CAA de NANCY, 3ème chambre, 08/04/2020, 19NC03015, Inédit au recueil Lebon
CAA de NANCY, 3ème chambre, 08/04/2020, 19NC03015, Inédit au recueil Lebon
CAA de NANCY - 3ème chambre
- N° 19NC03015
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
mercredi
08 avril 2020
- Président
- M. WURTZ
- Rapporteur
- M. Eric MEISSE
- Avocat(s)
- SELARL ABSIL CARMINATI TRAN TERMEAU
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 11 avril 2019 par lequel le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de son éventuelle reconduite d'office à la frontière et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français de deux ans.
Par un jugement n° 1901080 du 20 septembre 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé l'arrêté du 11 avril 2019 en tant qu'il fait obligation à M. C... de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixe le pays de destination de son éventuelle reconduite d'office à la frontière et lui fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 octobre 2019, le préfet de l'Aube, représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1901080 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 20 septembre 2019 en tant qu'il prononce l'annulation des décisions du 11 avril 2019 portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixation du pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans ;
2°) de rejeter la demande de première instance de M. C... en tant qu'elle est dirigée contre les décisions du 11 avril 2019 portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixation du pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français de deux ans.
Il soutient que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas les stipulations du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant, M. C... ne démontrant pas sa contribution effective à l'entretien et à l'éducation de sa fille.
La requête a été régulièrement communiquée à M. C... qui n'a pas défendu dans la présente instance.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit ;
1. M. A... C... est un ressortissant géorgien, né le 6 février 1985. Il a déclaré être entré irrégulièrement en France le 13 juin 2009. Le 7 avril 2010, il a présenté une demande d'asile, qui a été successivement rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le 22 avril 2011, puis par la Cour nationale du droit d'asile, le 24 février 2012. En conséquence de ces refus, il a fait l'objet, le 29 mai 2012, d'une obligation de quitter le territoire français à laquelle il n'a pas déféré. Le réexamen de sa demande d'asile, sollicité le 3 janvier 2013, a également été rejeté par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis par la Cour nationale du droit d'asile les 9 janvier et 24 septembre 2013. Le 17 octobre 2018, le requérant a adressé aux services de la préfecture de l'Aube une demande de titre de séjour au titre de la vie privée et familiale, en se prévalant de sa vie conjugale avec une étrangère en situation régulière. Par un arrêté du 11 avril 2019, le préfet de l'Aube a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de son éventuelle reconduite d'office à la frontière et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français de deux ans. M. C... a saisi le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'une demande tendant à l'annulation de de l'arrêté du 11 avril 2019. Le préfet de l'Aude relève appel du jugement n° 1901080 du 20 septembre 2019, en tant qu'il annule les décisions du 11 avril 2019 portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixation du pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
3. Il ressort des pièces du dossier que M. C... est le père d'une fille, née le 23 septembre 2016. Issue de sa relation avec une ressortissante russe, titulaire d'une carte de résident en qualité de réfugiée, cette fille a été reconnue par l'intéressé le 7 novembre 2016. Par un jugement du 19 mai 2017, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Digne-les-Bains, saisi à l'initiative de M. C..., a décidé que l'autorité parentale sur l'enfant sera exercée en commun par les deux parents et a accordé au père un droit d'accueil de cette enfant, dont la résidence a été fixée au domicile de la mère, qui s'exercera à l'amiable avec celle-ci ou, à défaut d'accord, le samedi et le dimanche de 12 à 18 heures. Si M. C... ne justifie plus d'une communauté de vie avec sa compagne, qui est veuve et a trois autres enfants plus âgés, il ressort des pièces du dossier, spécialement des nombreuses photographies et des attestations versées au dossier, qu'il exerce effectivement son autorité parentale et, en accord avec la mère, son droit d'accueil de sa fille, qu'il accompagne presque quotidiennement en promenade ou à des rendez-vous médicaux. Dans ces conditions, M. C..., dont il n'est pas contesté qu'il est dépourvu de toutes ressources, doit être regardé comme participant effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant. Dès lors et eu égard à la qualité de réfugiée de la mère, l'obligation faite à l'intéressé de quitter le territoire français aurait nécessairement pour effet de priver cette enfant de la présence de l'un de ses parents. Par suite, en prononçant une telle mesure d'éloignement à l'encontre de M. C..., le préfet de l'Aube a méconnu les stipulations du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant.
4. Il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Aube n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision du 11 avril 2019 portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et, par voie de conséquence, les décisions du même jour portant fixation du pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.
D E C I D E :
Article 1er : Le recours du préfet de l'Aube est rejeté.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A... C....
Copie en sera adressée au préfet de l'Aube.
N° 19NC03015 2
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 11 avril 2019 par lequel le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de son éventuelle reconduite d'office à la frontière et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français de deux ans.
Par un jugement n° 1901080 du 20 septembre 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé l'arrêté du 11 avril 2019 en tant qu'il fait obligation à M. C... de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixe le pays de destination de son éventuelle reconduite d'office à la frontière et lui fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 octobre 2019, le préfet de l'Aube, représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1901080 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 20 septembre 2019 en tant qu'il prononce l'annulation des décisions du 11 avril 2019 portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixation du pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans ;
2°) de rejeter la demande de première instance de M. C... en tant qu'elle est dirigée contre les décisions du 11 avril 2019 portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixation du pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français de deux ans.
Il soutient que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas les stipulations du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant, M. C... ne démontrant pas sa contribution effective à l'entretien et à l'éducation de sa fille.
La requête a été régulièrement communiquée à M. C... qui n'a pas défendu dans la présente instance.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit ;
1. M. A... C... est un ressortissant géorgien, né le 6 février 1985. Il a déclaré être entré irrégulièrement en France le 13 juin 2009. Le 7 avril 2010, il a présenté une demande d'asile, qui a été successivement rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le 22 avril 2011, puis par la Cour nationale du droit d'asile, le 24 février 2012. En conséquence de ces refus, il a fait l'objet, le 29 mai 2012, d'une obligation de quitter le territoire français à laquelle il n'a pas déféré. Le réexamen de sa demande d'asile, sollicité le 3 janvier 2013, a également été rejeté par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis par la Cour nationale du droit d'asile les 9 janvier et 24 septembre 2013. Le 17 octobre 2018, le requérant a adressé aux services de la préfecture de l'Aube une demande de titre de séjour au titre de la vie privée et familiale, en se prévalant de sa vie conjugale avec une étrangère en situation régulière. Par un arrêté du 11 avril 2019, le préfet de l'Aube a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de son éventuelle reconduite d'office à la frontière et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français de deux ans. M. C... a saisi le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'une demande tendant à l'annulation de de l'arrêté du 11 avril 2019. Le préfet de l'Aude relève appel du jugement n° 1901080 du 20 septembre 2019, en tant qu'il annule les décisions du 11 avril 2019 portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixation du pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
3. Il ressort des pièces du dossier que M. C... est le père d'une fille, née le 23 septembre 2016. Issue de sa relation avec une ressortissante russe, titulaire d'une carte de résident en qualité de réfugiée, cette fille a été reconnue par l'intéressé le 7 novembre 2016. Par un jugement du 19 mai 2017, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Digne-les-Bains, saisi à l'initiative de M. C..., a décidé que l'autorité parentale sur l'enfant sera exercée en commun par les deux parents et a accordé au père un droit d'accueil de cette enfant, dont la résidence a été fixée au domicile de la mère, qui s'exercera à l'amiable avec celle-ci ou, à défaut d'accord, le samedi et le dimanche de 12 à 18 heures. Si M. C... ne justifie plus d'une communauté de vie avec sa compagne, qui est veuve et a trois autres enfants plus âgés, il ressort des pièces du dossier, spécialement des nombreuses photographies et des attestations versées au dossier, qu'il exerce effectivement son autorité parentale et, en accord avec la mère, son droit d'accueil de sa fille, qu'il accompagne presque quotidiennement en promenade ou à des rendez-vous médicaux. Dans ces conditions, M. C..., dont il n'est pas contesté qu'il est dépourvu de toutes ressources, doit être regardé comme participant effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant. Dès lors et eu égard à la qualité de réfugiée de la mère, l'obligation faite à l'intéressé de quitter le territoire français aurait nécessairement pour effet de priver cette enfant de la présence de l'un de ses parents. Par suite, en prononçant une telle mesure d'éloignement à l'encontre de M. C..., le préfet de l'Aube a méconnu les stipulations du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant.
4. Il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Aube n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision du 11 avril 2019 portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et, par voie de conséquence, les décisions du même jour portant fixation du pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.
D E C I D E :
Article 1er : Le recours du préfet de l'Aube est rejeté.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A... C....
Copie en sera adressée au préfet de l'Aube.
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