Conseil d'État, 1ère chambre, 08/11/2017, 401402, Inédit au recueil Lebon
Conseil d'État, 1ère chambre, 08/11/2017, 401402, Inédit au recueil Lebon
Conseil d'État - 1ère chambre
- N° 401402
- ECLI:FR:CECHS:2017:401402.20171108
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du
mercredi
08 novembre 2017
- Rapporteur
- M. Frédéric Pacoud
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 12 juillet et 7 octobre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération hospitalière de France et l'Association des directeurs généraux de centres hospitaliers régionaux et universitaires demandent au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'instruction n° DGOS/R2/2015/378 du ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes du 23 décembre 2015 relative aux pratiques de facturation inter-établissement des transports SMUR secondaires.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Frédéric Pacoud, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
Sur le non-lieu à statuer :
1. Si l'instruction attaquée par la Fédération hospitalière de France et par l'Association des directeurs généraux de centres hospitaliers régionaux et universitaires a été abrogée par l'instruction du ministre des affaires sociales et de la santé du 15 mars 2017 relative aux pratiques de facturation inter-établissements des transports " SMUR secondaires ", elle a auparavant reçu application. Par suite, le ministre des affaires sociales et de la santé n'est pas fondé à soutenir que la requête aurait perdu son objet.
Sur la recevabilité de la requête :
2. Eu égard aux termes de leur requête et aux moyens qu'elles soulèvent, la Fédération hospitalière de France et l'Association des directeurs généraux de centres hospitaliers régionaux et universitaires doivent être regardées comme demandant l'annulation pour excès de pouvoir de l'instruction du 23 décembre 2015 en tant qu'elle affirme que les transports assurés par les structures mobiles d'urgence et de réanimation pour transférer des patients entre deux établissements de santé, sans retour dans l'établissement d'origine dans le délai de 48 heures, sont financés par la dotation de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation des établissements sièges de la structure mobile. Contrairement à ce que soutient le ministre des affaires sociales et de la santé, l'instruction attaquée comporte sur ce point des dispositions impératives à caractère général, qui doivent, dès lors, être regardées comme faisant grief.
Sur l'intervention du centre hospitalier universitaire de Limoges :
3. Le centre hospitalier universitaire de Limoges justifie d'un intérêt suffisant à l'annulation de l'instruction attaquée, dans la mesure relevée au point 2. Ainsi, son intervention est recevable cette mesure.
Sur la légalité des dispositions critiquées de l'instruction du 23 décembre 2015 :
4. D'une part, aux termes de l'article L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'instruction attaquée : " Il est créé, au sein de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (...), une dotation nationale de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation des établissements de santé mentionnés aux a, b, c et d de l'article L. 162-22-6. Cette dotation participe notamment au financement des engagements relatifs aux missions mentionnées à l'article L. 6112-1 du code de la santé publique (...) ". Aux termes de l'article D. 162-6 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Peuvent être financées par la dotation nationale de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation mentionnée à l'article L. 162-22-13 les dépenses correspondant aux missions d'intérêt général suivantes : (...) 2° La participation aux missions de santé publique mentionnées ci-dessous : (...) j) L'aide médicale urgente réalisée par les services d'aide médicale urgente et les services mobiles d'urgence et de réanimation respectivement mentionnés aux articles L. 6112-5 et R. 6123-10 du code de la santé publique (...) ", dont les dispositions ont été transférées aux articles L. 6311-2 et R. 6123-15 du même code.
5. D'autre part, aux termes de l'article L. 6112-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction alors applicable : " Les établissements de santé peuvent être appelés à assurer, en tout ou partie, une ou plusieurs des missions de service public suivantes : (...) 8° L'aide médicale urgente (...) ". Aux termes de l'article R. 6123-1 du code de la santé publique : " L'exercice par un établissement de santé de l'activité de soins de médecine d'urgence (...) est autorisé selon une ou plusieurs des trois modalités suivantes : / 1° La régulation des appels adressés au service d'aide médicale urgente mentionné à l'article L. 6112-5 ; / 2° La prise en charge des patients par la structure mobile d'urgence et de réanimation, appelée SMUR (...) ; / 3° La prise en charge des patients accueillis dans la structure des urgences (...) ". Aux termes de son article R. 6123-15 : " Dans le cadre de l'aide médicale urgente, la structure mobile d'urgence et de réanimation mentionnée à l'article R. 6123-1 a pour mission : / 1° D'assurer, en permanence, en tous lieux et prioritairement hors de l'établissement de santé auquel il est rattaché, la prise en charge d'un patient dont l'état requiert de façon urgente une prise en charge médicale et de réanimation, et, le cas échéant, et après régulation par le SAMU [service d'aide médicale urgente], le transport de ce patient vers un établissement de santé ; / 2° D'assurer le transfert entre deux établissements de santé d'un patient nécessitant une prise en charge médicale pendant le trajet. / Pour l'exercice de ces missions, l'équipe d'intervention de la structure mobile d'urgence et de réanimation comprend un médecin ". Enfin, aux termes de son article R. 6123-16 : " Les interventions des SMUR (...) sont déclenchées et coordonnées par le SAMU ". A cette fin, le médecin régulateur du service d'aide médicale urgente peut, en vertu de l'article L. 1111-17 du même code, accéder, sauf opposition expresse précédemment manifestée par le patient, au dossier médical personnel de celui-ci.
6. Il résulte des dispositions du code de la santé publique citées au point 5 que la décision de transporter un patient par une structure mobile d'urgence et de réanimation ne peut intervenir que dans le cadre de sa mission de service public d'aide médicale urgente, limitativement définie à l'article R. 6123-15 du code de la santé publique, sur décision du médecin régulateur du service d'aide médicale urgente. Par suite, en l'absence de dispositions prévoyant un autre mode de financement des transports assurés par les structures mobiles d'urgence et de réanimation pour transférer des patients entre deux établissements de santé, sans retour dans l'établissement d'origine dans le délai de 48 heures, ces transports ont vocation à être financés par la dotation nationale de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation.
7. Dès lors, et sans qu'ait d'incidence à cet égard la circonstance que les transports assurés pour transférer des patients entre deux établissements de santé, lorsque le patient retourne dans son établissement d'origine dans les 48 heures, aient pu être financés par les forfaits de séjour et de soins " groupes homogènes de séjour " ou par la dotation de l'établissement d'origine, l'instruction attaquée n'a pas méconnu le sens ou la portée des dispositions qu'elle interprétait en affirmant que les transports assurés par les structures mobiles d'urgence et de réanimation pour transférer des patients entre deux établissements de santé, sans retour dans l'établissement d'origine dans le délai de 48 heures, sont financés par la dotation de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation des établissements sièges de la structure mobile. Pour les mêmes motifs, les organisations requérantes ne sont pas fondées à soutenir que le ministre, par les dispositions critiquées de l'instruction, aurait adopté une règle nouvelle entachée d'incompétence.
8. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres fins de non-recevoir soulevées par le ministre des affaires sociales et de la santé, que la requête de la Fédération hospitalière de France et de l'Association des directeurs généraux de centres hospitaliers régionaux et universitaires doit être rejetée.
Sur les frais exposés à l'occasion du litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées à ce titre par le centre hospitalier universitaire de Limoges, intervenant en demande, qui n'a pas la qualité de partie à l'instance.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'intervention du centre hospitalier universitaire de Limoges est admise.
Article 2 : La requête de la Fédération hospitalière de France et de l'Association des directeurs généraux de centres hospitaliers régionaux et universitaires est rejetée.
Article 3 : Les conclusions du centre hospitalier universitaire de Limoges présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la Fédération hospitalière de France, à l'Association des directeurs généraux de centres hospitaliers régionaux et universitaires, au centre hospitalier universitaire de Limoges et à la ministre des solidarités et de la santé.
ECLI:FR:CECHS:2017:401402.20171108
Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 12 juillet et 7 octobre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération hospitalière de France et l'Association des directeurs généraux de centres hospitaliers régionaux et universitaires demandent au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'instruction n° DGOS/R2/2015/378 du ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes du 23 décembre 2015 relative aux pratiques de facturation inter-établissement des transports SMUR secondaires.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Frédéric Pacoud, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
Sur le non-lieu à statuer :
1. Si l'instruction attaquée par la Fédération hospitalière de France et par l'Association des directeurs généraux de centres hospitaliers régionaux et universitaires a été abrogée par l'instruction du ministre des affaires sociales et de la santé du 15 mars 2017 relative aux pratiques de facturation inter-établissements des transports " SMUR secondaires ", elle a auparavant reçu application. Par suite, le ministre des affaires sociales et de la santé n'est pas fondé à soutenir que la requête aurait perdu son objet.
Sur la recevabilité de la requête :
2. Eu égard aux termes de leur requête et aux moyens qu'elles soulèvent, la Fédération hospitalière de France et l'Association des directeurs généraux de centres hospitaliers régionaux et universitaires doivent être regardées comme demandant l'annulation pour excès de pouvoir de l'instruction du 23 décembre 2015 en tant qu'elle affirme que les transports assurés par les structures mobiles d'urgence et de réanimation pour transférer des patients entre deux établissements de santé, sans retour dans l'établissement d'origine dans le délai de 48 heures, sont financés par la dotation de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation des établissements sièges de la structure mobile. Contrairement à ce que soutient le ministre des affaires sociales et de la santé, l'instruction attaquée comporte sur ce point des dispositions impératives à caractère général, qui doivent, dès lors, être regardées comme faisant grief.
Sur l'intervention du centre hospitalier universitaire de Limoges :
3. Le centre hospitalier universitaire de Limoges justifie d'un intérêt suffisant à l'annulation de l'instruction attaquée, dans la mesure relevée au point 2. Ainsi, son intervention est recevable cette mesure.
Sur la légalité des dispositions critiquées de l'instruction du 23 décembre 2015 :
4. D'une part, aux termes de l'article L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'instruction attaquée : " Il est créé, au sein de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (...), une dotation nationale de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation des établissements de santé mentionnés aux a, b, c et d de l'article L. 162-22-6. Cette dotation participe notamment au financement des engagements relatifs aux missions mentionnées à l'article L. 6112-1 du code de la santé publique (...) ". Aux termes de l'article D. 162-6 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Peuvent être financées par la dotation nationale de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation mentionnée à l'article L. 162-22-13 les dépenses correspondant aux missions d'intérêt général suivantes : (...) 2° La participation aux missions de santé publique mentionnées ci-dessous : (...) j) L'aide médicale urgente réalisée par les services d'aide médicale urgente et les services mobiles d'urgence et de réanimation respectivement mentionnés aux articles L. 6112-5 et R. 6123-10 du code de la santé publique (...) ", dont les dispositions ont été transférées aux articles L. 6311-2 et R. 6123-15 du même code.
5. D'autre part, aux termes de l'article L. 6112-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction alors applicable : " Les établissements de santé peuvent être appelés à assurer, en tout ou partie, une ou plusieurs des missions de service public suivantes : (...) 8° L'aide médicale urgente (...) ". Aux termes de l'article R. 6123-1 du code de la santé publique : " L'exercice par un établissement de santé de l'activité de soins de médecine d'urgence (...) est autorisé selon une ou plusieurs des trois modalités suivantes : / 1° La régulation des appels adressés au service d'aide médicale urgente mentionné à l'article L. 6112-5 ; / 2° La prise en charge des patients par la structure mobile d'urgence et de réanimation, appelée SMUR (...) ; / 3° La prise en charge des patients accueillis dans la structure des urgences (...) ". Aux termes de son article R. 6123-15 : " Dans le cadre de l'aide médicale urgente, la structure mobile d'urgence et de réanimation mentionnée à l'article R. 6123-1 a pour mission : / 1° D'assurer, en permanence, en tous lieux et prioritairement hors de l'établissement de santé auquel il est rattaché, la prise en charge d'un patient dont l'état requiert de façon urgente une prise en charge médicale et de réanimation, et, le cas échéant, et après régulation par le SAMU [service d'aide médicale urgente], le transport de ce patient vers un établissement de santé ; / 2° D'assurer le transfert entre deux établissements de santé d'un patient nécessitant une prise en charge médicale pendant le trajet. / Pour l'exercice de ces missions, l'équipe d'intervention de la structure mobile d'urgence et de réanimation comprend un médecin ". Enfin, aux termes de son article R. 6123-16 : " Les interventions des SMUR (...) sont déclenchées et coordonnées par le SAMU ". A cette fin, le médecin régulateur du service d'aide médicale urgente peut, en vertu de l'article L. 1111-17 du même code, accéder, sauf opposition expresse précédemment manifestée par le patient, au dossier médical personnel de celui-ci.
6. Il résulte des dispositions du code de la santé publique citées au point 5 que la décision de transporter un patient par une structure mobile d'urgence et de réanimation ne peut intervenir que dans le cadre de sa mission de service public d'aide médicale urgente, limitativement définie à l'article R. 6123-15 du code de la santé publique, sur décision du médecin régulateur du service d'aide médicale urgente. Par suite, en l'absence de dispositions prévoyant un autre mode de financement des transports assurés par les structures mobiles d'urgence et de réanimation pour transférer des patients entre deux établissements de santé, sans retour dans l'établissement d'origine dans le délai de 48 heures, ces transports ont vocation à être financés par la dotation nationale de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation.
7. Dès lors, et sans qu'ait d'incidence à cet égard la circonstance que les transports assurés pour transférer des patients entre deux établissements de santé, lorsque le patient retourne dans son établissement d'origine dans les 48 heures, aient pu être financés par les forfaits de séjour et de soins " groupes homogènes de séjour " ou par la dotation de l'établissement d'origine, l'instruction attaquée n'a pas méconnu le sens ou la portée des dispositions qu'elle interprétait en affirmant que les transports assurés par les structures mobiles d'urgence et de réanimation pour transférer des patients entre deux établissements de santé, sans retour dans l'établissement d'origine dans le délai de 48 heures, sont financés par la dotation de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation des établissements sièges de la structure mobile. Pour les mêmes motifs, les organisations requérantes ne sont pas fondées à soutenir que le ministre, par les dispositions critiquées de l'instruction, aurait adopté une règle nouvelle entachée d'incompétence.
8. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres fins de non-recevoir soulevées par le ministre des affaires sociales et de la santé, que la requête de la Fédération hospitalière de France et de l'Association des directeurs généraux de centres hospitaliers régionaux et universitaires doit être rejetée.
Sur les frais exposés à l'occasion du litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées à ce titre par le centre hospitalier universitaire de Limoges, intervenant en demande, qui n'a pas la qualité de partie à l'instance.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'intervention du centre hospitalier universitaire de Limoges est admise.
Article 2 : La requête de la Fédération hospitalière de France et de l'Association des directeurs généraux de centres hospitaliers régionaux et universitaires est rejetée.
Article 3 : Les conclusions du centre hospitalier universitaire de Limoges présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la Fédération hospitalière de France, à l'Association des directeurs généraux de centres hospitaliers régionaux et universitaires, au centre hospitalier universitaire de Limoges et à la ministre des solidarités et de la santé.