Conseil d'État, 1ère - 4ème chambres réunies, 24/02/2021, 432096
Conseil d'État, 1ère - 4ème chambres réunies, 24/02/2021, 432096
Conseil d'État - 1ère - 4ème chambres réunies
- N° 432096
- ECLI:FR:CECHR:2021:432096.20210224
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
mercredi
24 février 2021
- Rapporteur
- Mme Bénédicte Fauvarque-Cosson
- Avocat(s)
- SCP BUK LAMENT - ROBILLOT ; LE PRADO ; CABINET BRIARD
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Le syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine et MM. E... F..., G... H..., I... J... et K... L... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 9 mai 2016 par lequel le maire d'Aix-en-Provence a délivré à la société en nom collectif La Régina le permis de construire trois immeubles de 74 logements, ainsi que la décision implicite de rejet de leur recours gracieux. Par un jugement n° 1608896 du 29 avril 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 1er juillet et 2 octobre 2019 et le 16 avril 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine et MM. F..., H..., J... et L... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur demande de première instance ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Aix-en-Provence et de la société La Régina la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ;
- le décret n° 67-223 du 17 mars 1967 ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme B... D..., conseillère d'Etat,
- les conclusions de Mme A... C..., rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Buk Lament-Robillot, avocat du syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine, de MM. F..., H..., J... et L..., à Me Le Prado, avocat de la commune d'Aix-en-Provence et au cabinet Briard, avocat de la société en nom collectif La Régina ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 9 mai 2016, le maire d'Aix-en-Provence a délivré à la société La Régina un permis de construire trois immeubles de 74 logements. Le recours gracieux formé le 8 juillet 2016 par le syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine, située sur la parcelle jouxtant le terrain d'assiette du projet en litige, a été implicitement rejeté. Le syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine et MM. F..., H..., J... et L..., copropriétaires occupants de cette résidence, ont collectivement demandé au tribunal administratif de Marseille l'annulation pour excès de pouvoir de ces décisions. Par un jugement du 29 avril 2019, contre lequel ils se pourvoient en cassation, ce tribunal a rejeté leur demande en faisant droit aux fins de non-recevoir opposées par la commune d'Aix-en-Provence et par la société La Régina tirées, d'une part, de la tardiveté des conclusions présentées par MM. F..., H..., J... et L... et, d'autre part, de l'absence de justification par le syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine d'un intérêt lui donnant qualité pour agir.
Sur le jugement, en tant qu'il rejette les conclusions de MM. F..., H..., J... et L... :
2. Pour rejeter comme tardives les conclusions présentées le 13 novembre 2016 par MM. F..., H..., J... et L..., le tribunal, après avoir relevé que les intéressés ne contestaient pas que le permis de construire avait été affiché dans des conditions de nature à faire courir le délai de recours à leur égard à compter du 9 mai 2016, s'est fondé sur la circonstance que seul le syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine avait formé un recours gracieux le 8 juillet 2016, dont il a déduit que ce recours n'avait prorogé le délai de recours contentieux qu'au bénéfice de ce syndicat.
3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme: " Le délai de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire (...) court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ". Si le délai dans lequel un demandeur doit introduire un recours contentieux peut être prorogé par un recours administratif formé dans ce délai par une personne qu'il mandate à cet effet, c'est à la condition que ce mandat soit exprès. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, d'une part, qu'aucun mandat écrit n'y figurait, d'autre part, que les requérants ne se prévalaient pas d'un mandat exprès, fût-il verbal, qu'ils auraient donné au syndicat des copropriétaires ou dont les termes du recours administratif auraient permis de présumer l'existence. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le tribunal aurait commis une erreur de droit en ne recherchant pas si le syndicat des copropriétaires pouvait être considéré comme ayant été leur mandataire ne peut qu'être écarté.
4. En second lieu, aux termes de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, dans sa rédaction applicable au litige : " La collectivité des copropriétaires est constituée en un syndicat qui a la personnalité civile. (...). Il a pour objet la conservation de l'immeuble et l'administration des parties communes. (...) ". L'article 15 de cette même loi dispose que : " Le syndicat a qualité pour agir en justice, tant en demandant qu'en défendant, même contre certains des copropriétaires ; il peut notamment agir, conjointement ou non avec un ou plusieurs de ces derniers, en vue de la sauvegarde des droits afférents à l'immeuble. Tout copropriétaire peut néanmoins exercer seul les actions concernant la propriété ou la jouissance de son lot, à charge d'en informer le syndic ". L'article 17 de la même loi prévoit que : " Les décisions du syndicat sont prises en assemblée générale des copropriétaires (...) " et le I de son article 24 que : " Les décisions de l'assemblée générale sont prises à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance, s'il n'en est autrement ordonné par la loi. ". Il résulte de ces dispositions que lorsque, sur décision de son assemblée générale, un syndicat de copropriétaires agit en justice, il le fait pour le compte de la collectivité des copropriétaires et non des copropriétaires pris individuellement, en vue de défendre les droits afférents à l'immeuble dans son ensemble. Dès lors, le tribunal n'a pas inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis en ne déduisant pas de ces dispositions que le syndicat des copropriétaires devait être regardé comme ayant disposé d'un mandat de MM. F..., H..., J... et L..., copropriétaires, en vue de défendre leurs intérêts personnels.
Sur le jugement, en tant qu'il rejette les conclusions du syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine
5. Aux termes des dispositions de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ".
6. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous les éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat, justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction. Il en va de même lorsque le requérant est un syndicat de copropriétaires.
7. Il résulte des termes mêmes du jugement attaqué que le tribunal a relevé que la résidence La Dauphine est située sur la parcelle jouxtant le terrain d'assiette du projet en litige et que le syndicat des copropriétaires de cette résidence faisait notamment état, pour justifier de son intérêt à demander l'annulation du permis de construire contesté, de l'importance du projet, conduisant à la construction de 74 logements en vis-à-vis de la résidence et entraînant un triplement de la surface bâtie existante sur la parcelle du terrain d'assiette du projet ainsi qu'à la création de 124 places de stationnement. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'en jugeant néanmoins que ces éléments ne suffisaient pas à justifier de l'intérêt pour agir du syndicat requérant, le tribunal a commis une erreur de droit.
8. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants sont fondés à demander l'annulation du jugement qu'ils attaquent, en tant seulement qu'il rejette les conclusions du syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine.
9. Il a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune d'Aix-en-Provence et de la société La Régina une somme de 1 000 euros chacune, à verser au syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la commune d'Aix-en-Provence et de la société La Régina présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le jugement du 29 avril 2019 du tribunal administratif de Marseille est annulé en tant qu'il rejette les conclusions du syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine.
Article 2 : L'affaire est renvoyée dans cette mesure au tribunal administratif de Marseille.
Article 3 : La commune d'Aix-en-Provence et la société La Régina verseront chacune une somme de 1 000 euros au syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la commune d'Aix-en-Provence et de la société La Régina présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le surplus des conclusions du pourvoi est rejeté.
Article 6 : La présente décision sera notifiée au syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine, représentant unique désigné pour l'ensemble des requérants, à la commune d'Aix-en-Provence et à la société en nom collectif La Régina.
ECLI:FR:CECHR:2021:432096.20210224
Le syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine et MM. E... F..., G... H..., I... J... et K... L... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 9 mai 2016 par lequel le maire d'Aix-en-Provence a délivré à la société en nom collectif La Régina le permis de construire trois immeubles de 74 logements, ainsi que la décision implicite de rejet de leur recours gracieux. Par un jugement n° 1608896 du 29 avril 2019, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 1er juillet et 2 octobre 2019 et le 16 avril 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine et MM. F..., H..., J... et L... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur demande de première instance ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Aix-en-Provence et de la société La Régina la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ;
- le décret n° 67-223 du 17 mars 1967 ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme B... D..., conseillère d'Etat,
- les conclusions de Mme A... C..., rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Buk Lament-Robillot, avocat du syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine, de MM. F..., H..., J... et L..., à Me Le Prado, avocat de la commune d'Aix-en-Provence et au cabinet Briard, avocat de la société en nom collectif La Régina ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 9 mai 2016, le maire d'Aix-en-Provence a délivré à la société La Régina un permis de construire trois immeubles de 74 logements. Le recours gracieux formé le 8 juillet 2016 par le syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine, située sur la parcelle jouxtant le terrain d'assiette du projet en litige, a été implicitement rejeté. Le syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine et MM. F..., H..., J... et L..., copropriétaires occupants de cette résidence, ont collectivement demandé au tribunal administratif de Marseille l'annulation pour excès de pouvoir de ces décisions. Par un jugement du 29 avril 2019, contre lequel ils se pourvoient en cassation, ce tribunal a rejeté leur demande en faisant droit aux fins de non-recevoir opposées par la commune d'Aix-en-Provence et par la société La Régina tirées, d'une part, de la tardiveté des conclusions présentées par MM. F..., H..., J... et L... et, d'autre part, de l'absence de justification par le syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine d'un intérêt lui donnant qualité pour agir.
Sur le jugement, en tant qu'il rejette les conclusions de MM. F..., H..., J... et L... :
2. Pour rejeter comme tardives les conclusions présentées le 13 novembre 2016 par MM. F..., H..., J... et L..., le tribunal, après avoir relevé que les intéressés ne contestaient pas que le permis de construire avait été affiché dans des conditions de nature à faire courir le délai de recours à leur égard à compter du 9 mai 2016, s'est fondé sur la circonstance que seul le syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine avait formé un recours gracieux le 8 juillet 2016, dont il a déduit que ce recours n'avait prorogé le délai de recours contentieux qu'au bénéfice de ce syndicat.
3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme: " Le délai de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire (...) court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ". Si le délai dans lequel un demandeur doit introduire un recours contentieux peut être prorogé par un recours administratif formé dans ce délai par une personne qu'il mandate à cet effet, c'est à la condition que ce mandat soit exprès. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, d'une part, qu'aucun mandat écrit n'y figurait, d'autre part, que les requérants ne se prévalaient pas d'un mandat exprès, fût-il verbal, qu'ils auraient donné au syndicat des copropriétaires ou dont les termes du recours administratif auraient permis de présumer l'existence. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le tribunal aurait commis une erreur de droit en ne recherchant pas si le syndicat des copropriétaires pouvait être considéré comme ayant été leur mandataire ne peut qu'être écarté.
4. En second lieu, aux termes de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, dans sa rédaction applicable au litige : " La collectivité des copropriétaires est constituée en un syndicat qui a la personnalité civile. (...). Il a pour objet la conservation de l'immeuble et l'administration des parties communes. (...) ". L'article 15 de cette même loi dispose que : " Le syndicat a qualité pour agir en justice, tant en demandant qu'en défendant, même contre certains des copropriétaires ; il peut notamment agir, conjointement ou non avec un ou plusieurs de ces derniers, en vue de la sauvegarde des droits afférents à l'immeuble. Tout copropriétaire peut néanmoins exercer seul les actions concernant la propriété ou la jouissance de son lot, à charge d'en informer le syndic ". L'article 17 de la même loi prévoit que : " Les décisions du syndicat sont prises en assemblée générale des copropriétaires (...) " et le I de son article 24 que : " Les décisions de l'assemblée générale sont prises à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance, s'il n'en est autrement ordonné par la loi. ". Il résulte de ces dispositions que lorsque, sur décision de son assemblée générale, un syndicat de copropriétaires agit en justice, il le fait pour le compte de la collectivité des copropriétaires et non des copropriétaires pris individuellement, en vue de défendre les droits afférents à l'immeuble dans son ensemble. Dès lors, le tribunal n'a pas inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis en ne déduisant pas de ces dispositions que le syndicat des copropriétaires devait être regardé comme ayant disposé d'un mandat de MM. F..., H..., J... et L..., copropriétaires, en vue de défendre leurs intérêts personnels.
Sur le jugement, en tant qu'il rejette les conclusions du syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine
5. Aux termes des dispositions de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ".
6. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous les éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat, justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction. Il en va de même lorsque le requérant est un syndicat de copropriétaires.
7. Il résulte des termes mêmes du jugement attaqué que le tribunal a relevé que la résidence La Dauphine est située sur la parcelle jouxtant le terrain d'assiette du projet en litige et que le syndicat des copropriétaires de cette résidence faisait notamment état, pour justifier de son intérêt à demander l'annulation du permis de construire contesté, de l'importance du projet, conduisant à la construction de 74 logements en vis-à-vis de la résidence et entraînant un triplement de la surface bâtie existante sur la parcelle du terrain d'assiette du projet ainsi qu'à la création de 124 places de stationnement. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'en jugeant néanmoins que ces éléments ne suffisaient pas à justifier de l'intérêt pour agir du syndicat requérant, le tribunal a commis une erreur de droit.
8. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants sont fondés à demander l'annulation du jugement qu'ils attaquent, en tant seulement qu'il rejette les conclusions du syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine.
9. Il a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune d'Aix-en-Provence et de la société La Régina une somme de 1 000 euros chacune, à verser au syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la commune d'Aix-en-Provence et de la société La Régina présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 29 avril 2019 du tribunal administratif de Marseille est annulé en tant qu'il rejette les conclusions du syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine.
Article 2 : L'affaire est renvoyée dans cette mesure au tribunal administratif de Marseille.
Article 3 : La commune d'Aix-en-Provence et la société La Régina verseront chacune une somme de 1 000 euros au syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la commune d'Aix-en-Provence et de la société La Régina présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le surplus des conclusions du pourvoi est rejeté.
Article 6 : La présente décision sera notifiée au syndicat des copropriétaires de la résidence La Dauphine, représentant unique désigné pour l'ensemble des requérants, à la commune d'Aix-en-Provence et à la société en nom collectif La Régina.