CAA de BORDEAUX, 1ère chambre, 31/05/2021, 20BX01900, Inédit au recueil Lebon
CAA de BORDEAUX, 1ère chambre, 31/05/2021, 20BX01900, Inédit au recueil Lebon
CAA de BORDEAUX - 1ère chambre
- N° 20BX01900
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
lundi
31 mai 2021
- Président
- Mme HARDY
- Rapporteur
- M. Didier SALVI
- Avocat(s)
- PATHER
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... D... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 25 novembre 2019 par lequel le préfet des Landes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans.
Par une ordonnance n° 2000014 du 18 février 2020, la présidente du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 15 juin 2020, M. D..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance de la présidente du tribunal administratif de Pau du 18 février 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 25 novembre 2019 par lequel le préfet des Landes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, subsidiairement de réexaminer sa demande dans un délai de deux mois et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la notification par voie postale de l'arrêté litigieux n'est pas de nature à faire courir le délai de recours contentieux de 48 heures prévu par les dispositions du II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de sorte que la présidente du tribunal a, à tort, rejeté sa demande comme tardive et, par suite, manifestement irrecevable ;
s'agissant du refus de titre de séjour :
- la décision litigieuse est entachée d'un vice d'incompétence ;
- elle est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- elle est entachée d'un vice de procédure, faute pour le préfet d'avoir saisi la commission du titre de séjour en méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste dans son appréciation ses conséquences sur sa situation personnelle ;
s'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :
- la décision litigieuse est entachée d'un vice d'incompétence et d'un défaut de motivation ;
- l'illégalité du refus de titre de séjour prive de base légale l'obligation de quitter le territoire français ;
- elle méconnaît les dispositions du 2° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors que le préfet a commis une erreur de droit en ne retenant pas au titre de la résidence habituelle ses périodes d'incarcération ;
- elle méconnaît les dispositions du 4° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors que c'est à tort que le préfet considère que la période d'incarcération ne permet pas d'établir une résidence régulière de plus de dix ans ;
- le préfet a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a commis une erreur de fait et une erreur de droit en fondant sa décision sur les dispositions du 4° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
s'agissant du refus de lui accorder un délai de départ volontaire :
- la décision litigieuse est entachée d'un vice d'incompétence et d'un défaut de motivation ;
- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
s'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :
- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre et de l'obligation de quitter le territoire français ;
s'agissant de l'interdiction de retour sur le territoire français :
- la décision litigieuse est entachée d'un vice d'incompétence ;
- elle est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français la prive de base légale ;
- l'interdiction de retour d'une durée de trois ans est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 janvier 2021, le préfet des Landes conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision de la présidente de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 20 août 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020, et notamment son article 5 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. C... B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... ressortissant marocain né le 6 juillet 1991, a été mis en possession d'un document de circulation pour mineur étranger pour la période allant du 13 juillet 2006 au 22 juillet 2008. Il a ensuite bénéficié d'un titre de séjour pour la période allant du 8 juillet 2009 au 7 juillet 2011 puis du 31 mai 2012 au 30 mai 2014. Écroué le 4 mars 2014 puis condamné le 9 mars 2014 à six ans d'emprisonnement pour viol commis le 9 janvier 2011, il est sorti de détention le 9 décembre 2017. Saisi par M. D... d'une demande de titre de séjour le 10 août 2017, renouvelée le 4 novembre 2019 après une nouvelle incarcération du 8 juillet 2018 au 2 novembre 2019, le préfet des Landes a, par un arrêté du 25 novembre 2019, refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de 3 ans. M. D... relève appel de l'ordonnance du 18 février 2020 par laquelle la présidente du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité de l'ordonnance :
2. Aux termes du II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire sans délai peut, dans les quarante-huit heures suivant sa notification par voie administrative, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision refusant un délai de départ volontaire, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. ". Aux termes du II de l'article R. 776-2 du code de justice administrative : " Conformément aux dispositions du II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification par voie administrative d'une obligation de quitter sans délai le territoire français fait courir un délai de quarante-huit heures pour contester cette obligation et les décisions relatives au séjour, à la suppression du délai de départ volontaire, au pays de renvoi et à l'interdiction de retour ou à l'interdiction de circulation notifiées simultanément. ".
3. Il résulte des dispositions citées ci-dessus que les décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire peuvent faire l'objet d'un recours devant la juridiction administrative dans un délai de quarante-huit heures à compter de leur notification par voie administrative. Dès lors, la notification d'une telle obligation de quitter le territoire français à l'intéressé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, quand bien même elle comporte l'indication de ce délai de recours contentieux, n'est pas de nature à le faire courir.
4. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du préfet des Landes du 25 novembre 2019 portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sans délai a été notifié à M. D... le 3 décembre 2019 par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Une telle notification n'était ainsi pas de nature à faire courir le délai de recours contentieux d'une durée de 48 heures imparti par les dispositions citées au point 2 ci-dessus. Par suite, M. D... est fondé à soutenir qu'en rejetant pour tardiveté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté, qui avait été enregistrée au greffe du tribunal le 3 janvier 2020, la présidente du tribunal administratif de Pau a entaché son ordonnance d'irrégularité.
5. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. D... devant le tribunal administratif de Pau.
Sur la légalité de l'arrêté pris dans son ensemble :
6. Par un arrêté du 6 septembre 2019, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le 11 septembre suivant, le préfet des Landes a donné délégation à M. Grosse, secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer notamment les décisions prévues aux articles L. 511-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté litigieux doit être écarté.
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
7. En premier lieu, la décision litigieuse vise les conventions internationales et les dispositions légales dont il est fait application, comporte des éléments de faits relatifs à la situation de M. D... et expose avec précision les raisons pour lesquelles le préfet a refusé de lui délivrer un titre de séjour. Ces indications étaient suffisantes pour permettre à l'intéressé de comprendre et de contester la mesure prise à son encontre. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision doit être écarté. Il ne ressort pas davantage des termes mêmes de l'arrêté en litige que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. D....
8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) ".
9. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. D... aurait saisi le préfet d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions citées ci-dessus. Ainsi, M. D... ne peut utilement invoquer, à l'encontre de la décision refusant de régulariser sa situation, le défaut de consultation, pour avis, de la commission mentionnée à l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors même que le préfet a usé de son pouvoir discrétionnaire pour examiner d'office si l'intéressé remplissait les conditions de l'admission exceptionnelle au séjour. Au surplus, M. D... a été condamné à de nombreuses reprises, en particulier pour des faits de vols, recels de biens provenant d'un vol ainsi que pour viol et, en dernier lieu, le 9 juillet 2018 par le tribunal correctionnel de Pau notamment pour des faits de violence aggravée par deux circonstances en récidive, de sorte que, eu égard à la nature, au caractère répété et à la gravité de ces faits, la présence en France de M. D... constitue une menace pour l'ordre public et qu'ainsi, il ne pouvait prétendre à une admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions citées ci-dessus, de sorte qu'en l'espèce et en tout état de cause, le défaut de consultation de la commission n'a pas fait perdre une garantie à l'intéressé et n'a pu influencer le sens de la décision.
10. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit (...) 7° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".
11. Il ressort des pièces du dossier que si M. D... est entré en France alors qu'il était mineur et que son père ainsi qu'un frère et une soeur sont titulaires d'une carte de résident, il est célibataire âgé de 28 ans à la date de la décision litigieuse. S'il soutient qu'il est le père d'une enfant française née en 2014, il n'apporte à l'instance ni d'élément justifiant de sa reconnaissance de cette enfant, ni d'élément susceptible de justifier qu'il participerait effectivement à son entretien et son éducation, ni même qu'il entretiendrait une relation affective importante avec elle. Par ailleurs, et comme il a déjà été dit, M. D... a été condamné à de nombreuses reprises pour des faits rappelés au point 9 ci-dessus, de sorte que sa présence constitue une menace pour l'ordre public et qu'à tout le moins, il ne peut se prévaloir d'une insertion particulièrement réussie dans la société française. Dans ces conditions, le préfet n'a pas, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, et n'a ainsi méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions citées ci-dessus du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. D....
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
12. La motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé, ainsi qu'il a été dit au point 7 ci-dessus, et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision doit être écarté.
13. Il résulte de ce qui a été dit aux points 7 à 11 que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait privée de base légale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour doit être écarté.
14. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; 4° Si l'étranger n'a pas demandé le renouvellement de son titre de séjour temporaire ou pluriannuel et s'est maintenu sur le territoire français à l'expiration de ce titre ; (...) 7° Si le comportement de l'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois constitue une menace pour l'ordre public (...) ".
15. Il ressort des termes mêmes de l'arrêté litigieux que le préfet des Landes a prononcé une obligation de quitter le territoire français à l'encontre de M. D... après avoir refusé de l'admettre au séjour. Si, le préfet après avoir estimé que M. D... ne remplissait pas les conditions justifiant la délivrance d'un titre de séjour, a mentionné que l'intéressé entrait dans le champ d'application des dispositions des 4° et 7° du I de l'article L. 511-1 et non dans celui des 3° et 7° du I de ce même article, cette mention erronée, qui est purement matérielle, est sans incidence sur la légalité de la décision litigieuse. Au surplus, il ressort des pièces du dossier que M. D..., qui entrait dans le champ d'application du 3° du I de l'article L. 511-1, entrait également dans celui du 7° du I du même article mentionné par le préfet. Par suite, les moyens tirés d'une erreur de fait et d'une erreur de droit doivent être écartés.
16. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 2° L'étranger qui justifie par tous moyens résider habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans ; (...) 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention " étudiant " (...) ".
17. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. D... aurait été présent en France antérieurement à la rentrée scolaire de septembre 2004, de sorte que l'intéressé ne peut justifier de sa présence sur le territoire français depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans. Il n'entrait donc pas dans le champ d'application du 2° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. D'autre part, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que M. D... aurait résidé régulièrement en France au cours de la période allant du 8 juillet 2011 au 30 mai 2012, de sorte qu'il ne peut justifier d'une présence régulière en France depuis plus de dix ans à la date de la décision litigieuse. Au surplus, les périodes de détention accomplies par M. D... à la suite de condamnations à des peines privatives de liberté, soit du 9 mars 2014 au 9 décembre 2017 puis du 8 juillet 2018 au 2 novembre 2019, ne peuvent pas davantage être prises en compte dans le calcul de la durée de sa résidence régulière en France pour l'application du 4° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées ci-dessus doit être écarté.
18. Pour les mêmes motifs que ceux qui ont été développés au point 11 ci-dessus, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
Sur la légalité de la décision refusant un délai de départ volontaire :
19. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " II - (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : 1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public (...) ".
20. Le préfet, après avoir visé l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a mentionné, après avoir examiné le droit au séjour de l'intéressé et avoir estimé qu'il devait faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, que sa présence en France constituait une menace à l'ordre public. Ces indications étaient suffisantes pour permettre à l'intéressé de comprendre et de contester la mesure prise à son encontre. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision doit être écarté.
21. Il résulte de ce qui a été dit aux points 12 à 18 que le moyen tiré de ce que la décision litigieuse serait privée de base légale par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
22. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
23. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / Sauf s'il n'a pas satisfait à une précédente obligation de quitter le territoire français ou si son comportement constitue une menace pour l'ordre public, le présent III n'est pas applicable à l'étranger obligé de quitter le territoire français au motif que le titre de séjour qui lui avait été délivré en application de l'article L. 316-1 n'a pas été renouvelé ou a été retiré (...). La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".
24. Il ressort des pièces du dossier, notamment des termes mêmes de la décision litigieuse, que celle-ci mentionne avec suffisamment de précisions les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, notamment que la présence en France de l'intéressé constitue une menace pour l'ordre public et que la durée de l'interdiction prononcée ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette durée a été retenue. Le moyen tiré d'un défaut de motivation doit ainsi être écarté.
25. Eu égard aux faits commis par M. D... en France, rappelés au point 9 ci-dessus, de sorte que sa présence y constitue une menace pour l'ordre public, le préfet, en décidant d'une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans, n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation alors même que l'intéressé est entré en France alors qu'il était mineur et que son père, un frère et une soeur y résident régulièrement.
26. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet des Landes du 25 novembre 2019. Ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance de la présidente du tribunal administratif de Pau est annulée.
Article 2 : La demande présentée par M. D... devant le tribunal administratif de Pau et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise, pour information, au préfet des Landes.
Délibéré après l'audience du 29 avril 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, présidente,
M. C... B..., président-assesseur,
Mme F..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2021.
La présidente,
Marianne Hardy
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 20BX01900
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... D... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 25 novembre 2019 par lequel le préfet des Landes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans.
Par une ordonnance n° 2000014 du 18 février 2020, la présidente du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 15 juin 2020, M. D..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance de la présidente du tribunal administratif de Pau du 18 février 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 25 novembre 2019 par lequel le préfet des Landes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, subsidiairement de réexaminer sa demande dans un délai de deux mois et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'État le paiement de la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la notification par voie postale de l'arrêté litigieux n'est pas de nature à faire courir le délai de recours contentieux de 48 heures prévu par les dispositions du II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de sorte que la présidente du tribunal a, à tort, rejeté sa demande comme tardive et, par suite, manifestement irrecevable ;
s'agissant du refus de titre de séjour :
- la décision litigieuse est entachée d'un vice d'incompétence ;
- elle est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- elle est entachée d'un vice de procédure, faute pour le préfet d'avoir saisi la commission du titre de séjour en méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste dans son appréciation ses conséquences sur sa situation personnelle ;
s'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :
- la décision litigieuse est entachée d'un vice d'incompétence et d'un défaut de motivation ;
- l'illégalité du refus de titre de séjour prive de base légale l'obligation de quitter le territoire français ;
- elle méconnaît les dispositions du 2° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors que le préfet a commis une erreur de droit en ne retenant pas au titre de la résidence habituelle ses périodes d'incarcération ;
- elle méconnaît les dispositions du 4° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors que c'est à tort que le préfet considère que la période d'incarcération ne permet pas d'établir une résidence régulière de plus de dix ans ;
- le préfet a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a commis une erreur de fait et une erreur de droit en fondant sa décision sur les dispositions du 4° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
s'agissant du refus de lui accorder un délai de départ volontaire :
- la décision litigieuse est entachée d'un vice d'incompétence et d'un défaut de motivation ;
- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
s'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :
- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre et de l'obligation de quitter le territoire français ;
s'agissant de l'interdiction de retour sur le territoire français :
- la décision litigieuse est entachée d'un vice d'incompétence ;
- elle est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français la prive de base légale ;
- l'interdiction de retour d'une durée de trois ans est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 janvier 2021, le préfet des Landes conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision de la présidente de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 20 août 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020, et notamment son article 5 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. C... B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... ressortissant marocain né le 6 juillet 1991, a été mis en possession d'un document de circulation pour mineur étranger pour la période allant du 13 juillet 2006 au 22 juillet 2008. Il a ensuite bénéficié d'un titre de séjour pour la période allant du 8 juillet 2009 au 7 juillet 2011 puis du 31 mai 2012 au 30 mai 2014. Écroué le 4 mars 2014 puis condamné le 9 mars 2014 à six ans d'emprisonnement pour viol commis le 9 janvier 2011, il est sorti de détention le 9 décembre 2017. Saisi par M. D... d'une demande de titre de séjour le 10 août 2017, renouvelée le 4 novembre 2019 après une nouvelle incarcération du 8 juillet 2018 au 2 novembre 2019, le préfet des Landes a, par un arrêté du 25 novembre 2019, refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de 3 ans. M. D... relève appel de l'ordonnance du 18 février 2020 par laquelle la présidente du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité de l'ordonnance :
2. Aux termes du II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire sans délai peut, dans les quarante-huit heures suivant sa notification par voie administrative, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision refusant un délai de départ volontaire, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. ". Aux termes du II de l'article R. 776-2 du code de justice administrative : " Conformément aux dispositions du II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification par voie administrative d'une obligation de quitter sans délai le territoire français fait courir un délai de quarante-huit heures pour contester cette obligation et les décisions relatives au séjour, à la suppression du délai de départ volontaire, au pays de renvoi et à l'interdiction de retour ou à l'interdiction de circulation notifiées simultanément. ".
3. Il résulte des dispositions citées ci-dessus que les décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire peuvent faire l'objet d'un recours devant la juridiction administrative dans un délai de quarante-huit heures à compter de leur notification par voie administrative. Dès lors, la notification d'une telle obligation de quitter le territoire français à l'intéressé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, quand bien même elle comporte l'indication de ce délai de recours contentieux, n'est pas de nature à le faire courir.
4. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du préfet des Landes du 25 novembre 2019 portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sans délai a été notifié à M. D... le 3 décembre 2019 par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Une telle notification n'était ainsi pas de nature à faire courir le délai de recours contentieux d'une durée de 48 heures imparti par les dispositions citées au point 2 ci-dessus. Par suite, M. D... est fondé à soutenir qu'en rejetant pour tardiveté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté, qui avait été enregistrée au greffe du tribunal le 3 janvier 2020, la présidente du tribunal administratif de Pau a entaché son ordonnance d'irrégularité.
5. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. D... devant le tribunal administratif de Pau.
Sur la légalité de l'arrêté pris dans son ensemble :
6. Par un arrêté du 6 septembre 2019, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le 11 septembre suivant, le préfet des Landes a donné délégation à M. Grosse, secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer notamment les décisions prévues aux articles L. 511-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté litigieux doit être écarté.
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
7. En premier lieu, la décision litigieuse vise les conventions internationales et les dispositions légales dont il est fait application, comporte des éléments de faits relatifs à la situation de M. D... et expose avec précision les raisons pour lesquelles le préfet a refusé de lui délivrer un titre de séjour. Ces indications étaient suffisantes pour permettre à l'intéressé de comprendre et de contester la mesure prise à son encontre. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision doit être écarté. Il ne ressort pas davantage des termes mêmes de l'arrêté en litige que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. D....
8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) ".
9. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. D... aurait saisi le préfet d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions citées ci-dessus. Ainsi, M. D... ne peut utilement invoquer, à l'encontre de la décision refusant de régulariser sa situation, le défaut de consultation, pour avis, de la commission mentionnée à l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors même que le préfet a usé de son pouvoir discrétionnaire pour examiner d'office si l'intéressé remplissait les conditions de l'admission exceptionnelle au séjour. Au surplus, M. D... a été condamné à de nombreuses reprises, en particulier pour des faits de vols, recels de biens provenant d'un vol ainsi que pour viol et, en dernier lieu, le 9 juillet 2018 par le tribunal correctionnel de Pau notamment pour des faits de violence aggravée par deux circonstances en récidive, de sorte que, eu égard à la nature, au caractère répété et à la gravité de ces faits, la présence en France de M. D... constitue une menace pour l'ordre public et qu'ainsi, il ne pouvait prétendre à une admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions citées ci-dessus, de sorte qu'en l'espèce et en tout état de cause, le défaut de consultation de la commission n'a pas fait perdre une garantie à l'intéressé et n'a pu influencer le sens de la décision.
10. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit (...) 7° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".
11. Il ressort des pièces du dossier que si M. D... est entré en France alors qu'il était mineur et que son père ainsi qu'un frère et une soeur sont titulaires d'une carte de résident, il est célibataire âgé de 28 ans à la date de la décision litigieuse. S'il soutient qu'il est le père d'une enfant française née en 2014, il n'apporte à l'instance ni d'élément justifiant de sa reconnaissance de cette enfant, ni d'élément susceptible de justifier qu'il participerait effectivement à son entretien et son éducation, ni même qu'il entretiendrait une relation affective importante avec elle. Par ailleurs, et comme il a déjà été dit, M. D... a été condamné à de nombreuses reprises pour des faits rappelés au point 9 ci-dessus, de sorte que sa présence constitue une menace pour l'ordre public et qu'à tout le moins, il ne peut se prévaloir d'une insertion particulièrement réussie dans la société française. Dans ces conditions, le préfet n'a pas, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, et n'a ainsi méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions citées ci-dessus du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. D....
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
12. La motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé, ainsi qu'il a été dit au point 7 ci-dessus, et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision doit être écarté.
13. Il résulte de ce qui a été dit aux points 7 à 11 que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait privée de base légale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour doit être écarté.
14. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; 4° Si l'étranger n'a pas demandé le renouvellement de son titre de séjour temporaire ou pluriannuel et s'est maintenu sur le territoire français à l'expiration de ce titre ; (...) 7° Si le comportement de l'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois constitue une menace pour l'ordre public (...) ".
15. Il ressort des termes mêmes de l'arrêté litigieux que le préfet des Landes a prononcé une obligation de quitter le territoire français à l'encontre de M. D... après avoir refusé de l'admettre au séjour. Si, le préfet après avoir estimé que M. D... ne remplissait pas les conditions justifiant la délivrance d'un titre de séjour, a mentionné que l'intéressé entrait dans le champ d'application des dispositions des 4° et 7° du I de l'article L. 511-1 et non dans celui des 3° et 7° du I de ce même article, cette mention erronée, qui est purement matérielle, est sans incidence sur la légalité de la décision litigieuse. Au surplus, il ressort des pièces du dossier que M. D..., qui entrait dans le champ d'application du 3° du I de l'article L. 511-1, entrait également dans celui du 7° du I du même article mentionné par le préfet. Par suite, les moyens tirés d'une erreur de fait et d'une erreur de droit doivent être écartés.
16. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 2° L'étranger qui justifie par tous moyens résider habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans ; (...) 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention " étudiant " (...) ".
17. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. D... aurait été présent en France antérieurement à la rentrée scolaire de septembre 2004, de sorte que l'intéressé ne peut justifier de sa présence sur le territoire français depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans. Il n'entrait donc pas dans le champ d'application du 2° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. D'autre part, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que M. D... aurait résidé régulièrement en France au cours de la période allant du 8 juillet 2011 au 30 mai 2012, de sorte qu'il ne peut justifier d'une présence régulière en France depuis plus de dix ans à la date de la décision litigieuse. Au surplus, les périodes de détention accomplies par M. D... à la suite de condamnations à des peines privatives de liberté, soit du 9 mars 2014 au 9 décembre 2017 puis du 8 juillet 2018 au 2 novembre 2019, ne peuvent pas davantage être prises en compte dans le calcul de la durée de sa résidence régulière en France pour l'application du 4° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées ci-dessus doit être écarté.
18. Pour les mêmes motifs que ceux qui ont été développés au point 11 ci-dessus, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
Sur la légalité de la décision refusant un délai de départ volontaire :
19. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " II - (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : 1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public (...) ".
20. Le préfet, après avoir visé l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a mentionné, après avoir examiné le droit au séjour de l'intéressé et avoir estimé qu'il devait faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, que sa présence en France constituait une menace à l'ordre public. Ces indications étaient suffisantes pour permettre à l'intéressé de comprendre et de contester la mesure prise à son encontre. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision doit être écarté.
21. Il résulte de ce qui a été dit aux points 12 à 18 que le moyen tiré de ce que la décision litigieuse serait privée de base légale par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
22. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
23. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / Sauf s'il n'a pas satisfait à une précédente obligation de quitter le territoire français ou si son comportement constitue une menace pour l'ordre public, le présent III n'est pas applicable à l'étranger obligé de quitter le territoire français au motif que le titre de séjour qui lui avait été délivré en application de l'article L. 316-1 n'a pas été renouvelé ou a été retiré (...). La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".
24. Il ressort des pièces du dossier, notamment des termes mêmes de la décision litigieuse, que celle-ci mentionne avec suffisamment de précisions les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, notamment que la présence en France de l'intéressé constitue une menace pour l'ordre public et que la durée de l'interdiction prononcée ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette durée a été retenue. Le moyen tiré d'un défaut de motivation doit ainsi être écarté.
25. Eu égard aux faits commis par M. D... en France, rappelés au point 9 ci-dessus, de sorte que sa présence y constitue une menace pour l'ordre public, le préfet, en décidant d'une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans, n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation alors même que l'intéressé est entré en France alors qu'il était mineur et que son père, un frère et une soeur y résident régulièrement.
26. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet des Landes du 25 novembre 2019. Ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance de la présidente du tribunal administratif de Pau est annulée.
Article 2 : La demande présentée par M. D... devant le tribunal administratif de Pau et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise, pour information, au préfet des Landes.
Délibéré après l'audience du 29 avril 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, présidente,
M. C... B..., président-assesseur,
Mme F..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2021.
La présidente,
Marianne Hardy
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 20BX01900