Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 04/12/2019, 418414, Inédit au recueil Lebon
Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 04/12/2019, 418414, Inédit au recueil Lebon
Conseil d'État - 9ème - 10ème chambres réunies
- N° 418414
- ECLI:FR:CECHR:2019:418414.20191204
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
mercredi
04 décembre 2019
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
La société par actions simplifiée (SAS) Saint Gilles Sud, devenue la SAS Foncière Saint Gilles, a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du mois de mai 2010. Par un jugement n° 1302992 du 5 janvier 2016, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Par un arrêt n°16NT00763 du 21 décembre 2017, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par la société contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 21 février et 22 mai 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SAS Foncière Saint Gilles demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de commerce ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Nicolas Agnoux, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Didier, Pinet, avocat de la société Foncière Saint Gilles ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Saint Gilles Sud exploitait un hypermarché dans la commune de Saint-Gilles-Croix-de-Vie (Vendée). La société a fait l'objet d'une vérification de comptabilité engagée le 8 juin 2011 au titre de la période du 1er mars 2007 au 31 janvier 2011, à l'issue de laquelle l'administration fiscale a remis en cause la déduction de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) opérée par la société au titre de son activité commerciale pour la période du mois de mai 2010. Par un traité d'apport partiel d'actif en date du 13 juillet 2011, la société a apporté son activité d'hypermarché à la société SGS 2, avec laquelle elle partageait le même dirigeant et la même adresse postale puis, le 1er septembre 2011, la société Saint Gilles Sud a été renommée " société Foncière Saint Gilles ", tandis que la société SGS 2 a repris, à cette même date, la dénomination " Saint Gilles Sud ". Au terme de la procédure contradictoire, l'administration a notifié des rappels de TVA à la société Foncière Saint Gilles par un avis de mise en recouvrement en date du 31 juillet 2012. Cette société demande l'annulation de l'arrêt du 21 décembre 2017 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté son appel contre le jugement du tribunal administratif de Nantes en date du 5 janvier 2016 rejetant sa demande de décharge des rappels de TVA ainsi mis à sa charge.
2. Lorsqu'une société apporte une partie de son actif à une autre société et que, d'un commun accord entre les parties, cette opération est, comme le permet l'article L. 236-22 du code de commerce, soumise aux dispositions des articles L. 236-16 à L. 236-21 de ce code, relatives aux scissions de société, la société apporteuse reste, sauf dérogation prévue à l'article L. 236-21 du même code, solidairement obligée avec la société bénéficiaire au paiement des dettes transmises à cette dernière. Il en résulte que la société apporteuse et la société bénéficiaire de l'apport deviennent débitrices solidaires des impositions relatives à la branche d'activité concernée dont le fait générateur est intervenu antérieurement à la réalisation de l'opération d'apport, bien que la société apporteuse conserve seule la qualité de redevable légal de ces impositions.
3. Il ressort des pièces soumises aux juges du fond que l'avis de mise en recouvrement en date du 31 juillet 2012 notifié à la société Foncière Saint Gilles faisait référence à une proposition de rectification en date du 4 novembre 2011, laquelle a été notifiée à la " SAS Saint Gilles Sud " alors qu'à cette date l'administration fiscale avait été informée de ce que cette dénomination ne désignait plus la société apporteuse mais la société bénéficiaire de l'apport. Pour écarter le grief tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition, la cour a jugé que cette erreur n'était pas de nature à provoquer une confusion sur le destinataire effectif de la proposition de rectification, au motif que la vérification de comptabilité à laquelle cette dernière faisait référence concernait nécessairement la comptabilité de la société apporteuse, soit la société Saint Gilles Sud renommée " société Foncière Saint Gilles ". Or une telle circonstance ne permettait pas d'établir que la proposition de rectification était effectivement parvenue à cette société et que, par suite, celle-ci avait notamment été mise à même de faire valoir ses observations avant la mise en recouvrement de l'imposition en litige. Par suite, en s'abstenant de vérifier si l'erreur commise par l'administration dans la désignation de la société avec laquelle elle entendait engager la procédure contradictoire n'avait pas privé la société requérante d'une garantie, la cour a commis une erreur de droit.
4. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que son arrêt doit être annulé.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SAS Foncière Saint Gilles de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 21 décembre 2017 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nantes.
Article 3 : L'Etat versera à la SAS Foncière Saint Gilles la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société par actions simplifiée Foncière Saint Gilles et au ministre de l'action et des comptes publics.
ECLI:FR:CECHR:2019:418414.20191204
La société par actions simplifiée (SAS) Saint Gilles Sud, devenue la SAS Foncière Saint Gilles, a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du mois de mai 2010. Par un jugement n° 1302992 du 5 janvier 2016, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Par un arrêt n°16NT00763 du 21 décembre 2017, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par la société contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 21 février et 22 mai 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SAS Foncière Saint Gilles demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de commerce ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Nicolas Agnoux, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Didier, Pinet, avocat de la société Foncière Saint Gilles ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Saint Gilles Sud exploitait un hypermarché dans la commune de Saint-Gilles-Croix-de-Vie (Vendée). La société a fait l'objet d'une vérification de comptabilité engagée le 8 juin 2011 au titre de la période du 1er mars 2007 au 31 janvier 2011, à l'issue de laquelle l'administration fiscale a remis en cause la déduction de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) opérée par la société au titre de son activité commerciale pour la période du mois de mai 2010. Par un traité d'apport partiel d'actif en date du 13 juillet 2011, la société a apporté son activité d'hypermarché à la société SGS 2, avec laquelle elle partageait le même dirigeant et la même adresse postale puis, le 1er septembre 2011, la société Saint Gilles Sud a été renommée " société Foncière Saint Gilles ", tandis que la société SGS 2 a repris, à cette même date, la dénomination " Saint Gilles Sud ". Au terme de la procédure contradictoire, l'administration a notifié des rappels de TVA à la société Foncière Saint Gilles par un avis de mise en recouvrement en date du 31 juillet 2012. Cette société demande l'annulation de l'arrêt du 21 décembre 2017 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté son appel contre le jugement du tribunal administratif de Nantes en date du 5 janvier 2016 rejetant sa demande de décharge des rappels de TVA ainsi mis à sa charge.
2. Lorsqu'une société apporte une partie de son actif à une autre société et que, d'un commun accord entre les parties, cette opération est, comme le permet l'article L. 236-22 du code de commerce, soumise aux dispositions des articles L. 236-16 à L. 236-21 de ce code, relatives aux scissions de société, la société apporteuse reste, sauf dérogation prévue à l'article L. 236-21 du même code, solidairement obligée avec la société bénéficiaire au paiement des dettes transmises à cette dernière. Il en résulte que la société apporteuse et la société bénéficiaire de l'apport deviennent débitrices solidaires des impositions relatives à la branche d'activité concernée dont le fait générateur est intervenu antérieurement à la réalisation de l'opération d'apport, bien que la société apporteuse conserve seule la qualité de redevable légal de ces impositions.
3. Il ressort des pièces soumises aux juges du fond que l'avis de mise en recouvrement en date du 31 juillet 2012 notifié à la société Foncière Saint Gilles faisait référence à une proposition de rectification en date du 4 novembre 2011, laquelle a été notifiée à la " SAS Saint Gilles Sud " alors qu'à cette date l'administration fiscale avait été informée de ce que cette dénomination ne désignait plus la société apporteuse mais la société bénéficiaire de l'apport. Pour écarter le grief tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition, la cour a jugé que cette erreur n'était pas de nature à provoquer une confusion sur le destinataire effectif de la proposition de rectification, au motif que la vérification de comptabilité à laquelle cette dernière faisait référence concernait nécessairement la comptabilité de la société apporteuse, soit la société Saint Gilles Sud renommée " société Foncière Saint Gilles ". Or une telle circonstance ne permettait pas d'établir que la proposition de rectification était effectivement parvenue à cette société et que, par suite, celle-ci avait notamment été mise à même de faire valoir ses observations avant la mise en recouvrement de l'imposition en litige. Par suite, en s'abstenant de vérifier si l'erreur commise par l'administration dans la désignation de la société avec laquelle elle entendait engager la procédure contradictoire n'avait pas privé la société requérante d'une garantie, la cour a commis une erreur de droit.
4. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que son arrêt doit être annulé.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SAS Foncière Saint Gilles de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 21 décembre 2017 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nantes.
Article 3 : L'Etat versera à la SAS Foncière Saint Gilles la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société par actions simplifiée Foncière Saint Gilles et au ministre de l'action et des comptes publics.