Conseil d'État, 3ème chambre, 19/05/2022, 450627, Inédit au recueil Lebon
Conseil d'État, 3ème chambre, 19/05/2022, 450627, Inédit au recueil Lebon
Conseil d'État - 3ème chambre
- N° 450627
- ECLI:FR:CECHS:2022:450627.20220519
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
jeudi
19 mai 2022
- Rapporteur
- Mme Cécile Isidoro
- Avocat(s)
- SARL LE PRADO – GILBERT
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par une décision du 14 décembre 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de la société par actions simplifiée (SAS) SECOBRA Recherches dirigées contre l'arrêt du 12 janvier 2021 de la cour administrative d'appel de Versailles en tant que cet arrêt a jugé que les contributions qu'elle a versées au titre de la mutuelle n'étaient pas éligibles au crédit d'impôt recherche.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 février 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de ces conclusions.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Cécile Isidoro, conseillère d'Etat,
- les conclusions de M. Laurent Cytermann, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société SECOBRA Recherches ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société par actions simplifiée SECOBRA Recherches, qui exerce une activité de recherche agricole spécialisée dans la création de nouvelles variétés d'orge et de blé, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur le crédit d'impôt pour dépenses de recherche (CIR) pour les années 2004 à 2010. Par ailleurs, par deux réclamations du 15 avril 2015, la société a sollicité des compléments de CIR au titre des années 2012 et 2013. Ces demandes complémentaires n'ont fait l'objet que de décisions d'acceptation partielle par l'administration fiscale. La société se pourvoit en cassation contre l'arrêt par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté son appel contre le jugement du tribunal administratif de Versailles ayant rejeté ses demandes, d'une part, de décharge de rappels de CIR mis à sa charge au titre des années 2004 à 2010 et, d'autre part, de restitution au titre de ses demandes supplémentaires de CIR pour les années 2012 et 2013. Par une décision du 14 décembre 2021, le Conseil d'Etat a admis les conclusions du pourvoi en tant seulement que cet arrêt a jugé que les contributions versées par la société SECOBRA Recherches au titre des contrats de prévoyance et de mutuelle souscrits en faveur de ses salariés n'entraient pas dans les dépenses de personnel à retenir pour ce calcul du crédit d'impôt recherche.
2. Aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts : " I. Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel [...] peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année. '...' II. Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : '...' / b) Les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche directement et exclusivement affectés à ces opérations. '...' ". Aux termes de l'article 49 septies I de l'annexe III au code précité : " Pour la détermination des dépenses de recherche visées aux a, b, f et au 2° du h du II de l'article 244 quater B du code général des impôts, il y a lieu de retenir : / '...' / b. Au titre des dépenses de personnel, les rémunérations et leurs accessoires ainsi que les charges sociales, dans la mesure où celles-ci correspondent à des cotisations sociales obligatoires. ". Aux termes de l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale : " A moins qu'elles ne soient instituées par des dispositions législatives ou réglementaires, les garanties collectives dont bénéficient les salariés, anciens salariés et ayants droit en complément de celles qui résultent de l'organisation de la sécurité sociale sont déterminées soit par voie de conventions ou d'accords collectifs, soit à la suite de la ratification à la majorité des intéressés d'un projet d'accord proposé par le chef d'entreprise, soit par une décision unilatérale du chef d'entreprise constatée dans un écrit remis par celui-ci à chaque intéressé ".
3. D'une part, revêtent le caractère de cotisations sociales obligatoires, au sens des dispositions précitées de l'article 49 septies I du code général des impôts, les versements de la part des employeurs aux régimes obligatoires de sécurité sociale ainsi que les versements destinés à financer les garanties collectives complémentaires instituées par des dispositions législatives ou réglementaires ou les garanties instituées par voie de conventions ou d'accords collectifs ainsi que par les projets d'accord ou les décisions unilatérales mentionnés à l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale et qui ont pour objet d'ouvrir des droits à des prestations et avantages servis par ces régimes ou au titre de ces garanties. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société SECOBRA Recherches ne se prévalait d'aucun accord ou projet d'accord collectif et que c'est sans dénaturation que la cour administrative d'appel a jugé que l'existence de la décision unilatérale de l'employeur dont elle indiquait se prévaloir n'était pas établie. Dans ces conditions, c'est sans erreur de droit ni erreur de qualification juridique que la cour en a déduit que les sommes que la société SECOBRA Recherches soutenait avoir versées en application de contrats de mutuelle et de prévoyance au profit de ses salariés ne pouvaient être regardées comme des cotisations sociales obligatoires.
4. D'autre part, c'est sans erreur de droit ni erreur de qualification juridique que la cour a jugé que de telles sommes ne pouvaient être regardées comme des accessoires de rémunération au sens et pour l'application des dispositions précitées de l'article 49 septies I de l'annexe III au code général des impôts.
5. Il résulte de ce qui précède que c'est sans erreur de droit ni erreur de qualification juridique, et par un arrêt suffisamment motivé, que la cour a jugé que ces sommes n'entraient pas dans les dépenses éligibles au crédit d'impôt recherche. Par suite, la SAS SECOBRA Recherches n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en tant seulement que les contributions versées par la société SECOBRA Recherches au titre des contrats de prévoyance et de mutuelle souscrits en faveur de ses salariés n'entraient pas dans les dépenses de personnel à retenir pour ce calcul du crédit d'impôt recherche.
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la SAS SECOBRA Recherches est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société par actions simplifiées SECOBRA Recherches et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré à l'issue de la séance du 21 avril 2022 où siégeaient : M. Christian Fournier, conseiller d'Etat, présidant ; M. Stéphane Verclytte, conseiller d'Etat et Mme Cécile Isidoro, conseillère d'Etat-rapporteure.
Rendu le 19 mai 2022.
Le président :
Signé : M. Christian Fournier
La rapporteure :
Signé : Mme Cécile Isidoro
La secrétaire :
Signé : Mme Nathalie Martinez-Casanova