Conseil d'État, 6ème chambre, 04/07/2018, 419180, Inédit au recueil Lebon
Conseil d'État, 6ème chambre, 04/07/2018, 419180, Inédit au recueil Lebon
Conseil d'État - 6ème chambre
- N° 419180
- ECLI:FR:CECHS:2018:419180.20180704
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
mercredi
04 juillet 2018
- Rapporteur
- Mme Laurence Franceschini
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
M. A...B...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 25 janvier 2018 par lequel la garde des sceaux, ministre de la justice, a mis fin à ses fonctions de surveillant pénitentiaire stagiaire et d'enjoindre à la garde des sceaux, ministre de la justice de procéder à sa réintégration en qualité d'élève surveillant de l'administration pénitentiaire dans un délai de quinze jours. Par une ordonnance n° 1800550 du 5 mars 2018, le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a fait droit à cette demande.
1° Sous le n° 419180, par un pourvoi, enregistré le 21 mars 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la garde des sceaux, ministre de la justice demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) statuant en référé, de rejeter la demande de M.B....
2° sous le n° 419181, par un recours et un mémoire complémentaire, enregistrés les 21 mars et 27 mars 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la garde des sceaux, ministre de la justice demande au Conseil d'Etat d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de l'ordonnance n° 1800550 du 5 mars 2018 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative a suspendu à la demande de M. A...B..., l'exécution de l'arrêté du 25 janvier 2018 et lui a enjoint de procéder à la réintégration de M. B...en qualité d'élève surveillant de l'administration pénitentiaire dans le délai de quinze jours.
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 2010-1711 du 30 décembre 2010 ;
- le code de justice administrative.
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Laurence Franceschini, conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Julie Burguburu, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Le pourvoi par lequel la garde des sceaux ministre de la justice demande l'annulation de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux du 5 mars 2018 qui a suspendu l'exécution de l'arrêté du 25 janvier 2018 par lequel elle a procédé au retrait de la nomination de M. B...comme élève surveillant pénitentiaire et le recours tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de cette ordonnance présentant à juger les mêmes questions, il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.
Sur le pourvoi n° 419180 :
2. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés, que par un arrêté du 25 janvier 2018, la ministre de la justice a procédé au retrait de la nomination de M. B...en qualité d'élève surveillant de l'administration pénitentiaire et l'a radié des cadres à compter du 25 janvier 2018. Par une ordonnance du 5 mars 2018, le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a, à la demande de M.B..., suspendu l'exécution de cet arrêté.
3. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, pour prendre l'arrêté litigieux, la ministre de la justice a estimé que l'engagement de M. B...dans un groupuscule extrémiste revendiquant une idéologie xénophobe voire raciste ainsi que la publicité qu'en a donné l'intéressé lui-même, y compris en arborant sur les réseaux sociaux un tatouage figurant un symbole nazi, était incompatible avec les fonctions d'agent de l'administration pénitentiaire. Pour suspendre cet arrêté, le juge des référés s'est fondé sur la circonstance que les faits reprochés à M.B..., âgé de 23 ans lorsqu'a été prise la mesure contestée, seraient anciens, remonteraient à l'époque de l'adolescence de l'intéressé et n'avaient pas fait l'objet d'une publicité particulière. Il ressort au contraire des pièces du dossier soumis au juge des référés que les faits en cause se sont poursuivis jusqu'en 2016, l'engagement de l'intéressé ayant été particulièrement visible au cours de la période 2014-2016, tant localement que dans la presse et sur les réseaux sociaux. Par suite, la ministre de la justice est fondé à soutenir que l'ordonnance attaquée est entachée d'une dénaturation. Il résulte de ce qui précède que l'ordonnance attaquée doit être annulée.
4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de statuer sur la demande en référé en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
5. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. "
6. Pour demander la suspension de l'exécution de l'arrêté du 25 janvier 2018 par lequel la ministre de la justice a procédé au retrait de sa nomination en qualité d'élève surveillant de l'administration pénitentiaire, M. B...soutient que l'arrêté en cause est inexistant dès lors qu'il comporte une date postérieure à sa rédaction et à sa notification ; que l'auteur de l'arrêté litigieux ne disposait pas de la compétence pour la prendre ; que l'arrêté en cause a été pris en dehors de toute procédure législative ou réglementaire ; que sa motivation est insuffisante au regard de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ; qu'il est entaché d'une erreur de droit, dès lors qu'il ne repose sur aucun fondement textuel, et d'une erreur de fait, dès lors qu'il se fonde sur des faits anciens alors qu'il a respecté ses obligations statutaires ; qu'il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation, sa radiation étant disproportionnée et inadaptée. Aucun de ces moyens n'est, en l'état de l'instruction, de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision de la ministre de la justice.
7. L'une des conditions posées par l'article L. 521-1 du code de justice administrative n'étant pas remplie, la demande présentée par M. B...devant le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux tendant à ce que soit ordonnée la suspension de l'exécution de l'arrêté du 25 janvier 2018 de la ministre de la justice doit être rejetée.
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
Sur le recours n° 419181 :
9. Par la présente décision, le Conseil d'Etat a statué sur le pourvoi formé par la ministre de la justice contre l'ordonnance du 5 mars 2018 du juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux. Par suite, les conclusions à fin de sursis de cette ordonnance sont devenues sans objet ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux du 5 mars 2018 est annulée.
Article 2 : La demande de M. B...devant le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux est rejetée.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution présentées par la garde des sceaux, ministre de la justice.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la garde des sceaux, ministre de la justice et à M. A... B....
ECLI:FR:CECHS:2018:419180.20180704
M. A...B...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 25 janvier 2018 par lequel la garde des sceaux, ministre de la justice, a mis fin à ses fonctions de surveillant pénitentiaire stagiaire et d'enjoindre à la garde des sceaux, ministre de la justice de procéder à sa réintégration en qualité d'élève surveillant de l'administration pénitentiaire dans un délai de quinze jours. Par une ordonnance n° 1800550 du 5 mars 2018, le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a fait droit à cette demande.
1° Sous le n° 419180, par un pourvoi, enregistré le 21 mars 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la garde des sceaux, ministre de la justice demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) statuant en référé, de rejeter la demande de M.B....
2° sous le n° 419181, par un recours et un mémoire complémentaire, enregistrés les 21 mars et 27 mars 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la garde des sceaux, ministre de la justice demande au Conseil d'Etat d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de l'ordonnance n° 1800550 du 5 mars 2018 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative a suspendu à la demande de M. A...B..., l'exécution de l'arrêté du 25 janvier 2018 et lui a enjoint de procéder à la réintégration de M. B...en qualité d'élève surveillant de l'administration pénitentiaire dans le délai de quinze jours.
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 2010-1711 du 30 décembre 2010 ;
- le code de justice administrative.
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Laurence Franceschini, conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Julie Burguburu, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Le pourvoi par lequel la garde des sceaux ministre de la justice demande l'annulation de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux du 5 mars 2018 qui a suspendu l'exécution de l'arrêté du 25 janvier 2018 par lequel elle a procédé au retrait de la nomination de M. B...comme élève surveillant pénitentiaire et le recours tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de cette ordonnance présentant à juger les mêmes questions, il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.
Sur le pourvoi n° 419180 :
2. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés, que par un arrêté du 25 janvier 2018, la ministre de la justice a procédé au retrait de la nomination de M. B...en qualité d'élève surveillant de l'administration pénitentiaire et l'a radié des cadres à compter du 25 janvier 2018. Par une ordonnance du 5 mars 2018, le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a, à la demande de M.B..., suspendu l'exécution de cet arrêté.
3. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, pour prendre l'arrêté litigieux, la ministre de la justice a estimé que l'engagement de M. B...dans un groupuscule extrémiste revendiquant une idéologie xénophobe voire raciste ainsi que la publicité qu'en a donné l'intéressé lui-même, y compris en arborant sur les réseaux sociaux un tatouage figurant un symbole nazi, était incompatible avec les fonctions d'agent de l'administration pénitentiaire. Pour suspendre cet arrêté, le juge des référés s'est fondé sur la circonstance que les faits reprochés à M.B..., âgé de 23 ans lorsqu'a été prise la mesure contestée, seraient anciens, remonteraient à l'époque de l'adolescence de l'intéressé et n'avaient pas fait l'objet d'une publicité particulière. Il ressort au contraire des pièces du dossier soumis au juge des référés que les faits en cause se sont poursuivis jusqu'en 2016, l'engagement de l'intéressé ayant été particulièrement visible au cours de la période 2014-2016, tant localement que dans la presse et sur les réseaux sociaux. Par suite, la ministre de la justice est fondé à soutenir que l'ordonnance attaquée est entachée d'une dénaturation. Il résulte de ce qui précède que l'ordonnance attaquée doit être annulée.
4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de statuer sur la demande en référé en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
5. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. "
6. Pour demander la suspension de l'exécution de l'arrêté du 25 janvier 2018 par lequel la ministre de la justice a procédé au retrait de sa nomination en qualité d'élève surveillant de l'administration pénitentiaire, M. B...soutient que l'arrêté en cause est inexistant dès lors qu'il comporte une date postérieure à sa rédaction et à sa notification ; que l'auteur de l'arrêté litigieux ne disposait pas de la compétence pour la prendre ; que l'arrêté en cause a été pris en dehors de toute procédure législative ou réglementaire ; que sa motivation est insuffisante au regard de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ; qu'il est entaché d'une erreur de droit, dès lors qu'il ne repose sur aucun fondement textuel, et d'une erreur de fait, dès lors qu'il se fonde sur des faits anciens alors qu'il a respecté ses obligations statutaires ; qu'il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation, sa radiation étant disproportionnée et inadaptée. Aucun de ces moyens n'est, en l'état de l'instruction, de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision de la ministre de la justice.
7. L'une des conditions posées par l'article L. 521-1 du code de justice administrative n'étant pas remplie, la demande présentée par M. B...devant le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux tendant à ce que soit ordonnée la suspension de l'exécution de l'arrêté du 25 janvier 2018 de la ministre de la justice doit être rejetée.
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
Sur le recours n° 419181 :
9. Par la présente décision, le Conseil d'Etat a statué sur le pourvoi formé par la ministre de la justice contre l'ordonnance du 5 mars 2018 du juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux. Par suite, les conclusions à fin de sursis de cette ordonnance sont devenues sans objet ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux du 5 mars 2018 est annulée.
Article 2 : La demande de M. B...devant le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux est rejetée.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution présentées par la garde des sceaux, ministre de la justice.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la garde des sceaux, ministre de la justice et à M. A... B....