Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 10/06/2021, 431875
Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 10/06/2021, 431875
Conseil d'État - 10ème - 9ème chambres réunies
- N° 431875
- ECLI:FR:CECHR:2021:431875.20210610
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
jeudi
10 juin 2021
- Rapporteur
- Mme Christelle Thomas
- Avocat(s)
- SCP MARLANGE, DE LA BURGADE
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
M. B... A...-C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du directeur général des finances publiques en date du 30 mai 2016 rejetant son recours gracieux du 14 avril 2016 tendant au retrait d'informations le concernant dans l'arrêté du 8 juillet 2015 le nommant et titularisant dans le grade d'inspecteur des finances publiques tel que mis en ligne sur le portail des ministères économiques et financiers et d'enjoindre à l'administration de retirer les informations le concernant figurant dans cet arrêté. Par un jugement n° 1612597/5-2 du 30 novembre 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 18PA00415 du 24 avril 2019, la cour administrative d'appel de Paris, a rejeté l'appel formé par M. A...-C... contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés le 24 juin 2019 et le 18 septembre 2019au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...-C... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 ;
- le règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 ;
- la convention n° 108 du Conseil de l'Europe pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel du 28 janvier 1981 ;
- le code civil ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 63-280 du 19 mars 1963 ;
- le décret n° 95-979 du 25 août 1995 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Christelle Thomas, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Laurent Domingo, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de M. B... A...-C... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A...-C..., qui a été recruté à la direction générale des finances publiques le 1er septembre 2014 pour exercer les fonctions d'inspecteur des finances publiques en vertu d'un contrat d'engagement d'une durée d'un an, conclu sur le fondement du décret du 25 août 1995 relatif au recrutement des travailleurs handicapés dans la fonction publique, a été, à l'expiration de ce contrat, nommé et titularisé dans le grade correspondant à compter du 1er septembre 2015 par un arrêté en date du 8 juillet 2015 établissant la liste des agents titularisés dans le grade d'inspecteur des finances publiques sur le fondement de ce décret. Estimant que cet arrêté, qui a fait l'objet d'une publication au Bulletin officiel de la direction générale des finances publiques et a été mis en ligne sur le portail internet des ministères économiques et financiers, portait atteinte à sa vie privée, M. A...-C... a, par courrier du 18 décembre 2015, demandé la suppression de la mention de son nom et de sa date de naissance sur la version de l'arrêté mise en ligne. L'administration a rejeté sa demande par un courrier en date du 12 février 2016, de même que, par un courrier en date du 30 mai 2016, le recours gracieux formé par l'intéressé le 14 avril 2016 contre ce refus. Ce dernier se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 24 avril 2019 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son appel formé contre le jugement du 30 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus opposé par l'administration et à ce qu'il soit enjoint à cette dernière de retirer les informations le concernant figurant dans l'arrêté du 8 juillet 2015.
2. Aux termes de l'article 4 du règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016, on entend par " 1) " données à caractère personnel ", toute information se rapportant à une personne physique identifiée ou identifiable (ci-après dénommée "personne concernée") ; est réputée être une "personne physique identifiable" une personne physique qui peut être identifiée, directement ou indirectement, notamment par référence à un identifiant, tel qu'un nom, un numéro d'identification, des données de localisation, un identifiant en ligne, ou à un ou plusieurs éléments spécifiques propres à son identité physique, physiologique, génétique, psychique, économique, culturelle ou sociale ; 2) "traitement", toute opération ou tout ensemble d'opérations effectuées ou non à l'aide de procédés automatisés et appliquées à des données ou des ensembles de données à caractère personnel, telles que la collecte, l'enregistrement, l'organisation, la structuration, la conservation, l'adaptation ou la modification, l'extraction, la consultation, l'utilisation, la communication par transmission, la diffusion ou toute autre forme de mise à disposition, le rapprochement ou l'interconnexion, la limitation, l'effacement ou la destruction (...) "
3. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance des règles nationales et européennes applicables aux traitements de données à caractère personnel, la cour administrative d'appel a jugé que ni la publication par voie informatique d'un arrêté de nomination d'agents publics ne comportant que le nom des intéressés et l'indication du fondement juridique de leur nomination, ni la décision refusant de mettre un terme à cette publication, ne pouvaient être regardées comme relatives à un traitement de données à caractère personnel par voie informatique. En écartant l'application de ces règles, alors que la seule publication sur un site internet de données à caractère personnel suffit à les rendre applicables, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit.
4. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit être annulé.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
6. L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus de l'autorité compétente de procéder à la suppression d'une mention figurant dans un traitement de données réside dans l'obligation, que le juge peut prescrire d'office en vertu des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, pour cette autorité d'y procéder. Il en résulte que, lorsqu'il est saisi de conclusions aux fins d'annulation d'un tel refus, le juge de l'excès de pouvoir est conduit à apprécier sa légalité au regard des règles applicables et des circonstances prévalant à la date de sa décision.
7. D'une part, l'article 28 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat dispose que : " Les décisions portant nominations, promotions de grades et mises à la retraite doivent faire l'objet d'une publication suivant des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat ". Aux termes de l'article 1er du décret du 19 mars 1963 portant règlement d'administration publique et relatif à la publication des décisions concernant la situation individuelle des fonctionnaires : " La publication prévue à l'article 28 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat des décisions portant nominations, promotions de grades et mises à la retraite est faite au Journal officiel de la République française en ce qui concerne : (...) 2° Les fonctionnaires nommés par arrêté appartenant aux corps de catégorie A des administrations centrales de l'Etat ou des administrations assimilées ; 3° Les fonctionnaires nommés par arrêté appartenant à des corps de catégorie A des services déconcentrés ou des établissements publics de l'Etat et dont la liste est établie par arrêté conjoint du Premier ministre et du ministre intéressé ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " La publication au Journal officiel de la République française des décisions concernant les fonctionnaires non mentionnés à l'article précédent n'est pas obligatoire. / A défaut d'une telle insertion, la publication prévue à l'article 28 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat est valablement assurée en ce qui concerne ces fonctionnaires par tous autres procédés permettant de porter les décisions considérées à la connaissance des tiers intéressés, tels que l'insertion aux recueils ou bulletins publiés par les administrations ou les organisations professionnelles intéressées, l'affichage dans les locaux administratifs, la diffusion par voie de notes de service, l'insertion dans la presse locale ". En vertu de l'article 3 de ce même décret : " La publication d'une décision concernant un fonctionnaire consiste soit à la reproduire intégralement, soit à en donner un extrait mentionnant sa nature, ses auteurs, sa date et son objet ".
8. D'autre part, l'article 4 de la loi du 6 janvier 1978 impose que les données à caractère personnel qui font l'objet d'un traitement soient " adéquates, pertinentes et, au regard des finalités pour lesquelles elles sont traitées, limitées à ce qui est nécessaire ou, pour les traitements relevant des titres III et IV, non excessives ". Aux termes du I de l'article 6 de cette même loi : " Il est interdit de de traiter des données (...) concernant la santé " d'une personne. Son II prévoit que " les exceptions à l'interdiction mentionnée au I sont fixées dans les conditions prévues par le 2 de l'article 9 du règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 et par la présente loi ". Aux termes du g) du 2 de l'article 9 de ce règlement, l'interdiction ne s'applique pas si " le traitement est nécessaire pour des motifs d'intérêt public important, sur la base du droit de l'Union ou du droit d'un État membre qui doit être proportionné à l'objectif poursuivi, respecter l'essence du droit à la protection des données et prévoir des mesures appropriées et spécifiques pour la sauvegarde des droits fondamentaux et des intérêts de la personne concernée ".
9. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'arrêté du 8 juillet 2015 portant nomination, classement et titularisation de contractuels de catégorie A dans le grade d'inspecteur des finances publiques, qui a fait l'objet d'une publication au Bulletin officiel de la direction générale des finances publiques et a été mis en ligne sur le portail internet des ministères économiques et financiers, comporte le visa du décret du 25 août 1995 relatif au recrutement des travailleurs handicapés dans la fonction publique.
10. Si la mise en ligne d'une telle information révèle indirectement que les personnes recrutées à ce titre souffrent d'un handicap, elle ne donne directement aucune information sur la nature ou la gravité de ce handicap et ne saurait, par suite, être regardée comme procédant au traitement d'une donnée relative à la santé des personnes considérées. Toutefois, le maintien permanent sur le site internet du ministère de ces données personnelles excède ce qui est nécessaire au regard des finalités du traitement en cause, qui vise à garantir les droits des tiers et le respect du principe d'égal accès aux emplois publics énoncé à l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Il appartient ainsi à l'autorité compétente, saisie d'une demande en ce sens, une fois expiré le délai de recours contre un tel acte, de prendre des mesures de nature à limiter le traitement des données en cause à ce qui est nécessaire, en ne maintenant cette publication que sous la forme d'un extrait ne mentionnant pas le fondement juridique de l'arrêté de nomination. En l'espèce, à la date de la présente décision, le délai de recours est expiré et le maintien de la mise en ligne des informations révélant indirectement le handicap du requérant excède ce qui est nécessaire au regard des finalités du traitement.
11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de sa demande, que M. A...-C... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 30 mai 2016 du directeur général des finances publiques.
12. L'annulation de cette décision implique nécessairement que le ministre prenne toute mesure utile pour que la mention du fait que M. A...-C... a été recruté sur le fondement du décret du 25 août 1995 relatif au recrutement des travailleurs handicapés ne figure plus sur la version de l'arrêté du 8 juillet 2015 mise en ligne sur le site internet du ministère, dans un délai qu'il y a lieu de fixer à trois mois.
13. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. A...-C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt du 24 avril 2019 de la cour administrative d'appel de Paris et le jugement du 30 novembre 2017 du tribunal administratif de Paris sont annulés.
Article 2 : La décision du 30 mai 2016 du directeur général des finances publiques est annulée.
Article 3 : Il est enjoint au ministre de l'économie, des finances et de la relance de supprimer la mention que M. A...-C... a été recruté sur le fondement du décret du 25 août 1995 relatif au recrutement des travailleurs handicapés sur la version de l'arrêté du 8 juillet 2015 mise en ligne sur le site internet du ministère, dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision.
Article 4 : L'Etat versera la somme de 3 000 euros à M. A...-C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : la présente décision sera notifiée à M. B... A...-C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
ECLI:FR:CECHR:2021:431875.20210610
M. B... A...-C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du directeur général des finances publiques en date du 30 mai 2016 rejetant son recours gracieux du 14 avril 2016 tendant au retrait d'informations le concernant dans l'arrêté du 8 juillet 2015 le nommant et titularisant dans le grade d'inspecteur des finances publiques tel que mis en ligne sur le portail des ministères économiques et financiers et d'enjoindre à l'administration de retirer les informations le concernant figurant dans cet arrêté. Par un jugement n° 1612597/5-2 du 30 novembre 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 18PA00415 du 24 avril 2019, la cour administrative d'appel de Paris, a rejeté l'appel formé par M. A...-C... contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés le 24 juin 2019 et le 18 septembre 2019au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...-C... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 ;
- le règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 ;
- la convention n° 108 du Conseil de l'Europe pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel du 28 janvier 1981 ;
- le code civil ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 63-280 du 19 mars 1963 ;
- le décret n° 95-979 du 25 août 1995 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Christelle Thomas, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Laurent Domingo, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de M. B... A...-C... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A...-C..., qui a été recruté à la direction générale des finances publiques le 1er septembre 2014 pour exercer les fonctions d'inspecteur des finances publiques en vertu d'un contrat d'engagement d'une durée d'un an, conclu sur le fondement du décret du 25 août 1995 relatif au recrutement des travailleurs handicapés dans la fonction publique, a été, à l'expiration de ce contrat, nommé et titularisé dans le grade correspondant à compter du 1er septembre 2015 par un arrêté en date du 8 juillet 2015 établissant la liste des agents titularisés dans le grade d'inspecteur des finances publiques sur le fondement de ce décret. Estimant que cet arrêté, qui a fait l'objet d'une publication au Bulletin officiel de la direction générale des finances publiques et a été mis en ligne sur le portail internet des ministères économiques et financiers, portait atteinte à sa vie privée, M. A...-C... a, par courrier du 18 décembre 2015, demandé la suppression de la mention de son nom et de sa date de naissance sur la version de l'arrêté mise en ligne. L'administration a rejeté sa demande par un courrier en date du 12 février 2016, de même que, par un courrier en date du 30 mai 2016, le recours gracieux formé par l'intéressé le 14 avril 2016 contre ce refus. Ce dernier se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 24 avril 2019 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son appel formé contre le jugement du 30 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus opposé par l'administration et à ce qu'il soit enjoint à cette dernière de retirer les informations le concernant figurant dans l'arrêté du 8 juillet 2015.
2. Aux termes de l'article 4 du règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016, on entend par " 1) " données à caractère personnel ", toute information se rapportant à une personne physique identifiée ou identifiable (ci-après dénommée "personne concernée") ; est réputée être une "personne physique identifiable" une personne physique qui peut être identifiée, directement ou indirectement, notamment par référence à un identifiant, tel qu'un nom, un numéro d'identification, des données de localisation, un identifiant en ligne, ou à un ou plusieurs éléments spécifiques propres à son identité physique, physiologique, génétique, psychique, économique, culturelle ou sociale ; 2) "traitement", toute opération ou tout ensemble d'opérations effectuées ou non à l'aide de procédés automatisés et appliquées à des données ou des ensembles de données à caractère personnel, telles que la collecte, l'enregistrement, l'organisation, la structuration, la conservation, l'adaptation ou la modification, l'extraction, la consultation, l'utilisation, la communication par transmission, la diffusion ou toute autre forme de mise à disposition, le rapprochement ou l'interconnexion, la limitation, l'effacement ou la destruction (...) "
3. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance des règles nationales et européennes applicables aux traitements de données à caractère personnel, la cour administrative d'appel a jugé que ni la publication par voie informatique d'un arrêté de nomination d'agents publics ne comportant que le nom des intéressés et l'indication du fondement juridique de leur nomination, ni la décision refusant de mettre un terme à cette publication, ne pouvaient être regardées comme relatives à un traitement de données à caractère personnel par voie informatique. En écartant l'application de ces règles, alors que la seule publication sur un site internet de données à caractère personnel suffit à les rendre applicables, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit.
4. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit être annulé.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
6. L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus de l'autorité compétente de procéder à la suppression d'une mention figurant dans un traitement de données réside dans l'obligation, que le juge peut prescrire d'office en vertu des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, pour cette autorité d'y procéder. Il en résulte que, lorsqu'il est saisi de conclusions aux fins d'annulation d'un tel refus, le juge de l'excès de pouvoir est conduit à apprécier sa légalité au regard des règles applicables et des circonstances prévalant à la date de sa décision.
7. D'une part, l'article 28 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat dispose que : " Les décisions portant nominations, promotions de grades et mises à la retraite doivent faire l'objet d'une publication suivant des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat ". Aux termes de l'article 1er du décret du 19 mars 1963 portant règlement d'administration publique et relatif à la publication des décisions concernant la situation individuelle des fonctionnaires : " La publication prévue à l'article 28 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat des décisions portant nominations, promotions de grades et mises à la retraite est faite au Journal officiel de la République française en ce qui concerne : (...) 2° Les fonctionnaires nommés par arrêté appartenant aux corps de catégorie A des administrations centrales de l'Etat ou des administrations assimilées ; 3° Les fonctionnaires nommés par arrêté appartenant à des corps de catégorie A des services déconcentrés ou des établissements publics de l'Etat et dont la liste est établie par arrêté conjoint du Premier ministre et du ministre intéressé ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " La publication au Journal officiel de la République française des décisions concernant les fonctionnaires non mentionnés à l'article précédent n'est pas obligatoire. / A défaut d'une telle insertion, la publication prévue à l'article 28 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat est valablement assurée en ce qui concerne ces fonctionnaires par tous autres procédés permettant de porter les décisions considérées à la connaissance des tiers intéressés, tels que l'insertion aux recueils ou bulletins publiés par les administrations ou les organisations professionnelles intéressées, l'affichage dans les locaux administratifs, la diffusion par voie de notes de service, l'insertion dans la presse locale ". En vertu de l'article 3 de ce même décret : " La publication d'une décision concernant un fonctionnaire consiste soit à la reproduire intégralement, soit à en donner un extrait mentionnant sa nature, ses auteurs, sa date et son objet ".
8. D'autre part, l'article 4 de la loi du 6 janvier 1978 impose que les données à caractère personnel qui font l'objet d'un traitement soient " adéquates, pertinentes et, au regard des finalités pour lesquelles elles sont traitées, limitées à ce qui est nécessaire ou, pour les traitements relevant des titres III et IV, non excessives ". Aux termes du I de l'article 6 de cette même loi : " Il est interdit de de traiter des données (...) concernant la santé " d'une personne. Son II prévoit que " les exceptions à l'interdiction mentionnée au I sont fixées dans les conditions prévues par le 2 de l'article 9 du règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 et par la présente loi ". Aux termes du g) du 2 de l'article 9 de ce règlement, l'interdiction ne s'applique pas si " le traitement est nécessaire pour des motifs d'intérêt public important, sur la base du droit de l'Union ou du droit d'un État membre qui doit être proportionné à l'objectif poursuivi, respecter l'essence du droit à la protection des données et prévoir des mesures appropriées et spécifiques pour la sauvegarde des droits fondamentaux et des intérêts de la personne concernée ".
9. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'arrêté du 8 juillet 2015 portant nomination, classement et titularisation de contractuels de catégorie A dans le grade d'inspecteur des finances publiques, qui a fait l'objet d'une publication au Bulletin officiel de la direction générale des finances publiques et a été mis en ligne sur le portail internet des ministères économiques et financiers, comporte le visa du décret du 25 août 1995 relatif au recrutement des travailleurs handicapés dans la fonction publique.
10. Si la mise en ligne d'une telle information révèle indirectement que les personnes recrutées à ce titre souffrent d'un handicap, elle ne donne directement aucune information sur la nature ou la gravité de ce handicap et ne saurait, par suite, être regardée comme procédant au traitement d'une donnée relative à la santé des personnes considérées. Toutefois, le maintien permanent sur le site internet du ministère de ces données personnelles excède ce qui est nécessaire au regard des finalités du traitement en cause, qui vise à garantir les droits des tiers et le respect du principe d'égal accès aux emplois publics énoncé à l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Il appartient ainsi à l'autorité compétente, saisie d'une demande en ce sens, une fois expiré le délai de recours contre un tel acte, de prendre des mesures de nature à limiter le traitement des données en cause à ce qui est nécessaire, en ne maintenant cette publication que sous la forme d'un extrait ne mentionnant pas le fondement juridique de l'arrêté de nomination. En l'espèce, à la date de la présente décision, le délai de recours est expiré et le maintien de la mise en ligne des informations révélant indirectement le handicap du requérant excède ce qui est nécessaire au regard des finalités du traitement.
11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de sa demande, que M. A...-C... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 30 mai 2016 du directeur général des finances publiques.
12. L'annulation de cette décision implique nécessairement que le ministre prenne toute mesure utile pour que la mention du fait que M. A...-C... a été recruté sur le fondement du décret du 25 août 1995 relatif au recrutement des travailleurs handicapés ne figure plus sur la version de l'arrêté du 8 juillet 2015 mise en ligne sur le site internet du ministère, dans un délai qu'il y a lieu de fixer à trois mois.
13. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. A...-C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 24 avril 2019 de la cour administrative d'appel de Paris et le jugement du 30 novembre 2017 du tribunal administratif de Paris sont annulés.
Article 2 : La décision du 30 mai 2016 du directeur général des finances publiques est annulée.
Article 3 : Il est enjoint au ministre de l'économie, des finances et de la relance de supprimer la mention que M. A...-C... a été recruté sur le fondement du décret du 25 août 1995 relatif au recrutement des travailleurs handicapés sur la version de l'arrêté du 8 juillet 2015 mise en ligne sur le site internet du ministère, dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision.
Article 4 : L'Etat versera la somme de 3 000 euros à M. A...-C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : la présente décision sera notifiée à M. B... A...-C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.