Conseil d'État, 3ème - 8ème chambres réunies, 07/07/2022, 459456

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Versailles de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de la décision du 29 octobre 2021 par laquelle le ministre de l'économie, des finances et de la relance a prononcé sa mutation d'office dans le département des Yvelines.

Par une ordonnance n° 2109925 du 30 novembre 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de M. B....

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 14 décembre 2021, 29 décembre 2021 et 4 mai 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à ses conclusions de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Nicolas Jau, auditeur,

- les conclusions de M. Laurent Cytermann, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à Me Bardoul François-Eric, avocat de M. A... B... ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 29 juin 2022, présentée par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique ;




Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. / (...) La suspension prend fin au plus tard lorsqu'il est statué sur la requête en annulation ou en réformation de la décision ".

2. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que M. B..., inspecteur des finances publiques, affecté depuis le 4 mars 2013 au sein de la mission départementale risques et audit de la direction départementale des finances publiques du Val-d'Oise, a été affecté par un arrêté du ministre de l'économie, des finances et de la relance du 29 octobre 2021 sur " tout emploi " au sein de la direction départementale des finances publiques des Yvelines, avec une date d'installation au 1er décembre 2021. M. B... se pourvoit contre l'ordonnance du 30 novembre 2021 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Versailles, en application de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'exécution de cet arrêté.

Sur le pourvoi :

3. Aux termes de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, désormais codifié aux articles L. 512-18 et L. 512-19 du code général de la fonction publique, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - L'autorité compétente procède aux mutations des fonctionnaires en tenant compte des besoins du service. / II. - Dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service et sous réserve des priorités instituées à l'article 62 bis, les affectations prononcées tiennent compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille ". Ces dispositions prévoient la prise en considération de la situation de famille des fonctionnaires pour leurs mutations, y compris lorsque l'autorité compétente décide de la mutation d'un fonctionnaire dans l'intérêt du service. Par suite, en jugeant que ces dispositions ne concernent que les mouvements de fonctionnaires et non les mutations décidées par l'autorité compétente dans l'intérêt du service, le juge des référés a commis une erreur de droit. En conséquence, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, M. B... est fondé à demander l'annulation de l'ordonnance qu'il attaque.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

Sur la demande de suspension de l'exécution de la décision du 29 octobre 2021 du ministre de l'économie, des finances et de la relance :

5. Pour demander la suspension de l'exécution de la décision contestée, M. B... soutient que celle-ci est entachée d'un défaut de motivation, qu'elle méconnaît les dispositions de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 précitées, et qu'elle revêt le caractère d'une sanction déguisée.

6. Aucun de ces moyens n'est propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée. Dès lors, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le ministre de l'économie, des finances et de la relance ni de se prononcer sur l'existence d'une situation d'urgence, la demande de M. B... tendant à la suspension de l'exécution de cette décision doit être rejetée. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.




D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du 30 novembre 2021 du juge des référés du tribunal administratif de Versailles est annulée.
Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le juge des référés du tribunal administratif de Versailles et ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 20 juin 2022 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Guillaume Goulard, M. Pierre Collin, présidents de chambre ; M. Stéphane Verclytte, M. Christian Fournier, M. Mathieu Herondart, M. Hervé Cassagnabère, M. Pierre Boussaroque, conseillers d'Etat et M. Nicolas Jau, auditeur-rapporteur.



Rendu le 7 juillet 2022.

Le président :
Signé : M. Rémy Schwartz
Le rapporteur :
Signé : M. Nicolas Jau
La secrétaire :
Signé : Mme Elsa Sarrazin

ECLI:FR:CECHR:2022:459456.20220707
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