CAA de DOUAI, 4ème chambre, 18/06/2020, 18DA00359, Inédit au recueil Lebon
CAA de DOUAI, 4ème chambre, 18/06/2020, 18DA00359, Inédit au recueil Lebon
CAA de DOUAI - 4ème chambre
- N° 18DA00359
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
jeudi
18 juin 2020
- Président
- M. Heu
- Rapporteur
- M. Jean-François Papin
- Avocat(s)
- SOCIETE D' AVOCATS FIDAL
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme C... D...-B... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge, en droits, pénalités et intérêts de retard, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011, d'autre part, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à leur charge au titre de la période couvrant ces mêmes années.
Par un jugement n° 1502140 du 21 décembre 2017, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 16 février 2018, M. et Mme D...-B..., représentés par Me A..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme C... D...-B..., qui sont domiciliés à Cachy (Somme), ont acquis, le 2 avril 2010 et le 28 février 2011, deux terrains situés sur le territoire de cette commune. Ils ont vendu ces terrains, respectivement, le 11 août 2010 et le 7 mars 2011, sur chacun desquels avait été édifiée une maison d'habitation, et ont spontanément déclaré les plus-values correspondantes, qui ont été soumises à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux dans la catégorie des plus-values immobilières des particuliers. L'indivision C... D... / E... B... a fait l'objet, au cours de l'année 2013, d'une vérification de comptabilité, portant sur la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012. A l'issue de ce contrôle, le service vérificateur a estimé que les intéressés s'étaient livrés, à raison de ces opérations d'achat et de revente, à une activité de marchand de biens et que ces opérations devaient être soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, tandis que la plus-value réalisée par eux devait être imposée en tant que plus-value professionnelle dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux. Par une première proposition de rectification, adressée à l'indivision le 13 décembre 2013, l'administration a fait connaître à celle-ci les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et suppléments d'impôt envisagés en conséquence de ces rectifications. Par une seconde proposition de rectification, adressée le même jour à M. et Mme D...-B..., l'administration a informé ceux-ci des conséquences susceptibles de résulter, sur leur imposition personnelle, de ces rectifications et les a également informés de la remise en cause du bénéfice d'une réduction d'impôt obtenue par les intéressés en 2010. En dépit des observations de M. et Mme D...-B..., les rehaussements envisagés ont été maintenus par l'administration. Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux ainsi que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en résultant ont été mis en recouvrement, en droits et pénalités, pour un montant total de 80 904 euros. Les réclamations formées par les intéressés ont été rejetées, l'administration leur ayant toutefois accordé la décharge de l'imposition, sous le régime des plus-values des particuliers, qu'ils avaient spontanément acquittée. M. et Mme D...-B... relèvent appel du jugement du 21 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits, pénalités et intérêts de retard, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011, d'autre part, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à leur charge au titre de la période couvrant ces mêmes années, à raison de l'opération de vente des deux terrains en cause.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. En vertu de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales, lorsque le désaccord entre le contribuable et l'administration persiste sur les rectifications notifiées, le contribuable peut demander à l'administration de soumettre le différend à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts, qui peut également être saisie à l'initiative de l'administration. Le II de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales précise que, dans les domaines relevant de sa compétence, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires peut, sans trancher une question de droit, se prononcer sur les faits susceptibles d'être pris en compte pour l'examen de cette question de droit. En outre, selon l'article L. 60 du même livre, le rapport par lequel l'administration des impôts soumet à la commission départementale le différend qui l'oppose au contribuable, ainsi que tous les autres documents dont l'administration fait état pour appuyer sa thèse, doivent, sous réserve du secret professionnel relatif aux renseignements concernant d'autres contribuables, être tenus à la disposition du contribuable. Enfin, l'article L. 192 du même livre dispose que, lorsque la commission départementale est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission, mais que, toutefois, le contribuable supporte la charge de la preuve à défaut de comptabilité ou de pièces en tenant lieu ou lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission ou encore, en cas de taxation d'office, à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle.
3. Lorsque la charge de la preuve dépend de la procédure d'imposition suivie à l'égard du contribuable, ce dernier peut utilement soutenir devant le juge de l'impôt que l'avis émis par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires est entaché d'une irrégularité. Toutefois, une telle irrégularité, à la supposer établie, demeure dépourvue d'incidence sur la régularité de la procédure d'imposition mais est seulement de nature à modifier, le cas échéant, la dévolution de la charge de la preuve, pour l'application des dispositions, rappelées au point précédent, de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales.
4. Il résulte de l'instruction qu'à la demande de M. et Mme D...-B..., l'administration a soumis le différend qui l'opposait à ceux-ci à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires de la Somme, qui, par un avis émis dans sa séance du 17 octobre 2014, a préconisé le maintien des rehaussements contestés. Il ressort des termes mêmes de cet avis que, pour retenir que M. et Mme D...-B... s'étaient livrés à l'exercice habituel d'une activité de marchand de biens, la commission a relevé, notamment, qu'un plan cadastral fourni par l'administration révélait que les deux opérations d'achat et revente effectuées par M. et Mme D...-B... pouvaient être rapprochées d'une opération plus globale de lotissement conduite sur le territoire de la même commune par la SARL C... D... Promotion, à laquelle M. et Mme D...-B... étaient liés. Or, il est constant que ces derniers n'ont, en méconnaissance des dispositions, rappelées au point 2, de l'article L. 60 du livre des procédures fiscales, pas eu accès à ce plan cadastral, qui ne leur a été communiqué qu'en même temps que l'avis de la commission, de sorte qu'ils n'ont pas été mis à même de discuter de sa pertinence au cours de la séance. M. et Mme D...-B... sont, dès lors, fondés à soutenir que, comme l'a d'ailleurs retenu le tribunal administratif, cet avis est entaché d'irrégularité. Toutefois, il résulte de ce qui a été dit au point 3 que cette irrégularité est, par elle-même, dépourvue d'incidence sur la régularité de la procédure d'imposition mise en oeuvre à l'égard des intéressés, mais qu'elle est seulement susceptible d'influer sur la dévolution de la charge de la preuve. Par ailleurs, dès lors, d'une part, qu'il ne résulte pas de l'instruction, compte tenu notamment des motifs de la proposition de rectification adressée à l'indivision, que l'administration ait elle-même fondé les rehaussements sur les informations contenues dans ce plan cadastral, d'autre part, que M. et Mme D...-B... ont obtenu communication de ce document avant la mise en recouvrement des impositions en litige et ont ainsi été mis à même de formuler en temps utile des observations à ce sujet, les intéressés ne sont pas fondés à invoquer une méconnaissance par l'administration de leur droit à organiser leur défense.
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
5. Aux termes de l'article 257 du code général des impôts : " I. - Les opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée dans les conditions qui suivent. / 1. Sont assimilés à des biens corporels et suivent le régime du bien immeuble auquel ils se rapportent : / 1° Les droits réels immobiliers, à l'exception des locations résultant de baux qui confèrent un droit de jouissance ; / (...) / 2. Sont considérés : / (...) / 2° Comme immeubles neufs, les immeubles qui ne sont pas achevés depuis plus de cinq années, qu'ils résultent d'une construction nouvelle ou de travaux portant sur des immeubles existants (...) ". Aux termes de l'article 35 de ce code : " I. Présentent (...) le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques désignées ci-après : / 1° Personnes qui, habituellement, achètent en leur nom, en vue de les revendre, des immeubles (...). / 1° bis Personnes qui, à titre habituel, achètent des biens immeubles, en vue d'édifier un ou plusieurs bâtiments et de les vendre, en bloc ou par locaux ; / (...) ". L'application de ces dispositions est subordonnée à la double condition que les opérations présentent un caractère habituel et procèdent d'une intention spéculative.
6. Il résulte de l'instruction que M. et Mme D...-B... ont déposé, le 13 janvier 2009, une demande de permis de construire portant sur l'édification d'une maison d'habitation sur la parcelle cadastrée B 244, située sur le territoire de la commune de Cachy. Ils ont fait de même, le 4 mai 2010, s'agissant de l'édification d'une maison d'habitation sur la parcelle cadastrée B 241, située sur le territoire de la même commune. Les travaux correspondants ont débuté, respectivement, le 15 septembre 2009 et le 25 juin 2010. M. et Mme D...-B... ayant trouvé des acquéreurs pour les habitations ainsi édifiées et pour leur terrain d'assiette, ils ont conclu avec ceux-ci des compromis de vente, qui ont été signés, respectivement, le 17 février 2010 et le 26 mars 2010. M. et Mme D...-B... ont ensuite acquis, le 2 avril 2010 et le 28 février 2011, la propriété de ces deux terrains, avant de les vendre, le 11 août 2010 et le 7 mars 2011, aux acquéreurs avec lesquels ils s'étaient contractuellement engagés.
7. Les deux opérations d'achat et de vente que M. et Mme D...-B... ont ainsi réalisées sur une période allant du 2 avril 2010 au 7 mars 2011, et qui ont d'ailleurs été suivies, ainsi que l'avance le ministre, sans être contredit, de l'achat par les intéressés, le 28 mars 2011, d'un autre terrain, situé sur la commune de Thézy-Glimont et de l'engagement de travaux d'édification d'un immeuble en vue d'une location sous un régime d'exonération fiscale, doivent être regardées comme présentant un caractère habituel, alors, au surplus, que M. et Mme D...-B... détiennent ensemble l'intégralité du capital de la SARL C... D... Promotion, qui exerce l'activité de marchand de biens, de lotisseur et de promoteur immobilier.
8. Les courts laps de temps, qui sont, respectivement, soit d'un peu plus de quatre mois soit de sept jours, séparant l'acquisition des terrains, situés à Cachy, comportant chacun une maison d'habitation, de leur revente, révèlent l'intention spéculative qui animait M. et Mme D...-B... lorsqu'ils ont engagé ces deux opérations d'achat et de revente, sans qu'importe sur ce point le mode de financement de ces opérations, l'absence de souscription d'une garantie de dommage-ouvrage ou encore la circonstance que la maison d'habitation située sur le premier terrain, cadastré B 244, aurait été construite par M. D...-B... sur son temps libre. Dès lors, les requérants ne peuvent utilement soutenir, alors d'ailleurs qu'ils n'apportent aucun élément au soutien de cette allégation, qu'ils auraient eu l'intention, avant de trouver finalement un acquéreur pour l'une des deux maisons d'habitation, de donner celles-ci en location.
9. Eu égard à ce qui vient d'être dit, l'administration a estimé à bon droit que les deux opérations d'achat et de revente effectuées par M. et Mme D...-B... au cours des années 2010 et 2011 constituaient, eu égard à leur caractère habituel et à l'intention spéculative qui animait leurs auteurs, l'exercice d'une activité de marchand de biens, assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée sur le fondement des dispositions précitées de l'article 257 du code général des impôts, et imposable dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux en application des dispositions précitées de l'article 35 de ce code. Les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et les rehaussements d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en résultant ont, dès lors, été mis à bon droit à leur charge.
En ce qui concerne l'interprétation de la loi fiscale par l'administration :
10. Ni le paragraphe n°30 de la doctrine administrative BOI-BIC-CHAMP-20-10-10 du 12 septembre 2012, qui est issu de la documentation de base 8 D 1111 publiée le 30 juin 1998, ni le paragraphe n°80 de la doctrine administrative BOI-BIC-CHAMP-20-40-10 du 12 septembre 2012, qui reprend des prévisions de la documentation de base 8 E 211 publiée le 30 juin 1998, ne comporte, s'agissant de l'appréciation du caractère habituel des opérations d'achat et de revente contribuant à caractériser l'exercice d'une activité de marchand de biens, une interprétation formelle de la loi fiscale qui soit différente de celle dont le présent arrêt fait application. Dès lors, M. et Mme D...-B... ne sont, en tout état de cause, pas fondés à s'en prévaloir sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.
11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'action et des comptes publics, que M. et Mme D...-B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande. Les conclusions qu'ils présentent au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme D...-B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... D...-B... et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
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N°18DA00359
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme C... D...-B... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge, en droits, pénalités et intérêts de retard, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011, d'autre part, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à leur charge au titre de la période couvrant ces mêmes années.
Par un jugement n° 1502140 du 21 décembre 2017, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 16 février 2018, M. et Mme D...-B..., représentés par Me A..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme C... D...-B..., qui sont domiciliés à Cachy (Somme), ont acquis, le 2 avril 2010 et le 28 février 2011, deux terrains situés sur le territoire de cette commune. Ils ont vendu ces terrains, respectivement, le 11 août 2010 et le 7 mars 2011, sur chacun desquels avait été édifiée une maison d'habitation, et ont spontanément déclaré les plus-values correspondantes, qui ont été soumises à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux dans la catégorie des plus-values immobilières des particuliers. L'indivision C... D... / E... B... a fait l'objet, au cours de l'année 2013, d'une vérification de comptabilité, portant sur la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012. A l'issue de ce contrôle, le service vérificateur a estimé que les intéressés s'étaient livrés, à raison de ces opérations d'achat et de revente, à une activité de marchand de biens et que ces opérations devaient être soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, tandis que la plus-value réalisée par eux devait être imposée en tant que plus-value professionnelle dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux. Par une première proposition de rectification, adressée à l'indivision le 13 décembre 2013, l'administration a fait connaître à celle-ci les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et suppléments d'impôt envisagés en conséquence de ces rectifications. Par une seconde proposition de rectification, adressée le même jour à M. et Mme D...-B..., l'administration a informé ceux-ci des conséquences susceptibles de résulter, sur leur imposition personnelle, de ces rectifications et les a également informés de la remise en cause du bénéfice d'une réduction d'impôt obtenue par les intéressés en 2010. En dépit des observations de M. et Mme D...-B..., les rehaussements envisagés ont été maintenus par l'administration. Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux ainsi que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en résultant ont été mis en recouvrement, en droits et pénalités, pour un montant total de 80 904 euros. Les réclamations formées par les intéressés ont été rejetées, l'administration leur ayant toutefois accordé la décharge de l'imposition, sous le régime des plus-values des particuliers, qu'ils avaient spontanément acquittée. M. et Mme D...-B... relèvent appel du jugement du 21 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits, pénalités et intérêts de retard, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011, d'autre part, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à leur charge au titre de la période couvrant ces mêmes années, à raison de l'opération de vente des deux terrains en cause.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. En vertu de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales, lorsque le désaccord entre le contribuable et l'administration persiste sur les rectifications notifiées, le contribuable peut demander à l'administration de soumettre le différend à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts, qui peut également être saisie à l'initiative de l'administration. Le II de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales précise que, dans les domaines relevant de sa compétence, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires peut, sans trancher une question de droit, se prononcer sur les faits susceptibles d'être pris en compte pour l'examen de cette question de droit. En outre, selon l'article L. 60 du même livre, le rapport par lequel l'administration des impôts soumet à la commission départementale le différend qui l'oppose au contribuable, ainsi que tous les autres documents dont l'administration fait état pour appuyer sa thèse, doivent, sous réserve du secret professionnel relatif aux renseignements concernant d'autres contribuables, être tenus à la disposition du contribuable. Enfin, l'article L. 192 du même livre dispose que, lorsque la commission départementale est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission, mais que, toutefois, le contribuable supporte la charge de la preuve à défaut de comptabilité ou de pièces en tenant lieu ou lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission ou encore, en cas de taxation d'office, à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle.
3. Lorsque la charge de la preuve dépend de la procédure d'imposition suivie à l'égard du contribuable, ce dernier peut utilement soutenir devant le juge de l'impôt que l'avis émis par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires est entaché d'une irrégularité. Toutefois, une telle irrégularité, à la supposer établie, demeure dépourvue d'incidence sur la régularité de la procédure d'imposition mais est seulement de nature à modifier, le cas échéant, la dévolution de la charge de la preuve, pour l'application des dispositions, rappelées au point précédent, de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales.
4. Il résulte de l'instruction qu'à la demande de M. et Mme D...-B..., l'administration a soumis le différend qui l'opposait à ceux-ci à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires de la Somme, qui, par un avis émis dans sa séance du 17 octobre 2014, a préconisé le maintien des rehaussements contestés. Il ressort des termes mêmes de cet avis que, pour retenir que M. et Mme D...-B... s'étaient livrés à l'exercice habituel d'une activité de marchand de biens, la commission a relevé, notamment, qu'un plan cadastral fourni par l'administration révélait que les deux opérations d'achat et revente effectuées par M. et Mme D...-B... pouvaient être rapprochées d'une opération plus globale de lotissement conduite sur le territoire de la même commune par la SARL C... D... Promotion, à laquelle M. et Mme D...-B... étaient liés. Or, il est constant que ces derniers n'ont, en méconnaissance des dispositions, rappelées au point 2, de l'article L. 60 du livre des procédures fiscales, pas eu accès à ce plan cadastral, qui ne leur a été communiqué qu'en même temps que l'avis de la commission, de sorte qu'ils n'ont pas été mis à même de discuter de sa pertinence au cours de la séance. M. et Mme D...-B... sont, dès lors, fondés à soutenir que, comme l'a d'ailleurs retenu le tribunal administratif, cet avis est entaché d'irrégularité. Toutefois, il résulte de ce qui a été dit au point 3 que cette irrégularité est, par elle-même, dépourvue d'incidence sur la régularité de la procédure d'imposition mise en oeuvre à l'égard des intéressés, mais qu'elle est seulement susceptible d'influer sur la dévolution de la charge de la preuve. Par ailleurs, dès lors, d'une part, qu'il ne résulte pas de l'instruction, compte tenu notamment des motifs de la proposition de rectification adressée à l'indivision, que l'administration ait elle-même fondé les rehaussements sur les informations contenues dans ce plan cadastral, d'autre part, que M. et Mme D...-B... ont obtenu communication de ce document avant la mise en recouvrement des impositions en litige et ont ainsi été mis à même de formuler en temps utile des observations à ce sujet, les intéressés ne sont pas fondés à invoquer une méconnaissance par l'administration de leur droit à organiser leur défense.
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
5. Aux termes de l'article 257 du code général des impôts : " I. - Les opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée dans les conditions qui suivent. / 1. Sont assimilés à des biens corporels et suivent le régime du bien immeuble auquel ils se rapportent : / 1° Les droits réels immobiliers, à l'exception des locations résultant de baux qui confèrent un droit de jouissance ; / (...) / 2. Sont considérés : / (...) / 2° Comme immeubles neufs, les immeubles qui ne sont pas achevés depuis plus de cinq années, qu'ils résultent d'une construction nouvelle ou de travaux portant sur des immeubles existants (...) ". Aux termes de l'article 35 de ce code : " I. Présentent (...) le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques désignées ci-après : / 1° Personnes qui, habituellement, achètent en leur nom, en vue de les revendre, des immeubles (...). / 1° bis Personnes qui, à titre habituel, achètent des biens immeubles, en vue d'édifier un ou plusieurs bâtiments et de les vendre, en bloc ou par locaux ; / (...) ". L'application de ces dispositions est subordonnée à la double condition que les opérations présentent un caractère habituel et procèdent d'une intention spéculative.
6. Il résulte de l'instruction que M. et Mme D...-B... ont déposé, le 13 janvier 2009, une demande de permis de construire portant sur l'édification d'une maison d'habitation sur la parcelle cadastrée B 244, située sur le territoire de la commune de Cachy. Ils ont fait de même, le 4 mai 2010, s'agissant de l'édification d'une maison d'habitation sur la parcelle cadastrée B 241, située sur le territoire de la même commune. Les travaux correspondants ont débuté, respectivement, le 15 septembre 2009 et le 25 juin 2010. M. et Mme D...-B... ayant trouvé des acquéreurs pour les habitations ainsi édifiées et pour leur terrain d'assiette, ils ont conclu avec ceux-ci des compromis de vente, qui ont été signés, respectivement, le 17 février 2010 et le 26 mars 2010. M. et Mme D...-B... ont ensuite acquis, le 2 avril 2010 et le 28 février 2011, la propriété de ces deux terrains, avant de les vendre, le 11 août 2010 et le 7 mars 2011, aux acquéreurs avec lesquels ils s'étaient contractuellement engagés.
7. Les deux opérations d'achat et de vente que M. et Mme D...-B... ont ainsi réalisées sur une période allant du 2 avril 2010 au 7 mars 2011, et qui ont d'ailleurs été suivies, ainsi que l'avance le ministre, sans être contredit, de l'achat par les intéressés, le 28 mars 2011, d'un autre terrain, situé sur la commune de Thézy-Glimont et de l'engagement de travaux d'édification d'un immeuble en vue d'une location sous un régime d'exonération fiscale, doivent être regardées comme présentant un caractère habituel, alors, au surplus, que M. et Mme D...-B... détiennent ensemble l'intégralité du capital de la SARL C... D... Promotion, qui exerce l'activité de marchand de biens, de lotisseur et de promoteur immobilier.
8. Les courts laps de temps, qui sont, respectivement, soit d'un peu plus de quatre mois soit de sept jours, séparant l'acquisition des terrains, situés à Cachy, comportant chacun une maison d'habitation, de leur revente, révèlent l'intention spéculative qui animait M. et Mme D...-B... lorsqu'ils ont engagé ces deux opérations d'achat et de revente, sans qu'importe sur ce point le mode de financement de ces opérations, l'absence de souscription d'une garantie de dommage-ouvrage ou encore la circonstance que la maison d'habitation située sur le premier terrain, cadastré B 244, aurait été construite par M. D...-B... sur son temps libre. Dès lors, les requérants ne peuvent utilement soutenir, alors d'ailleurs qu'ils n'apportent aucun élément au soutien de cette allégation, qu'ils auraient eu l'intention, avant de trouver finalement un acquéreur pour l'une des deux maisons d'habitation, de donner celles-ci en location.
9. Eu égard à ce qui vient d'être dit, l'administration a estimé à bon droit que les deux opérations d'achat et de revente effectuées par M. et Mme D...-B... au cours des années 2010 et 2011 constituaient, eu égard à leur caractère habituel et à l'intention spéculative qui animait leurs auteurs, l'exercice d'une activité de marchand de biens, assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée sur le fondement des dispositions précitées de l'article 257 du code général des impôts, et imposable dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux en application des dispositions précitées de l'article 35 de ce code. Les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et les rehaussements d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en résultant ont, dès lors, été mis à bon droit à leur charge.
En ce qui concerne l'interprétation de la loi fiscale par l'administration :
10. Ni le paragraphe n°30 de la doctrine administrative BOI-BIC-CHAMP-20-10-10 du 12 septembre 2012, qui est issu de la documentation de base 8 D 1111 publiée le 30 juin 1998, ni le paragraphe n°80 de la doctrine administrative BOI-BIC-CHAMP-20-40-10 du 12 septembre 2012, qui reprend des prévisions de la documentation de base 8 E 211 publiée le 30 juin 1998, ne comporte, s'agissant de l'appréciation du caractère habituel des opérations d'achat et de revente contribuant à caractériser l'exercice d'une activité de marchand de biens, une interprétation formelle de la loi fiscale qui soit différente de celle dont le présent arrêt fait application. Dès lors, M. et Mme D...-B... ne sont, en tout état de cause, pas fondés à s'en prévaloir sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.
11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'action et des comptes publics, que M. et Mme D...-B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande. Les conclusions qu'ils présentent au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme D...-B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... D...-B... et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
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N°18DA00359