CAA de DOUAI, 3e chambre - formation à 3, 04/10/2018, 17DA00437 17DA00453, Inédit au recueil Lebon
CAA de DOUAI, 3e chambre - formation à 3, 04/10/2018, 17DA00437 17DA00453, Inédit au recueil Lebon
CAA de DOUAI - 3e chambre - formation à 3
- N° 17DA00437 17DA00453
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
jeudi
04 octobre 2018
- Président
- M. Albertini
- Rapporteur
- Mme Valérie Petit
- Avocat(s)
- SCP FRISON ET ASSOCIES
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La commune de Rouvroy a demandé au tribunal d'Amiens de condamner solidairement M. H...F...et la société Verdi Ingénierie Pas-de-Calais à lui verser la somme de 215 868,39 euros toutes taxes comprises en réparation des dysfonctionnements du système de chauffage de la pompe à chaleur du foyer rural, de condamner la société Bernier à lui verser la somme de 27 290,54 euros toutes taxes comprises au titre de ces mêmes désordres, de condamner le CETE Apave Nord-Ouest à lui verser la somme de 10 937,35 euros toutes taxes comprises au titre de ces mêmes désordres et de condamner l'ensemble de ces constructeurs, au prorata de la répartition de leur responsabilité, à lui verser la somme de 39 000 euros en réparation du préjudice de jouissance qu'elle estime avoir subi.
Par un jugement n° 1401675 du 27 décembre 2016, le tribunal administratif d'Amiens a condamné solidairement M. F...et la société Verdi Ingénierie Pas-de-Calais à verser à la commune de Rouvroy la somme de 125 102,13 euros toutes taxes comprises, a condamné la société Bernier à verser à la commune de Rouvroy la somme de 21 052,49 euros toutes taxes comprises et a condamné la société Verdi Ingénierie Pas-de-Calais à garantir M. F...à hauteur de 33 % du montant de leur condamnation solidaire.
Procédure devant la cour :
I) Par une requête enregistrée le 3 mars 2017 sous le n° 17DA00437 et des mémoires enregistrés les 3 juillet et 30 novembre 2017, M. H...F..., représenté par Me I...C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 27 décembre 2016 en tant qu'il a prononcé des condamnations à son encontre ;
2°) de rejeter la demande présentée par la commune de Rouvroy devant le tribunal administratif, en tant qu'elle tend à sa condamnation ;
3°) subsidiairement, de condamner la société Verdi Ingénierie Pas-de-Calais, la société CETE Apave Nord Picardie et la société Didier Bernier à le garantir de toute condamnation pouvant être prononcée à son encontre ;
4°) de mettre à la charge de la société Verdi Ingénierie Pas-de-Calais, de la société CETE Apave Nord Picardie et de la société Didier Bernier la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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II) Par une requête enregistrée le 6 mars 2017 sous le n° 17DA00453, la société Didier Bernier, représentée par Me D...E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 27 décembre 2016 en tant qu'il a prononcé des condamnations à son encontre ;
2°) de rejeter la demande présentée par la commune de Rouvroy devant le tribunal administratif, en tant qu'elle tend à sa condamnation ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Rouvroy la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le décret n°2006-592 du 24 mai 2006 relatif aux caractéristiques techniques et à la performance énergétique des constructions ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
-le rapport de Mme Valérie Petit, président-assesseur,
- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,
- les observations de Me A...B..., représentant le CETE Apave Nord Picardie,
- les observations de MeK..., représentant le commune de Rouvroy,
-et les observations de Me G...J..., représentant la société Verdi bâtiment Nord de France.
Considérant ce qui suit
1. Pour la construction d'un foyer rural, la commune de Rouvroy a confié la maîtrise d'oeuvre du projet, le 12 avril 2006 et pour un montant hors taxes définitif de 43 171,99 euros, à un groupement solidaire composé de M. H... F..., architecte, et d'un bureau d'études techniques, la société BetR Ingénierie Aménagement, devenue la SARL Verdi Ingénierie Pas-de-Calais, puis la société Verdi Bâtiment Nord de France. Le lot n° 7 " chauffage - VMC - Plomberie " a été confié à la société Didier Bernier par un marché du 24 février 2007, pour un montant total de 100 205,97 euros hors taxes. Une mission de contrôle technique a été confiée à la société CETE Apave Nord-Ouest. La commune a opté pour un système de chauffage électrique, produit par une pompe à chaleur. L'ouvrage a été réceptionné, le 16 janvier 2008, avec une réserve portant sur la pompe à chaleur. La commune a constaté, ensuite, des dysfonctionnements persistants du système de chauffage, empêchant notamment d'atteindre, en hiver, une température suffisante. Elle a saisi le juge des référés du tribunal administratif d'Amiens à fins de nomination d'un expert. Elle a également saisi ce tribunal d'un recours indemnitaire tendant à l'indemnisation des constructeurs à lui verser le montant des travaux de reprise du système de chauffage ainsi qu'à la réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis. Une expertise a été ordonnée par le juge des référés, le 2 mai 2012. Le rapport d'expertise a été déposé le 31 juillet 2013. Par un jugement du 27 décembre 2016, le tribunal administratif a estimé que l'action engagée par la commune, fondée sur la responsabilité contractuelle, n'était pas prescrite et que le groupement de maîtrise d'oeuvre et la société Didier Bernier avaient manqué à leurs obligations contractuelles, selon un partage de responsabilités qu'il a déterminé. Il a, en revanche, écarté les conclusions de la commune dirigées contre la société CETE Apave Nord-Ouest. Il a évalué le montant total des préjudices subis par la commune à la somme de 156 096,29 euros toutes taxes comprises, condamné solidairement M. F...et la société Verdi Ingénierie Pas-de-Calais à verser à la commune de Rouvroy la somme de 125 102,13 euros toutes taxes comprises, a condamné la société Bernier à verser à la commune de Rouvroy la somme de 21 052,49 euros toutes taxes comprises, enfin, a condamné la société Verdi Ingénierie Pas-de-Calais à garantir M. F...à hauteur de 33 % du montant de leur condamnation solidaire. Par les deux requêtes susvisées, qu'il y a lieu de joindre, M. F...et la société Didier Bernier relèvent appel de ce jugement en tant qu'il a prononcé des condamnations à leur encontre. La société Verdi Bâtiment Nord de France, qui vient aux droits de la société Verdi Ingénierie Pas-de-Calais ainsi que la commune de Rouvroy présentent des conclusions d'appel incident et d'appel provoqué. La société CETE Apave Nord-Ouest demande à la cour de confirmer le jugement, en tant qu'il a rejeté les conclusions dirigées à son encontre.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
2. La demande de première instance présentée par la commune de Rouvroy se référait expressément à la " responsabilité contractuelle " des différents intervenants, indiquait que la réception du foyer rural avait été prononcée sous réserve du bon fonctionnement de la pompe à chaleur et se référait au rapport d'expertise, qui pointait différents manquements contractuels des constructeurs. Par suite, comme l'ont estimé à bon droit les premiers juges, cette demande, fondée sur la responsabilité contractuelle des cocontractants de la commune, était suffisamment motivée au regard des exigences de l'article R. 411-1 du code de justice administrative.
Sur la prescription de l'action en responsabilité contractuelle :
3. En l'absence de stipulations particulières prévues par les documents contractuels, lorsque la réception d'un ouvrage est prononcée avec réserves, les rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs ne se poursuivent qu'au titre des travaux ou des parties de l'ouvrage ayant fait l'objet de réserves. En l'espèce, le procès-verbal de réception du lot n° 7 " chauffage ", daté du 16 janvier 2008, comporte une réserve portant sur " le bon fonctionnement de la pompe à chaleur ". Cette réserve identifie de manière suffisamment précise l'équipement affecté, selon le maître d'ouvrage, par des dysfonctionnements. Cette réserve doit être regardée comme incluant les éléments indissociables de la pompe à chaleur et nécessaires au bon fonctionnement de celle-ci. Il résulte aussi de l'instruction que le maître d'ouvrage n'a jamais accepté, par la suite, de lever cette réserve. La circonstance que la commune ait utilisé le foyer rural et tenté de faire fonctionner le chauffage, tout en y ajoutant pendant l'hiver des radiateurs électriques d'appoint, n'est pas de nature à la faire regarder comme ayant réceptionné tacitement le lot n° 7, dès lors que, comme cela a été dit ci-dessus, elle a refusé expressément de lever la réserve. Par suite, nonobstant l'expiration du délai pendant lequel les constructeurs étaient tenus, selon les documents contractuels, à une obligation de parfait achèvement, la commune de Rouvroy était recevable à rechercher leur responsabilité contractuelle à raison des travaux ayant fait l'objet de la réserve susmentionnée ci-dessus.
Sur les responsabilités des différents constructeurs :
En ce qui concerne la responsabilité contractuelle de la maîtrise d'oeuvre :
4. Il ne résulte pas de l'instruction qu'un chauffage efficace du bâtiment par géothermie aurait été techniquement impossible. Le groupement de maîtrise d'oeuvre ne peut, dès lors, être regardé comme ayant manqué à son obligation de conseil en ne déconseillant pas formellement au maître d'ouvrage de choisir un tel mode de chauffage.
5. A la date de la conclusion du marché de maîtrise d'oeuvre, soit le 12 avril 2006, le décret n°2006-592 du 24 mai 2006 relatif aux caractéristiques techniques et à la performance énergétique des constructions, qui a modifié le code de la construction et de l'habitation, ainsi que son arrêté d'application du même jour, n'étaient pas encore en vigueur. Ce décret dispose, toutefois, que la règlementation thermique qu'il impose est applicable à toutes les constructions faisant l'objet d'un dépôt de permis de construire à compter du 1er septembre 2006. Dès lors que le contrat de maîtrise d'oeuvre était en cours d'exécution à la date de publication du décret et que le permis de construire du foyer rural ne pouvait être déposé que postérieurement au 1er septembre 2006, il appartenait à tout le moins au groupement de maîtrise d'oeuvre d'alerter le maître d'ouvrage du risque de non-conformité du bâtiment à la nouvelle réglementation et de lui proposer la signature d'un avenant afin de modifier le projet en ce sens. Il est constant que le groupement de maîtrise d'oeuvre n'a pas tenu compte de l'entrée en vigueur de la nouvelle réglementation thermique. Il a, dès lors, manqué à l'obligation de conseil qui lui incombait.
6. Il n'est pas non plus sérieusement contesté que la prise en compte de la réglementation issue du décret du 24 mai 2006 et de l'arrêté du même jour aurait dû conduire à prévoir le calorifugeage de la vanne trois voies située à la sortie de la pompe à chaleur.
7. Enfin, il résulte du rapport d'expertise que le système de chauffage par pompe à chaleur ne pouvait être efficace que si le plenum du faux plafond était isolé. En ne prévoyant pas une telle isolation, la maîtrise d'oeuvre a également commis une faute de nature à engager sa responsabilité.
En ce qui concerne la responsabilité contractuelle de la société Didier Bernier :
8. A la date de la signature par la société Didier Bernier du marché correspondant au lot n° 7, la réglementation thermique imposée par le décret du 24 mai 2006 et l'arrêté du même jour était entrée en vigueur. Il appartenait dès lors à cette société de veiller au respect de cette réglementation et, à tout le moins, d'attirer l'attention du maître d'oeuvre sur cette nécessité. Il résulte de l'instruction que la société n'a pas procédé à un calorifugeage efficace de la vanne à trois voies située à la sortie de la pompe à chaleur, exigée par cette réglementation. Par ailleurs, il ressort du rapport de l'expert que le disjoncteur de tête de l'armoire électrique de la pompe à chaleur était sous-dimensionné et ne pouvait dès lors supporter les puissances mises en oeuvre. Enfin, il ressort de la version produite par la commune du cahier des clauses techniques particulières commun à tous les lots, signé par l'ensemble des entrepreneurs qu'il lui appartenait d'installer un caisson de mélange dans la centrale de traitement d'air, alors même que le plan d'exécution de la centrale ne faisait pas apparaître ce caisson. Ces différentes fautes sont de nature à engager la responsabilité contractuelle de la société Didier Bernier.
En ce qui concerne la responsabilité de la société CETE Apave Nord-Ouest :
9. Il résulte de l'instruction que la société CETE Apave Nord-Ouest a demandé expressément à la commune de Rouvroy de pouvoir disposer d'une étude thermique pour assurer la mission " Th isolation thermique et économie d'énergie " qui lui avait été confiée. Elle n'était pas tenue d'engager elle-même une telle étude. Par suite, comme l'ont estimé à bon droit les premiers juges, sa responsabilité contractuelle ne peut être regardée comme engagée.
En ce qui concerne la faute qu'aurait commise la commune de Rouvroy :
10. En exprimant sa préférence pour un système de chauffage par géothermie, la commune de Rouvroy, qui n'est pas un professionnel de l'art, ne peut être regardée comme ayant elle-même commis une faute de nature à atténuer celles commises par le groupement de maîtrise d'oeuvre et par la société Didier Bernier. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que les dysfonctionnements du système de chauffage seraient dus au caractère insuffisant de son entretien par la commune de Rouvroy.
En ce qui concerne le partage des responsabilités :
11. Compte tenu des fautes respectives commises par le groupement de maîtrise d'oeuvre et la société Didier Bernier, les premiers juges n'ont pas fait une inexacte appréciation des faits de l'espèce en retenant, s'agissant des travaux de reprise relatifs au calorifugeage du réseau, une part de responsabilité de 50 % pour le groupement de maîtrise d'oeuvre et de 50 % pour la société Didier Bernier. Le sous-dimensionnement du disjoncteur de l'armoire de tête de la pompe à chaleur et l'absence de réalisation d'un caisson de mélange d'air engage seulement la responsabilité de la société Didier Bernier. Quant au défaut d'isolation du plénum du faux-plafond et au non-respect des autres exigences de la réglementation thermique imposée par le décret du 24 mai 2006, ils engagement seulement la responsabilité contractuelle du groupement de maîtrise d'oeuvre.
Sur les préjudices subis par la commune de Rouvroy :
12. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que les travaux nécessaires pour respecter les prescriptions de la réglementation thermique imposée par le décret du 24 mai 2006 s'élèvent à la somme globale de 109 373,54 euros toutes taxes comprises. M. F...ne peut utilement soutenir que le préjudice subi à ce titre par la commune aurait disparu, du fait de l'évolution ultérieure de la réglementation, dès lors qu'il n'est pas même soutenu que les textes réglementaires les plus récents auraient supprimé certaines exigences imposées par le décret du 24 mai 2006. Par ailleurs, le coût spécifique du calorifugeage des réseaux s'élève à 22 221,68 euros toutes taxes comprises, celui du remplacement du disjoncteur de tête à 1504,57 euros toutes taxes comprises, celui de l'installation d'un caisson de mélange d'air à 18 378,75 euros toutes taxes comprises, enfin celui de la mise en place d'une isolation du plenum du faux-plafond à 4 617,75 euros toutes taxes comprises.
13. La commune de Rouvroy invoque, par la voie de l'appel incident, deux séries de préjudices complémentaires. Elle soutient, en premier lieu, avoir subi, du fait du choix d'un mode de chauffage par géothermie, une surconsommation énergétique. Toutefois, il résulte de ce qui a été dit au point 4 ci-dessus que la responsabilité du groupement de maîtrise d'oeuvre ne peut être regardée comme engagée sur ce point. Le préjudice invoqué, d'un montant de 98 000 euros, n'est en tout état de cause pas établi. En second lieu, la commune invoque un " préjudice de jouissance ", pour un montant de 39 000 euros. Toutefois, elle ne justifie pas de manière probante des pertes qui résulteraient, selon elle, des difficultés à louer la salle du foyer rural du fait des déficiences du système de chauffage. Par suite, ces deux chefs de préjudice ne peuvent être retenus.
14. Compte tenu de ce qui précède et des parts de responsabilité retenues, c'est à bon droit que le tribunal administratif a condamné solidairement M. F...et la société Verdi Bâtiment Nord de France, membres d'un groupement solidaire de maîtrise d'oeuvre, à verser à la commune de Rouvroy la somme de 125 102,13 euros toutes taxes comprises et qu'il a condamné la société Bernier à verser à celle-ci la somme de 21 052,49 euros toutes taxes comprises.
Sur les appels en garantie :
15. S'agissant en premier lieu des appels en garantie internes au groupement de maîtrise d'oeuvre, il y a lieu de tenir compte, non de l'importance des rémunérations respectives prévues pour chacun des membres de ce groupement, mais des fautes respectives commises par chacun d'eux en fonction de la nature de leurs missions. Il résulte de l'instruction que la société BetR Ingénierie Aménagement était, notamment, chargée des questions relatives au chauffage. Dans les circonstances de l'espèce, il a y a lieu de condamner la société Verdi Bâtiment Nord de France à garantir M. F...à hauteur de 50 % des condamnations solidaires prononcées à leur encontre, de condamner M. F...à garantir la société Verdi Bâtiment Ile de France à hauteur de 50 % de celles-ci, et de réformer le jugement en ce sens.
16. En second lieu, M. F...demande à être garanti par les autres constructeurs, sur le fondement de la responsabilité quasi-délictuelle de ceux-ci. La condamnation solidaire de cocontractants n'est pas une condition nécessaire de l'exercice entre eux d'actions récursoires. L'appel en garantie est ainsi possible, même en l'absence de condamnation solidaire, lorsqu'un constructeur fait valoir qu'un autre constructeur doit le garantir de sa condamnation à réparer un préjudice au titre de sa responsabilité propre dans la survenance des désordres qui sont à l'origine de cette condamnation. Toutefois, en l'espèce, le présent arrêt condamne M. F...à verser à la commune une indemnité correspondant à sa seule part de responsabilité. Par suite, ses conclusions d'appel en garantie doivent être rejetées.
Sur les frais d'expertise :
17. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et compte tenu des fautes respectives commises par les parties, de mettre les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 12 200,01 euros par ordonnance de la présidente du tribunal administratif d'Amiens, à la charge de M. F...à hauteur de 4 000 euros, à la charge de la société Verdi Bâtiment Nord de France à hauteur de la même somme, et à la charge de la société Didier F...à hauteur de 4 200 euros. Il y a lieu, par suite, de réformer le jugement en ce sens.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
18. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : M. F...et la société Verdi Bâtiment Nord de France sont condamnés solidairement à verser à la commune de Rouvroy la somme de 125 102,13 euros toutes taxes comprises.
Article 2 : La société Didier Bernier est condamnée à verser à la commune de Rouvroy la somme de 21 052,49 euros toutes taxes comprises.
Article 3 : La société Verdi Bâtiment Nord de France est condamnée à garantir M. F...à hauteur de 50 % des condamnations solidaires prononcées à leur encontre et M. F...est condamné à garantir cette société dans la même proportion.
Article 4 : Les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 12 200,01 euros par ordonnance de la présidente du tribunal administratif d'Amiens, sont mis à la charge de M. F...à hauteur de 4 000 euros, à la charge de la société Verdi Bâtiment Nord de France à hauteur de la même somme, et à la charge de la société Didier Bernier à hauteur de 4 200 euros.
Article 5 : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 27 décembre 2016 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 6 : Les conclusions présentées par les parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. H...F..., à la société Verdi Bâtiment Nord de France, à la société CETE Apave Nord Ouest, à la société Didier Bernier et à la commune de Rouvroy.
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N°17DA00437, 17DA00453
Procédure contentieuse antérieure :
La commune de Rouvroy a demandé au tribunal d'Amiens de condamner solidairement M. H...F...et la société Verdi Ingénierie Pas-de-Calais à lui verser la somme de 215 868,39 euros toutes taxes comprises en réparation des dysfonctionnements du système de chauffage de la pompe à chaleur du foyer rural, de condamner la société Bernier à lui verser la somme de 27 290,54 euros toutes taxes comprises au titre de ces mêmes désordres, de condamner le CETE Apave Nord-Ouest à lui verser la somme de 10 937,35 euros toutes taxes comprises au titre de ces mêmes désordres et de condamner l'ensemble de ces constructeurs, au prorata de la répartition de leur responsabilité, à lui verser la somme de 39 000 euros en réparation du préjudice de jouissance qu'elle estime avoir subi.
Par un jugement n° 1401675 du 27 décembre 2016, le tribunal administratif d'Amiens a condamné solidairement M. F...et la société Verdi Ingénierie Pas-de-Calais à verser à la commune de Rouvroy la somme de 125 102,13 euros toutes taxes comprises, a condamné la société Bernier à verser à la commune de Rouvroy la somme de 21 052,49 euros toutes taxes comprises et a condamné la société Verdi Ingénierie Pas-de-Calais à garantir M. F...à hauteur de 33 % du montant de leur condamnation solidaire.
Procédure devant la cour :
I) Par une requête enregistrée le 3 mars 2017 sous le n° 17DA00437 et des mémoires enregistrés les 3 juillet et 30 novembre 2017, M. H...F..., représenté par Me I...C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 27 décembre 2016 en tant qu'il a prononcé des condamnations à son encontre ;
2°) de rejeter la demande présentée par la commune de Rouvroy devant le tribunal administratif, en tant qu'elle tend à sa condamnation ;
3°) subsidiairement, de condamner la société Verdi Ingénierie Pas-de-Calais, la société CETE Apave Nord Picardie et la société Didier Bernier à le garantir de toute condamnation pouvant être prononcée à son encontre ;
4°) de mettre à la charge de la société Verdi Ingénierie Pas-de-Calais, de la société CETE Apave Nord Picardie et de la société Didier Bernier la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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II) Par une requête enregistrée le 6 mars 2017 sous le n° 17DA00453, la société Didier Bernier, représentée par Me D...E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 27 décembre 2016 en tant qu'il a prononcé des condamnations à son encontre ;
2°) de rejeter la demande présentée par la commune de Rouvroy devant le tribunal administratif, en tant qu'elle tend à sa condamnation ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Rouvroy la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le décret n°2006-592 du 24 mai 2006 relatif aux caractéristiques techniques et à la performance énergétique des constructions ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
-le rapport de Mme Valérie Petit, président-assesseur,
- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,
- les observations de Me A...B..., représentant le CETE Apave Nord Picardie,
- les observations de MeK..., représentant le commune de Rouvroy,
-et les observations de Me G...J..., représentant la société Verdi bâtiment Nord de France.
Considérant ce qui suit
1. Pour la construction d'un foyer rural, la commune de Rouvroy a confié la maîtrise d'oeuvre du projet, le 12 avril 2006 et pour un montant hors taxes définitif de 43 171,99 euros, à un groupement solidaire composé de M. H... F..., architecte, et d'un bureau d'études techniques, la société BetR Ingénierie Aménagement, devenue la SARL Verdi Ingénierie Pas-de-Calais, puis la société Verdi Bâtiment Nord de France. Le lot n° 7 " chauffage - VMC - Plomberie " a été confié à la société Didier Bernier par un marché du 24 février 2007, pour un montant total de 100 205,97 euros hors taxes. Une mission de contrôle technique a été confiée à la société CETE Apave Nord-Ouest. La commune a opté pour un système de chauffage électrique, produit par une pompe à chaleur. L'ouvrage a été réceptionné, le 16 janvier 2008, avec une réserve portant sur la pompe à chaleur. La commune a constaté, ensuite, des dysfonctionnements persistants du système de chauffage, empêchant notamment d'atteindre, en hiver, une température suffisante. Elle a saisi le juge des référés du tribunal administratif d'Amiens à fins de nomination d'un expert. Elle a également saisi ce tribunal d'un recours indemnitaire tendant à l'indemnisation des constructeurs à lui verser le montant des travaux de reprise du système de chauffage ainsi qu'à la réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis. Une expertise a été ordonnée par le juge des référés, le 2 mai 2012. Le rapport d'expertise a été déposé le 31 juillet 2013. Par un jugement du 27 décembre 2016, le tribunal administratif a estimé que l'action engagée par la commune, fondée sur la responsabilité contractuelle, n'était pas prescrite et que le groupement de maîtrise d'oeuvre et la société Didier Bernier avaient manqué à leurs obligations contractuelles, selon un partage de responsabilités qu'il a déterminé. Il a, en revanche, écarté les conclusions de la commune dirigées contre la société CETE Apave Nord-Ouest. Il a évalué le montant total des préjudices subis par la commune à la somme de 156 096,29 euros toutes taxes comprises, condamné solidairement M. F...et la société Verdi Ingénierie Pas-de-Calais à verser à la commune de Rouvroy la somme de 125 102,13 euros toutes taxes comprises, a condamné la société Bernier à verser à la commune de Rouvroy la somme de 21 052,49 euros toutes taxes comprises, enfin, a condamné la société Verdi Ingénierie Pas-de-Calais à garantir M. F...à hauteur de 33 % du montant de leur condamnation solidaire. Par les deux requêtes susvisées, qu'il y a lieu de joindre, M. F...et la société Didier Bernier relèvent appel de ce jugement en tant qu'il a prononcé des condamnations à leur encontre. La société Verdi Bâtiment Nord de France, qui vient aux droits de la société Verdi Ingénierie Pas-de-Calais ainsi que la commune de Rouvroy présentent des conclusions d'appel incident et d'appel provoqué. La société CETE Apave Nord-Ouest demande à la cour de confirmer le jugement, en tant qu'il a rejeté les conclusions dirigées à son encontre.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
2. La demande de première instance présentée par la commune de Rouvroy se référait expressément à la " responsabilité contractuelle " des différents intervenants, indiquait que la réception du foyer rural avait été prononcée sous réserve du bon fonctionnement de la pompe à chaleur et se référait au rapport d'expertise, qui pointait différents manquements contractuels des constructeurs. Par suite, comme l'ont estimé à bon droit les premiers juges, cette demande, fondée sur la responsabilité contractuelle des cocontractants de la commune, était suffisamment motivée au regard des exigences de l'article R. 411-1 du code de justice administrative.
Sur la prescription de l'action en responsabilité contractuelle :
3. En l'absence de stipulations particulières prévues par les documents contractuels, lorsque la réception d'un ouvrage est prononcée avec réserves, les rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs ne se poursuivent qu'au titre des travaux ou des parties de l'ouvrage ayant fait l'objet de réserves. En l'espèce, le procès-verbal de réception du lot n° 7 " chauffage ", daté du 16 janvier 2008, comporte une réserve portant sur " le bon fonctionnement de la pompe à chaleur ". Cette réserve identifie de manière suffisamment précise l'équipement affecté, selon le maître d'ouvrage, par des dysfonctionnements. Cette réserve doit être regardée comme incluant les éléments indissociables de la pompe à chaleur et nécessaires au bon fonctionnement de celle-ci. Il résulte aussi de l'instruction que le maître d'ouvrage n'a jamais accepté, par la suite, de lever cette réserve. La circonstance que la commune ait utilisé le foyer rural et tenté de faire fonctionner le chauffage, tout en y ajoutant pendant l'hiver des radiateurs électriques d'appoint, n'est pas de nature à la faire regarder comme ayant réceptionné tacitement le lot n° 7, dès lors que, comme cela a été dit ci-dessus, elle a refusé expressément de lever la réserve. Par suite, nonobstant l'expiration du délai pendant lequel les constructeurs étaient tenus, selon les documents contractuels, à une obligation de parfait achèvement, la commune de Rouvroy était recevable à rechercher leur responsabilité contractuelle à raison des travaux ayant fait l'objet de la réserve susmentionnée ci-dessus.
Sur les responsabilités des différents constructeurs :
En ce qui concerne la responsabilité contractuelle de la maîtrise d'oeuvre :
4. Il ne résulte pas de l'instruction qu'un chauffage efficace du bâtiment par géothermie aurait été techniquement impossible. Le groupement de maîtrise d'oeuvre ne peut, dès lors, être regardé comme ayant manqué à son obligation de conseil en ne déconseillant pas formellement au maître d'ouvrage de choisir un tel mode de chauffage.
5. A la date de la conclusion du marché de maîtrise d'oeuvre, soit le 12 avril 2006, le décret n°2006-592 du 24 mai 2006 relatif aux caractéristiques techniques et à la performance énergétique des constructions, qui a modifié le code de la construction et de l'habitation, ainsi que son arrêté d'application du même jour, n'étaient pas encore en vigueur. Ce décret dispose, toutefois, que la règlementation thermique qu'il impose est applicable à toutes les constructions faisant l'objet d'un dépôt de permis de construire à compter du 1er septembre 2006. Dès lors que le contrat de maîtrise d'oeuvre était en cours d'exécution à la date de publication du décret et que le permis de construire du foyer rural ne pouvait être déposé que postérieurement au 1er septembre 2006, il appartenait à tout le moins au groupement de maîtrise d'oeuvre d'alerter le maître d'ouvrage du risque de non-conformité du bâtiment à la nouvelle réglementation et de lui proposer la signature d'un avenant afin de modifier le projet en ce sens. Il est constant que le groupement de maîtrise d'oeuvre n'a pas tenu compte de l'entrée en vigueur de la nouvelle réglementation thermique. Il a, dès lors, manqué à l'obligation de conseil qui lui incombait.
6. Il n'est pas non plus sérieusement contesté que la prise en compte de la réglementation issue du décret du 24 mai 2006 et de l'arrêté du même jour aurait dû conduire à prévoir le calorifugeage de la vanne trois voies située à la sortie de la pompe à chaleur.
7. Enfin, il résulte du rapport d'expertise que le système de chauffage par pompe à chaleur ne pouvait être efficace que si le plenum du faux plafond était isolé. En ne prévoyant pas une telle isolation, la maîtrise d'oeuvre a également commis une faute de nature à engager sa responsabilité.
En ce qui concerne la responsabilité contractuelle de la société Didier Bernier :
8. A la date de la signature par la société Didier Bernier du marché correspondant au lot n° 7, la réglementation thermique imposée par le décret du 24 mai 2006 et l'arrêté du même jour était entrée en vigueur. Il appartenait dès lors à cette société de veiller au respect de cette réglementation et, à tout le moins, d'attirer l'attention du maître d'oeuvre sur cette nécessité. Il résulte de l'instruction que la société n'a pas procédé à un calorifugeage efficace de la vanne à trois voies située à la sortie de la pompe à chaleur, exigée par cette réglementation. Par ailleurs, il ressort du rapport de l'expert que le disjoncteur de tête de l'armoire électrique de la pompe à chaleur était sous-dimensionné et ne pouvait dès lors supporter les puissances mises en oeuvre. Enfin, il ressort de la version produite par la commune du cahier des clauses techniques particulières commun à tous les lots, signé par l'ensemble des entrepreneurs qu'il lui appartenait d'installer un caisson de mélange dans la centrale de traitement d'air, alors même que le plan d'exécution de la centrale ne faisait pas apparaître ce caisson. Ces différentes fautes sont de nature à engager la responsabilité contractuelle de la société Didier Bernier.
En ce qui concerne la responsabilité de la société CETE Apave Nord-Ouest :
9. Il résulte de l'instruction que la société CETE Apave Nord-Ouest a demandé expressément à la commune de Rouvroy de pouvoir disposer d'une étude thermique pour assurer la mission " Th isolation thermique et économie d'énergie " qui lui avait été confiée. Elle n'était pas tenue d'engager elle-même une telle étude. Par suite, comme l'ont estimé à bon droit les premiers juges, sa responsabilité contractuelle ne peut être regardée comme engagée.
En ce qui concerne la faute qu'aurait commise la commune de Rouvroy :
10. En exprimant sa préférence pour un système de chauffage par géothermie, la commune de Rouvroy, qui n'est pas un professionnel de l'art, ne peut être regardée comme ayant elle-même commis une faute de nature à atténuer celles commises par le groupement de maîtrise d'oeuvre et par la société Didier Bernier. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que les dysfonctionnements du système de chauffage seraient dus au caractère insuffisant de son entretien par la commune de Rouvroy.
En ce qui concerne le partage des responsabilités :
11. Compte tenu des fautes respectives commises par le groupement de maîtrise d'oeuvre et la société Didier Bernier, les premiers juges n'ont pas fait une inexacte appréciation des faits de l'espèce en retenant, s'agissant des travaux de reprise relatifs au calorifugeage du réseau, une part de responsabilité de 50 % pour le groupement de maîtrise d'oeuvre et de 50 % pour la société Didier Bernier. Le sous-dimensionnement du disjoncteur de l'armoire de tête de la pompe à chaleur et l'absence de réalisation d'un caisson de mélange d'air engage seulement la responsabilité de la société Didier Bernier. Quant au défaut d'isolation du plénum du faux-plafond et au non-respect des autres exigences de la réglementation thermique imposée par le décret du 24 mai 2006, ils engagement seulement la responsabilité contractuelle du groupement de maîtrise d'oeuvre.
Sur les préjudices subis par la commune de Rouvroy :
12. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que les travaux nécessaires pour respecter les prescriptions de la réglementation thermique imposée par le décret du 24 mai 2006 s'élèvent à la somme globale de 109 373,54 euros toutes taxes comprises. M. F...ne peut utilement soutenir que le préjudice subi à ce titre par la commune aurait disparu, du fait de l'évolution ultérieure de la réglementation, dès lors qu'il n'est pas même soutenu que les textes réglementaires les plus récents auraient supprimé certaines exigences imposées par le décret du 24 mai 2006. Par ailleurs, le coût spécifique du calorifugeage des réseaux s'élève à 22 221,68 euros toutes taxes comprises, celui du remplacement du disjoncteur de tête à 1504,57 euros toutes taxes comprises, celui de l'installation d'un caisson de mélange d'air à 18 378,75 euros toutes taxes comprises, enfin celui de la mise en place d'une isolation du plenum du faux-plafond à 4 617,75 euros toutes taxes comprises.
13. La commune de Rouvroy invoque, par la voie de l'appel incident, deux séries de préjudices complémentaires. Elle soutient, en premier lieu, avoir subi, du fait du choix d'un mode de chauffage par géothermie, une surconsommation énergétique. Toutefois, il résulte de ce qui a été dit au point 4 ci-dessus que la responsabilité du groupement de maîtrise d'oeuvre ne peut être regardée comme engagée sur ce point. Le préjudice invoqué, d'un montant de 98 000 euros, n'est en tout état de cause pas établi. En second lieu, la commune invoque un " préjudice de jouissance ", pour un montant de 39 000 euros. Toutefois, elle ne justifie pas de manière probante des pertes qui résulteraient, selon elle, des difficultés à louer la salle du foyer rural du fait des déficiences du système de chauffage. Par suite, ces deux chefs de préjudice ne peuvent être retenus.
14. Compte tenu de ce qui précède et des parts de responsabilité retenues, c'est à bon droit que le tribunal administratif a condamné solidairement M. F...et la société Verdi Bâtiment Nord de France, membres d'un groupement solidaire de maîtrise d'oeuvre, à verser à la commune de Rouvroy la somme de 125 102,13 euros toutes taxes comprises et qu'il a condamné la société Bernier à verser à celle-ci la somme de 21 052,49 euros toutes taxes comprises.
Sur les appels en garantie :
15. S'agissant en premier lieu des appels en garantie internes au groupement de maîtrise d'oeuvre, il y a lieu de tenir compte, non de l'importance des rémunérations respectives prévues pour chacun des membres de ce groupement, mais des fautes respectives commises par chacun d'eux en fonction de la nature de leurs missions. Il résulte de l'instruction que la société BetR Ingénierie Aménagement était, notamment, chargée des questions relatives au chauffage. Dans les circonstances de l'espèce, il a y a lieu de condamner la société Verdi Bâtiment Nord de France à garantir M. F...à hauteur de 50 % des condamnations solidaires prononcées à leur encontre, de condamner M. F...à garantir la société Verdi Bâtiment Ile de France à hauteur de 50 % de celles-ci, et de réformer le jugement en ce sens.
16. En second lieu, M. F...demande à être garanti par les autres constructeurs, sur le fondement de la responsabilité quasi-délictuelle de ceux-ci. La condamnation solidaire de cocontractants n'est pas une condition nécessaire de l'exercice entre eux d'actions récursoires. L'appel en garantie est ainsi possible, même en l'absence de condamnation solidaire, lorsqu'un constructeur fait valoir qu'un autre constructeur doit le garantir de sa condamnation à réparer un préjudice au titre de sa responsabilité propre dans la survenance des désordres qui sont à l'origine de cette condamnation. Toutefois, en l'espèce, le présent arrêt condamne M. F...à verser à la commune une indemnité correspondant à sa seule part de responsabilité. Par suite, ses conclusions d'appel en garantie doivent être rejetées.
Sur les frais d'expertise :
17. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et compte tenu des fautes respectives commises par les parties, de mettre les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 12 200,01 euros par ordonnance de la présidente du tribunal administratif d'Amiens, à la charge de M. F...à hauteur de 4 000 euros, à la charge de la société Verdi Bâtiment Nord de France à hauteur de la même somme, et à la charge de la société Didier F...à hauteur de 4 200 euros. Il y a lieu, par suite, de réformer le jugement en ce sens.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
18. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : M. F...et la société Verdi Bâtiment Nord de France sont condamnés solidairement à verser à la commune de Rouvroy la somme de 125 102,13 euros toutes taxes comprises.
Article 2 : La société Didier Bernier est condamnée à verser à la commune de Rouvroy la somme de 21 052,49 euros toutes taxes comprises.
Article 3 : La société Verdi Bâtiment Nord de France est condamnée à garantir M. F...à hauteur de 50 % des condamnations solidaires prononcées à leur encontre et M. F...est condamné à garantir cette société dans la même proportion.
Article 4 : Les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 12 200,01 euros par ordonnance de la présidente du tribunal administratif d'Amiens, sont mis à la charge de M. F...à hauteur de 4 000 euros, à la charge de la société Verdi Bâtiment Nord de France à hauteur de la même somme, et à la charge de la société Didier Bernier à hauteur de 4 200 euros.
Article 5 : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 27 décembre 2016 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 6 : Les conclusions présentées par les parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. H...F..., à la société Verdi Bâtiment Nord de France, à la société CETE Apave Nord Ouest, à la société Didier Bernier et à la commune de Rouvroy.
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N°17DA00437, 17DA00453