Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 30/11/2018, 416753
Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 30/11/2018, 416753
Conseil d'État - 7ème - 2ème chambres réunies
- N° 416753
- ECLI:FR:CECHR:2018:416753.20181130
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du
vendredi
30 novembre 2018
- Avocat(s)
- LE PRADO
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 11 septembre 2012 par laquelle le directeur du service des retraites de l'Etat a refusé de lui accorder une allocation temporaire d'invalidité. Par un jugement n° 1205499 du 7 avril 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.
Par une ordonnance n° 16BX01880 du 7 décembre 2017, enregistrée le 22 décembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président de la cour administrative d'appel de Bordeaux a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi présenté devant cette cour par MmeA....
Par ce pourvoi, enregistré le 8 juin 2016 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 16 février et 14 mars 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A...demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Marc Firoud, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Le Prado, avocat de MmeA....
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que MmeA..., agent de constatation principale de 2ème classe des douanes, était affectée à un service de la direction générale des douanes intitulé " Paris spécial ", dont les agents sont amenés à intervenir sur l'ensemble du territoire métropolitain pour effectuer des missions temporaires ; qu'elle a été appelée, à compter de septembre 2009, à exercer une mission à Marseille, où elle s'est vu attribuer un studio dans une résidence proposant des logements provisoires aux fonctionnaires ; que, le dimanche 27 décembre 2009, alors qu'elle quittait, à l'issue d'une période de congé, son domicile personnel situé à Martel (Lot), pour regagner Marseille, où elle devait prendre son service à 8 h le lundi matin, elle a été victime d'une chute en se dirigeant vers son véhicule, qu'elle avait garé devant sa résidence ; qu'elle a été placée en arrêt de travail du 28 décembre 2009 au 30 juin 2011 ; qu'à la suite de la consolidation, à compter du 21 décembre 2011, des séquelles de ses blessures, Mme A...a demandé le bénéfice d'une allocation temporaire d'invalidité en vue de l'indemnisation des séquelles invalidantes de son accident ; que, par une décision du 11 septembre 2012, le directeur interrégional des douanes d'Ile-de-France l'a informée du refus du service des retraites de l'Etat de lui accorder le bénéfice de cette allocation, au motif que l'accident dont elle avait été victime ne pouvait être qualifié d'accident de service ; que Mme A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler cette décision ; que, par un jugement du 7 avril 2016, contre lequel Mme A...se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 65 de la loi du 10 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Le fonctionnaire qui a été atteint d'une invalidité résultant d'un accident de service ayant entraîné une incapacité permanente d'au moins 10 % ou d'une maladie professionnelle peut prétendre à une allocation temporaire d'invalidité cumulable avec son traitement dont le montant est fixé à la fraction du traitement minimal de la grille mentionnée à l'article 15 du titre Ier du statut général, correspondant au pourcentage d'invalidité (...) " ;
3. Considérant qu'est réputé constituer un accident de trajet tout accident dont est victime un agent public qui se produit sur le parcours habituel entre le lieu où s'accomplit son travail et sa résidence et pendant la durée normale pour l'effectuer, sauf si un fait personnel de cet agent ou toute autre circonstance particulière est de nature à détacher l'accident du service ; qu'est également réputé constituer un accident de trajet, dans les mêmes conditions, tout accident se produisant sur le parcours habituel entre la résidence de l'agent et le lieu où il est hébergé provisoirement afin d'être à même d'exercer les fonctions qui lui sont attribuées ;
4. Considérant qu'il ressort des énonciations du jugement attaqué que, pour rejeter les conclusions dont il était saisi par MmeA..., le tribunal administratif de Toulouse s'est fondé sur la seule circonstance que son accident était survenu à l'occasion d'un trajet ayant pour destination son logement à Marseille et non directement les locaux professionnels où elle devait exercer ses fonctions, alors qu'il était soutenu devant lui qu'elle regagnait un logement où elle était hébergée provisoirement afin d'être à même d'assurer la mission temporaire qui lui avait été confiée ; qu'il a ainsi entaché son jugement d'erreur de droit ; que, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, Mme A...est fondée à en demander l'annulation ;
5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;
6. Considérant que, pour que soit reconnue l'existence d'un accident de trajet, il faut que le trajet du domicile au lieu de destination ait commencé ; que tel n'est pas le cas lorsque l'intéressé se trouve encore, lors de l'accident, à l'intérieur de son domicile ou de sa propriété ;
7. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des plans cadastraux versés par les parties, que la chute litigieuse s'est déroulée à l'intérieur de la propriété de Mme A... ; qu'ainsi qu'il vient d'être dit, il ne peut y avoir d'accident de trajet si l'intéressée se trouve encore à l'intérieur de son domicile ou de sa propriété ; que, par suite, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que le directeur du service des retraites de l'Etat aurait entaché d'erreur de fait sa décision en lui refusant le bénéfice de l'allocation temporaire d'invalidité ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme A...doivent être rejetées ;
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le jugement du 7 avril 2016 du tribunal administratif de Toulouse est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme A...devant le tribunal administratif de Toulouse ainsi que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme B...A...et au ministre de l'action et des comptes publics.
ECLI:FR:CECHR:2018:416753.20181130
Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 11 septembre 2012 par laquelle le directeur du service des retraites de l'Etat a refusé de lui accorder une allocation temporaire d'invalidité. Par un jugement n° 1205499 du 7 avril 2016, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.
Par une ordonnance n° 16BX01880 du 7 décembre 2017, enregistrée le 22 décembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président de la cour administrative d'appel de Bordeaux a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi présenté devant cette cour par MmeA....
Par ce pourvoi, enregistré le 8 juin 2016 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 16 février et 14 mars 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A...demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Marc Firoud, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Le Prado, avocat de MmeA....
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que MmeA..., agent de constatation principale de 2ème classe des douanes, était affectée à un service de la direction générale des douanes intitulé " Paris spécial ", dont les agents sont amenés à intervenir sur l'ensemble du territoire métropolitain pour effectuer des missions temporaires ; qu'elle a été appelée, à compter de septembre 2009, à exercer une mission à Marseille, où elle s'est vu attribuer un studio dans une résidence proposant des logements provisoires aux fonctionnaires ; que, le dimanche 27 décembre 2009, alors qu'elle quittait, à l'issue d'une période de congé, son domicile personnel situé à Martel (Lot), pour regagner Marseille, où elle devait prendre son service à 8 h le lundi matin, elle a été victime d'une chute en se dirigeant vers son véhicule, qu'elle avait garé devant sa résidence ; qu'elle a été placée en arrêt de travail du 28 décembre 2009 au 30 juin 2011 ; qu'à la suite de la consolidation, à compter du 21 décembre 2011, des séquelles de ses blessures, Mme A...a demandé le bénéfice d'une allocation temporaire d'invalidité en vue de l'indemnisation des séquelles invalidantes de son accident ; que, par une décision du 11 septembre 2012, le directeur interrégional des douanes d'Ile-de-France l'a informée du refus du service des retraites de l'Etat de lui accorder le bénéfice de cette allocation, au motif que l'accident dont elle avait été victime ne pouvait être qualifié d'accident de service ; que Mme A...a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler cette décision ; que, par un jugement du 7 avril 2016, contre lequel Mme A...se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 65 de la loi du 10 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Le fonctionnaire qui a été atteint d'une invalidité résultant d'un accident de service ayant entraîné une incapacité permanente d'au moins 10 % ou d'une maladie professionnelle peut prétendre à une allocation temporaire d'invalidité cumulable avec son traitement dont le montant est fixé à la fraction du traitement minimal de la grille mentionnée à l'article 15 du titre Ier du statut général, correspondant au pourcentage d'invalidité (...) " ;
3. Considérant qu'est réputé constituer un accident de trajet tout accident dont est victime un agent public qui se produit sur le parcours habituel entre le lieu où s'accomplit son travail et sa résidence et pendant la durée normale pour l'effectuer, sauf si un fait personnel de cet agent ou toute autre circonstance particulière est de nature à détacher l'accident du service ; qu'est également réputé constituer un accident de trajet, dans les mêmes conditions, tout accident se produisant sur le parcours habituel entre la résidence de l'agent et le lieu où il est hébergé provisoirement afin d'être à même d'exercer les fonctions qui lui sont attribuées ;
4. Considérant qu'il ressort des énonciations du jugement attaqué que, pour rejeter les conclusions dont il était saisi par MmeA..., le tribunal administratif de Toulouse s'est fondé sur la seule circonstance que son accident était survenu à l'occasion d'un trajet ayant pour destination son logement à Marseille et non directement les locaux professionnels où elle devait exercer ses fonctions, alors qu'il était soutenu devant lui qu'elle regagnait un logement où elle était hébergée provisoirement afin d'être à même d'assurer la mission temporaire qui lui avait été confiée ; qu'il a ainsi entaché son jugement d'erreur de droit ; que, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, Mme A...est fondée à en demander l'annulation ;
5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;
6. Considérant que, pour que soit reconnue l'existence d'un accident de trajet, il faut que le trajet du domicile au lieu de destination ait commencé ; que tel n'est pas le cas lorsque l'intéressé se trouve encore, lors de l'accident, à l'intérieur de son domicile ou de sa propriété ;
7. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des plans cadastraux versés par les parties, que la chute litigieuse s'est déroulée à l'intérieur de la propriété de Mme A... ; qu'ainsi qu'il vient d'être dit, il ne peut y avoir d'accident de trajet si l'intéressée se trouve encore à l'intérieur de son domicile ou de sa propriété ; que, par suite, Mme A...n'est pas fondée à soutenir que le directeur du service des retraites de l'Etat aurait entaché d'erreur de fait sa décision en lui refusant le bénéfice de l'allocation temporaire d'invalidité ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme A...doivent être rejetées ;
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 7 avril 2016 du tribunal administratif de Toulouse est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme A...devant le tribunal administratif de Toulouse ainsi que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme B...A...et au ministre de l'action et des comptes publics.