies et seuls diplômes obtenus en France ; (...) 5° Les conditions d'emploi et de rémunération offertes à l'étranger, qui sont comparables à celles des salariés occupant un emploi de même nature dans l'entreprise ou, à défaut, conformes aux rémunérations pratiquées sur le marché du travail pour l'emploi sollicité ; (...) ".
5. Pour rejeter la demande d'autorisation de travail et de titre de séjour présentée par Mme C..., la préfète de l'Oise s'est fondée sur l'avis défavorable émis en 2020 par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRRECTE), laquelle s'est appuyée sur l'absence d'adéquation du diplôme obtenu par l'intéressée avec l'emploi d'agent des services hospitaliers dans un EHPAD qui lui était proposé et sur la circonstance que cette offre portait sur un poste assorti d'un salaire de 1697 euros alors que le montant renseigné sur le formulaire Cerfa atteignait la somme de 1708 euros. La préfète en a déduit que l'intéressée ne disposait pas d'un contrat visé par l'administration et s'est également fondée sur la circonstance que cet emploi ne nécessitait pas un savoir-faire rare sur le marché du travail ou stratégique pour son entreprise qu'elle maîtriserait à la différence des autres demandeurs d'emploi.
En ce qui concerne l'adéquation entre la formation et l'emploi :
6. Il ressort des pièces du dossier que Mme C..., entrée en France avec un visa long séjour " étudiant " en octobre 2018, a obtenu le diplôme universitaire Sorbonne-Université de soins infirmiers en rhumatologie avec la note globale de 14,3/20 et les félicitations du jury, au terme d'un cycle d'études de deux ans, en 2020.
7. D'une part, Mme C..., dans le cadre de ses études, a été employée d'abord à temps partiel comme agent des services hospitaliers du 20 décembre 2018 au 24 février 2019 et du 11 juillet 2019 au 30 juillet 2020, ensuite à temps complet à compter du 31 juillet 2020. La requérante a ainsi acquis une expérience significative sur l'emploi d'agent des services hospitaliers dans le cadre d'une activité exercée sous couvert d'un titre de séjour " étudiant ".
8. D'autre part, si la formation suivie par Mme C... s'adressait à un public d'infirmiers diplômés alors que l'emploi d'agent des services hospitaliers est accessible à un niveau de diplôme inférieur, cette circonstance est à elle seule, s'agissant d'emplois dans le même domaine de la santé et des soins aux personnes âgées et d'un premier emploi après des études, insusceptible d'établir un défaut d'adéquation manifeste entre la qualification de l'intéressée et l'emploi envisagé.
9. Il résulte de ce qui précède, alors que la préfète n'a produit un mémoire en défense ni en première instance ni en appel, que par le premier motif du refus de titre de séjour, la préfète de l'Oise n'a pas fait une exacte application des dispositions citées aux points 2 à 4.
En ce qui concerne les autres motifs du refus d'autorisation de travail et de titre de séjour :
10. D'une part, la requérante expose sans être contredite que la rémunération proposée, conforme à la grille indiciaire de la fonction publique, est celle indiquée par l'employeur sur le formulaire Cerfa. A cet égard, la préfète qui n'a pas produit d'écritures dans la présente instance, n'a apporté aucun élément de nature à expliquer les raisons pour lesquelles cette différence de rémunération de 11 euros entre deux documents serait de nature à justifier le refus qu'elle a opposé.
11. D'autre part, il ne résulte pas davantage de l'instruction que la préfète aurait pris la même décision en se fondant sur l'autre motif de son arrêté tiré de l'absence de spécificité du poste de travail en cause au regard de la situation de l'emploi.
12. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme C... est fondée à demander l'annulation de la décision de la préfète de l'Oise du 12 juillet 2021 ayant refusé de lui délivrer une autorisation de travail et un titre de séjour.
Sur les conclusions à fin d'annulation des autres décisions :
13. Il résulte de ce qui a été indiqué ci-dessus que la décision de refus de titre de séjour est illégale. Il s'ensuit qu'il y a lieu, par voie de conséquence, d'annuler les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination.
14. Il résulte de ce qui précède que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision de la préfète de l'Oise du 12 juillet 2021 portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination.
Sur l'application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative :
15. Les motifs d'annulation retenus par le présent arrêt n'impliquent pas que la préfète délivre à Mme C... une carte de séjour temporaire " salarié " mais seulement qu'elle réexamine sa situation administrative et lui délivre, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour. Il y a donc lieu d'enjoindre à la préfète de l'Oise de prendre ces mesures dans un délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'accueillir cette injonction d'une astreinte.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
16. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1000 euros au titre des frais exposés par Mme C... et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 10 novembre 2021 et l'arrêté de la préfète de l'Oise du 12 juillet 2021 sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à Mme C... la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D... C..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à la préfète de l'Oise.
Délibéré après l'audience publique du 4 juillet 2022 à laquelle siégeaient :
- M. Marc Heinis, président de chambre,
- Mme Baes-Honoré, présidente-assesseure,
- Mme Naïla Boukheloua première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 août 2022.
La présidente- rapporteure,
Signé : C. Baes-HonoréLe président de la 1ère chambre,
Signé : M. B...
La greffière,
Signé : S.Cardot
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
Christine Sire
N° 21DA02807 2