CAA de NANCY, 1ère chambre - formation à 3, 22/11/2018, 17NC02952, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I... et Mme D...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler le permis de construire délivré le 24 novembre 2014 par le maire de Riespach à M. F...G..., ainsi que la décision de rejet de leur recours gracieux du 2 septembre 2015.

Par un jugement n° 1506121 du 12 octobre 2017, le tribunal administratif a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 8 décembre 2017, M. I... et MmeD..., représentés par MeE..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler le permis de construire contesté ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Riespach une somme de 2 000 euros à leur verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la notice architecturale méconnaît les exigences de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme ;
- le permis de construire méconnaît les 1 et 3 de l'article UA 11 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune.


Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mars 2018, M.G..., représenté par MeC..., conclut :

- au rejet de la requête ;
- à ce que soit mise à la charge des appelants une somme de 3 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme n'est pas méconnu ;
- le projet respecte l'article UA 11 du règlement du plan d'occupation des sols.
Par des mémoires en défense et des pièces, enregistrés le 7 mai 2018 et le 15 octobre 2018, la commune de Riespach, représentée par MeJ..., conclut :

- au rejet de la requête ;
- à ce que soit mise à la charge solidaire des appelants une somme de 2 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les appelants ne démontrent pas qu'ils ont intérêt à agir ;
- l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme n'est pas méconnu ;
- le projet respecte l'article UA 11 du règlement du plan d'occupation des sols.
Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.




Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Stefanski, président,
- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., pour M.G....


Considérant ce qui suit :

1. M. B...I...et Mme H...D...demandent l'annulation de l'arrêté du 24 novembre 2014 par lequel le maire de Riespach a délivré à M. F...G...un permis de construire une extension de sa maison d'habitation, ainsi qu'un garage et autorisant des modifications des façades de la maison existante, ensemble la décision de rejet de leur recours gracieux du 2 septembre 2015.

Sur le permis de construire en tant qu'il autorise l'édification d'une extension :

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :

2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. ".

3. M. I...et MmeD..., voisins immédiats du projet, ont fait valoir devant le tribunal administratif que l'extension autorisée par le permis de construire contesté venait en limite de leur propriété et de leur bâtiment condamnant ainsi des portes, fenêtres et accès. Il ressort ainsi des pièces du dossier que les travaux projetés sont de nature à affecter directement leurs conditions d'occupation, d'utilisation et de jouissance de leur bien. Leur demande de première instance était, dès lors, recevable.

En ce qui concerne la légalité du permis de construire :

4. Aux termes de l'article UA 11 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Riespach : " (...) 11.3 Toitures / Les toitures des bâtiments principaux seront constituées de charpente à deux pans à couverture tuiles, dont la pente devra être comprise entre 40 et 55 degrés ".

5. Aux termes de l'article L. 111-6-2 du code de l'urbanisme alors en vigueur : " Nonobstant les règles relatives à l'aspect extérieur des constructions des plans locaux d'urbanisme, (...) le permis de construire ou d'aménager ou la décision prise sur une déclaration préalable ne peut s'opposer à l'utilisation de matériaux renouvelables ou de matériaux ou procédés de construction permettant d'éviter l'émission de gaz à effet de serre, (...). La liste des dispositifs, procédés de construction et matériaux concernés est fixée par voie réglementaire. Le présent alinéa ne fait pas obstacle à ce que le permis de construire ou d'aménager ou la décision prise sur une déclaration préalable comporte des prescriptions destinées à assurer la bonne intégration architecturale du projet dans le bâti existant et dans le milieu environnant. (...) ".

6. Il résulte des pièces du dossier de demande de permis de construire que le projet consiste notamment en une "extension bioclimatique à ossature bois" et qu'il comportera des "couvertures végétalisées". Cette extension, qui est accolée à la maison de M. G...et forme corps avec elle, constitue un élément indissociable du bâtiment principal pour l'application de l'article UA 11 du règlement du plan d'occupation des sols, qui impose des toitures à deux pans.

7. Les dispositions précitées de l'article L. 111-6-2 du code de l'urbanisme permettent d'écarter les règles des plans locaux d'urbanisme régissant l'aspect extérieur des constructions pour autoriser l'utilisation de certains matériaux ou procédés. Toutefois, ces dispositions n'ont pas pour effet d'écarter celles d'un plan local d'urbanisme qui interdisent les toitures plates. Si les toitures végétalisées font partie des matériaux mentionnés par l'article R. 111-50 du code de l'urbanisme, il ressort des pièces du dossier que la toiture de l'extension sera plate, alors que cette forme de toiture n'est pas la seule qui permet la mise en oeuvre de couvertures végétalisées. Dès lors, le permis de construire contesté méconnaît l'article UA 11.3 du règlement du plan local d'urbanisme qui impose des toitures à deux pans. Par suite, le permis de construire est entaché d'illégalité en ce qui concerne cette extension.

Sur le permis de construire en tant qu'il autorise l'édification d'un garage et la modification des façades de la maison existante :

8. D'une part, aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : (...) / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : (...) / e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer, / f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement ".

9. Contrairement à ce que soutiennent les appelants, la demande de permis de construire comporte une notice paysagère qui précise les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement, en mentionnant notamment la diminution des surfaces de pelouses due au projet, le type de matériaux utilisés pour traiter les surfaces destinées à la circulation, l'emplacement des places de stationnement, le traitement des espaces libres, l'organisation et l'aménagement des accès au terrain. Elle est ainsi conforme aux dispositions de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme. De plus, les autres pièces jointes à la demande de permis de construire, notamment les documents graphiques, permettaient également à l'autorité administrative d'apprécier l'insertion du projet dans son environnement. La circonstance que la notice indique de façon erronée la localisation du projet au 26 rue de Ferrette et non au 25 n'a pas été de nature à induire le service instructeur en erreur dès lors que l'adresse réelle du projet était mentionnée dans les autres documents de la demande.

10. D'autre part, aux termes de l'article UA 11 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Riespach : " 11.1 Bâtiments / - Les constructions devront présenter un aspect compatible avec le caractère des lieux avoisinants, des sites et des paysages. / - les bâtiments annexes devront être en harmonie avec les constructions principales. (...) ".

11. En se bornant à affirmer que le bâtiment annexe autorisé n'a pas un aspect compatible avec le caractère des lieux avoisinants, ni avec la construction principale et en reprenant des arguments invoqués à propos du 3 de l'article UA 11 du règlement du plan d'occupation des sols, les appelants ne mettent pas la cour en mesure d'apprécier la portée de leur moyen tiré de la méconnaissance de l'article UA 11.1 du règlement du plan local d'urbanisme.

12. Par suite, le permis de construire n'est pas entaché d'illégalité en tant qu'il autorise l'édification d'un garage et l'isolation de la façade de la maison existante.

13. Il résulte de ce qui précède que M. I...et Mme D...sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande en tant qu'elle concernait l'extension autorisée par le permis de construire contesté, qui est divisible du garage indépendant et de l'aménagement des façades de la maison existante. Ils ne sont pas, en revanche, fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté leurs conclusions en tant qu'elles portaient sur les autres dispositions du permis de construire contesté.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. I... et de Mme D...qui ne sont pas pour l'essentiel la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Riespach et M. G...demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

15. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions de mettre à la charge de la commune de Riespach, une somme de 1 500 euros à verser à M. I... et Mme D...au titre des mêmes frais.


DECIDE :


Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg et le permis de construire contesté sont annulés en tant qu'ils portent sur la construction d'une extension.

Article 2 : Le surplus des conclusions de M. I... et de Mme D...est rejeté.
Article 3 : La commune de Riespach versera à M. I... et à Mme D...une somme globale de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Riespach et de M. G...relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...I..., à Mme H...D..., à la commune de Riespach et à M. F...G....
Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.
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N° 17NC02952



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