Conseil d'État, 5ème chambre, 10/03/2021, 433790, Inédit au recueil Lebon
Conseil d'État, 5ème chambre, 10/03/2021, 433790, Inédit au recueil Lebon
Conseil d'État - 5ème chambre
- N° 433790
- ECLI:FR:CECHS:2021:433790.20210310
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
mercredi
10 mars 2021
- Rapporteur
- M. Jean-Dominique Langlais
- Avocat(s)
- SCP L. POULET-ODENT ; LE PRADO
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Mme C... B..., M. A... B... et Mme D... B... ont demandé au tribunal administratif de Caen de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Caen à leur verser respectivement les sommes de 319 227,04 euros, 8 382,85 euros et 5 000 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait de la prise en charge de Mme C... B... par cet établissement. Par un jugement n° 1600952 du 8 juin 2017, le tribunal administratif a condamné le CHU de Caen à verser la somme de 84 520,45 euros à Mme C... B..., la somme de 1 000 euros à M. A... B... et a rejeté le surplus de leurs conclusions.
Par un arrêt n° 17NT02469, 17NT02493 du 21 juin 2019, la cour administrative d'appel de Nantes a, sur appel de Mme B... et autres, porté à, respectivement, 99 898,99 euros et 5 000 euros les sommes que le CHU est condamné à verser à Mme C... B... et à M. A... B... et rejeté le surplus des conclusions.
Par une décision du 29 juin 2019, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a prononcé l'admission partielle des conclusions du pourvoi de Mme B... et autres dirigées contre cet arrêt, en tant qu'elles émanent de Mme B... et qu'elles portent sur l'indemnisation de ses frais d'assistance par un médecin conseil et de ses frais de déplacement.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 août 2020, le CHU de Caen conclut au rejet du pourvoi. Il soutient que le moyen soulevé par la requérante n'est pas fondé.
Par un mémoire en réplique, enregistré le 24 septembre 2020, Mme B... soutient que l'arrêt est entaché d'erreur de droit en ce qu'il juge que les frais de déplacement exposés pour rencontrer son avocat ne peuvent être indemnisés au titre des frais de déplacement.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP L. Poulet, Odent, avocat de Mme B... et autres et à Me Le Prado, avocat du centre hospitalier universitaire de Caen.
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des termes mêmes de l'arrêt du 21 juin 2019 contre lequel Mme B... se pourvoit en cassation que, tout en condamnant le centre hospitalier universitaire (CHU) de Caen à l'indemniser de divers préjudices liés à sa prise en charge dans cet établissement, la cour administrative d'appel de Nantes a, d'une part, rejeté sa demande d'indemnisation des frais qu'elle avait exposés pour se rendre chez son avocat, d'autre part, jugé que, dès lors que les fautes commises par le CHU de Caen lui avaient seulement fait perdre une chance, évaluée à 85%, d'éviter une aggravation de son état de santé, ce taux de 85% devait être appliqué au montant de divers préjudices liés aux expertises qu'elle mettait à la charge de l'établissement.
2. En jugeant que les frais de déplacement exposés par Mme B... pour se rendre, en cours d'instance, chez son avocat ne pouvaient faire l'objet d'une réparation, dès lors que l'intéressée avait fait valoir une demande fondée sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit.
3. Mais après avoir jugé, ainsi qu'il ressort des termes mêmes de l'arrêt attaqué, que les montants de 5 909 euros exposés par Mme B... pour se faire assister par trois médecins-conseils et de 2 830,58 euros exposés par elle pour se rendre aux réunions d'expertise étaient au nombre des préjudices en lien direct avec la faute commise par le centre hospitalier universitaire de Caen, elle n'a pu, sans commettre une erreur de droit, appliquer à ces montants le taux de perte de chance de 85% d'éviter une aggravation de son état de santé, lequel n'est applicable qu'à ceux des préjudices subis par Mme B... qui sont relatifs à son état de santé.
4. Il résulte de tout ce qui précède que l'arrêt attaqué doit être annulé en tant seulement qu'il fixe le montant des préjudices liés à l'assistance apportée par trois médecins-conseils et aux déplacements de Mme B... pour se rendre aux réunions d'expertise.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
6. Il résulte de l'instruction qu'il y a lieu d'allouer à Mme B..., au titre de ses frais de médecin-conseil et de ses frais de déplacement indemnisables par le centre hospitalier universitaire de Caen une somme de 8 739,58 euros. Par suite, la somme totale que le CHU de Caen est condamné à verser à Mme C... B... doit être portée à 101 209,93 euros.
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Caen le versement à Mme B... d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'article 1er et l'article 8 de l'arrêt du 21 juin 2019 de la cour administrative d'appel de Nantes sont annulés.
Article 2 : Le CHU de Caen est condamné à verser à Mme C... B... une somme de 101 209,93 euros.
Article 3 : Le CHU de Caen versera à Mme B... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le jugement n°1600952 du tribunal administratif de Caen est réformé en ce qu'il a de contraire à l'arrêt du 21 juin 2019 de la cour administrative d'appel de Nantes et au présent arrêt.
Article 5 : Le surplus des conclusions de Mme B... est rejeté.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à Mme C... B... et au centre hospitalier universitaire de Caen.
ECLI:FR:CECHS:2021:433790.20210310
Mme C... B..., M. A... B... et Mme D... B... ont demandé au tribunal administratif de Caen de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Caen à leur verser respectivement les sommes de 319 227,04 euros, 8 382,85 euros et 5 000 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait de la prise en charge de Mme C... B... par cet établissement. Par un jugement n° 1600952 du 8 juin 2017, le tribunal administratif a condamné le CHU de Caen à verser la somme de 84 520,45 euros à Mme C... B..., la somme de 1 000 euros à M. A... B... et a rejeté le surplus de leurs conclusions.
Par un arrêt n° 17NT02469, 17NT02493 du 21 juin 2019, la cour administrative d'appel de Nantes a, sur appel de Mme B... et autres, porté à, respectivement, 99 898,99 euros et 5 000 euros les sommes que le CHU est condamné à verser à Mme C... B... et à M. A... B... et rejeté le surplus des conclusions.
Par une décision du 29 juin 2019, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a prononcé l'admission partielle des conclusions du pourvoi de Mme B... et autres dirigées contre cet arrêt, en tant qu'elles émanent de Mme B... et qu'elles portent sur l'indemnisation de ses frais d'assistance par un médecin conseil et de ses frais de déplacement.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 août 2020, le CHU de Caen conclut au rejet du pourvoi. Il soutient que le moyen soulevé par la requérante n'est pas fondé.
Par un mémoire en réplique, enregistré le 24 septembre 2020, Mme B... soutient que l'arrêt est entaché d'erreur de droit en ce qu'il juge que les frais de déplacement exposés pour rencontrer son avocat ne peuvent être indemnisés au titre des frais de déplacement.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP L. Poulet, Odent, avocat de Mme B... et autres et à Me Le Prado, avocat du centre hospitalier universitaire de Caen.
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des termes mêmes de l'arrêt du 21 juin 2019 contre lequel Mme B... se pourvoit en cassation que, tout en condamnant le centre hospitalier universitaire (CHU) de Caen à l'indemniser de divers préjudices liés à sa prise en charge dans cet établissement, la cour administrative d'appel de Nantes a, d'une part, rejeté sa demande d'indemnisation des frais qu'elle avait exposés pour se rendre chez son avocat, d'autre part, jugé que, dès lors que les fautes commises par le CHU de Caen lui avaient seulement fait perdre une chance, évaluée à 85%, d'éviter une aggravation de son état de santé, ce taux de 85% devait être appliqué au montant de divers préjudices liés aux expertises qu'elle mettait à la charge de l'établissement.
2. En jugeant que les frais de déplacement exposés par Mme B... pour se rendre, en cours d'instance, chez son avocat ne pouvaient faire l'objet d'une réparation, dès lors que l'intéressée avait fait valoir une demande fondée sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit.
3. Mais après avoir jugé, ainsi qu'il ressort des termes mêmes de l'arrêt attaqué, que les montants de 5 909 euros exposés par Mme B... pour se faire assister par trois médecins-conseils et de 2 830,58 euros exposés par elle pour se rendre aux réunions d'expertise étaient au nombre des préjudices en lien direct avec la faute commise par le centre hospitalier universitaire de Caen, elle n'a pu, sans commettre une erreur de droit, appliquer à ces montants le taux de perte de chance de 85% d'éviter une aggravation de son état de santé, lequel n'est applicable qu'à ceux des préjudices subis par Mme B... qui sont relatifs à son état de santé.
4. Il résulte de tout ce qui précède que l'arrêt attaqué doit être annulé en tant seulement qu'il fixe le montant des préjudices liés à l'assistance apportée par trois médecins-conseils et aux déplacements de Mme B... pour se rendre aux réunions d'expertise.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
6. Il résulte de l'instruction qu'il y a lieu d'allouer à Mme B..., au titre de ses frais de médecin-conseil et de ses frais de déplacement indemnisables par le centre hospitalier universitaire de Caen une somme de 8 739,58 euros. Par suite, la somme totale que le CHU de Caen est condamné à verser à Mme C... B... doit être portée à 101 209,93 euros.
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Caen le versement à Mme B... d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : L'article 1er et l'article 8 de l'arrêt du 21 juin 2019 de la cour administrative d'appel de Nantes sont annulés.
Article 2 : Le CHU de Caen est condamné à verser à Mme C... B... une somme de 101 209,93 euros.
Article 3 : Le CHU de Caen versera à Mme B... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le jugement n°1600952 du tribunal administratif de Caen est réformé en ce qu'il a de contraire à l'arrêt du 21 juin 2019 de la cour administrative d'appel de Nantes et au présent arrêt.
Article 5 : Le surplus des conclusions de Mme B... est rejeté.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à Mme C... B... et au centre hospitalier universitaire de Caen.