CAA de NANTES, 1ère chambre, 05/11/2020, 19NT00453, Inédit au recueil Lebon
CAA de NANTES, 1ère chambre, 05/11/2020, 19NT00453, Inédit au recueil Lebon
CAA de NANTES - 1ère chambre
- N° 19NT00453
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
jeudi
05 novembre 2020
- Président
- M. BATAILLE
- Rapporteur
- M. Harold BRASNU
- Avocat(s)
- ALTEC AVO'K
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée (SAS) Kaufler-SMO International a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2011 et 2012, à hauteur des sommes versées par la société MBI à M. B... au titre des heures consacrées à des opérations de recherche.
Par un jugement n° 1600495 du 3 octobre 2018, le tribunal administratif de Rennes a fait droit à sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 30 janvier 2019 et 11 septembre 2020, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de remettre à la charge de la société Kaufler - SMO International les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés à hauteur de 18 460 euros au titre des exercices clos en 2011 et 2012.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a estimé que les sommes versées par la société Kaufler-SMO International à la société MBI correspondant aux salaires de M. B... à raison du temps consacré aux opérations de recherche, en application de la convention de management, entraient dans le champ de l'article 244 quater B du code général des impôts ;
- la convention de management conclue entre les deux sociétés ne saurait être confondue avec une convention de mise à disposition de main d'oeuvre ;
- la caractère forfaitaire des factures émises par la société MBI fait obstacle à la prise en compte de ces dépenses au titre du crédit d'impôt recherche.
Par un mémoire en défense et un mémoire, enregistrés les 8 avril 2019 et 21 septembre 2020, la SAS société Kaufler-SMO International conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
Elle fait valoir que les moyens soulevés par le ministre de l'action et des comptes publics ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- et les conclusions de Mme Chollet, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société par actions simplifiée (SAS) Kaufler, devenue SAS Kaufler-SMO International, fabrique et vend des matériels destinés à l'industrie ou aux commerces agro-alimentaires. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté sur les exercices clos les 31 décembre 2011 et 2012. L'administration a rectifié à cette occasion le montant des dépenses de personnel pour lesquelles la société a bénéficié d'un crédit d'impôt recherche, en écartant notamment les sommes versées à la société à responsabilité limitée (SARL) MBI en application d'une convention de management signée le 1er juillet 2011. Après mise en recouvrement et rejet de sa réclamation, la société a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2011 et 2012, à hauteur des sommes versées par la SARL MBI à M. B... au titre des heures consacrées à des opérations de recherche. Par un jugement n° 1600495 du 3 octobre 2018, le tribunal administratif de Rennes a fait droit à sa demande. Le ministre chargé des comptes publics relève appel de ce jugement.
2. L'article 244 quater B du code général des impôts dispose, d'une part, dans sa rédaction applicable au litige : " II. Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : (...) b) Les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche directement et exclusivement affectés à ces opérations. (...) c. les autres dépenses de fonctionnement exposées dans les mêmes opérations ; ces dépenses sont fixées forfaitairement à
la somme de (...) 50 % des dépenses de personnel (...) ". Ces dispositions ne limitent pas les dépenses de personnel susceptibles d'ouvrir droit au crédit d'impôt aux seules rémunérations et charges sociales versées pour des personnes employées par l'entreprise et affectées à des opérations de recherche susceptibles d'ouvrir droit à ce crédit, mais s'étendent aux rémunérations et aux charges sociales prises en charge par l'entreprise au titre de la mise à sa disposition par un tiers de personnes afin d'y effectuer dans ses locaux et avec ses moyens des opérations de recherche.
3. Il résulte de l'instruction qu'avant la signature de la convention de management du 1er juillet 2011, M. B..., directeur général délégué de la société Kaufler et responsable de la recherche et du développement de la société, était rémunéré directement par la société Kaufler. Lors du contrôle, le service n'a aucunement remis en cause l'éligibilité au crédit d'impôt en faveur de la recherche des dépenses correspondant aux heures consacrées par M. B... à des opérations de recherche au cours de cette période. Si, à compter du 1er juillet 2011, M. B... a été rémunéré par la SARL MBI, qui détient 50% des parts sociales de la société Kaufler, et ce en vertu d'une convention de management, il n'est pas contesté que la signature de cette convention n'a eu aucune incidence concrète sur les conditions dans lesquelles M. B... a exercé ses fonctions au sein de la société Kaufler. M. B... a ainsi continué, après le 1er juillet 2011, de réaliser des opérations de recherche dans les locaux et avec les moyens de la société Kaufler. En outre, dans sa déclaration de crédit d'impôt, la société a bien cantonné sa demande aux rémunérations brutes et aux charges sociales versées par la SARL MBI à M. B... à raison des heures consacrées à des opérations recherche. Dans ces conditions, rien ne faisait obstacle à la prise en compte de ces dépenses au titre des dépenses de personnel au sens de l'article 244 quater B du code général des impôts. La circonstance que M. B... soit intervenu dans la société Kaufler par le biais d'un contrat de mandat régi par les articles 1984 et suivants du code civil et non par le biais d'une convention de mise à disposition de personnel est à cet égard sans incidence sur l'éligibilité de ces dépenses au crédit d'impôt. En outre, si le ministre fait valoir que les factures mensuelles de 11 000 euros hors taxes émises par la SARL MBI étaient forfaitaires et ne précisaient ni la nature des travaux effectués ni le détail des heures facturées, cette circonstance est également sans incidence, dès lors que le détail des rémunérations et des charges sociales et le prorata des heures consacrées par M. B... aux opérations de recherche ont été indiquées dans la déclaration de la société Kaufler et n'ont fait l'objet d'aucune critique de la part du service. Il suit de là que c'est à tort que le service a remis en cause l'éligibilité de ces dépenses au crédit d'impôt en faveur de la recherche.
4. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre chargé des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a fait droit à la demande de la société Kaufler-SMO International.
Sur les frais liés au litige :
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la SAS Kaufler-SMO International et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête du ministre chargé des comptes publics est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à la SAS Kaufler-SMO International une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des comptes publics et à la société par actions simplifiée Kaufler-SMO International.
Délibéré après l'audience du 22 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président assesseur,
- M. A..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 5 novembre 2020.
Le rapporteur,
H. A...Le président,
F. Bataille
Le greffier,
A. Rivoal
La République mande et ordonne au ministre des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
No 19NT004532
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée (SAS) Kaufler-SMO International a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2011 et 2012, à hauteur des sommes versées par la société MBI à M. B... au titre des heures consacrées à des opérations de recherche.
Par un jugement n° 1600495 du 3 octobre 2018, le tribunal administratif de Rennes a fait droit à sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 30 janvier 2019 et 11 septembre 2020, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de remettre à la charge de la société Kaufler - SMO International les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés à hauteur de 18 460 euros au titre des exercices clos en 2011 et 2012.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a estimé que les sommes versées par la société Kaufler-SMO International à la société MBI correspondant aux salaires de M. B... à raison du temps consacré aux opérations de recherche, en application de la convention de management, entraient dans le champ de l'article 244 quater B du code général des impôts ;
- la convention de management conclue entre les deux sociétés ne saurait être confondue avec une convention de mise à disposition de main d'oeuvre ;
- la caractère forfaitaire des factures émises par la société MBI fait obstacle à la prise en compte de ces dépenses au titre du crédit d'impôt recherche.
Par un mémoire en défense et un mémoire, enregistrés les 8 avril 2019 et 21 septembre 2020, la SAS société Kaufler-SMO International conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
Elle fait valoir que les moyens soulevés par le ministre de l'action et des comptes publics ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- et les conclusions de Mme Chollet, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société par actions simplifiée (SAS) Kaufler, devenue SAS Kaufler-SMO International, fabrique et vend des matériels destinés à l'industrie ou aux commerces agro-alimentaires. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté sur les exercices clos les 31 décembre 2011 et 2012. L'administration a rectifié à cette occasion le montant des dépenses de personnel pour lesquelles la société a bénéficié d'un crédit d'impôt recherche, en écartant notamment les sommes versées à la société à responsabilité limitée (SARL) MBI en application d'une convention de management signée le 1er juillet 2011. Après mise en recouvrement et rejet de sa réclamation, la société a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2011 et 2012, à hauteur des sommes versées par la SARL MBI à M. B... au titre des heures consacrées à des opérations de recherche. Par un jugement n° 1600495 du 3 octobre 2018, le tribunal administratif de Rennes a fait droit à sa demande. Le ministre chargé des comptes publics relève appel de ce jugement.
2. L'article 244 quater B du code général des impôts dispose, d'une part, dans sa rédaction applicable au litige : " II. Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : (...) b) Les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche directement et exclusivement affectés à ces opérations. (...) c. les autres dépenses de fonctionnement exposées dans les mêmes opérations ; ces dépenses sont fixées forfaitairement à
la somme de (...) 50 % des dépenses de personnel (...) ". Ces dispositions ne limitent pas les dépenses de personnel susceptibles d'ouvrir droit au crédit d'impôt aux seules rémunérations et charges sociales versées pour des personnes employées par l'entreprise et affectées à des opérations de recherche susceptibles d'ouvrir droit à ce crédit, mais s'étendent aux rémunérations et aux charges sociales prises en charge par l'entreprise au titre de la mise à sa disposition par un tiers de personnes afin d'y effectuer dans ses locaux et avec ses moyens des opérations de recherche.
3. Il résulte de l'instruction qu'avant la signature de la convention de management du 1er juillet 2011, M. B..., directeur général délégué de la société Kaufler et responsable de la recherche et du développement de la société, était rémunéré directement par la société Kaufler. Lors du contrôle, le service n'a aucunement remis en cause l'éligibilité au crédit d'impôt en faveur de la recherche des dépenses correspondant aux heures consacrées par M. B... à des opérations de recherche au cours de cette période. Si, à compter du 1er juillet 2011, M. B... a été rémunéré par la SARL MBI, qui détient 50% des parts sociales de la société Kaufler, et ce en vertu d'une convention de management, il n'est pas contesté que la signature de cette convention n'a eu aucune incidence concrète sur les conditions dans lesquelles M. B... a exercé ses fonctions au sein de la société Kaufler. M. B... a ainsi continué, après le 1er juillet 2011, de réaliser des opérations de recherche dans les locaux et avec les moyens de la société Kaufler. En outre, dans sa déclaration de crédit d'impôt, la société a bien cantonné sa demande aux rémunérations brutes et aux charges sociales versées par la SARL MBI à M. B... à raison des heures consacrées à des opérations recherche. Dans ces conditions, rien ne faisait obstacle à la prise en compte de ces dépenses au titre des dépenses de personnel au sens de l'article 244 quater B du code général des impôts. La circonstance que M. B... soit intervenu dans la société Kaufler par le biais d'un contrat de mandat régi par les articles 1984 et suivants du code civil et non par le biais d'une convention de mise à disposition de personnel est à cet égard sans incidence sur l'éligibilité de ces dépenses au crédit d'impôt. En outre, si le ministre fait valoir que les factures mensuelles de 11 000 euros hors taxes émises par la SARL MBI étaient forfaitaires et ne précisaient ni la nature des travaux effectués ni le détail des heures facturées, cette circonstance est également sans incidence, dès lors que le détail des rémunérations et des charges sociales et le prorata des heures consacrées par M. B... aux opérations de recherche ont été indiquées dans la déclaration de la société Kaufler et n'ont fait l'objet d'aucune critique de la part du service. Il suit de là que c'est à tort que le service a remis en cause l'éligibilité de ces dépenses au crédit d'impôt en faveur de la recherche.
4. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre chargé des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a fait droit à la demande de la société Kaufler-SMO International.
Sur les frais liés au litige :
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la SAS Kaufler-SMO International et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête du ministre chargé des comptes publics est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à la SAS Kaufler-SMO International une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des comptes publics et à la société par actions simplifiée Kaufler-SMO International.
Délibéré après l'audience du 22 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président assesseur,
- M. A..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 5 novembre 2020.
Le rapporteur,
H. A...Le président,
F. Bataille
Le greffier,
A. Rivoal
La République mande et ordonne au ministre des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
No 19NT004532