Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 20/09/2019, 419659
Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 20/09/2019, 419659
Conseil d'État - 7ème - 2ème chambres réunies
- N° 419659
- ECLI:FR:CECHR:2019:419659.20190920
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
vendredi
20 septembre 2019
- Rapporteur
- M. Thomas Pez-Lavergne
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Mme E... A... a demandé au tribunal administratif de Caen, à titre principal, d'annuler le titre de perception d'un montant de 92 511 euros émis le 15 mai 2017 par le directeur départemental des finances publiques du Calvados et correspondant à la répétition d'un indu en matière de pension de réversion ainsi que le rejet de son recours gracieux et de procéder à la décharge de l'intégralité de la somme demandée et, à titre subsidiaire, de la décharger du paiement de la somme de 68 747,67 euros en application des dispositions de l'article L. 93 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Par un jugement n° 1701575 du 8 mars 2018, le tribunal administratif de Caen a déchargé Mme A... de l'obligation de payer la somme mise à sa charge par le titre de perception du 15 mai 2017 en tant qu'il porte sur le remboursement des sommes versées au titre de la pension de réversion entre le 21 octobre 2005 et le 31 décembre 2013.
Par un pourvoi, enregistré le 9 avril 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'action et des comptes publics demande au Conseil d'Etat d'annuler ce jugement.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le code de justice administrative.
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Thomas Pez-Lavergne, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. B... A... a bénéficié, à la suite du décès de son épouse, C... F..., d'une pension de réversion à compter du 13 décembre 1993. Il s'est remarié le 21 octobre 2005 avec Mme E... D..., puis est décédé le 23 juillet 2016. Informé de ce remariage à l'occasion de la succession de M. A..., le ministre de l'économie et des finances, sur proposition du directeur du service des retraites de l'Etat, a procédé, le 13 mars 2017, à l'annulation de la pension de réversion à compter du 21 octobre 2005. Le directeur départemental des finances publiques du Calvados a émis, le 15 mai 2017, un titre de perception afin de recouvrer la somme de 92 511 euros représentant le versement indu de la pension de réversion pour la période du 21 octobre 2005 au 31 juillet 2016. Par un courrier du 19 juin 2017, Mme D..., épouse A..., a contesté devant le comptable chargé du recouvrement le bien-fondé de ce titre exécutoire. Par un courrier du 29 juin 2017, le directeur départemental des finances publiques du Calvados a rejeté son recours gracieux. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Caen, à titre principal, l'annulation du titre de perception émis le 15 mai 2017 et, à titre subsidiaire, la réduction du montant du trop-perçu mis à sa charge par application des règles de prescription de l'article L. 93 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Par un jugement du 8 mars 2018, le tribunal administratif de Caen a déchargé Mme A... de l'obligation de payer la somme mise à sa charge par le titre de perception du 15 mai 2017 en tant qu'il porte sur le remboursement des sommes versées au titre de la pension de réversion entre le 21 octobre 2005 et le 31 décembre 2013. Le ministre de l'action et des comptes publics se pourvoit en cassation contre ce jugement.
2. Aux termes de l'article L. 46 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le conjoint survivant ou le conjoint divorcé, qui contracte un nouveau mariage ou vit en état de concubinage notoire, perd son droit à pension (...) ". Selon l'article L. 93 du même code : " Sauf le cas de fraude, omission, déclaration inexacte ou de mauvaise foi de la part du bénéficiaire, la restitution des sommes payées indûment au titre des pensions, de leurs accessoires ou d'avances provisoires sur pensions, attribués en application des dispositions du présent code, ne peut être exigée que pour celles de ces sommes correspondant aux arrérages afférents à l'année au cours de laquelle le trop-perçu a été constaté et aux trois années antérieures ".
3. Pour estimer que Mme A... pouvait se prévaloir du bénéfice de la prescription prévue par l'article L. 93 du code des pensions civiles et militaires de retraite, le tribunal administratif a relevé que M. A... avait transmis à la mutuelle des douanes, le 21 octobre 2005, un extrait de son livret de famille portant mention de son remariage et en avait fait état, la même année, dans sa déclaration de revenus. En estimant que M. A... devait être ainsi regardé comme ayant informé l'administration compétente de son changement de situation matrimoniale, alors qu'il n'appartenait ni à la mutuelle des douanes, organisme de droit privé, ni aux services fiscaux de transmettre l'information ci-dessus mentionnée dont ils avaient été destinataires au service des retraites de l'Etat et qu'ils n'avaient d'ailleurs pas procédé à une telle transmission, le tribunal administratif de Caen a dénaturé les faits de l'espèce. Le ministre de l'action et des comptes publics est, par suite, fondé à demander l'annulation du jugement attaqué.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le jugement du 8 mars 2018 du tribunal administratif de Caen est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Caen.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à Mme E... A....
ECLI:FR:CECHR:2019:419659.20190920
Mme E... A... a demandé au tribunal administratif de Caen, à titre principal, d'annuler le titre de perception d'un montant de 92 511 euros émis le 15 mai 2017 par le directeur départemental des finances publiques du Calvados et correspondant à la répétition d'un indu en matière de pension de réversion ainsi que le rejet de son recours gracieux et de procéder à la décharge de l'intégralité de la somme demandée et, à titre subsidiaire, de la décharger du paiement de la somme de 68 747,67 euros en application des dispositions de l'article L. 93 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Par un jugement n° 1701575 du 8 mars 2018, le tribunal administratif de Caen a déchargé Mme A... de l'obligation de payer la somme mise à sa charge par le titre de perception du 15 mai 2017 en tant qu'il porte sur le remboursement des sommes versées au titre de la pension de réversion entre le 21 octobre 2005 et le 31 décembre 2013.
Par un pourvoi, enregistré le 9 avril 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'action et des comptes publics demande au Conseil d'Etat d'annuler ce jugement.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le code de justice administrative.
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Thomas Pez-Lavergne, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. B... A... a bénéficié, à la suite du décès de son épouse, C... F..., d'une pension de réversion à compter du 13 décembre 1993. Il s'est remarié le 21 octobre 2005 avec Mme E... D..., puis est décédé le 23 juillet 2016. Informé de ce remariage à l'occasion de la succession de M. A..., le ministre de l'économie et des finances, sur proposition du directeur du service des retraites de l'Etat, a procédé, le 13 mars 2017, à l'annulation de la pension de réversion à compter du 21 octobre 2005. Le directeur départemental des finances publiques du Calvados a émis, le 15 mai 2017, un titre de perception afin de recouvrer la somme de 92 511 euros représentant le versement indu de la pension de réversion pour la période du 21 octobre 2005 au 31 juillet 2016. Par un courrier du 19 juin 2017, Mme D..., épouse A..., a contesté devant le comptable chargé du recouvrement le bien-fondé de ce titre exécutoire. Par un courrier du 29 juin 2017, le directeur départemental des finances publiques du Calvados a rejeté son recours gracieux. Mme A... a demandé au tribunal administratif de Caen, à titre principal, l'annulation du titre de perception émis le 15 mai 2017 et, à titre subsidiaire, la réduction du montant du trop-perçu mis à sa charge par application des règles de prescription de l'article L. 93 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Par un jugement du 8 mars 2018, le tribunal administratif de Caen a déchargé Mme A... de l'obligation de payer la somme mise à sa charge par le titre de perception du 15 mai 2017 en tant qu'il porte sur le remboursement des sommes versées au titre de la pension de réversion entre le 21 octobre 2005 et le 31 décembre 2013. Le ministre de l'action et des comptes publics se pourvoit en cassation contre ce jugement.
2. Aux termes de l'article L. 46 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le conjoint survivant ou le conjoint divorcé, qui contracte un nouveau mariage ou vit en état de concubinage notoire, perd son droit à pension (...) ". Selon l'article L. 93 du même code : " Sauf le cas de fraude, omission, déclaration inexacte ou de mauvaise foi de la part du bénéficiaire, la restitution des sommes payées indûment au titre des pensions, de leurs accessoires ou d'avances provisoires sur pensions, attribués en application des dispositions du présent code, ne peut être exigée que pour celles de ces sommes correspondant aux arrérages afférents à l'année au cours de laquelle le trop-perçu a été constaté et aux trois années antérieures ".
3. Pour estimer que Mme A... pouvait se prévaloir du bénéfice de la prescription prévue par l'article L. 93 du code des pensions civiles et militaires de retraite, le tribunal administratif a relevé que M. A... avait transmis à la mutuelle des douanes, le 21 octobre 2005, un extrait de son livret de famille portant mention de son remariage et en avait fait état, la même année, dans sa déclaration de revenus. En estimant que M. A... devait être ainsi regardé comme ayant informé l'administration compétente de son changement de situation matrimoniale, alors qu'il n'appartenait ni à la mutuelle des douanes, organisme de droit privé, ni aux services fiscaux de transmettre l'information ci-dessus mentionnée dont ils avaient été destinataires au service des retraites de l'Etat et qu'ils n'avaient d'ailleurs pas procédé à une telle transmission, le tribunal administratif de Caen a dénaturé les faits de l'espèce. Le ministre de l'action et des comptes publics est, par suite, fondé à demander l'annulation du jugement attaqué.
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 8 mars 2018 du tribunal administratif de Caen est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Caen.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à Mme E... A....