CAA de LYON, 7ème chambre, 26/06/2020, 19LY04533, Inédit au recueil Lebon
CAA de LYON, 7ème chambre, 26/06/2020, 19LY04533, Inédit au recueil Lebon
CAA de LYON - 7ème chambre
- N° 19LY04533
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
vendredi
26 juin 2020
- Président
- M. JOSSERAND-JAILLET
- Rapporteur
- M. Daniel JOSSERAND-JAILLET
- Avocat(s)
- CANS
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 26 août 2019 par lesquelles le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a désigné un pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français durant un an.
Par un jugement n° 1905703 du 25 septembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 9 décembre 2019, M. B..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble du 25 septembre 2019 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, une autorisation provisoire de séjour et de travail et de prendre une nouvelle décision dans un délai d'un mois, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de cent euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire :
- étant mineur, il ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en application du 1° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a commis une erreur de fait en considérant qu'il n'avait pas présenté de demande de titre de séjour ; il s'est présenté le 2 novembre 2018 pour déposer une demande d'asile et a ainsi sollicité un titre de séjour ;
- en ne prenant pas en compte sa volonté de demander l'asile et les risques qu'il encourt, le préfet n'a pas examiné l'ensemble de sa situation personnelle ;
- son droit à être entendu préalablement a été méconnu ;
- l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile fait obstacle à ce qu'il lui soit fait obligation de quitter le territoire français avant que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides n'ait examiné sa demande d'asile présentée le 2 novembre 2018 ;
- l'obligation de quitter le territoire en litige méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
S'agissant du refus de délai de départ volontaire :
- le refus de délai de départ volontaire méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- ce refus est illégal du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire ;
S'agissant de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
- l'interdiction de retour méconnaît le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire sans délai ;
S'agissant de la décision fixant le pays de destination :
- la décision fixant le pays de destination est intervenue en violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire sans délai.
La requête a été communiquée au préfet de l'Isère, qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code civil ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de M. Josserand-Jaillet, président, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. C... B..., ressortissant ivoirien, est entré irrégulièrement en France le 9 juillet 2018 selon ses déclarations. Considéré majeur par les services de l'aide sociale à l'enfance, il a été interpellé en flagrance et placé en garde à vue le 26 août 2019. A l'issue de cette dernière, le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant un an. M. B... relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / 1° L'étranger mineur de dix-huit ans (...) ". Aux termes de l'article 388 du code civil : " Le mineur est l'individu de l'un ou l'autre sexe qui n'a point encore l'âge de dix-huit ans accomplis. / Les examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l'âge, en l'absence de documents d'identité valables et lorsque l'âge allégué n'est pas vraisemblable, ne peuvent être réalisés que sur décision de l'autorité judiciaire et après recueil de l'accord de l'intéressé. / Les conclusions de ces examens, qui doivent préciser la marge d'erreur, ne peuvent à elles seules permettre de déterminer si l'intéressé est mineur. Le doute profite à l'intéressé (...) ".
3. M. B... s'est présenté le 6 septembre 2018 auprès des services de l'aide sociale à l'enfance en déclarant être né le 27 novembre 2001 en République de Côte d'Ivoire en faisant valoir, sans la produire à l'instance, qu'il possède une photographie d'un extrait d'acte de naissance. En relevant son comportement, son apparence et les incohérences dans son récit, le rapport d'évaluation conclut à la majorité de l'intéressé. Il ressort du procès-verbal d'audition de M. B... par les services de police le 22 janvier 2019 que le tirage sur papier de la photographie d'extrait du registre des actes d'état civil dont il vient d'être parlé n'a pu, par sa mauvaise qualité, être exploité par le service de la fraude documentaire de la police aux frontières. Le rapprochement de ses déclarations respectives lors de cette audition et devant les évaluateurs de l'aide sociale à l'enfance révèle des discordances et l'exposé de circonstances imprécises et peu crédibles, notamment pour l'établissement de son identité et de la minorité qu'il allègue. Par ailleurs, s'il fait valoir que son conseil a été convoqué pour une audience le 18 octobre 2019 par le juge des enfants, il n'a pas fait état de l'issue de cette procédure quant à laquelle il n'apporte au demeurant aucune précision et en tout état de cause postérieure à la décision en litige. Dans ces conditions, M. B... ne justifie pas entrer dans le champ d'application des dispositions précitées du 1° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il n'est pas plus établi que le préfet aurait commis une erreur de fait sur son âge.
4. En deuxième lieu, si l'obligation de quitter le territoire en litige ne comporte pas l'énoncé de l'ensemble des éléments relatifs à la situation de M. B..., et notamment de ses allégations sur une demande d'asile, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait négligé de procéder à l'examen particulier de la situation de l'intéressé.
5. En troisième lieu, selon la jurisprudence de la Cour de justice de 1'Union européenne (C 166/13 du 5 novembre 2014) rendue sur renvoi préjudiciel d'une juridiction administrative française, le droit d'être entendu dans toute procédure, tel qu'il s'applique dans le cadre de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier et, notamment, de l'article 6 de celle-ci, doit être interprété en ce sens qu'il ne s'oppose pas à ce qu'une autorité nationale n'entende pas le ressortissant d'un pays tiers spécifiquement au sujet d'une décision de retour lorsque, après avoir constaté le caractère irrégulier de son séjour sur le territoire national à l'issue d'une procédure ayant pleinement respecté son droit d'être entendu, elle envisage de prendre à son égard une telle décision, que cette décision de retour soit consécutive ou non à un refus de titre de séjour.
6. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., après un préalable à l'évaluation de sa minorité par l'aide sociale à l'enfance sur les enjeux de celle-ci pour son séjour, a été entendu, le 22 janvier 2019, par un officier de police judiciaire de la sûreté départementale sur l'ensemble des circonstances de son départ de Côte d'Ivoire, de son voyage, de son entrée en France et de son séjour. A cette occasion, il a notamment eu connaissance des conclusions de l'analyse documentaire aux termes de laquelle le document qu'il avait présenté pour justifier de sa minorité ne pouvait être exploité. Par ailleurs, il a pu exposer sa situation lors de sa garde à vue le 26 août 2019, notamment au regard du trouble à l'ordre public pour lequel il avait été interpellé. Il a ainsi été informé qu'il était susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement et il a pu, lors de ces auditions, faire état de tous les éléments relatifs à sa situation. Il a eu dans ces conditions la possibilité, au cours de cet entretien, de faire connaître des observations utiles et pertinentes de nature à influer sur la décision prise à son encontre. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé disposait d'informations tenant à sa situation personnelle qu'il aurait été empêché de porter à la connaissance de l'administration avant que ne soit prise à son encontre la mesure qu'il conteste. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait le principe général du droit d'être entendu, qui est au nombre des principes fondamentaux du droit de l'Union européenne et qui est notamment énoncé à l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, doit être écarté.
7. En quatrième lieu, en vertu des articles L. 741-1, L. 744-1 et R. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, tout étranger souhaitant demander l'asile se présente en personne à l'autorité administrative compétente, qui enregistre sa demande, en principe, au plus tard trois jours ouvrés après sa présentation et procède à la détermination de l'État responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013. L'autorité administrative compétente peut prévoir que la demande est présentée auprès de la personne morale à laquelle a été déléguée, par convention, la possibilité d'assurer certaines prestations d'accueil, d'information et d'accompagnement social et administratif des demandeurs d'asile pendant la période d'instruction de leur demande. La structure de pré-accueil est notamment chargée de renseigner en ligne le formulaire de demande pour le compte du demandeur d'asile et de prendre rendez-vous avec le guichet unique pour le demandeur d'asile et lui remettre une convocation.
8. Hors les cas visés tant à l'article L. 556-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile concernant l'hypothèse d'un ressortissant étranger placé en rétention, qu'à l'article L. 743-2 du même code, le préfet saisi d'une demande d'asile est tenu de délivrer au demandeur l'attestation mentionnée à l'article L. 741-1 précité de ce code. Il résulte, en outre, de ces dispositions que le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France bénéficie en principe du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et, le cas échéant, de celle de la Cour nationale du droit d'asile. Par voie de conséquence, les dispositions en cause font ainsi nécessairement obstacle à ce qu'un préfet prenne à l'encontre de l'étranger qui en a clairement exprimé le souhait avant un éventuel placement en rétention une quelconque mesure d'éloignement hormis les cas où l'étranger entrerait dans l'un des cas visés à l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où l'attestation de demande d'asile peut être refusée.
9. M. B..., qui déclare être entré en France le 9 juillet 2018, fait valoir, pour la première fois devant le juge, avoir demandé l'asile dès le 2 novembre 2018. Toutefois, il ne produit à l'appui de cette affirmation qu'une attestation de l'association ADATE - plate-forme d'accueil des demandeurs d'asile, dont il ressort que celle-ci a effectué pour l'intéressé une " demande de saisine du parquet en vue de la nomination d'un administrateur ad hoc ". S'il établit ainsi avoir tenté de se faire reconnaître comme mineur par l'autorité judiciaire par la voie de la structure de pré-accueil mentionnée au point 7, cette démarche ne saurait être assimilée à une demande d'asile ou de titre de séjour, dont M. B... ne justifie par ailleurs pas avant l'intervention de l'obligation de quitter le territoire en litige. Dès lors, le préfet de l'Isère, dont il a été dit au point 4 qu'il a procédé à l'examen particulier de la situation de M. B..., n'a pas méconnu l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni entaché sa décision d'une erreur de fait.
10. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " Ces stipulations ne sauraient, en tout état de cause, s'interpréter comme comportant pour un État l'obligation générale de respecter le choix, par un demandeur de titre de séjour, d'y établir sa résidence privée et de permettre son installation ou le regroupement de sa famille sur son territoire.
11. M. B... est entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations, le 9 juillet 2018 en faisant valoir une minorité qui ne lui a pas été reconnue. Sans domicile fixe, il ne fait état d'aucune attache réelle en France. Sa mère réside dans son pays d'origine. Il a été interpellé, ainsi que le relève la motivation de la décision en litige, en situation de trouble à l'ordre public. Dans ces conditions, l'obligation de quitter le territoire en litige ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis. Par suite, elle ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni n'est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'elle est susceptible de comporter pour la situation personnelle de l'intéressé.
Sur la légalité du refus de délai de départ volontaire :
12. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 11, la décision refusant à M. B... un délai de départ volontaire, prise notamment au regard de l'ordre public, ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'elle est susceptible de comporter pour la situation personnelle de M. B....
13. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'appui de sa demande tendant à l'annulation de la décision portant refus d'un délai de départ volontaire.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
14. M. B..., dont il a été dit ci-dessus qu'il n'a formé aucune demande d'asile depuis son entrée en France en juillet 2018, n'assortit d'aucune précision ses allégations sur les risques qu'il encourrait en cas de retour en Côte d'Ivoire, son pays d'origine. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est ainsi dépourvu de toute précision permettant d'en apprécier le bien-fondé.
15. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'appui de sa demande tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination.
Sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire français :
16. En premier lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III (...) [est décidée] par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".
17. Dans les circonstances de l'espèce, pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 9, le préfet de l'Isère n'a pas méconnu les dispositions précitées en décidant d'interdire à M. B... le retour sur le territoire français durant un an.
18. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 11, la décision portant interdiction de retour de M. B... sur le territoire durant un an ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'elle est susceptible de comporter pour la situation personnelle de M. B....
19. Enfin, il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'appui de sa demande tendant à l'annulation de l'interdiction de retour sur le territoire français.
20. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 25 mai 2020 à laquelle siégeaient :
M. Josserand-Jaillet, président de chambre,
M. Seillet, président assesseur,
Mme Burnichon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 26 juin 2020.
N° 19LY04533
Procédure contentieuse antérieure
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 26 août 2019 par lesquelles le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a désigné un pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français durant un an.
Par un jugement n° 1905703 du 25 septembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 9 décembre 2019, M. B..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble du 25 septembre 2019 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, une autorisation provisoire de séjour et de travail et de prendre une nouvelle décision dans un délai d'un mois, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de cent euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire :
- étant mineur, il ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en application du 1° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a commis une erreur de fait en considérant qu'il n'avait pas présenté de demande de titre de séjour ; il s'est présenté le 2 novembre 2018 pour déposer une demande d'asile et a ainsi sollicité un titre de séjour ;
- en ne prenant pas en compte sa volonté de demander l'asile et les risques qu'il encourt, le préfet n'a pas examiné l'ensemble de sa situation personnelle ;
- son droit à être entendu préalablement a été méconnu ;
- l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile fait obstacle à ce qu'il lui soit fait obligation de quitter le territoire français avant que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides n'ait examiné sa demande d'asile présentée le 2 novembre 2018 ;
- l'obligation de quitter le territoire en litige méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
S'agissant du refus de délai de départ volontaire :
- le refus de délai de départ volontaire méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- ce refus est illégal du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire ;
S'agissant de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
- l'interdiction de retour méconnaît le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire sans délai ;
S'agissant de la décision fixant le pays de destination :
- la décision fixant le pays de destination est intervenue en violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire sans délai.
La requête a été communiquée au préfet de l'Isère, qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code civil ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de M. Josserand-Jaillet, président, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. C... B..., ressortissant ivoirien, est entré irrégulièrement en France le 9 juillet 2018 selon ses déclarations. Considéré majeur par les services de l'aide sociale à l'enfance, il a été interpellé en flagrance et placé en garde à vue le 26 août 2019. A l'issue de cette dernière, le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant un an. M. B... relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / 1° L'étranger mineur de dix-huit ans (...) ". Aux termes de l'article 388 du code civil : " Le mineur est l'individu de l'un ou l'autre sexe qui n'a point encore l'âge de dix-huit ans accomplis. / Les examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l'âge, en l'absence de documents d'identité valables et lorsque l'âge allégué n'est pas vraisemblable, ne peuvent être réalisés que sur décision de l'autorité judiciaire et après recueil de l'accord de l'intéressé. / Les conclusions de ces examens, qui doivent préciser la marge d'erreur, ne peuvent à elles seules permettre de déterminer si l'intéressé est mineur. Le doute profite à l'intéressé (...) ".
3. M. B... s'est présenté le 6 septembre 2018 auprès des services de l'aide sociale à l'enfance en déclarant être né le 27 novembre 2001 en République de Côte d'Ivoire en faisant valoir, sans la produire à l'instance, qu'il possède une photographie d'un extrait d'acte de naissance. En relevant son comportement, son apparence et les incohérences dans son récit, le rapport d'évaluation conclut à la majorité de l'intéressé. Il ressort du procès-verbal d'audition de M. B... par les services de police le 22 janvier 2019 que le tirage sur papier de la photographie d'extrait du registre des actes d'état civil dont il vient d'être parlé n'a pu, par sa mauvaise qualité, être exploité par le service de la fraude documentaire de la police aux frontières. Le rapprochement de ses déclarations respectives lors de cette audition et devant les évaluateurs de l'aide sociale à l'enfance révèle des discordances et l'exposé de circonstances imprécises et peu crédibles, notamment pour l'établissement de son identité et de la minorité qu'il allègue. Par ailleurs, s'il fait valoir que son conseil a été convoqué pour une audience le 18 octobre 2019 par le juge des enfants, il n'a pas fait état de l'issue de cette procédure quant à laquelle il n'apporte au demeurant aucune précision et en tout état de cause postérieure à la décision en litige. Dans ces conditions, M. B... ne justifie pas entrer dans le champ d'application des dispositions précitées du 1° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il n'est pas plus établi que le préfet aurait commis une erreur de fait sur son âge.
4. En deuxième lieu, si l'obligation de quitter le territoire en litige ne comporte pas l'énoncé de l'ensemble des éléments relatifs à la situation de M. B..., et notamment de ses allégations sur une demande d'asile, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait négligé de procéder à l'examen particulier de la situation de l'intéressé.
5. En troisième lieu, selon la jurisprudence de la Cour de justice de 1'Union européenne (C 166/13 du 5 novembre 2014) rendue sur renvoi préjudiciel d'une juridiction administrative française, le droit d'être entendu dans toute procédure, tel qu'il s'applique dans le cadre de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier et, notamment, de l'article 6 de celle-ci, doit être interprété en ce sens qu'il ne s'oppose pas à ce qu'une autorité nationale n'entende pas le ressortissant d'un pays tiers spécifiquement au sujet d'une décision de retour lorsque, après avoir constaté le caractère irrégulier de son séjour sur le territoire national à l'issue d'une procédure ayant pleinement respecté son droit d'être entendu, elle envisage de prendre à son égard une telle décision, que cette décision de retour soit consécutive ou non à un refus de titre de séjour.
6. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., après un préalable à l'évaluation de sa minorité par l'aide sociale à l'enfance sur les enjeux de celle-ci pour son séjour, a été entendu, le 22 janvier 2019, par un officier de police judiciaire de la sûreté départementale sur l'ensemble des circonstances de son départ de Côte d'Ivoire, de son voyage, de son entrée en France et de son séjour. A cette occasion, il a notamment eu connaissance des conclusions de l'analyse documentaire aux termes de laquelle le document qu'il avait présenté pour justifier de sa minorité ne pouvait être exploité. Par ailleurs, il a pu exposer sa situation lors de sa garde à vue le 26 août 2019, notamment au regard du trouble à l'ordre public pour lequel il avait été interpellé. Il a ainsi été informé qu'il était susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement et il a pu, lors de ces auditions, faire état de tous les éléments relatifs à sa situation. Il a eu dans ces conditions la possibilité, au cours de cet entretien, de faire connaître des observations utiles et pertinentes de nature à influer sur la décision prise à son encontre. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé disposait d'informations tenant à sa situation personnelle qu'il aurait été empêché de porter à la connaissance de l'administration avant que ne soit prise à son encontre la mesure qu'il conteste. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait le principe général du droit d'être entendu, qui est au nombre des principes fondamentaux du droit de l'Union européenne et qui est notamment énoncé à l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, doit être écarté.
7. En quatrième lieu, en vertu des articles L. 741-1, L. 744-1 et R. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, tout étranger souhaitant demander l'asile se présente en personne à l'autorité administrative compétente, qui enregistre sa demande, en principe, au plus tard trois jours ouvrés après sa présentation et procède à la détermination de l'État responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013. L'autorité administrative compétente peut prévoir que la demande est présentée auprès de la personne morale à laquelle a été déléguée, par convention, la possibilité d'assurer certaines prestations d'accueil, d'information et d'accompagnement social et administratif des demandeurs d'asile pendant la période d'instruction de leur demande. La structure de pré-accueil est notamment chargée de renseigner en ligne le formulaire de demande pour le compte du demandeur d'asile et de prendre rendez-vous avec le guichet unique pour le demandeur d'asile et lui remettre une convocation.
8. Hors les cas visés tant à l'article L. 556-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile concernant l'hypothèse d'un ressortissant étranger placé en rétention, qu'à l'article L. 743-2 du même code, le préfet saisi d'une demande d'asile est tenu de délivrer au demandeur l'attestation mentionnée à l'article L. 741-1 précité de ce code. Il résulte, en outre, de ces dispositions que le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France bénéficie en principe du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et, le cas échéant, de celle de la Cour nationale du droit d'asile. Par voie de conséquence, les dispositions en cause font ainsi nécessairement obstacle à ce qu'un préfet prenne à l'encontre de l'étranger qui en a clairement exprimé le souhait avant un éventuel placement en rétention une quelconque mesure d'éloignement hormis les cas où l'étranger entrerait dans l'un des cas visés à l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où l'attestation de demande d'asile peut être refusée.
9. M. B..., qui déclare être entré en France le 9 juillet 2018, fait valoir, pour la première fois devant le juge, avoir demandé l'asile dès le 2 novembre 2018. Toutefois, il ne produit à l'appui de cette affirmation qu'une attestation de l'association ADATE - plate-forme d'accueil des demandeurs d'asile, dont il ressort que celle-ci a effectué pour l'intéressé une " demande de saisine du parquet en vue de la nomination d'un administrateur ad hoc ". S'il établit ainsi avoir tenté de se faire reconnaître comme mineur par l'autorité judiciaire par la voie de la structure de pré-accueil mentionnée au point 7, cette démarche ne saurait être assimilée à une demande d'asile ou de titre de séjour, dont M. B... ne justifie par ailleurs pas avant l'intervention de l'obligation de quitter le territoire en litige. Dès lors, le préfet de l'Isère, dont il a été dit au point 4 qu'il a procédé à l'examen particulier de la situation de M. B..., n'a pas méconnu l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni entaché sa décision d'une erreur de fait.
10. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " Ces stipulations ne sauraient, en tout état de cause, s'interpréter comme comportant pour un État l'obligation générale de respecter le choix, par un demandeur de titre de séjour, d'y établir sa résidence privée et de permettre son installation ou le regroupement de sa famille sur son territoire.
11. M. B... est entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations, le 9 juillet 2018 en faisant valoir une minorité qui ne lui a pas été reconnue. Sans domicile fixe, il ne fait état d'aucune attache réelle en France. Sa mère réside dans son pays d'origine. Il a été interpellé, ainsi que le relève la motivation de la décision en litige, en situation de trouble à l'ordre public. Dans ces conditions, l'obligation de quitter le territoire en litige ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis. Par suite, elle ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni n'est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'elle est susceptible de comporter pour la situation personnelle de l'intéressé.
Sur la légalité du refus de délai de départ volontaire :
12. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 11, la décision refusant à M. B... un délai de départ volontaire, prise notamment au regard de l'ordre public, ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'elle est susceptible de comporter pour la situation personnelle de M. B....
13. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'appui de sa demande tendant à l'annulation de la décision portant refus d'un délai de départ volontaire.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
14. M. B..., dont il a été dit ci-dessus qu'il n'a formé aucune demande d'asile depuis son entrée en France en juillet 2018, n'assortit d'aucune précision ses allégations sur les risques qu'il encourrait en cas de retour en Côte d'Ivoire, son pays d'origine. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est ainsi dépourvu de toute précision permettant d'en apprécier le bien-fondé.
15. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'appui de sa demande tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination.
Sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire français :
16. En premier lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III (...) [est décidée] par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".
17. Dans les circonstances de l'espèce, pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 9, le préfet de l'Isère n'a pas méconnu les dispositions précitées en décidant d'interdire à M. B... le retour sur le territoire français durant un an.
18. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 11, la décision portant interdiction de retour de M. B... sur le territoire durant un an ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'elle est susceptible de comporter pour la situation personnelle de M. B....
19. Enfin, il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'appui de sa demande tendant à l'annulation de l'interdiction de retour sur le territoire français.
20. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 25 mai 2020 à laquelle siégeaient :
M. Josserand-Jaillet, président de chambre,
M. Seillet, président assesseur,
Mme Burnichon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 26 juin 2020.
N° 19LY04533