CAA de DOUAI, 2ème chambre, 22/09/2020, 19DA01755, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 30 mars 2018 du directeur de la maison de retraite départementale de l'Aisne lui infligeant la sanction de l'avertissement.

Par un jugement n° 1801553 du 18 juin 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 juillet 2019 et le 4 mars 2020, Mme B..., représentée par Me C... D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 30 mars 2018 du directeur de la maison de retraite départementale de l'Aisne ;

3°) de mettre une somme de 2 000 euros à la charge de la maison de retraite départementale de l'Aisne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- la loi n° 83-634 du 10 juillet 1983 ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le décret n° 89-822 du 7 novembre 1989 ;
- le code de justice administrative.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., attachée d'administration hospitalière titulaire, exerçant ses fonctions à la maison de retraite départementale de l'Aisne depuis le 11 mars 2011, s'est vu infliger la sanction de l'avertissement par une décision du 30 mars 2018 du directeur de cet établissement. Elle relève appel du jugement du 18 juin 2019 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

2. Aux termes de l'article 29 de la loi du 10 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale ". Aux termes de l'article 81 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / Premier groupe : / L'avertissement (...) ".

3. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

4. Le directeur de la maison de retraite départementale de l'Aisne a prononcé à l'encontre de Mme B... la sanction de l'avertissement en litige en se fondant sur le motif tiré de l'utilisation répétée d'un ordinateur à des fins personnelles hors du poste de travail, sans autorisation et portant potentiellement atteinte à la confidentialité des données concernant les résidents.

Sur la matérialité des faits et leur qualification :

5. Il ressort des pièces du dossier, en particulier d'un courrier électronique du 6 juillet 2017 rédigé par trois agents du service, d'un rapport circonstancié en date du 12 juillet 2017 et d'un relevé de l'historique des connexions internet d'un ordinateur du service autre que le sien, que, au moins à deux reprises, les 6 juillet et 10 juillet 2017, Mme B... a utilisé l'ordinateur de ce service à des fins personnelles, en méconnaissance des dispositions de l'article 5 du règlement intérieur de l'établissement selon lesquelles les membres du personnel ne doivent pas utiliser le matériel qui leur est confié en vue de l'exécution de leur travail à d'autres fins et notamment à des fins personnelles sans autorisation, celle-ci étant écrite et délivrée par la direction pour une durée déterminée. Mme B... ne saurait soutenir que l'adoption de ce règlement est intervenue au terme d'une procédure irrégulière, les vices de forme et de procédure dont un tel acte serait entaché ne pouvant être utilement invoqués que dans le cadre du recours pour excès de pouvoir dirigé contre l'acte réglementaire lui-même et introduit avant l'expiration du délai de recours contentieux. En outre, et en tout état de cause, la maison de retraite départementale de l'Aisne justifie, d'une part, de la consultation préalable du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et du comité technique d'établissement, auxquelles Mme B... a d'ailleurs participé, d'autre part, que ce règlement intérieur a pris effet au 1er janvier 2014, ainsi que le précise son article 14, et, enfin, qu'il a fait l'objet d'une diffusion à l'ensemble du personnel via une publication sur le serveur de la maison de retraite ainsi que d'un affichage au sein de l'établissement. Mme B... ne saurait ainsi sérieusement soutenir qu'elle ignorait l'existence et le contenu de ce règlement intérieur qui, contrairement à ce qu'elle soutient, lui était opposable et dont elle n'établit pas, s'agissant de la prohibition de l'utilisation du matériel informatique à des fins personnelles qu'il pose, l'illégalité en se bornant à invoquer des orientations de la commission nationale de l'informatique et des libertés selon lesquelles une telle utilisation serait " tolérée ".

6. Par ailleurs, ni la circonstance, au demeurant non établie, selon laquelle l'époux d'une infirmière aurait également utilisé un ordinateur du service, ni les circonstances selon lesquelles l'employeur n'aurait pas mis en place une charte informatique concernant l'utilisation de l'outil internet et ne se serait pas conformé aux préconisations de la commission nationale de l'informatique et des libertés relatives à la gestion des mots de passe, ne sont de nature à soustraire Mme B... au respect des dispositions du règlement intérieur relatives aux conditions d'utilisation du matériel informatique de l'établissement, celle-ci exerçant les fonctions de cadre A au sein de l'établissement et devant ainsi avoir, vis-à-vis de l'ensemble des agents, un comportement exemplaire quant au respect des règles applicables. Dans ces conditions, les faits reprochés à Mme B..., dont la matérialité est établie, présentent un caractère fautif et sont de nature à justifier une sanction disciplinaire.

Sur le caractère proportionné de la sanction :

7. Si Mme B... soutient que le temps cumulé des deux connexions établies n'a pas excédé cinq minutes, qu'elles n'ont ainsi pu être de nature à perturber le bon fonctionnement du service, et qu'à aucun moment, elle n'a accédé à des données confidentielles relatives aux résidents, ces circonstances ont été prises en compte par le directeur de la maison de retraite départementale de l'Aisne qui, en faisant le choix d'infliger à l'encontre de Mme B... la sanction de l'avertissement, première sanction du premier groupe non inscrite au dossier du fonctionnaire, n'a pas prononcé à son encontre une sanction disproportionnée. Cette décision n'est ainsi pas entachée d'une erreur d'appréciation.

8. Enfin, si Mme B... fait valoir que la sanction litigieuse s'inscrit dans un contexte de harcèlement moral dont elle ne constitue qu'une des manifestations et a ainsi été adoptée dans la seule intention de lui nuire, elle ne produit aucun élément de nature à faire présumer qu'elle aurait subi des agissements constitutifs d'un tel harcèlement.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en litige. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de Mme B... le versement à la maison de retraite départementale de l'Aisne, d'une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.


DÉCIDE :


Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la maison de retraite départementale de l'Aisne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la maison de retraite départementale de l'Aisne.

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