CAA de NANCY, 1ère chambre, 10/03/2022, 21NC00714, Inédit au recueil Lebon
CAA de NANCY, 1ère chambre, 10/03/2022, 21NC00714, Inédit au recueil Lebon
CAA de NANCY - 1ère chambre
- N° 21NC00714
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
jeudi
10 mars 2022
- Président
- Mme VIDAL
- Rapporteur
- Mme Marion BARROIS
- Avocat(s)
- JEANNOT
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 27 juin 2018 rejetant son recours gracieux contre la décision du 23 février 2018 par laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui renouveler son titre de séjour en qualité de parent d'enfants français.
Par un jugement n° 1901379 du 15 octobre 2020, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 9 mars 2021 M. B..., représenté par Me Jeannot demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 15 octobre 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 23 février 2018 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui renouveler son titre de séjour en qualité de parent d'enfants français ;
3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 800 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision est entachée d'un vice de procédure dès lors que le préfet aurait dû saisir la commission du titre de séjour dans le cadre de l'examen de sa demande de titre sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que le préfet n'a pas examiné la situation de M. B... au regard des motifs exceptionnels ou des considérations humanitaires prévus à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et les dispositions des alinéas 6 et 7 de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le jugement est insuffisamment motivé sur ces trois moyens.
Par un mémoire en défense du 26 janvier 2022, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 4 février 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 du 27 décembre 1968 modifié en matière de séjour et de travail ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Barrois, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant tunisien, est entré sur le territoire français selon ses déclarations en 2004 et il a obtenu un premier titre de séjour en avril 2013. Le 20 octobre 2016, il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11-6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif qu'il était père de deux enfants nés de son union avec une ressortissante française le 12 février 2010 et le 27 juin 2011. Par un arrêté du 23 février 2018, le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui renouveler son titre de séjour. Par un courrier reçu le 13 avril 2018, M. B... a formé un recours gracieux auprès du préfet de Meurthe-et-Moselle à l'encontre de cette décision qui a été rejeté par décision du 27 juin 2018. Par la présente requête, M. B... fait appel du jugement du 15 octobre 2020 et demande l'annulation de l'arrêté du 23 février 2018.
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
3. Il est constant que M. B... bénéficie d'un titre de séjour régulièrement renouvelé depuis avril 2013 et qu'aux termes de la décision du juge aux affaires familiales du 16 juillet 2013, il exerce conjointement avec son ancienne compagne l'autorité parentale sur leurs deux enfants, dispose d'un droit de visite et d'hébergement les 1er, 3ème et 5ème fins de semaine par mois ainsi que la moitié des vacances scolaires et que le juge a décidé de ne pas allouer de pension alimentaire en raison de sa situation financière. Il résulte de deux attestations de son ancienne compagne en date du 23 mars 2018 et du 8 novembre 2020 qu'il s'occupe de ses filles et participe à leurs vies même s'il ne peut plus les recevoir à domicile tant qu'il n'a pas de logement propre et que dans la mesure de ses possibilités, il subvient également à leurs besoins. En outre, les liens qu'il entretient avec ses enfants sont également confirmés par des attestations de son entourage. Par suite, il en résulte que le préfet a méconnu les stipulations précitées. Des lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, il y a lieu d'annuler la décision du préfet du Meurthe-et-Moselle.
4. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement attaqué, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Eu égard au motif d'annulation de l'arrêté attaqué ci-dessus retenu et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des éléments de fait ou de droit nouveaux justifieraient que l'autorité administrative oppose une nouvelle décision de refus, le présent arrêt implique nécessairement que cette autorité délivre à M. B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de délivrer ce titre dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
6. M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Jeannot avocat de M. B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Jeannot de la somme de 1 500 euros.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1901379 du 15 octobre 2020 du tribunal administratif de Nancy et l'arrêté en date du 23 février 2018 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a rejeté la demande de renouvellement de titre de séjour présentée par M. B... sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de Meurthe-et-Moselle de délivrer à M. B... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me Jeannot, avocat de M. B..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Jeannot renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au Préfet de Meurthe-et-Moselle.
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N° 21NC00714
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 27 juin 2018 rejetant son recours gracieux contre la décision du 23 février 2018 par laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui renouveler son titre de séjour en qualité de parent d'enfants français.
Par un jugement n° 1901379 du 15 octobre 2020, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 9 mars 2021 M. B..., représenté par Me Jeannot demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 15 octobre 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 23 février 2018 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui renouveler son titre de séjour en qualité de parent d'enfants français ;
3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 800 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision est entachée d'un vice de procédure dès lors que le préfet aurait dû saisir la commission du titre de séjour dans le cadre de l'examen de sa demande de titre sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que le préfet n'a pas examiné la situation de M. B... au regard des motifs exceptionnels ou des considérations humanitaires prévus à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et les dispositions des alinéas 6 et 7 de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le jugement est insuffisamment motivé sur ces trois moyens.
Par un mémoire en défense du 26 janvier 2022, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 4 février 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 du 27 décembre 1968 modifié en matière de séjour et de travail ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Barrois, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant tunisien, est entré sur le territoire français selon ses déclarations en 2004 et il a obtenu un premier titre de séjour en avril 2013. Le 20 octobre 2016, il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11-6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif qu'il était père de deux enfants nés de son union avec une ressortissante française le 12 février 2010 et le 27 juin 2011. Par un arrêté du 23 février 2018, le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui renouveler son titre de séjour. Par un courrier reçu le 13 avril 2018, M. B... a formé un recours gracieux auprès du préfet de Meurthe-et-Moselle à l'encontre de cette décision qui a été rejeté par décision du 27 juin 2018. Par la présente requête, M. B... fait appel du jugement du 15 octobre 2020 et demande l'annulation de l'arrêté du 23 février 2018.
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
3. Il est constant que M. B... bénéficie d'un titre de séjour régulièrement renouvelé depuis avril 2013 et qu'aux termes de la décision du juge aux affaires familiales du 16 juillet 2013, il exerce conjointement avec son ancienne compagne l'autorité parentale sur leurs deux enfants, dispose d'un droit de visite et d'hébergement les 1er, 3ème et 5ème fins de semaine par mois ainsi que la moitié des vacances scolaires et que le juge a décidé de ne pas allouer de pension alimentaire en raison de sa situation financière. Il résulte de deux attestations de son ancienne compagne en date du 23 mars 2018 et du 8 novembre 2020 qu'il s'occupe de ses filles et participe à leurs vies même s'il ne peut plus les recevoir à domicile tant qu'il n'a pas de logement propre et que dans la mesure de ses possibilités, il subvient également à leurs besoins. En outre, les liens qu'il entretient avec ses enfants sont également confirmés par des attestations de son entourage. Par suite, il en résulte que le préfet a méconnu les stipulations précitées. Des lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, il y a lieu d'annuler la décision du préfet du Meurthe-et-Moselle.
4. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement attaqué, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Eu égard au motif d'annulation de l'arrêté attaqué ci-dessus retenu et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des éléments de fait ou de droit nouveaux justifieraient que l'autorité administrative oppose une nouvelle décision de refus, le présent arrêt implique nécessairement que cette autorité délivre à M. B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de délivrer ce titre dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
6. M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Jeannot avocat de M. B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Jeannot de la somme de 1 500 euros.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1901379 du 15 octobre 2020 du tribunal administratif de Nancy et l'arrêté en date du 23 février 2018 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a rejeté la demande de renouvellement de titre de séjour présentée par M. B... sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de Meurthe-et-Moselle de délivrer à M. B... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me Jeannot, avocat de M. B..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Jeannot renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au Préfet de Meurthe-et-Moselle.
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