Conseil d'État, 5ème chambre, 23/03/2022, 453357, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision " 48 SI " du 10 août 2015 par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté l'invalidité de son permis de conduire pour solde de points nul et d'enjoindre au ministre de lui restituer son permis de conduire. Par un jugement n° 2002276 du 12 avril 2021, le tribunal administratif a annulé cette décision et enjoint au ministre de restituer à M. D... son permis de conduire.

Par un pourvoi, enregistré le 7 juin 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de M. D....



Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la route ;
- le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. François Charmont, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public.




Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision référencée " 48 SI " du 10 août 2015 par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté l'invalidité de son permis de conduire pour solde de points nul. Le ministre de l'intérieur se pourvoit en cassation contre le jugement du 12 avril 2021 par lequel le tribunal administratif a annulé cette décision.

2. D'une part, aucun principe général, ni aucune disposition législative ou réglementaire ne fait obligation au titulaire d'un permis de conduire de déclarer sa nouvelle adresse à l'administration en cas de changement d'adresse. D'autre part, la notification d'une décision relative au permis de conduire doit être regardée comme régulière lorsqu'elle est faite à une adresse correspondant effectivement à une résidence de l'intéressé.

3. Il résulte des termes du jugement attaqué que, pour juger que les conclusions de M. D... dirigées contre la décision " 48 SI " constatant l'invalidité de son permis de conduire n'étaient pas tardives, le tribunal administratif s'est fondé sur ce que cette décision avait été envoyée et reçue, le 10 août 2015, à une adresse située dans la commune de Lucelle (Haut-Rhin) qui n'était plus celle de l'intéressé et qu'aucune pièce du dossier n'établissait la date à laquelle celui-ci en avait eu connaissance.

4. D'une part, en estimant, au vu des pièces du dossier qui lui était soumis, que M. D... avait, à la date du 10 août 2015 à laquelle le courrier avait été réceptionné à Lucelle, déjà déménagé à une adresse située dans la commune de Ferrette (Haut-Rhin) et ne résidait plus effectivement à Lucelle, le tribunal s'est livré à une appréciation souveraine de ces pièces, qui n'est pas entachée de dénaturation.

5. D'autre part, en estimant que, ainsi que le soutenait M. D..., la signature figurant sur l'avis de réception du pli distribué le 10 août 2015 n'était pas celle de l'intéressé, pour en déduire que ce dernier n'avait pas réceptionné le pli, le tribunal s'est également livré à une appréciation souveraine des pièces du dossier qui lui était soumis, exempte de dénaturation.

6. Par suite, en déduisant de l'absence, non seulement de toute notification régulière de la décision attaquée mais même de tout élément établissant la date à laquelle M. D... avait eu connaissance de cette décision, que la fin de non recevoir soulevée par le ministre de l'intérieur, tirée de ce que la demande était tardive, devait être écartée, le tribunal n'a pas commis d'erreur de droit.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.




D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi du ministre de l'intérieur est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et à M. B... D....
Délibéré à l'issue de la séance du 2 février 2022 où siégeaient : M. Denis Piveteau, président de chambre, présidant ; M. Olivier Yeznikian, conseiller d'Etat et M. François Charmont, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 23 mars 2022.
Le président :
Signé : M. Denis Piveteau
Le rapporteur :
Signé : M. François Charmont
Le secrétaire :
Signé : M. A... C...


ECLI:FR:CECHS:2022:453357.20220323
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