Tribunal des Conflits, , 13/09/2021, C4226, Publié au recueil Lebon
Tribunal des Conflits, , 13/09/2021, C4226, Publié au recueil Lebon
Tribunal des Conflits -
- N° C4226
- Publié au recueil Lebon
Lecture du
lundi
13 septembre 2021
- Président
- M. Schwartz
- Rapporteur
- Mme Laurence Pécaut-Rivolier
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu, enregistrée à son secrétariat le 4 juin 2021, la lettre par laquelle la cour d'appel de Paris a transmis au Tribunal le dossier de la procédure opposant Maître Philippe Stepniewski à l'agent judiciaire de l'Etat et au ministère de l'intérieur devant la cour d'appel de Paris ;
Vu le déclinatoire de compétence, présenté le 21 février 2020 par le préfet de la région Ile de France, tendant à voir déclarer la juridiction de l'ordre judiciaire incompétente, par le motif que le litige est relatif aux conditions d'octroi de la protection fonctionnelle à un agent public et relève du juge administratif ;
Vu l'arrêt du 9 novembre 2020 par laquelle la cour d'appel de Paris a rejeté le déclinatoire et retenu sa compétence ;
Vu l'arrêté du 1er décembre 2020 par lequel le préfet de la région Ile-de-France a élevé le conflit ;
Vu le mémoire, enregistré le 16 juin 2021, présenté par le ministre de l'intérieur et l'agent judiciaire de l'Etat, qui conclut à la compétence du juge administratif ;
Vu le mémoire, enregistré le 16 juin 2021, présenté par le ministre de la justice, qui conclut à la compétence du juge judiciaire ;
Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal a été notifiée à Maître Stepniewski, qui n'a pas produit de mémoire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Laurence Pécaut-Rivolier, membre du Tribunal,
- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. A la suite du décès du lieutenant de police Franck B... dans l'exercice de ses fonctions, le 7 janvier 2015, le ministre de l'intérieur a, par décision du 20 février 2015, accordé à Mme A... B..., son épouse, et à ses deux enfants mineurs, le bénéfice de la protection fonctionnelle. Mme B... a mandaté Maître Philippe Stepniewski, avocat au barreau de Paris, pour l'assister dans sa constitution de partie civile au cours de la procédure d'information. Une convention d'honoraires a été signée le 28 juillet 2015 entre l'avocat de Mme B... et le ministre de l'intérieur
2. Après avoir acquitté plusieurs factures, le ministre de l'intérieur a refusé le paiement d'honoraires correspondant à trois factures du 22 juin 2016, 2 mars 2018 et 7 juin 2018 au motif de leur montant et de la nature des diligences effectuées. Maître Stepniewski a alors saisi le bâtonnier pour obtenir la fixation de ses honoraires à l'encontre du ministère de l'intérieur et de l'agence judiciaire du trésor. Le bâtonnier a dit la demande irrecevable. Saisie d'un recours contre cette décision, la cour d'appel de Paris a, le 9 novembre 2020, rejeté le déclinatoire de compétence déposé par le Préfet de la région Ile-de-France. Faisant application des dispositions de l'article 22 du décret n° 2015-233 du 27 février 2015 relatif au Tribunal des conflits et aux questions préjudicielles, le préfet a, par arrêté du 1er décembre 2020, pris un arrêté d'élévation de conflit.
3. Aux termes de l'article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction alors applicable : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions et conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, d'une protection organisée par la collectivité publique qui les emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire au fonctionnaire (...)/ La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté (...) ".
4. Dans le cadre du bénéfice de la protection fonctionnelle instaurée par les dispositions précitées de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 au bénéfice des agents publics, la collectivité publique peut, dans certaines conditions, ne prendre en charge qu'une partie des honoraires demandés par l'avocat de l'agent lorsque le nombre d'heures facturées ou déjà réglées apparaît manifestement excessif. Dans ce cas, le règlement du solde incombe à l'agent dans le cadre de ses relations avec son conseil.
5. La décision prise par l'administration de refuser le paiement de certaines factures présentées par l'avocat de l'agent public bénéficiaire de la protection, s'inscrit dans le cadre des relations entre la collectivité publique et son agent, l'administration n'étant ni cliente, ni bénéficiaire des prestations de l'avocat, ni substituée dans les droits de cet agent et ce alors même qu'elle aurait signé avec l'avocat une convention relative au montant des honoraires pris en charge. Il s'ensuit que la contestation par Maître Stepniewski du refus du ministre de l'intérieur de payer une partie de ses honoraires, qui est hors du champ des dispositions des articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat relatives au recours devant le bâtonnier en cas de différent sur le montant et le recouvrement des honoraires, relève de la compétence de la juridiction administrative.
6. Il résulte de ce qui précède que c'est dès lors à bon droit que le préfet de la région Ile-de-France a élevé le conflit.
D E C I D E :
--------------
Article 1 : L'arrêté de conflit pris le 2 décembre 2020 par le préfet de la région Ile-de-France est confirmé.
Article 2 : Sont déclarés nuls et non avenus la procédure engagée par Maître Stepniewski contre le ministre de l'intérieur devant la cour d'appel de Paris et l'arrêt de cette juridiction en date du du 9 novembre 2020.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Maître Stepniewski, à l'agent judiciaire de l'Etat, au préfet de la région Ile-de-France, au ministre de l'intérieur et au ministre de justice.
Vu le déclinatoire de compétence, présenté le 21 février 2020 par le préfet de la région Ile de France, tendant à voir déclarer la juridiction de l'ordre judiciaire incompétente, par le motif que le litige est relatif aux conditions d'octroi de la protection fonctionnelle à un agent public et relève du juge administratif ;
Vu l'arrêt du 9 novembre 2020 par laquelle la cour d'appel de Paris a rejeté le déclinatoire et retenu sa compétence ;
Vu l'arrêté du 1er décembre 2020 par lequel le préfet de la région Ile-de-France a élevé le conflit ;
Vu le mémoire, enregistré le 16 juin 2021, présenté par le ministre de l'intérieur et l'agent judiciaire de l'Etat, qui conclut à la compétence du juge administratif ;
Vu le mémoire, enregistré le 16 juin 2021, présenté par le ministre de la justice, qui conclut à la compétence du juge judiciaire ;
Vu les pièces desquelles il résulte que la saisine du Tribunal a été notifiée à Maître Stepniewski, qui n'a pas produit de mémoire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Laurence Pécaut-Rivolier, membre du Tribunal,
- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. A la suite du décès du lieutenant de police Franck B... dans l'exercice de ses fonctions, le 7 janvier 2015, le ministre de l'intérieur a, par décision du 20 février 2015, accordé à Mme A... B..., son épouse, et à ses deux enfants mineurs, le bénéfice de la protection fonctionnelle. Mme B... a mandaté Maître Philippe Stepniewski, avocat au barreau de Paris, pour l'assister dans sa constitution de partie civile au cours de la procédure d'information. Une convention d'honoraires a été signée le 28 juillet 2015 entre l'avocat de Mme B... et le ministre de l'intérieur
2. Après avoir acquitté plusieurs factures, le ministre de l'intérieur a refusé le paiement d'honoraires correspondant à trois factures du 22 juin 2016, 2 mars 2018 et 7 juin 2018 au motif de leur montant et de la nature des diligences effectuées. Maître Stepniewski a alors saisi le bâtonnier pour obtenir la fixation de ses honoraires à l'encontre du ministère de l'intérieur et de l'agence judiciaire du trésor. Le bâtonnier a dit la demande irrecevable. Saisie d'un recours contre cette décision, la cour d'appel de Paris a, le 9 novembre 2020, rejeté le déclinatoire de compétence déposé par le Préfet de la région Ile-de-France. Faisant application des dispositions de l'article 22 du décret n° 2015-233 du 27 février 2015 relatif au Tribunal des conflits et aux questions préjudicielles, le préfet a, par arrêté du 1er décembre 2020, pris un arrêté d'élévation de conflit.
3. Aux termes de l'article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction alors applicable : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions et conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, d'une protection organisée par la collectivité publique qui les emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire au fonctionnaire (...)/ La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté (...) ".
4. Dans le cadre du bénéfice de la protection fonctionnelle instaurée par les dispositions précitées de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 au bénéfice des agents publics, la collectivité publique peut, dans certaines conditions, ne prendre en charge qu'une partie des honoraires demandés par l'avocat de l'agent lorsque le nombre d'heures facturées ou déjà réglées apparaît manifestement excessif. Dans ce cas, le règlement du solde incombe à l'agent dans le cadre de ses relations avec son conseil.
5. La décision prise par l'administration de refuser le paiement de certaines factures présentées par l'avocat de l'agent public bénéficiaire de la protection, s'inscrit dans le cadre des relations entre la collectivité publique et son agent, l'administration n'étant ni cliente, ni bénéficiaire des prestations de l'avocat, ni substituée dans les droits de cet agent et ce alors même qu'elle aurait signé avec l'avocat une convention relative au montant des honoraires pris en charge. Il s'ensuit que la contestation par Maître Stepniewski du refus du ministre de l'intérieur de payer une partie de ses honoraires, qui est hors du champ des dispositions des articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat relatives au recours devant le bâtonnier en cas de différent sur le montant et le recouvrement des honoraires, relève de la compétence de la juridiction administrative.
6. Il résulte de ce qui précède que c'est dès lors à bon droit que le préfet de la région Ile-de-France a élevé le conflit.
D E C I D E :
--------------
Article 1 : L'arrêté de conflit pris le 2 décembre 2020 par le préfet de la région Ile-de-France est confirmé.
Article 2 : Sont déclarés nuls et non avenus la procédure engagée par Maître Stepniewski contre le ministre de l'intérieur devant la cour d'appel de Paris et l'arrêt de cette juridiction en date du du 9 novembre 2020.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Maître Stepniewski, à l'agent judiciaire de l'Etat, au préfet de la région Ile-de-France, au ministre de l'intérieur et au ministre de justice.