Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 17/03/2022, 452034
Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 17/03/2022, 452034
Conseil d'État - 10ème - 9ème chambres réunies
- N° 452034
- ECLI:FR:CECHR:2022:452034.20220317
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
jeudi
17 mars 2022
- Rapporteur
- Mme Alexandra Bratos
- Avocat(s)
- SCP BORE, SALVE DE BRUNETON, MEGRET ; SCP DUHAMEL - RAMEIX - GURY- MAITRE
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par un jugement n° 1603419 du 11 décembre 2018, le tribunal administratif de Nantes a, d'une part, annulé la décision implicite par laquelle la société Solution Antoine Beaufour a refusé de communiquer à l'association Nos Amis Les Animaux (NALA) une copie des registres légaux d'entrée et de sortie des animaux de la fourrière et des registres de suivi sanitaire de l'ensemble des communes où elle assure sa mission, pour la période allant du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2015 et, d'autre part, enjoint à la société Solution Antoine Beaufour de communiquer à l'association NALA, dans un délai de quatre mois à compter de la notification du jugement et après occultation de certaines mentions, l'ensemble des documents sollicités.
Par un jugement n° 1911076 du 28 juillet 2020, le tribunal administratif de Nantes, saisi par l'association NALA d'une demande tendant à l'exécution du jugement du 11 décembre 2018, a prononcé une astreinte quotidienne de 50 euros à l'encontre de la société Solution Antoine Beaufour si elle ne justifiait pas avoir, dans un délai de deux mois suivant la notification de ce jugement, exécuté l'article 2 du jugement du 11 décembre 2018 en procédant à la communication des documents administratifs susmentionnés ou justifié de leur destruction ou de leur versement aux archives.
Par une ordonnance n° 20NT03095 du 26 avril 2021, enregistrée le 27 avril 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président de la cour administrative d'appel de Nantes a transmis au Conseil d'Etat, en application des dispositions combinées des articles R. 351-2 et R. 811-1 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré le 25 septembre 2020 au greffe de la cour, présenté par la société Solution Antoine Beaufour. Par ce pourvoi et deux mémoires, enregistrés les 21 juin et 8 décembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Solution Antoine Beaufour demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 28 juillet 2020 du tribunal administratif de Nantes ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande d'exécution de l'association NALA ;
3°) de mettre à la charge de l'association NALA la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Alexandra Bratos, auditrice,
- les conclusions de M. Laurent Domingo, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, avocat de la société Solution Antoine Beaufour et à la SCP Duhamel - Rameix - Gury - Maître, avocat de l'association Nos Amis Les Animaux ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'association Nos Amis Les Animaux, NALA, a demandé à la société Solution Antoine Beaufour, sur le fondement de l'article L. 311-1 du code des relations entre le public et l'administration, la communication d'une copie des registres d'entrée et de sortie des animaux ainsi que les registres de leur suivi sanitaire et de santé, détenus par cette société dans le cadre de sa délégation du service public de la fourrière animale, pour la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2015. L'association NALA a saisi le tribunal administratif de Nantes d'une demande tendant à l'annulation de la décision implicite de refus de communication de ces documents. Par un jugement du 11 décembre 2018, le tribunal administratif a annulé cette décision et a enjoint à la société Solution Antoine Beaufour de communiquer les documents à l'association NALA dans un délai de quatre mois à compter de la notification du jugement. A la suite de la demande de l'association NALA tendant à l'exécution de ce jugement, le tribunal administratif de Nantes, par un jugement du 28 juillet 2020, a prononcé une astreinte de 50 euros par jour à l'encontre de la société Solution Antoine Beaufour si elle ne justifiait pas avoir, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, exécuté le jugement du 11 décembre 2018 en procédant à la communication des documents administratifs demandés ou en justifiant de leur destruction ou de leur versement aux archives. La société Solution Antoine Beaufour se pourvoit en cassation contre ce jugement.
2. Les administrations mentionnées à l'article L. 311-1 du code des relations entre le public et l'administration ne peuvent s'exonérer de leur obligation d'assurer l'exécution d'une décision de justice annulant une décision de refus de communication de documents administratifs et de celle de communiquer les documents sollicités dans les conditions prévues par cette décision qu'à la condition d'établir l'impossibilité matérielle de communiquer lesdits documents. Pour ce faire, les administrations doivent, d'une part, faire état de ce que des faits postérieurs au jugement ou des faits dont elles ne pouvaient faire état avant son prononcé ont rendu impossible cette communication et, d'autre part, qu'elles ont accompli toutes les diligences nécessaires pour assurer l'exécution de cette décision compte-tenu de la date d'élaboration des documents demandés et de la précision de cette demande. Elles ne peuvent en aucun cas procéder à la destruction délibérée des documents dont le refus de communication a été annulé par le juge administratif, alors même que la réglementation ne leur imposerait plus, à cette date, de les conserver. Si elles ont procédé à une telle destruction après la notification du jugement, elles sont tenues d'accomplir toutes les diligences nécessaires pour les reconstituer, sous réserve d'une charge de travail manifestement disproportionnée, sans préjudice de l'engagement de leur responsabilité.
3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que si, pour justifier de l'absence d'exécution du jugement du 11 décembre 2018 qui lui avait été notifié le 19 décembre suivant, la société Solution Antoine Beaufour faisait état de ce qu'elle avait procédé à la destruction des documents sollicités au début du mois de janvier 2019, le tribunal, après avoir relevé, par une appréciation souveraine non entachée de dénaturation, que la société s'était bornée à produire une attestation non circonstanciée de son gérant, a pu en déduire, sans commettre d'erreur de droit, qu'elle ne justifiait ni de l'exécution du jugement ni de la destruction des documents demandés.
4. Il résulte de tout ce qui précède que la société Solution Antoine Beaufour n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'association NALA, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Les conclusions présentées au même titre par l'association NALA doivent être rejetées dès lors qu'elles sont dirigées contre l'Etat qui n'est pas partie à l'instance.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de la société Solution Antoine Beaufour est rejeté.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'association NALA au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Solution Antoine Beaufour et à l'association Nos Amis Les Animaux.
Délibéré à l'issue de la séance du 23 février 2022 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. G... F..., M. Frédéric Aladjidi, présidents de chambre ; Mme J... C..., Mme A... K..., M. D... E..., M. I... B..., Mme Isabelle Lemesle, conseillers d'Etat et Mme Alexandra Bratos, auditrice-rapporteure.
Rendu le 17 mars 2022.
La présidente :
Signé : Mme Christine Maugüé
La rapporteure :
Signé : Mme Alexandra Bratos
La secrétaire :
Signé : Mme H... L...
ECLI:FR:CECHR:2022:452034.20220317
Par un jugement n° 1603419 du 11 décembre 2018, le tribunal administratif de Nantes a, d'une part, annulé la décision implicite par laquelle la société Solution Antoine Beaufour a refusé de communiquer à l'association Nos Amis Les Animaux (NALA) une copie des registres légaux d'entrée et de sortie des animaux de la fourrière et des registres de suivi sanitaire de l'ensemble des communes où elle assure sa mission, pour la période allant du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2015 et, d'autre part, enjoint à la société Solution Antoine Beaufour de communiquer à l'association NALA, dans un délai de quatre mois à compter de la notification du jugement et après occultation de certaines mentions, l'ensemble des documents sollicités.
Par un jugement n° 1911076 du 28 juillet 2020, le tribunal administratif de Nantes, saisi par l'association NALA d'une demande tendant à l'exécution du jugement du 11 décembre 2018, a prononcé une astreinte quotidienne de 50 euros à l'encontre de la société Solution Antoine Beaufour si elle ne justifiait pas avoir, dans un délai de deux mois suivant la notification de ce jugement, exécuté l'article 2 du jugement du 11 décembre 2018 en procédant à la communication des documents administratifs susmentionnés ou justifié de leur destruction ou de leur versement aux archives.
Par une ordonnance n° 20NT03095 du 26 avril 2021, enregistrée le 27 avril 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président de la cour administrative d'appel de Nantes a transmis au Conseil d'Etat, en application des dispositions combinées des articles R. 351-2 et R. 811-1 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré le 25 septembre 2020 au greffe de la cour, présenté par la société Solution Antoine Beaufour. Par ce pourvoi et deux mémoires, enregistrés les 21 juin et 8 décembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Solution Antoine Beaufour demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 28 juillet 2020 du tribunal administratif de Nantes ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande d'exécution de l'association NALA ;
3°) de mettre à la charge de l'association NALA la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Alexandra Bratos, auditrice,
- les conclusions de M. Laurent Domingo, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, avocat de la société Solution Antoine Beaufour et à la SCP Duhamel - Rameix - Gury - Maître, avocat de l'association Nos Amis Les Animaux ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'association Nos Amis Les Animaux, NALA, a demandé à la société Solution Antoine Beaufour, sur le fondement de l'article L. 311-1 du code des relations entre le public et l'administration, la communication d'une copie des registres d'entrée et de sortie des animaux ainsi que les registres de leur suivi sanitaire et de santé, détenus par cette société dans le cadre de sa délégation du service public de la fourrière animale, pour la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2015. L'association NALA a saisi le tribunal administratif de Nantes d'une demande tendant à l'annulation de la décision implicite de refus de communication de ces documents. Par un jugement du 11 décembre 2018, le tribunal administratif a annulé cette décision et a enjoint à la société Solution Antoine Beaufour de communiquer les documents à l'association NALA dans un délai de quatre mois à compter de la notification du jugement. A la suite de la demande de l'association NALA tendant à l'exécution de ce jugement, le tribunal administratif de Nantes, par un jugement du 28 juillet 2020, a prononcé une astreinte de 50 euros par jour à l'encontre de la société Solution Antoine Beaufour si elle ne justifiait pas avoir, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, exécuté le jugement du 11 décembre 2018 en procédant à la communication des documents administratifs demandés ou en justifiant de leur destruction ou de leur versement aux archives. La société Solution Antoine Beaufour se pourvoit en cassation contre ce jugement.
2. Les administrations mentionnées à l'article L. 311-1 du code des relations entre le public et l'administration ne peuvent s'exonérer de leur obligation d'assurer l'exécution d'une décision de justice annulant une décision de refus de communication de documents administratifs et de celle de communiquer les documents sollicités dans les conditions prévues par cette décision qu'à la condition d'établir l'impossibilité matérielle de communiquer lesdits documents. Pour ce faire, les administrations doivent, d'une part, faire état de ce que des faits postérieurs au jugement ou des faits dont elles ne pouvaient faire état avant son prononcé ont rendu impossible cette communication et, d'autre part, qu'elles ont accompli toutes les diligences nécessaires pour assurer l'exécution de cette décision compte-tenu de la date d'élaboration des documents demandés et de la précision de cette demande. Elles ne peuvent en aucun cas procéder à la destruction délibérée des documents dont le refus de communication a été annulé par le juge administratif, alors même que la réglementation ne leur imposerait plus, à cette date, de les conserver. Si elles ont procédé à une telle destruction après la notification du jugement, elles sont tenues d'accomplir toutes les diligences nécessaires pour les reconstituer, sous réserve d'une charge de travail manifestement disproportionnée, sans préjudice de l'engagement de leur responsabilité.
3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que si, pour justifier de l'absence d'exécution du jugement du 11 décembre 2018 qui lui avait été notifié le 19 décembre suivant, la société Solution Antoine Beaufour faisait état de ce qu'elle avait procédé à la destruction des documents sollicités au début du mois de janvier 2019, le tribunal, après avoir relevé, par une appréciation souveraine non entachée de dénaturation, que la société s'était bornée à produire une attestation non circonstanciée de son gérant, a pu en déduire, sans commettre d'erreur de droit, qu'elle ne justifiait ni de l'exécution du jugement ni de la destruction des documents demandés.
4. Il résulte de tout ce qui précède que la société Solution Antoine Beaufour n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'association NALA, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Les conclusions présentées au même titre par l'association NALA doivent être rejetées dès lors qu'elles sont dirigées contre l'Etat qui n'est pas partie à l'instance.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la société Solution Antoine Beaufour est rejeté.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'association NALA au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Solution Antoine Beaufour et à l'association Nos Amis Les Animaux.
Délibéré à l'issue de la séance du 23 février 2022 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. G... F..., M. Frédéric Aladjidi, présidents de chambre ; Mme J... C..., Mme A... K..., M. D... E..., M. I... B..., Mme Isabelle Lemesle, conseillers d'Etat et Mme Alexandra Bratos, auditrice-rapporteure.
Rendu le 17 mars 2022.
La présidente :
Signé : Mme Christine Maugüé
La rapporteure :
Signé : Mme Alexandra Bratos
La secrétaire :
Signé : Mme H... L...