CAA de LYON, 4ème chambre, 28/11/2019, 18LY02621, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :


Procédure contentieuse antérieure

L'établissement public Voies navigables de France (VNF) a demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner la société Gavelle à lui verser une indemnité de 15 000 euros au titre de l'action domaniale et la somme de 400 euros au titre des dépens.

Par un jugement n° 1502583 du 29 janvier 2018, le tribunal a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 12 juillet et 15 novembre 2018, la société Gavelle, représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) de réformer le jugement et de ramener le montant de l'indemnité qu'elle a été condamnée à verser à 7 000 euros ;

2°) de mettre les dépens à la charge de VNF.

Elle soutient que :
- un abattement de vétusté doit être déduit de l'indemnité mise à sa charge ;
- l'assureur de VNF a versé à l'établissement la somme de 15 617,61 euros soustrayant une somme de 15 000 euros du montant avant vétusté au titre de sa franchise ; le solde restant dû à VNF s'élève à 9 214,52 euros et non à 15 000 euros ;
- VNF n'a pas d'intérêt à agir au-delà de la somme de 6 787,52 euros dans la mesure où le prestataire intervenu pour réparer les dommages causés a réclamé le paiement des plans d'exécution qui lui avaient été pourtant fournis par l'établissement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 octobre 2018, VNF conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 000 euros soit mise à la charge de la société Gavelle au titre des frais du litige.

Elle fait valoir que :
- la vétusté des ouvrages endommagés n'est pas de nature à justifier une réduction des dommages et intérêts dans la cadre d'une contravention de grande voirie ; au demeurant, le montant de la franchise retenue par l'assureur incombe in fine au contrevenant ;
- la prise de cotes et la réalisation de plans d'exécution étaient justifiées et constituaient une obligation contractuelle incombant au titulaire du marché de travaux conclu pour la réparation des passerelles ;
- l'opportunité des travaux de remise en état du domaine ne peut être laissée au contrevenant.

Un mémoire enregistré le 20 décembre 2018 présenté pour VNF n'a pas été communiqué.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code de justice administrative ;


Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de Mme C...,
- et les observations de Me B... pour la société Gavelle ;


Considérant ce qui suit :

1. Le 9 février 2010, la corde d'amarrage du bateau pousseur portant la devise " ATOLL " appartenant à la société Gavelle et de ses deux barges, " Lagune " et " Lagon ", a cédé au point kilométrique 119 au niveau de l'écluse d'Ormes, en Saône-et-Loire. L'ensemble a percuté la porte amont de l'écluse alors fermée et a arraché la passerelle fixée aux deux vantaux de la porte. Voies navigables de France (VNF), gestionnaire de l'ouvrage pour le compte de l'Etat, a dressé un procès-verbal de grande voirie pour infraction à l'article L. 2132-8 du code général de la propriété des personnes publiques. VNF a ensuite saisi le tribunal administratif de Dijon d'une demande tendant à ce que la société Gavelle soit condamnée au remboursement des frais de remise en état de l'ouvrage et des dépens. La société Gavelle relève appel du jugement du 29 janvier 2018 et demande que la somme de 15 000 euros qu'elle a été condamnée à verser à VNF en remboursement des frais de remise en état de l'ouvrage soit ramenée à 7 000 euros.
2. L'auteur d'une contravention de grande voirie doit être condamné à rembourser au gestionnaire du domaine public le montant des frais exposés ou à exposer par celui-ci pour les besoins de la remise en état de l'ouvrage endommagé. Il n'est fondé à demander la réduction des frais mis à sa charge que dans le cas où le montant des dépenses engagées en vue de réparer les conséquences de la contravention présente un caractère anormal. Le coût total des réparations chiffré par l'expert désigné par l'assureur dommages aux biens de VNF s'élève à la somme de 30 617,60 euros HT. La somme de 15 000 euros réclamée à la société Gavelle après déduction de la somme versée à l'établissement par son assureur qui a retenu une franchise de 15 000 euros n'est pas excessive par rapport au coût de la remise en état qui ne présente pas un caractère anormal eu égard à la nature du dommage. L'appelante ne saurait par ailleurs utilement invoquer la vétusté de l'ouvrage pour diminuer la somme mise à sa charge dès lors que la contravention qu'elle a commise a rendu nécessaire la remise en état de la passerelle. Enfin, elle n'apporte pas d'élément pour établir que les plans d'exécution auraient été fournis par VNF à l'entreprise qui est intervenue pour réparer les dommages causés et contester la somme de 2 427 euros mise à sa charge à ce titre, dès lors qu'il incombait bien à cette entreprise d'établir des plans d'exécution à partir des plans et schémas de l'ouvrage, certes fournis par le maître d'ouvrage, conformément au cahier des charges des travaux à réaliser.


3. Il résulte de ce qui précède que la société Gavelle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort qu'elle a été condamnée par le tribunal administratif de Dijon à payer à VNF la somme de 15 000 euros.


4. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que VNF, qui n'a pas eu recours au ministère d'avocat et ne se prévaut pas de frais spécifiques exposés par lui en indiquant leur nature, obtienne que la société Gavelle soit condamnée à lui payer la somme qu'il demande à ce titre.

DÉCIDE :


Article 1er : La requête de la société Gavelle et les conclusions d'appel de l'établissement public VNF sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Gavelle, à Voies navigables de France et au ministre de la transition écologique et solidaire.


Délibéré après l'audience du 8 novembre 2019, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président,
Mme A..., président assesseur,
Mme Lesieux, premier conseiller.
Lu en audience publique le 28 novembre 2019.

Le rapporteur,
C. A...Le président,
J.-L. d'Hervé
Le greffier,
J. Billot

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique et solidaire, en ce qui la concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
Le greffier,

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N° 18LY02621



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