CAA de DOUAI, 1ère chambre, 03/11/2020, 16DA01098, Inédit au recueil Lebon
CAA de DOUAI, 1ère chambre, 03/11/2020, 16DA01098, Inédit au recueil Lebon
CAA de DOUAI - 1ère chambre
- N° 16DA01098
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
mardi
03 novembre 2020
- Président
- M. Yeznikian
- Rapporteur
- M. Michel Richard
- Avocat(s)
- MONAMY
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par un arrêt du 4 octobre 2018, la cour administrative d'appel de Douai, saisie de la requête présentée par l'association Thiérache à contrevent et huit autres requérants, après avoir relevé que le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis de l'autorité environnementale était, en l'état du dossier et des moyens soumis à la cour, de nature à entacher d'illégalité l'arrêté du 3 octobre 2013 par lequel le préfet de la région Picardie avait délivré l'autorisation d'exploiter sept éoliennes et deux postes de livraison sur le territoire des communes d'Haution, Laigny, La Vallée au Blé et Voulpaix, et après avoir écarté l'ensemble des autres moyens, a invité les parties à faire part de leurs observations sur la mise en oeuvre éventuelle de la procédure de régularisation prévue au 2° du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement.
Par un arrêt du 7 février 2019 la cour administrative d'appel de Douai a sursis à statuer sur la légalité de l'arrêté du préfet de la région Picardie du 3 octobre 2013 jusqu'à l'expiration d'un délai de dix mois à compter de la notification de cet arrêt pour permettre, le cas échéant, la régularisation de cet arrêté.
Par des mémoires, enregistrés les 15 janvier, 17 avril, 22 juin et 24 juillet 2020, l'association Thiérache à contrevent et les autres requérants, représentés par Me C... A..., demandent à la cour, en outre, d'annuler l'arrêté du 19 mars 2020 portant régularisation de l'arrêté du 3 octobre 2013.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la directive n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement ;
- le code de l'environnement ;
- le décret n° 2015-1229 du 2 octobre 2015 relatif au Conseil général de l'environnement et du développement durable ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Claire Rollet-Perraud, président-assesseur,
- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,
- et les observations de Me D... B..., représentant la société Eoliennes de la vallée.
Une note en délibéré présentée par la société Eoliennes de la vallée a été enregistrée le 15 octobre 2020.
Considérant ce qui suit :
Sur l'objet du litige :
1. Les 25, 26 et 27 janvier 2012, la société Eoliennes de la vallée a déposé sept demandes de permis de construire pour sept éoliennes et deux postes de livraison sur le territoire des communes d'Haution, Laigny, La Vallée au Blé et Voulpaix dans le département de l'Aisne. Par un arrêté du 14 juin 2013, le préfet de la région Picardie, au titre de son pouvoir d'évocation, a délivré à la société Eoliennes de la vallée un permis de construire ce parc éolien.
2. Le 31 janvier 2012, la société pétitionnaire a sollicité la délivrance d'une autorisation d'exploiter ces éoliennes, laquelle lui a été délivrée, après une enquête publique qui s'est déroulée du 17 décembre 2012 au 18 janvier 2013, par un arrêté du préfet de la région Picardie du 3 octobre 2013.
3. L'association Thiérache à contrevent et d'autres requérants ont relevé appel du jugement du 12 avril 2016 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 3 octobre 2013.
4. Par un arrêt avant dire droit du 4 octobre 2018, la cour a invité les parties à faire part, dans un délai d'un mois, de leurs observations sur la mise en oeuvre éventuelle de la procédure de régularisation prévue au 2° du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, en raison de l'irrégularité de l'avis émis par l'autorité environnementale.
5. Par un arrêt du 7 février 2019, la cour a prononcé un sursis à statuer sur la légalité de l'arrêté du préfet de la région Picardie du 3 octobre 2013 jusqu'à l'expiration d'un délai de dix mois à compter de la notification de l'arrêt pour permettre, le cas échéant, la régularisation de cet arrêté. La société Eoliennes de la vallée a produit, par un mémoire enregistré le 24 mars 2020, l'arrêté du préfet de l'Aisne du 19 mars 2020 portant régularisation de l'arrêté du 3 octobre 2013. Les requérants demandent l'annulation de cet arrêté du 19 mars 2020.
Sur la régularisation du vice relevé par l'arrêt avant dire droit :
6. Dans son arrêt du 4 octobre 2018, la cour a jugé que : " Il résulte de l'instruction qu'en l'espèce, cet avis [de l'autorité environnementale] a été émis le 28 septembre 2012 par le secrétaire général aux affaires régionales (SGAR) " pour le préfet de région ". Ni cette autorité, ni davantage la direction régionale pour l'environnement, l'aménagement du territoire et le logement (DREAL) qui a procédé à l'instruction et préparé cet avis, ne disposaient d'une autonomie réelle vis-à-vis du préfet de région qui a pris ensuite la décision autorisant le projet. Ainsi, le préfet de région, en agissant comme autorité environnementale, n'a pas été, en l'espèce, placé dans les conditions lui permettant de remplir la mission de consultation qui lui était confiée et de donner ainsi un avis objectif sur le projet concerné. ".
7. Dans son arrêt du 7 février 2019, la cour a fixé les modalités de la régularisation dans les termes suivants : " 11. Il appartient à la société pétitionnaire de présenter un dossier de demande d'autorisation, le cas échéant actualisé, qui sera soumis pour avis à l'autorité environnementale, laquelle devra présenter les garanties d'impartialité requises. L'avis sera rendu conformément aux dispositions qui seront substituées à celles de l'article R. 122-6 du code de l'environnement ou, le cas échéant, dans les conditions définies aux articles R. 122-6 à R. 122-8 et R. 122-24 du code de l'environnement par la mission régionale de l'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable créée par le décret du 28 avril 2016. Cette mission est une entité administrative de l'Etat séparée de l'autorité compétente pour autoriser un projet et disposant d'une autonomie réelle la mettant en mesure, contrairement à ce que soutiennent l'association " Thiérache à contrevent " et autres, de donner un avis objectif sur les projets qui lui sont soumis dans le cadre de sa mission d'autorité environnementale. 12. Dans le cas où l'avis de l'autorité environnementale recueilli à titre de régularisation et rendu en tenant compte d'éventuels changements significatifs du projet et de son environnement, diffèrerait substantiellement de celui qui avait été porté à la connaissance du public à l'occasion de l'enquête publique dont le projet a fait l'objet, une enquête publique complémentaire devra être organisée à titre de régularisation, selon les modalités prévues par les articles L. 123-14 et R. 123-23 du code de l'environnement, dans le cadre de laquelle seront soumis au public, outre l'avis recueilli à titre de régularisation, tout autre élément de nature à régulariser d'éventuels vices révélés par le nouvel avis, notamment une insuffisance de l'étude d'impact. Dans le cas où aucune modification substantielle n'aurait été apportée à l'avis, l'information du public sur le nouvel avis de l'autorité environnementale recueilli à titre de régularisation pourra prendre la forme d'une simple publication sur internet, dans les conditions prévues à l'article R. 122-7 du code de l'environnement ".
8. L'arrêté du préfet de l'Aisne du 19 mars 2020 portant régularisation de l'arrêté du 3 octobre 2013 a été pris au visa de l'avis de régularisation rendu par la mission régionale d'autorité environnementale de la région Hauts-de-France le 27 août 2019 et après une enquête publique complémentaire, prescrite par un arrêté du préfet de l'Aisne du 30 septembre 2019, qui s'est déroulée du 21 octobre 2019 au 5 novembre 2019.
En ce qui concerne l'actualisation du dossier de demande d'autorisation présenté à la mission régionale d'autorité environnementale :
9. Aux termes de l'article R. 122-7 du code de l'environnement : " I. - L'autorité compétente pour prendre la décision d'autorisation du projet transmet pour avis le dossier comprenant l'étude d'impact et le dossier de demande d'autorisation aux autorités mentionnées au V de l'article L. 122-1. (...) ". Ce V se réfère à l'autorité environnementale.
10. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances affectant un dossier de demande d'autorisation ne sont susceptibles de vicier la procédure et ainsi d'entacher d'irrégularité l'autorisation que si elles ont eu pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative. Par ailleurs, dans l'hypothèse d'une régularisation de l'avis de l'autorité environnementale, cet avis doit être rendu en tenant compte d'éventuels changements significatifs des circonstances de fait.
S'agissant de l'autorisation de nouveaux parcs éoliens :
11. Les requérants font valoir que quatre parcs éoliens ont été autorisés entre mars 2015 et juin 2019 à proximité du site d'implantation du projet.
12. Toutefois, il résulte de l'instruction que seuls deux de ces parcs éoliens, comptant respectivement six et cinq engins, se situent à moins de 15 kilomètres du parc projeté. Dans ces conditions, il ne résulte pas des pièces du dossier que l'implantation de ces parcs serait constitutive d'un changement significatif des circonstances de fait.
13. De plus, il est constant que le projet de parc en litige a déjà été pris en compte, pour l'évaluation de l'effet cumulatif de saturation du paysage, dans le cadre des procédures d'autorisation et donc dans le cadre des enquêtes publiques relatives aux quatre parcs éoliens susmentionnés.
S'agissant des modifications apportées au projet :
14. Un permis de construire modificatif délivré le 12 mai 2016 a autorisé des aménagements au projet, qui ont consisté à modifier le modèle d'éolienne, qui présente désormais une hauteur de 149,4 mètres au lieu de 149,9 mètres, à modifier l'accès aux éoliennes 3, 4, 5, 6, et 7, à déplacer l'ensemble des machines en fonction des nouvelles spécifications liées au changement de turbines et à supprimer deux postes de livraison. Il ne résulte pas de l'instruction que de telles modifications, qui ont été notifiées au préfet de l'Aisne par un porter à connaissance, constitueraient des changements significatifs.
S'agissant de la réponse à l'avis initial de l'autorité environnementale :
15. Si n'ont été communiquées à la mission régionale de l'autorité environnementale avant qu'elle n'émette son avis en août 2019 ni la réponse à l'avis émis par l'autorité environnementale en septembre 2012, qui apportait des précisions sur la présentation des résultats de l'étude d'impact ou sur des questions de méthodologie, ni l'étude Natura 2000 accompagnant cette réponse, qui concluait à " l'absence d'incidences du projet éolien vis-à-vis des enjeux de conservation " et qui au surplus a été jointe au dossier d'enquête publique, ces documents n'étaient pas destinés à combler des lacunes de l'étude d'impact d'une importance telle que l'autorité environnementale ne pouvait, en leur absence, rendre un avis sur les effets du projet sur l'environnement.
S'agissant de l'étude de la société Calidris :
16. Aux termes de l'avis émis le 27 août 2019 par la mission régionale d'autorité environnementale : " Au regard de l'ancienneté des relevés, des méthodes utilisées, notamment pour la détection des chiroptères, il n'est pas démontré que l'état initial dressé par l'étude d'impact corresponde à la réalité de la biodiversité sur le site du projet. Dès lors, l'autorité environnementale n'est pas en mesure de formuler un avis sur la bonne prise en compte des enjeux écologiques par le projet ". La Mission a recommandé en conséquence " d'actualiser le volet écologique de l'étude d'impact ".
17. A la suite de cet avis, la société Calidris a réalisé une évaluation des enjeux relatifs à la faune en octobre 2019. Cette étude a conclu que : " les enjeux sur le site du projet (...) ont peu évolué depuis 2012. Les modifications observées dans l'occupation du sol montrent que la qualité du site déjà peu riche et diverse s'est encore dégradée. Les impacts du projet éolien déjà définis comme faibles dans l'étude d'impact sont donc toujours valables en 2019 et peuvent même être réévalués à la baisse ".
18. S'il est regrettable que, compte tenu de la teneur de cet avis, cette étude de la société Calidris n'ait pas été transmise à la mission régionale de l'autorité environnementale, aucune disposition du code de l'environnement n'impose de soumettre à la Mission les éléments complémentaires que produit le pétitionnaire à la suite d'un avis qu'elle a rendu, cet avis et ces éléments complémentaires devant être joints au dossier d'enquête publique, ce qui a été fait en l'espèce, puis devant être lus ensemble par l'autorité administrative. De plus, la Mission, dans l'avis qu'elle a émis en août 2019, n'a pas remis en cause l'avis initial de l'autorité environnementale et n'a pas demandé qu'après actualisation du volet écologique de l'étude d'impact elle soit à nouveau saisie. Enfin, l'étude réalisée par la société Calidris a fait apparaître, ainsi qu'il a été dit, que les études initiales conservaient leur valeur.
19. Il résulte de ce qui précède que les irrégularités invoquées n'ont pas nui à l'information complète de la population et n'ont pas été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
En ce qui concerne la nécessité d'une nouvelle consultation de la mission régionale d'autorité environnementale :
20. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que, à la suite de l'étude diligentée par la société Calidris, la mission régionale de l'autorité environnementale aurait dû être consultée une nouvelle fois.
En ce qui concerne la consultation du directeur départemental des territoires et du directeur général de l'agence régionale de santé :
21. Lorsque le juge a sursis à statuer afin de permettre la régularisation d'un vice de forme ou de procédure affectant la légalité de l'autorisation, il appartient à l'autorité compétente de procéder à cette régularisation en faisant application des dispositions en vigueur à la date à laquelle la décision attaquée a été prise. En revanche, lorsque la régularisation concerne un vice de fond, l'autorité compétente y procède en faisant application des règles en vigueur à la date de la décision complémentaire.
22. Aux termes du III de l'article R. 122-7 du code de l'environnement en vigueur à la date du 3 octobre 2013 : " Les autorités administratives de l'Etat compétentes en matière d'environnement mentionnées à l'article R. 122-6 rendent leur avis après avoir consulté : - le ou les préfets de département sur le territoire desquels est situé le projet, au titre de leurs attributions dans le domaine de l'environnement ; - dans les cas mentionnés aux I et II de l'article R. 122-6, le ministre chargé de la santé ou le directeur général de l'agence régionale de santé dans les cas mentionnés au III du même article ".
23. Il résulte de l'instruction que le directeur départemental des territoires et le directeur général de l'agence régionale de santé ont été consultés avant que l'autorité environnementale n'émette son avis initial. Eu égard à la nature des modifications ci-dessus analysées apportées au projet, il n'est pas démontré qu'une nouvelle saisine de ces autorités, qui n'avaient formulé aucune observation particulière dans leurs avis initiaux, était nécessaire.
En ce qui concerne l'objectivité de l'avis de la mission régionale de l'autorité environnementale :
24. La mission régionale de l'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable, créée par le décret n° 2016-519 du 28 avril 2016, est une entité administrative de l'Etat séparée de l'autorité compétente pour autoriser un projet qui dispose d'une autonomie réelle la mettant en mesure de donner un avis objectif sur les projets qui lui sont soumis dans le cadre de sa mission d'autorité environnementale.
25. Aux termes de l'article R. 122-24 du code de l'environnement. : " Dans chaque région, la mission régionale d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable bénéficie de l'appui technique d'agents du service régional chargé de l'environnement selon les modalités prévues aux articles R. 122-17 et suivants du présent code et R. 104-19 et suivants du code de l'urbanisme. Pour l'exercice de cet appui, par dérogation à l'article 2 du décret n° 2009-235 du 27 février 2009 relatif à l'organisation et aux missions des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement, (...) les agents de ce service sont placés sous l'autorité fonctionnelle du président de la mission régionale d'autorité environnementale. ".
26. Selon le dernier alinéa de l'article 3 du décret n° 2015-1229 du 2 octobre 2015 relatif au Conseil général de l'environnement et du développement durable : " Dans chaque région, la mission régionale bénéficie de l'appui technique d'agents du service régional chargé de l'environnement dans les conditions fixées à l'article R. 122-24 du code de l'environnement. ".
27. D'une part, les requérants soutiennent que l'avis de la mission régionale de l'autorité environnementale n'a pas été émis par un service autonome en se prévalant de l'article 15 du règlement intérieur du Conseil général de l'environnement et du développement durable approuvé par l'arrêté du 12 mai 2016 du ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, qui dispose que : " Les projets d'avis et de décision sont préparés et transmis à la MRAE par la direction du service régional de l'environnement ", et de l'article 19 du même règlement, qui prévoit que : " le service régional de l'environnement peut être invité à présenter certains dossiers devant la MRAE ".
28. Toutefois, ces dispositions d'un règlement intérieur approuvé par un arrêté ministériel n'ont ni pour objet ni pour effet de déroger à une règle fixée par un décret en Conseil d'État dans la partie réglementaire du code de l'environnement.
29. En tout état de cause, ce même article 15 prévoit que le président de la mission régionale de l'autorité environnementale conclut avec le directeur du service régional de l'environnement une convention définissant les modalités selon lesquelles, sous l'autorité fonctionnelle du président de la Mission, celle-ci est informée des dossiers déposés, le niveau d'enjeu des dossiers est défini et certains agents du service régional de l'environnement préparent et, le cas échéant, présentent les documents sur lesquels la Mission a vocation à délibérer, le cas échéant après modification, dans le respect du principe de séparation fonctionnelle.
30. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que ces articles 15 et 19, qui organisent les modalités de l'appui technique d'agents du service régional chargé de l'environnement, violent les dispositions citées aux points 25 et 26 doit être écarté.
31. D'autre part, il résulte des dispositions citées aux points 25 et 26 que le service d'appui de la mission régionale de l'autorité environnementale est constitué d'agents de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement placés, pour l'exercice de cet appui, sous l'autorité fonctionnelle du président de la Mission.
32. Alors que la convention conclue entre la mission régionale de l'autorité environnementale et la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement, accessible sur le site internet de la Mission, mentionne les agents ainsi placés sous l'autorité fonctionnelle du président de la Mission, il ne résulte d'aucune pièce du dossier que les agents qui ont préparé en l'espèce l'avis émis par la Mission n'étaient pas alors placés sous l'autorité fonctionnelle de son président.
33. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale n'a pas été préparé par un service distinct de celui auquel les agents en charge de l'instruction de la demande d'autorisation appartiennent et pourvu de moyens administratifs et humains propres, lui permettant de préparer en toute objectivité et indépendance les éléments nécessaires à l'autorité environnementale pour émettre son avis.
En ce qui concerne l'enquête publique complémentaire :
34. S'il appartient à l'autorité administrative de procéder à l'ouverture de l'enquête publique et à la publicité de celle-ci dans les conditions fixées par les dispositions du code de l'environnement, la méconnaissance de ces dispositions n'est de nature à vicier la procédure et donc à entraîner l'illégalité de la décision prise à l'issue de l'enquête publique que si elle n'a pas permis une bonne information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération ou si elle a été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête et, par suite, sur la décision de l'autorité administrative.
35. D'une part, l'avis d'ouverture de l'enquête publique complémentaire portait très clairement le titre " avis d'enquête publique complémentaire de régularisation " et faisait état de l'arrêté du préfet de l'Aisne prescrivant la réalisation d'une enquête publique complémentaire de régularisation.
36. D'autre part, la note contextuelle jointe au dossier d'enquête publique de régularisation mentionnait d'abord la teneur de l'arrêt de la cour du 4 octobre 2019 quant au vice de procédure retenu, la mise en oeuvre d'une procédure de régularisation et les modalités de la régularisation, ensuite l'avis émis par la mission régionale d'autorité environnementale.
37. Dans ces conditions, le moyen tiré, sur le fondement des articles L. 123-14 et R. 123-13 du code de l'environnement, du caractère insuffisant de l'information du public doit être écarté.
En ce qui concerne la saisine de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites :
38. Cette commission a émis en 2014 un avis défavorable au projet. Ainsi qu'il a été dit au point 12 et, en tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction que l'implantation de nouveaux parcs éoliens à proximité du projet était constitutive d'un changement significatif des circonstances de fait qui aurait rendu nécessaire une nouvelle saisine de commission départementale de la nature, des paysages et des sites.
En ce qui concerne la caducité de l'enquête publique initiale :
39. Aux termes de l'article L. 123-17 du code de l'environnement : " Lorsque les projets qui ont fait l'objet d'une enquête publique n'ont pas été entrepris dans un délai de cinq ans à compter de la décision, une nouvelle enquête doit être conduite, à moins qu'une prorogation de cinq ans au plus ne soit décidée avant l'expiration de ce délai dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. ".
40. L'introduction d'un recours devant la juridiction administrative contre l'acte d'autorisation a pour effet de suspendre le délai de cinq ans. La suspension prend effet à compter de la date d'introduction du recours jusqu'à la date de notification au bénéficiaire de l'autorisation de la décision devenue irrévocable statuant sur ce recours.
41. Dans ces conditions, le dépôt au tribunal administratif d'Amiens, le 3 avril 2014, d'une requête tendant à l'annulation de la décision d'autorisation litigieuse du 3 octobre 2013, puis l'appel formé contre le jugement rendu par le tribunal administratif le 12 avril 2016 ont eu pour effet, même si aucune décision de prorogation n'a été prise, de suspendre le délai de cinq ans de validité de l'enquête publique prévu à l'article L. 123-17 du code de l'environnement.
42. En tout état de cause, l'enquête publique complémentaire diligentée ainsi qu'il a été dit a porté sur tous les changements, d'ailleurs non significatifs, intervenus depuis la précédente enquête publique, de sorte que l'ancienneté de l'enquête initiale n'a pas privé le public d'une garantie et n'a pas exercé d'influence sur le sens de la décision.
43. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont donc pas fondés à soutenir que le préfet de l'Aisne ne pouvait pas légalement, compte tenu de la caducité de l'enquête publique initiale, prendre une décision de régularisation.
44. Il résulte de tout ce qui précède, d'une part, que le vice retenu par la cour dans son arrêt du 4 octobre 2018 a été régularisé, d'autre part, sans qu'il soit besoin de solliciter du préfet de l'Aisne la communication de pièces supplémentaires, que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de la région Picardie du 3 octobre 2013 régularisé par l'arrêté du préfet de l'Aisne du 19 mars 2020.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
45. Les conclusions présentées par les requérants sur le fondement de ces dispositions ne peuvent qu'être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la société Eoliennes de la vallée les frais exposés par elle dans la présente instance et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête n° 16DA01098 est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la société Eoliennes de la vallée présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Thiérache à contrevent, qui a été désignée à cette fin dans les conditions prévues au dernier alinéa de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, à la société Eoliennes de la vallée et à la ministre de la transition écologique.
Copie en sera adressée au préfet de la région Hauts-de-France et au préfet de l'Aisne.
N°16DA01098 4
Par un arrêt du 4 octobre 2018, la cour administrative d'appel de Douai, saisie de la requête présentée par l'association Thiérache à contrevent et huit autres requérants, après avoir relevé que le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis de l'autorité environnementale était, en l'état du dossier et des moyens soumis à la cour, de nature à entacher d'illégalité l'arrêté du 3 octobre 2013 par lequel le préfet de la région Picardie avait délivré l'autorisation d'exploiter sept éoliennes et deux postes de livraison sur le territoire des communes d'Haution, Laigny, La Vallée au Blé et Voulpaix, et après avoir écarté l'ensemble des autres moyens, a invité les parties à faire part de leurs observations sur la mise en oeuvre éventuelle de la procédure de régularisation prévue au 2° du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement.
Par un arrêt du 7 février 2019 la cour administrative d'appel de Douai a sursis à statuer sur la légalité de l'arrêté du préfet de la région Picardie du 3 octobre 2013 jusqu'à l'expiration d'un délai de dix mois à compter de la notification de cet arrêt pour permettre, le cas échéant, la régularisation de cet arrêté.
Par des mémoires, enregistrés les 15 janvier, 17 avril, 22 juin et 24 juillet 2020, l'association Thiérache à contrevent et les autres requérants, représentés par Me C... A..., demandent à la cour, en outre, d'annuler l'arrêté du 19 mars 2020 portant régularisation de l'arrêté du 3 octobre 2013.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la directive n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement ;
- le code de l'environnement ;
- le décret n° 2015-1229 du 2 octobre 2015 relatif au Conseil général de l'environnement et du développement durable ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Claire Rollet-Perraud, président-assesseur,
- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,
- et les observations de Me D... B..., représentant la société Eoliennes de la vallée.
Une note en délibéré présentée par la société Eoliennes de la vallée a été enregistrée le 15 octobre 2020.
Considérant ce qui suit :
Sur l'objet du litige :
1. Les 25, 26 et 27 janvier 2012, la société Eoliennes de la vallée a déposé sept demandes de permis de construire pour sept éoliennes et deux postes de livraison sur le territoire des communes d'Haution, Laigny, La Vallée au Blé et Voulpaix dans le département de l'Aisne. Par un arrêté du 14 juin 2013, le préfet de la région Picardie, au titre de son pouvoir d'évocation, a délivré à la société Eoliennes de la vallée un permis de construire ce parc éolien.
2. Le 31 janvier 2012, la société pétitionnaire a sollicité la délivrance d'une autorisation d'exploiter ces éoliennes, laquelle lui a été délivrée, après une enquête publique qui s'est déroulée du 17 décembre 2012 au 18 janvier 2013, par un arrêté du préfet de la région Picardie du 3 octobre 2013.
3. L'association Thiérache à contrevent et d'autres requérants ont relevé appel du jugement du 12 avril 2016 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 3 octobre 2013.
4. Par un arrêt avant dire droit du 4 octobre 2018, la cour a invité les parties à faire part, dans un délai d'un mois, de leurs observations sur la mise en oeuvre éventuelle de la procédure de régularisation prévue au 2° du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, en raison de l'irrégularité de l'avis émis par l'autorité environnementale.
5. Par un arrêt du 7 février 2019, la cour a prononcé un sursis à statuer sur la légalité de l'arrêté du préfet de la région Picardie du 3 octobre 2013 jusqu'à l'expiration d'un délai de dix mois à compter de la notification de l'arrêt pour permettre, le cas échéant, la régularisation de cet arrêté. La société Eoliennes de la vallée a produit, par un mémoire enregistré le 24 mars 2020, l'arrêté du préfet de l'Aisne du 19 mars 2020 portant régularisation de l'arrêté du 3 octobre 2013. Les requérants demandent l'annulation de cet arrêté du 19 mars 2020.
Sur la régularisation du vice relevé par l'arrêt avant dire droit :
6. Dans son arrêt du 4 octobre 2018, la cour a jugé que : " Il résulte de l'instruction qu'en l'espèce, cet avis [de l'autorité environnementale] a été émis le 28 septembre 2012 par le secrétaire général aux affaires régionales (SGAR) " pour le préfet de région ". Ni cette autorité, ni davantage la direction régionale pour l'environnement, l'aménagement du territoire et le logement (DREAL) qui a procédé à l'instruction et préparé cet avis, ne disposaient d'une autonomie réelle vis-à-vis du préfet de région qui a pris ensuite la décision autorisant le projet. Ainsi, le préfet de région, en agissant comme autorité environnementale, n'a pas été, en l'espèce, placé dans les conditions lui permettant de remplir la mission de consultation qui lui était confiée et de donner ainsi un avis objectif sur le projet concerné. ".
7. Dans son arrêt du 7 février 2019, la cour a fixé les modalités de la régularisation dans les termes suivants : " 11. Il appartient à la société pétitionnaire de présenter un dossier de demande d'autorisation, le cas échéant actualisé, qui sera soumis pour avis à l'autorité environnementale, laquelle devra présenter les garanties d'impartialité requises. L'avis sera rendu conformément aux dispositions qui seront substituées à celles de l'article R. 122-6 du code de l'environnement ou, le cas échéant, dans les conditions définies aux articles R. 122-6 à R. 122-8 et R. 122-24 du code de l'environnement par la mission régionale de l'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable créée par le décret du 28 avril 2016. Cette mission est une entité administrative de l'Etat séparée de l'autorité compétente pour autoriser un projet et disposant d'une autonomie réelle la mettant en mesure, contrairement à ce que soutiennent l'association " Thiérache à contrevent " et autres, de donner un avis objectif sur les projets qui lui sont soumis dans le cadre de sa mission d'autorité environnementale. 12. Dans le cas où l'avis de l'autorité environnementale recueilli à titre de régularisation et rendu en tenant compte d'éventuels changements significatifs du projet et de son environnement, diffèrerait substantiellement de celui qui avait été porté à la connaissance du public à l'occasion de l'enquête publique dont le projet a fait l'objet, une enquête publique complémentaire devra être organisée à titre de régularisation, selon les modalités prévues par les articles L. 123-14 et R. 123-23 du code de l'environnement, dans le cadre de laquelle seront soumis au public, outre l'avis recueilli à titre de régularisation, tout autre élément de nature à régulariser d'éventuels vices révélés par le nouvel avis, notamment une insuffisance de l'étude d'impact. Dans le cas où aucune modification substantielle n'aurait été apportée à l'avis, l'information du public sur le nouvel avis de l'autorité environnementale recueilli à titre de régularisation pourra prendre la forme d'une simple publication sur internet, dans les conditions prévues à l'article R. 122-7 du code de l'environnement ".
8. L'arrêté du préfet de l'Aisne du 19 mars 2020 portant régularisation de l'arrêté du 3 octobre 2013 a été pris au visa de l'avis de régularisation rendu par la mission régionale d'autorité environnementale de la région Hauts-de-France le 27 août 2019 et après une enquête publique complémentaire, prescrite par un arrêté du préfet de l'Aisne du 30 septembre 2019, qui s'est déroulée du 21 octobre 2019 au 5 novembre 2019.
En ce qui concerne l'actualisation du dossier de demande d'autorisation présenté à la mission régionale d'autorité environnementale :
9. Aux termes de l'article R. 122-7 du code de l'environnement : " I. - L'autorité compétente pour prendre la décision d'autorisation du projet transmet pour avis le dossier comprenant l'étude d'impact et le dossier de demande d'autorisation aux autorités mentionnées au V de l'article L. 122-1. (...) ". Ce V se réfère à l'autorité environnementale.
10. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances affectant un dossier de demande d'autorisation ne sont susceptibles de vicier la procédure et ainsi d'entacher d'irrégularité l'autorisation que si elles ont eu pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative. Par ailleurs, dans l'hypothèse d'une régularisation de l'avis de l'autorité environnementale, cet avis doit être rendu en tenant compte d'éventuels changements significatifs des circonstances de fait.
S'agissant de l'autorisation de nouveaux parcs éoliens :
11. Les requérants font valoir que quatre parcs éoliens ont été autorisés entre mars 2015 et juin 2019 à proximité du site d'implantation du projet.
12. Toutefois, il résulte de l'instruction que seuls deux de ces parcs éoliens, comptant respectivement six et cinq engins, se situent à moins de 15 kilomètres du parc projeté. Dans ces conditions, il ne résulte pas des pièces du dossier que l'implantation de ces parcs serait constitutive d'un changement significatif des circonstances de fait.
13. De plus, il est constant que le projet de parc en litige a déjà été pris en compte, pour l'évaluation de l'effet cumulatif de saturation du paysage, dans le cadre des procédures d'autorisation et donc dans le cadre des enquêtes publiques relatives aux quatre parcs éoliens susmentionnés.
S'agissant des modifications apportées au projet :
14. Un permis de construire modificatif délivré le 12 mai 2016 a autorisé des aménagements au projet, qui ont consisté à modifier le modèle d'éolienne, qui présente désormais une hauteur de 149,4 mètres au lieu de 149,9 mètres, à modifier l'accès aux éoliennes 3, 4, 5, 6, et 7, à déplacer l'ensemble des machines en fonction des nouvelles spécifications liées au changement de turbines et à supprimer deux postes de livraison. Il ne résulte pas de l'instruction que de telles modifications, qui ont été notifiées au préfet de l'Aisne par un porter à connaissance, constitueraient des changements significatifs.
S'agissant de la réponse à l'avis initial de l'autorité environnementale :
15. Si n'ont été communiquées à la mission régionale de l'autorité environnementale avant qu'elle n'émette son avis en août 2019 ni la réponse à l'avis émis par l'autorité environnementale en septembre 2012, qui apportait des précisions sur la présentation des résultats de l'étude d'impact ou sur des questions de méthodologie, ni l'étude Natura 2000 accompagnant cette réponse, qui concluait à " l'absence d'incidences du projet éolien vis-à-vis des enjeux de conservation " et qui au surplus a été jointe au dossier d'enquête publique, ces documents n'étaient pas destinés à combler des lacunes de l'étude d'impact d'une importance telle que l'autorité environnementale ne pouvait, en leur absence, rendre un avis sur les effets du projet sur l'environnement.
S'agissant de l'étude de la société Calidris :
16. Aux termes de l'avis émis le 27 août 2019 par la mission régionale d'autorité environnementale : " Au regard de l'ancienneté des relevés, des méthodes utilisées, notamment pour la détection des chiroptères, il n'est pas démontré que l'état initial dressé par l'étude d'impact corresponde à la réalité de la biodiversité sur le site du projet. Dès lors, l'autorité environnementale n'est pas en mesure de formuler un avis sur la bonne prise en compte des enjeux écologiques par le projet ". La Mission a recommandé en conséquence " d'actualiser le volet écologique de l'étude d'impact ".
17. A la suite de cet avis, la société Calidris a réalisé une évaluation des enjeux relatifs à la faune en octobre 2019. Cette étude a conclu que : " les enjeux sur le site du projet (...) ont peu évolué depuis 2012. Les modifications observées dans l'occupation du sol montrent que la qualité du site déjà peu riche et diverse s'est encore dégradée. Les impacts du projet éolien déjà définis comme faibles dans l'étude d'impact sont donc toujours valables en 2019 et peuvent même être réévalués à la baisse ".
18. S'il est regrettable que, compte tenu de la teneur de cet avis, cette étude de la société Calidris n'ait pas été transmise à la mission régionale de l'autorité environnementale, aucune disposition du code de l'environnement n'impose de soumettre à la Mission les éléments complémentaires que produit le pétitionnaire à la suite d'un avis qu'elle a rendu, cet avis et ces éléments complémentaires devant être joints au dossier d'enquête publique, ce qui a été fait en l'espèce, puis devant être lus ensemble par l'autorité administrative. De plus, la Mission, dans l'avis qu'elle a émis en août 2019, n'a pas remis en cause l'avis initial de l'autorité environnementale et n'a pas demandé qu'après actualisation du volet écologique de l'étude d'impact elle soit à nouveau saisie. Enfin, l'étude réalisée par la société Calidris a fait apparaître, ainsi qu'il a été dit, que les études initiales conservaient leur valeur.
19. Il résulte de ce qui précède que les irrégularités invoquées n'ont pas nui à l'information complète de la population et n'ont pas été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
En ce qui concerne la nécessité d'une nouvelle consultation de la mission régionale d'autorité environnementale :
20. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que, à la suite de l'étude diligentée par la société Calidris, la mission régionale de l'autorité environnementale aurait dû être consultée une nouvelle fois.
En ce qui concerne la consultation du directeur départemental des territoires et du directeur général de l'agence régionale de santé :
21. Lorsque le juge a sursis à statuer afin de permettre la régularisation d'un vice de forme ou de procédure affectant la légalité de l'autorisation, il appartient à l'autorité compétente de procéder à cette régularisation en faisant application des dispositions en vigueur à la date à laquelle la décision attaquée a été prise. En revanche, lorsque la régularisation concerne un vice de fond, l'autorité compétente y procède en faisant application des règles en vigueur à la date de la décision complémentaire.
22. Aux termes du III de l'article R. 122-7 du code de l'environnement en vigueur à la date du 3 octobre 2013 : " Les autorités administratives de l'Etat compétentes en matière d'environnement mentionnées à l'article R. 122-6 rendent leur avis après avoir consulté : - le ou les préfets de département sur le territoire desquels est situé le projet, au titre de leurs attributions dans le domaine de l'environnement ; - dans les cas mentionnés aux I et II de l'article R. 122-6, le ministre chargé de la santé ou le directeur général de l'agence régionale de santé dans les cas mentionnés au III du même article ".
23. Il résulte de l'instruction que le directeur départemental des territoires et le directeur général de l'agence régionale de santé ont été consultés avant que l'autorité environnementale n'émette son avis initial. Eu égard à la nature des modifications ci-dessus analysées apportées au projet, il n'est pas démontré qu'une nouvelle saisine de ces autorités, qui n'avaient formulé aucune observation particulière dans leurs avis initiaux, était nécessaire.
En ce qui concerne l'objectivité de l'avis de la mission régionale de l'autorité environnementale :
24. La mission régionale de l'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable, créée par le décret n° 2016-519 du 28 avril 2016, est une entité administrative de l'Etat séparée de l'autorité compétente pour autoriser un projet qui dispose d'une autonomie réelle la mettant en mesure de donner un avis objectif sur les projets qui lui sont soumis dans le cadre de sa mission d'autorité environnementale.
25. Aux termes de l'article R. 122-24 du code de l'environnement. : " Dans chaque région, la mission régionale d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable bénéficie de l'appui technique d'agents du service régional chargé de l'environnement selon les modalités prévues aux articles R. 122-17 et suivants du présent code et R. 104-19 et suivants du code de l'urbanisme. Pour l'exercice de cet appui, par dérogation à l'article 2 du décret n° 2009-235 du 27 février 2009 relatif à l'organisation et aux missions des directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement, (...) les agents de ce service sont placés sous l'autorité fonctionnelle du président de la mission régionale d'autorité environnementale. ".
26. Selon le dernier alinéa de l'article 3 du décret n° 2015-1229 du 2 octobre 2015 relatif au Conseil général de l'environnement et du développement durable : " Dans chaque région, la mission régionale bénéficie de l'appui technique d'agents du service régional chargé de l'environnement dans les conditions fixées à l'article R. 122-24 du code de l'environnement. ".
27. D'une part, les requérants soutiennent que l'avis de la mission régionale de l'autorité environnementale n'a pas été émis par un service autonome en se prévalant de l'article 15 du règlement intérieur du Conseil général de l'environnement et du développement durable approuvé par l'arrêté du 12 mai 2016 du ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, qui dispose que : " Les projets d'avis et de décision sont préparés et transmis à la MRAE par la direction du service régional de l'environnement ", et de l'article 19 du même règlement, qui prévoit que : " le service régional de l'environnement peut être invité à présenter certains dossiers devant la MRAE ".
28. Toutefois, ces dispositions d'un règlement intérieur approuvé par un arrêté ministériel n'ont ni pour objet ni pour effet de déroger à une règle fixée par un décret en Conseil d'État dans la partie réglementaire du code de l'environnement.
29. En tout état de cause, ce même article 15 prévoit que le président de la mission régionale de l'autorité environnementale conclut avec le directeur du service régional de l'environnement une convention définissant les modalités selon lesquelles, sous l'autorité fonctionnelle du président de la Mission, celle-ci est informée des dossiers déposés, le niveau d'enjeu des dossiers est défini et certains agents du service régional de l'environnement préparent et, le cas échéant, présentent les documents sur lesquels la Mission a vocation à délibérer, le cas échéant après modification, dans le respect du principe de séparation fonctionnelle.
30. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que ces articles 15 et 19, qui organisent les modalités de l'appui technique d'agents du service régional chargé de l'environnement, violent les dispositions citées aux points 25 et 26 doit être écarté.
31. D'autre part, il résulte des dispositions citées aux points 25 et 26 que le service d'appui de la mission régionale de l'autorité environnementale est constitué d'agents de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement placés, pour l'exercice de cet appui, sous l'autorité fonctionnelle du président de la Mission.
32. Alors que la convention conclue entre la mission régionale de l'autorité environnementale et la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement, accessible sur le site internet de la Mission, mentionne les agents ainsi placés sous l'autorité fonctionnelle du président de la Mission, il ne résulte d'aucune pièce du dossier que les agents qui ont préparé en l'espèce l'avis émis par la Mission n'étaient pas alors placés sous l'autorité fonctionnelle de son président.
33. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale n'a pas été préparé par un service distinct de celui auquel les agents en charge de l'instruction de la demande d'autorisation appartiennent et pourvu de moyens administratifs et humains propres, lui permettant de préparer en toute objectivité et indépendance les éléments nécessaires à l'autorité environnementale pour émettre son avis.
En ce qui concerne l'enquête publique complémentaire :
34. S'il appartient à l'autorité administrative de procéder à l'ouverture de l'enquête publique et à la publicité de celle-ci dans les conditions fixées par les dispositions du code de l'environnement, la méconnaissance de ces dispositions n'est de nature à vicier la procédure et donc à entraîner l'illégalité de la décision prise à l'issue de l'enquête publique que si elle n'a pas permis une bonne information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération ou si elle a été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête et, par suite, sur la décision de l'autorité administrative.
35. D'une part, l'avis d'ouverture de l'enquête publique complémentaire portait très clairement le titre " avis d'enquête publique complémentaire de régularisation " et faisait état de l'arrêté du préfet de l'Aisne prescrivant la réalisation d'une enquête publique complémentaire de régularisation.
36. D'autre part, la note contextuelle jointe au dossier d'enquête publique de régularisation mentionnait d'abord la teneur de l'arrêt de la cour du 4 octobre 2019 quant au vice de procédure retenu, la mise en oeuvre d'une procédure de régularisation et les modalités de la régularisation, ensuite l'avis émis par la mission régionale d'autorité environnementale.
37. Dans ces conditions, le moyen tiré, sur le fondement des articles L. 123-14 et R. 123-13 du code de l'environnement, du caractère insuffisant de l'information du public doit être écarté.
En ce qui concerne la saisine de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites :
38. Cette commission a émis en 2014 un avis défavorable au projet. Ainsi qu'il a été dit au point 12 et, en tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction que l'implantation de nouveaux parcs éoliens à proximité du projet était constitutive d'un changement significatif des circonstances de fait qui aurait rendu nécessaire une nouvelle saisine de commission départementale de la nature, des paysages et des sites.
En ce qui concerne la caducité de l'enquête publique initiale :
39. Aux termes de l'article L. 123-17 du code de l'environnement : " Lorsque les projets qui ont fait l'objet d'une enquête publique n'ont pas été entrepris dans un délai de cinq ans à compter de la décision, une nouvelle enquête doit être conduite, à moins qu'une prorogation de cinq ans au plus ne soit décidée avant l'expiration de ce délai dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. ".
40. L'introduction d'un recours devant la juridiction administrative contre l'acte d'autorisation a pour effet de suspendre le délai de cinq ans. La suspension prend effet à compter de la date d'introduction du recours jusqu'à la date de notification au bénéficiaire de l'autorisation de la décision devenue irrévocable statuant sur ce recours.
41. Dans ces conditions, le dépôt au tribunal administratif d'Amiens, le 3 avril 2014, d'une requête tendant à l'annulation de la décision d'autorisation litigieuse du 3 octobre 2013, puis l'appel formé contre le jugement rendu par le tribunal administratif le 12 avril 2016 ont eu pour effet, même si aucune décision de prorogation n'a été prise, de suspendre le délai de cinq ans de validité de l'enquête publique prévu à l'article L. 123-17 du code de l'environnement.
42. En tout état de cause, l'enquête publique complémentaire diligentée ainsi qu'il a été dit a porté sur tous les changements, d'ailleurs non significatifs, intervenus depuis la précédente enquête publique, de sorte que l'ancienneté de l'enquête initiale n'a pas privé le public d'une garantie et n'a pas exercé d'influence sur le sens de la décision.
43. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont donc pas fondés à soutenir que le préfet de l'Aisne ne pouvait pas légalement, compte tenu de la caducité de l'enquête publique initiale, prendre une décision de régularisation.
44. Il résulte de tout ce qui précède, d'une part, que le vice retenu par la cour dans son arrêt du 4 octobre 2018 a été régularisé, d'autre part, sans qu'il soit besoin de solliciter du préfet de l'Aisne la communication de pièces supplémentaires, que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de la région Picardie du 3 octobre 2013 régularisé par l'arrêté du préfet de l'Aisne du 19 mars 2020.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
45. Les conclusions présentées par les requérants sur le fondement de ces dispositions ne peuvent qu'être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la société Eoliennes de la vallée les frais exposés par elle dans la présente instance et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête n° 16DA01098 est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la société Eoliennes de la vallée présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Thiérache à contrevent, qui a été désignée à cette fin dans les conditions prévues au dernier alinéa de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, à la société Eoliennes de la vallée et à la ministre de la transition écologique.
Copie en sera adressée au préfet de la région Hauts-de-France et au préfet de l'Aisne.
N°16DA01098 4