CAA de BORDEAUX, 2ème chambre - formation à 3, 10/07/2018, 16BX00740, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Saint-Martin d'annuler la décision du 21 mai 2013 par laquelle le directeur du centre hospitalier Louis-Constant Fleming a émis à son encontre un titre de recettes d'un montant de 13 756,11 euros en remboursement de l'indemnité d'engagement de service public exclusif.

Par un jugement n° 1300048 du 23 avril 2015, le tribunal administratif de Saint-Martin a annulé la décision attaquée.

Procédure devant la cour :

Par une ordonnance n° 392006 du 17 février 2016, enregistrée le 23 février 2016, le président de la section du contentieux du Conseil d'État a transmis à la cour, en application de l'article R. 351-1 du code de justice administrative, la requête, enregistrée le 23 juillet 2015, présentée par le centre hospitalier Louis-Constant Fleming.

Par cette requête et quatre mémoires enregistrés les 23 juillet et 23 octobre 2015,
12 mai et 17 juin 2017 et 24 avril 2018, le centre hospitalier Louis-Constant Fleming, représenté par la SELARL GZB, avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Saint Martin du 23 avril 2015 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de M. A...la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :
- les premiers juges ont commis une erreur de droit au regard des dispositions combinées de l'article L. 6154-1 et du 6° de l'article D. 6152-23-1 du code de la santé publique alors que l'intéressé a reconnu avoir exercé pour des établissements autres que le centre hospitalier Louis-Constant Fleming ;
- M. A...a exercé ses activités extérieures à l'établissement public en méconnaissance de l'article 23 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, applicable aux praticiens hospitaliers en vertu de l'article L. 6152-4 du code de la santé publique, et en méconnaissance des articles R. 6152-24 et R. 6152-26 du même code sans l'autorisation de cumul d'activité et de rémunération prévue à l'article R. 6152-30 dudit code.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 27 avril et 18 mai 2017 et le 18 avril 2018, M. B...A...conclut au rejet de la requête et, en outre, à ce qu'il soit mis à la charge du centre hospitalier Louis-Constant Fleming la somme de 4 000 euros en application de
l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par le centre hospitalier Louis-Constant Fleming ne sont pas fondés.


Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Salvi,
- les conclusions de M. Katz, rapporteur public.


Considérant ce qui suit :


1. Le directeur du centre hospitalier Louis-Constant Fleming à Saint-Martin a décidé, le 21 mai 2013, d'émettre à l'encontre de M.A..., praticien hospitalier, un titre de recettes n° 7088 en vue de recouvrer la somme de 13 756,11 euros en remboursement de l'indemnité d'engagement de service public exclusif qui lui avait été versée. Le centre
hospitalier Louis-Constant Fleming relève appel du jugement du 23 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Saint-Martin, saisi par M.A..., a annulé le titre de recettes litigieux.
2. D'une part, aux termes des dispositions alors en vigueur de l'article 25 de la loi
du 13 juillet 1983, rendu applicable aux praticiens hospitaliers par l'article L. 6152-4 du code de la santé publique : " I.- Les fonctionnaires et agents non titulaires de droit public consacrent l'intégralité de leur activité professionnelle aux tâches qui leur sont confiées. Ils ne peuvent exercer à titre professionnel une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit. / (...) / Les fonctionnaires et agents non titulaires de droit public peuvent toutefois être autorisés à exercer, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État, à titre accessoire, une activité, lucrative ou non, auprès d'une personne ou d'un organisme public ou privé, dès lors que cette activité est compatible avec les fonctions qui leur sont confiées et n'affecte pas leur exercice. (...) V.- Sans préjudice de l'application de l'article 432-12 du code pénal, la violation du présent article donne lieu au reversement des sommes indûment perçues, par voie de retenue sur le traitement. ". En vertu de l'article R. 6152-24 du code de la santé publique, les praticiens ne peuvent percevoir des rémunérations s'ajoutant aux émoluments, indemnités et allocations versés au titre de leur activité de praticien hospitalier que pour les activités et dans les conditions prévues par cet article.
3. D'autre part, en vertu des dispositions de l'article L. 6154-1 du code de la santé publique, les praticiens hospitaliers statutaires à temps plein sont autorisés à exercer une activité libérale au sein de leur établissement dans les conditions prévues aux articles L. 6154-2
à L. 6154-7. Le 6° de l'article D. 6152-23-1 dispose que figure au nombre des indemnités et allocations que peuvent percevoir les praticiens hospitaliers " une indemnité d'engagement de service public exclusif versée aux praticiens qui s'engagent, pour une période de trois ans renouvelable, à ne pas exercer une activité libérale telle que prévue à l'article L. 6154-1 ".
4. Il résulte de ces dispositions que si l'exercice par un praticien hospitalier d'une activité professionnelle non autorisée en application des dispositions de l'article R. 6152-24 du code de la santé publique donne lieu au reversement des sommes perçues au titre de cette activité par voie de retenue sur le traitement, le reversement de l'indemnité d'engagement de service public exclusif ne peut être légalement opéré que si l'intéressé a méconnu son engagement de ne pas exercer une activité libérale au sein de son établissement.
5. Il résulte de l'instruction que le titre de recettes litigieux a été émis à l'encontre
de M. A...au motif qu'il avait exercé, sans autorisation, des activités d'évacuation sanitaire rémunérées par une société privée et non en raison de l'exercice d'une activité libérale au sein du centre hospitalier où il était affecté, au sens de l'article L. 6154-1 précité du code de la santé publique. Dès lors, le centre hospitalier Louis-Constant Fleming n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Martin a annulé ledit titre de recettes.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M.A..., qui n'est pas partie perdante à l'instance, la somme que demande le centre hospitalier Louis-Constant Fleming au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier Louis-Constant Fleming une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés
par M. A...au même titre.



DÉCIDE


Article 1er : La requête du centre hospitalier Louis-Constant Fleming est rejetée.
Article 2 : Le centre hospitalier Louis-Constant Fleming versera à M. A...une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier Louis-Constant Fleming et
à M. B...A....
Délibéré après l'audience du 12 juin 2018 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
M. Salvi, président-assesseur,
Mme Chauvin, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 juillet 2018.

Le rapporteur,
Didier Salvi
Le président,
Éric Rey-BèthbéderLe greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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N° 16BX00740



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