CAA de BORDEAUX, 4ème chambre, 17/12/2021, 19BX02911, Inédit au recueil Lebon
CAA de BORDEAUX, 4ème chambre, 17/12/2021, 19BX02911, Inédit au recueil Lebon
CAA de BORDEAUX - 4ème chambre
- N° 19BX02911
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
vendredi
17 décembre 2021
- Président
- Mme BALZAMO
- Rapporteur
- Mme Evelyne BALZAMO
- Avocat(s)
- CABINET NORAY - ESPEIG AVOCATS
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 18 octobre 2017 par lequel le maire de la commune de Vacquiers a refusé de lui délivrer un permis de construire un bâtiment à usage d'habitation.
Par un jugement n° 1705902 du 13 mai 2019, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté et enjoint au maire de Vacquiers de délivrer à Mme A... le permis de construire sollicité dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 11 juillet 2019 et 15 juin 2021, la commune de Vacquiers, représentée par la SELARL d'avocats Noray-Espeig, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 13 mai 2019 du tribunal administratif de Toulouse ;
2°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal le refus de permis de construire n'est pas motivé par la méconnaissance du plan de prévention des risques sécheresse ni sur le défaut d'assainissement mais sur le seul motif tiré de la méconnaissance de l'article A2 du règlement de la zone A du plan local d'urbanisme (PLU) ; l'arrêté reproduit cet article et précise suffisamment les éléments de fait relatifs à l'absence d'absence d'activité agricole permettant à la pétitionnaire de comprendre les raisons du rejet de sa demande ; l'arrêté est donc suffisamment motivé en droit et en fait conformément aux articles R 424-5 et A 424-4 du code de l'urbanisme ;
- à supposer la décision de refus insuffisamment motivée, le moyen était inopérant compte tenu de la compétence liée du maire pour refuser le permis de construire sollicité dès lors que cette décision résultait d'un simple constat de l'absence d'exploitation agricole sur la parcelle sans qu'il y ait lieu à une appréciation des faits ;
- l'arrêté qui n'est pas fondé sur l'impossibilité d'assurer l'assainissement du terrain ni sur la violation du plan de prévention des risques sécheresse n'est donc pas entaché d'erreur de droit à ces titres ;
- l'arrêté de refus de permis de construire n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que sont interdites en zone agricole du PLU les constructions d'habitations non liées et utiles à l'exploitation agricole et que l'exploitation agricole de Mme A..., dont la réalité n'est pas contestée, ne parait pas viable compte tenu de son implantation, de la retraite prochaine de l'intéressée et de son fort endettement ; le tribunal n'a pas pris en compte l'absence de pérennité de cette exploitation ; Mme A... a en outre cessé son activité sur les terrains en cause depuis près de 3 ans et s'est installée dans une ferme située dans une autre commune dont la superficie de 1,5 hectare correspond à son activité d'élevage ce qui n'est pas le cas des terrains en cause d'une surface limitée à 5 070 m² ; elle a conclu un bail rural de 9 ans qui prouve l'installation définitive de son siège d'exploitation à Villematier ; la construction d'une habitation ne peut précéder celles des bâtiments d'activité agricole qui la justifie ce qui serait le cas en l'espèce, aucune activité agricole n'étant exercée sur les parcelles A 173 ET 170 situées à Vacquiers ; aucun élément ne justifie en outre au regard des caractéristiques de l'exploitation envisagée, de peu d'importance, la création d'une habitation à proximité ;
- la décision de refus n'est entachée d'aucun détournement de pouvoir qui résulte de la seule application de la réglementation ; Mme A... n'a d'ailleurs pas contesté les précédentes décisions de refus opposées en 2008 alors qu'elle avait construit sa bergerie sans autorisation ; la commune a d'ailleurs délivré le permis de construire la bergerie en exécution de l'ordonnance du juge des référés du 15 avril 2015 mais l'intéressée a alors quitté Vacquiers pour s'installer dans une autre commune où elle exerce son activité d'élevage ; le permis de construire la bergerie est devenu caduc compte tenu de l'interruption des travaux depuis plus de 3 ans constatée par huissier.
Par mémoire en défense, enregistré le 13 mai 2021, Mme A..., représentée par Me Terrasse, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Vacquiers la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Evelyne Balzamo,
- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique,
- et les observations de Me Lafforgue, représentant la commune de Vacquiers, et de Me Terrasse, représentant Mme A....
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... est propriétaire d'un terrain d'une surface de 5 072 mètres carrés, cadastré section AE n° 170 et 173, situé chemin des Sudres à Vacquiers et classé en zone agricole du plan local d'urbanisme de cette commune. Le 6 mars 2017, elle a déposé une demande de permis de construire une habitation individuelle sur ce terrain afin de lui permettre d'être présente en permanence à proximité du bâtiment d'élevage existant destiné à abriter les ovins, caprins et équidés de son exploitation agricole. Par arrêté du 18 octobre 2017, le maire de Vacquiers a refusé le permis de construire. La commune de Vacquiers relève appel du jugement du 13 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté de refus de permis de construire et a enjoint au maire de délivrer à Mme A... le permis de construire sollicité.
2. Aux termes de l'article L. 600-4-1du code de l'urbanisme : " Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier ".
3. Pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement par lequel un tribunal administratif a prononcé l'annulation d'un acte intervenu en matière d'urbanisme en retenant plusieurs moyens, de se prononcer sur le bien-fondé de tous les moyens d'annulation retenus au soutien de leur décision par les premiers juges et d'apprécier si l'un au moins de ces moyens justifie la solution d'annulation ; dans ce cas, le juge d'appel n'a pas à examiner les autres moyens de première instance ; dans le cas où il estime en revanche qu'aucun des moyens retenus par le tribunal administratif n'est fondé, le juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif des autres moyens de première instance, examine ces moyens ; il lui appartient de les écarter si aucun d'entre eux n'est fondé et, à l'inverse, de se prononcer, si un ou plusieurs d'entre eux lui paraissent fondés, sur l'ensemble de ceux qu'il estime de nature à confirmer, par d'autres motifs, l'annulation prononcée par les premiers juges.
4. Pour annuler l'arrêté du maire de Vacquiers du 18 octobre 2017, le tribunal administratif de Toulouse s'est fondé sur les moyens tirés de l'insuffisante motivation de cette décision, des erreurs de droit commises par le maire en se fondant d'une part, sur l'absence de réseau d'assainissement collectif alors que le syndicat compétent en matière d'assainissement avait émis un avis conforme à l'installation d'un dispositif d'assainissement non collectif, d'autre part, sur la méconnaissance des prescriptions du plan de prévention des risques sécheresse applicable et enfin, de l'erreur manifeste d'appréciation entachant la décision de refus au regard des dispositions de l'article R. 151-23 du code de l'urbanisme et de l'article A2 du règlement du PLU de la commune compte tenu des caractéristiques du projet de Mme A....
5. En premier lieu, aux termes de l'article R. 424-5 du code de l'urbanisme : " En cas d'autorisation ou de non-opposition à déclaration préalable, la décision mentionne la date d'affichage en mairie ou la date de publication par voie électronique de l'avis de dépôt prévu à l'article R. 423-6. Si la décision comporte rejet de la demande, si elle est assortie de prescriptions ou s'il s'agit d'un sursis à statuer, elle doit être motivée. Il en est de même lorsqu'une dérogation ou une adaptation mineure est accordée. ".
6. L'arrêté en litige refusant l'autorisation de construire sollicitée vise le code de l'urbanisme ainsi que le plan local d'urbanisme de la commune de Vacquiers ; cette décision précise que le terrain d'assiette du projet est situé en zone agricole du PLU de la commune dans laquelle seules sont autorisées les constructions à usage d'habitation sous réserve qu'elles soient liées et utiles à l'exploitation agricoles et qu'elles soient implantées dans un rayon de 50 mètres des bâtiments d'exploitation. Elle ajoute que les éléments du dossier ne justifient pas la construction d'une habitation directement liée et utile à un bâtiment d'élevage, qu'au regard des conditions de l'activité agricole projetée, de sa faible ampleur et de sa vocation pédagogique, il n'est pas démontré la nécessité d'une présence rapprochée et permanente sur place de l'exploitant, que le bâtiment d'élevage et le mobil-home sont inoccupés et que l'absence d'animaux sur place démontre l'absence d'activité agricole en cours. Contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif, cette décision précise, de manière suffisamment intelligible, les motifs de droit et de fait qui fondent le refus d'autorisation de construire opposé. C'est par suite à tort que le tribunal a retenu le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté du 18 octobre 2017.
7. En deuxième lieu, si la décision de refus de permis de construire vise le plan de prévention des risques sécheresse de la commune et précise que le terrain est situé dans son périmètre et n'est pas desservi par le réseau d'assainissement collectif, ces éléments ne viennent au soutien d'aucun des motifs de refus opposés dans l'arrêté en litige. Par suite, c'est à tort que le tribunal administratif a considéré que le maire de Vacquiers avait entaché son arrêté d'erreurs de droit en retenant de tels motifs au soutien de sa décision.
8. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 151-23 du code de l'urbanisme : " Peuvent être autorisées, en zone A : 1° Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole ou au stockage et à l'entretien de matériel agricole par les coopératives d'utilisation de matériel agricole agréées au titre de l'article L. 525-1 du code rural et de la pêche maritime; 2° Les constructions, installations, extensions ou annexes aux bâtiments d'habitation, changements de destination et aménagements prévus par les articles L. 151-11, L. 151-12 et L. 151-13, dans les conditions fixées par ceux-ci. ". L'article A2 du règlement du PLU de Vacquiers prévoit que sont autorisées en zone agricole : " 1. Les constructions à usage d'habitation sous réserve qu'elles soient liées et utiles à l'exploitation agricole et qu'elles soient implantées dans un rayon de 50 mètres des bâtiments d'exploitation ".
9. Il ressort des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas contesté, que Mme A... possède depuis 2004 un troupeau d'ovins et de caprins d'environ 70 animaux. Elle dispose à cette fin depuis 2014 de 23,98 hectares de terrains agricoles dont 8 hectares se situent à Vacquiers, commune où elle s'est installée en 2006. Les parcelles lui appartenant, cadastrées section AE n° 170 et 173 situées chemin des Sudres à Vacquiers, sont classées depuis 2007 en zone agricole par le PLU communal et comportent un bâtiment d'élevage destiné à abriter ses animaux ainsi qu'il ressort des photographies produites par la commune. La commune soutient que Mme A... ne justifie pas de la réalité de son exploitation agricole sur les terrains d'assiette de son projet de construction d'habitation ni en conséquence de la nécessité d'une telle habitation. Il ressort cependant des pièces du dossier que Mme A... qui avait installé sans autorisation une caravane, un mobil-home et construit sans permis le bâtiment destiné à abriter ses animaux en 2007, a ensuite sollicité une autorisation en vue de régulariser ce bâtiment agricole que la commune de Vacquiers a d'abord refusé de lui délivrer, avant de la lui accorder par arrêté du 29 avril 2015, en exécution d'une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse. La commune s'est également opposée au raccordement de ses parcelles aux réseaux d'eau et d'électricité ce qui a conduit Mme A... à louer des bâtiments d'exploitation agricole desservis en eau et électricité situés dans une commune voisine pour y abriter ses animaux dans l'attente de l'obtention des autorisations nécessaires à la mise en œuvre de son projet. Il ressort de l'ensemble de ces éléments et des pièces du dossier que Mme A... justifie depuis 2014 de la réalité de son activité agricole d'élevage d'ovins et de caprins destinés à la reproduction, activité justifiant la présence rapprochée de l'exploitant des bâtiments d'élevage, ainsi que de la réalité de son projet d'installation du siège de son exploitation sur ses parcelles à vocation agricole situées chemin des Sudres. Par suite, et alors qu'aucune disposition législative ou réglementaire ni d'ailleurs celles du règlement du PLU de Vacquiers n'imposent la préexistence de l'activité agricole sur les parcelles classées en zone A, avant l'autorisation de construire une habitation liée et utile à l'exploitation agricole c'est à juste titre que le tribunal administratif a considéré qu'en opposant un tel motif de refus le maire de Vacquiers avait entaché son arrêté d'une erreur d'appréciation. Le moyen ainsi retenu était de nature à lui seul à justifier l'annulation de l'arrêté en litige prononcée par le jugement dont la commune relève appel.
10. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Vacquiers n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 18 octobre 2017 par lequel le maire a refusé de délivrer le permis de construire sollicité par Mme A... et lui a enjoint de délivrer cette autorisation.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de Mme A... qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Vacquiers le versement d'une somme de 1 500 euros à Mme A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Vacquiers est rejetée.
Article 2 : La commune de Vacquiers versera à Mme A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Vacquiers.
Délibéré après l'audience du 23 novembre 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Evelyne Balzamo, présidente,
M. Dominique Ferrari, président-assesseur,
M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2021.
Le président-assesseur,
Dominique FerrariLa présidente-rapporteure,
Evelyne Balzamo Le greffier,
Christophe Pelletier
La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
2
N° 19BX02911
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 18 octobre 2017 par lequel le maire de la commune de Vacquiers a refusé de lui délivrer un permis de construire un bâtiment à usage d'habitation.
Par un jugement n° 1705902 du 13 mai 2019, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté et enjoint au maire de Vacquiers de délivrer à Mme A... le permis de construire sollicité dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 11 juillet 2019 et 15 juin 2021, la commune de Vacquiers, représentée par la SELARL d'avocats Noray-Espeig, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 13 mai 2019 du tribunal administratif de Toulouse ;
2°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal le refus de permis de construire n'est pas motivé par la méconnaissance du plan de prévention des risques sécheresse ni sur le défaut d'assainissement mais sur le seul motif tiré de la méconnaissance de l'article A2 du règlement de la zone A du plan local d'urbanisme (PLU) ; l'arrêté reproduit cet article et précise suffisamment les éléments de fait relatifs à l'absence d'absence d'activité agricole permettant à la pétitionnaire de comprendre les raisons du rejet de sa demande ; l'arrêté est donc suffisamment motivé en droit et en fait conformément aux articles R 424-5 et A 424-4 du code de l'urbanisme ;
- à supposer la décision de refus insuffisamment motivée, le moyen était inopérant compte tenu de la compétence liée du maire pour refuser le permis de construire sollicité dès lors que cette décision résultait d'un simple constat de l'absence d'exploitation agricole sur la parcelle sans qu'il y ait lieu à une appréciation des faits ;
- l'arrêté qui n'est pas fondé sur l'impossibilité d'assurer l'assainissement du terrain ni sur la violation du plan de prévention des risques sécheresse n'est donc pas entaché d'erreur de droit à ces titres ;
- l'arrêté de refus de permis de construire n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que sont interdites en zone agricole du PLU les constructions d'habitations non liées et utiles à l'exploitation agricole et que l'exploitation agricole de Mme A..., dont la réalité n'est pas contestée, ne parait pas viable compte tenu de son implantation, de la retraite prochaine de l'intéressée et de son fort endettement ; le tribunal n'a pas pris en compte l'absence de pérennité de cette exploitation ; Mme A... a en outre cessé son activité sur les terrains en cause depuis près de 3 ans et s'est installée dans une ferme située dans une autre commune dont la superficie de 1,5 hectare correspond à son activité d'élevage ce qui n'est pas le cas des terrains en cause d'une surface limitée à 5 070 m² ; elle a conclu un bail rural de 9 ans qui prouve l'installation définitive de son siège d'exploitation à Villematier ; la construction d'une habitation ne peut précéder celles des bâtiments d'activité agricole qui la justifie ce qui serait le cas en l'espèce, aucune activité agricole n'étant exercée sur les parcelles A 173 ET 170 situées à Vacquiers ; aucun élément ne justifie en outre au regard des caractéristiques de l'exploitation envisagée, de peu d'importance, la création d'une habitation à proximité ;
- la décision de refus n'est entachée d'aucun détournement de pouvoir qui résulte de la seule application de la réglementation ; Mme A... n'a d'ailleurs pas contesté les précédentes décisions de refus opposées en 2008 alors qu'elle avait construit sa bergerie sans autorisation ; la commune a d'ailleurs délivré le permis de construire la bergerie en exécution de l'ordonnance du juge des référés du 15 avril 2015 mais l'intéressée a alors quitté Vacquiers pour s'installer dans une autre commune où elle exerce son activité d'élevage ; le permis de construire la bergerie est devenu caduc compte tenu de l'interruption des travaux depuis plus de 3 ans constatée par huissier.
Par mémoire en défense, enregistré le 13 mai 2021, Mme A..., représentée par Me Terrasse, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune de Vacquiers la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Evelyne Balzamo,
- les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique,
- et les observations de Me Lafforgue, représentant la commune de Vacquiers, et de Me Terrasse, représentant Mme A....
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... est propriétaire d'un terrain d'une surface de 5 072 mètres carrés, cadastré section AE n° 170 et 173, situé chemin des Sudres à Vacquiers et classé en zone agricole du plan local d'urbanisme de cette commune. Le 6 mars 2017, elle a déposé une demande de permis de construire une habitation individuelle sur ce terrain afin de lui permettre d'être présente en permanence à proximité du bâtiment d'élevage existant destiné à abriter les ovins, caprins et équidés de son exploitation agricole. Par arrêté du 18 octobre 2017, le maire de Vacquiers a refusé le permis de construire. La commune de Vacquiers relève appel du jugement du 13 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté de refus de permis de construire et a enjoint au maire de délivrer à Mme A... le permis de construire sollicité.
2. Aux termes de l'article L. 600-4-1du code de l'urbanisme : " Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier ".
3. Pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement par lequel un tribunal administratif a prononcé l'annulation d'un acte intervenu en matière d'urbanisme en retenant plusieurs moyens, de se prononcer sur le bien-fondé de tous les moyens d'annulation retenus au soutien de leur décision par les premiers juges et d'apprécier si l'un au moins de ces moyens justifie la solution d'annulation ; dans ce cas, le juge d'appel n'a pas à examiner les autres moyens de première instance ; dans le cas où il estime en revanche qu'aucun des moyens retenus par le tribunal administratif n'est fondé, le juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif des autres moyens de première instance, examine ces moyens ; il lui appartient de les écarter si aucun d'entre eux n'est fondé et, à l'inverse, de se prononcer, si un ou plusieurs d'entre eux lui paraissent fondés, sur l'ensemble de ceux qu'il estime de nature à confirmer, par d'autres motifs, l'annulation prononcée par les premiers juges.
4. Pour annuler l'arrêté du maire de Vacquiers du 18 octobre 2017, le tribunal administratif de Toulouse s'est fondé sur les moyens tirés de l'insuffisante motivation de cette décision, des erreurs de droit commises par le maire en se fondant d'une part, sur l'absence de réseau d'assainissement collectif alors que le syndicat compétent en matière d'assainissement avait émis un avis conforme à l'installation d'un dispositif d'assainissement non collectif, d'autre part, sur la méconnaissance des prescriptions du plan de prévention des risques sécheresse applicable et enfin, de l'erreur manifeste d'appréciation entachant la décision de refus au regard des dispositions de l'article R. 151-23 du code de l'urbanisme et de l'article A2 du règlement du PLU de la commune compte tenu des caractéristiques du projet de Mme A....
5. En premier lieu, aux termes de l'article R. 424-5 du code de l'urbanisme : " En cas d'autorisation ou de non-opposition à déclaration préalable, la décision mentionne la date d'affichage en mairie ou la date de publication par voie électronique de l'avis de dépôt prévu à l'article R. 423-6. Si la décision comporte rejet de la demande, si elle est assortie de prescriptions ou s'il s'agit d'un sursis à statuer, elle doit être motivée. Il en est de même lorsqu'une dérogation ou une adaptation mineure est accordée. ".
6. L'arrêté en litige refusant l'autorisation de construire sollicitée vise le code de l'urbanisme ainsi que le plan local d'urbanisme de la commune de Vacquiers ; cette décision précise que le terrain d'assiette du projet est situé en zone agricole du PLU de la commune dans laquelle seules sont autorisées les constructions à usage d'habitation sous réserve qu'elles soient liées et utiles à l'exploitation agricoles et qu'elles soient implantées dans un rayon de 50 mètres des bâtiments d'exploitation. Elle ajoute que les éléments du dossier ne justifient pas la construction d'une habitation directement liée et utile à un bâtiment d'élevage, qu'au regard des conditions de l'activité agricole projetée, de sa faible ampleur et de sa vocation pédagogique, il n'est pas démontré la nécessité d'une présence rapprochée et permanente sur place de l'exploitant, que le bâtiment d'élevage et le mobil-home sont inoccupés et que l'absence d'animaux sur place démontre l'absence d'activité agricole en cours. Contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif, cette décision précise, de manière suffisamment intelligible, les motifs de droit et de fait qui fondent le refus d'autorisation de construire opposé. C'est par suite à tort que le tribunal a retenu le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté du 18 octobre 2017.
7. En deuxième lieu, si la décision de refus de permis de construire vise le plan de prévention des risques sécheresse de la commune et précise que le terrain est situé dans son périmètre et n'est pas desservi par le réseau d'assainissement collectif, ces éléments ne viennent au soutien d'aucun des motifs de refus opposés dans l'arrêté en litige. Par suite, c'est à tort que le tribunal administratif a considéré que le maire de Vacquiers avait entaché son arrêté d'erreurs de droit en retenant de tels motifs au soutien de sa décision.
8. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 151-23 du code de l'urbanisme : " Peuvent être autorisées, en zone A : 1° Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole ou au stockage et à l'entretien de matériel agricole par les coopératives d'utilisation de matériel agricole agréées au titre de l'article L. 525-1 du code rural et de la pêche maritime; 2° Les constructions, installations, extensions ou annexes aux bâtiments d'habitation, changements de destination et aménagements prévus par les articles L. 151-11, L. 151-12 et L. 151-13, dans les conditions fixées par ceux-ci. ". L'article A2 du règlement du PLU de Vacquiers prévoit que sont autorisées en zone agricole : " 1. Les constructions à usage d'habitation sous réserve qu'elles soient liées et utiles à l'exploitation agricole et qu'elles soient implantées dans un rayon de 50 mètres des bâtiments d'exploitation ".
9. Il ressort des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas contesté, que Mme A... possède depuis 2004 un troupeau d'ovins et de caprins d'environ 70 animaux. Elle dispose à cette fin depuis 2014 de 23,98 hectares de terrains agricoles dont 8 hectares se situent à Vacquiers, commune où elle s'est installée en 2006. Les parcelles lui appartenant, cadastrées section AE n° 170 et 173 situées chemin des Sudres à Vacquiers, sont classées depuis 2007 en zone agricole par le PLU communal et comportent un bâtiment d'élevage destiné à abriter ses animaux ainsi qu'il ressort des photographies produites par la commune. La commune soutient que Mme A... ne justifie pas de la réalité de son exploitation agricole sur les terrains d'assiette de son projet de construction d'habitation ni en conséquence de la nécessité d'une telle habitation. Il ressort cependant des pièces du dossier que Mme A... qui avait installé sans autorisation une caravane, un mobil-home et construit sans permis le bâtiment destiné à abriter ses animaux en 2007, a ensuite sollicité une autorisation en vue de régulariser ce bâtiment agricole que la commune de Vacquiers a d'abord refusé de lui délivrer, avant de la lui accorder par arrêté du 29 avril 2015, en exécution d'une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse. La commune s'est également opposée au raccordement de ses parcelles aux réseaux d'eau et d'électricité ce qui a conduit Mme A... à louer des bâtiments d'exploitation agricole desservis en eau et électricité situés dans une commune voisine pour y abriter ses animaux dans l'attente de l'obtention des autorisations nécessaires à la mise en œuvre de son projet. Il ressort de l'ensemble de ces éléments et des pièces du dossier que Mme A... justifie depuis 2014 de la réalité de son activité agricole d'élevage d'ovins et de caprins destinés à la reproduction, activité justifiant la présence rapprochée de l'exploitant des bâtiments d'élevage, ainsi que de la réalité de son projet d'installation du siège de son exploitation sur ses parcelles à vocation agricole situées chemin des Sudres. Par suite, et alors qu'aucune disposition législative ou réglementaire ni d'ailleurs celles du règlement du PLU de Vacquiers n'imposent la préexistence de l'activité agricole sur les parcelles classées en zone A, avant l'autorisation de construire une habitation liée et utile à l'exploitation agricole c'est à juste titre que le tribunal administratif a considéré qu'en opposant un tel motif de refus le maire de Vacquiers avait entaché son arrêté d'une erreur d'appréciation. Le moyen ainsi retenu était de nature à lui seul à justifier l'annulation de l'arrêté en litige prononcée par le jugement dont la commune relève appel.
10. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Vacquiers n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 18 octobre 2017 par lequel le maire a refusé de délivrer le permis de construire sollicité par Mme A... et lui a enjoint de délivrer cette autorisation.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de Mme A... qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Vacquiers le versement d'une somme de 1 500 euros à Mme A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Vacquiers est rejetée.
Article 2 : La commune de Vacquiers versera à Mme A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Vacquiers.
Délibéré après l'audience du 23 novembre 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Evelyne Balzamo, présidente,
M. Dominique Ferrari, président-assesseur,
M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2021.
Le président-assesseur,
Dominique FerrariLa présidente-rapporteure,
Evelyne Balzamo Le greffier,
Christophe Pelletier
La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX02911